Les Murmures de l'ombre

Trouver les mots

La boule au ventre elle avança vers les derniers de ses combattants. Ils n'étaient plus qu'une poignée à encore tenir debout et autour d'eux le reste de leur village, des enfants et des vieillards principalement, les observaient et écoutaient attentivement. Tous avaient des visages abattus.

Ses combattants ne ressemblaient plus à rien, maigres, décharnées, amochés. Certains avaient un œil en moins, un membre manquant au mieux une jambe ou un bras cassé. Tous avaient faims.

— Alors chef ? Qu'est-ce qu'on fait ? demanda le vieux Ro appuyé sur son bâton.

Comment leur dire que c'était fini ? Qu'ils allaient se battre une dernière fois pour mourir. Que toute cette révolte avait été inutile. Que le Mal était plus fort. Que leurs efforts étaient vains. Qu'ils ne pouvaient pas gagner. Que ça avait été perdu d'avance de toute façon.

Elle ouvrit la bouche, observant tous ses visages qui espérait d'elle un exploit, et referma la bouche ne sachant quoi dire.

— On va se battre encore ?

— Est-ce que les envahisseurs vont partir.

Il fallait parler. Il fallait leur dire. Elle retint un soupir et prit son courage à deux mains.

— Ils ne veulent pas entendre qu'on veut rester libre ! Ils ne comptent pas repartir.

Les visages étaient défaits. Elle devait continuer, dire quelque chose, trouvé de quoi les remotiver.

— Et je ne compte pas me laisser faire.

Dévisageant son public elle ne vit que de la lassitude. Comment leur faire comprendre qu'il valait mieux se battre que d'être conquis par ces gens ?

— Ce sont nos terres. On a nos traditions...

Elle devait trouver d'autres rasions de se battre. Celles-ci étaient faiblardes mais les mots ne lui venaient pas.

— Ici c'est ce que nous et nos ancêtres ont construits et ils veulent se l'approprier, nous le voler !

— Ouais ! On ne leur laissera pas ! grognèrent deux-trois combattants.

— Ils veulent qu'on s'adapte, qu'on devienne comme eux ? Est-ce que c'est ce qu'on désir pour nos enfants ? Pour nous ?

— Non ! s'exclamèrent la plupart.

— On va continuer la bataille ! Pour tous nos morts qui n'acceptaient pas ça. Pour nos enfants qu'on veut élever comme on l'entend, dans le monde qu'on a construit, et pour nous qui ne voulons pas devenir une de leurs pâles copies !

Les poings levés ils crièrent leur approbation. Elle les avait remotivés. Maintenant elle ne voyait comment leur dire que c'était une bataille pour l'honneur, qu'ils allaient mourir sous les coups de leur armes bien plus avancés ett leur armée plus nombreuses, que leurs enfants seraient esclaves ou intégrés et aurait tout oublié d'eux d'ici quelques années et que ces terres ils les avaient perdus déjà, depuis que les autres étaient là.

Seulement elle ne voulait pas dire ça. Elle ne voulait pas qu'ils perdent espoir. Et elle n'avait pas envie de s'entendre prononcer ses mots pour les rendre réel et la tenter de négocier une paix qu'elle trouverait insupportable d'ici un an.

Alors ils ne furent pas prononcer.