- Chapitre I -

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" Quel était ce sentiment. Pourquoi étais-je démesurément recroquevillée sur moi-même, dans une ruelle sombre et silencieuse. Ma respiration était si saccadée, à tout moment mon coeur menaçait de lâcher. Après tout, pourquoi pas ? Pourquoi le miens ne lâcherait-il pas, comme les autres, comme tout ceux qui étaient coincés dans cet enfer avec moi. Au premier abord, j'avais ressenti une culpabilité immense, qui m'avait rongé de l'intérieur, laissant couler indéfiniment des larmes salées que je n'arrivais plus à contenir. J'avais réussi à dire non à la mort ce jour là, et je savais parfaitement que j'allais le payer. Chaque minute que j'écoulais semblait être une de trop. Le destin ne m'avait pas compté parmi les vivants le 23 octobre 2018. J'étais une anomalie, et j'allais être à tout les coups être supprimé. "




N E W  Y O R K - 23 octobre 2017. 




A cet instant, je savais que désormais, ma vie était finie. J'étais une erreur, et j'allais devoir vivre avec ce lourd fardeau. Je devais être morte.

Pourtant j'étais bel et bien là, les fesses trempées dans une flaque d'eau gelée. Je ne serais vous dire combien de temps il m'a fallut pour retrouver mes esprits, mais du peu que je me souvienne, il faisait jour quand je réalisais enfin ce qu'il venait de m'arriver. J'ai d'abord fait la chose la plus censé au monde, je me suis ruée dans une boulangerie où j'ai acheté de quoi me nourrir. Affamée, désorientée, perdue, il était certain que cette femme aux lunettes allait me questionner. Mais je me suis échappée, une nouvelle fois, à en perdre haleine.

Je ne pouvais pas repasser chez moi, c'était le premier endroit où ils allaient me chercher.

Ils.

Qui sont ils ? Que voulaient-ils ? Pourquoi ?

Tellement de questions me brouillaient l'esprit, j'étais comme larguée dans l'inconnu, alors que c'était la ville dans laquelle j'avais toute ma vie grandis.

Au final, la conclusion que mon cerveau finit par déceler fut amer : je n'avais pas d'autre choix que de fuir. Alors dans une tentative désespérée j'ai contacté la seule personne que je ne mettrai pas en danger en l'appelant : mon ancien dealer. Rapidement j'ai obtenus une réponse, malgré son vieux Nokia, il avait tendance à être très réactif. Ma demande ne le surpris pas le moins du monde et quelques heures plus tard, après avoir retiré l'intégralité de mon compte en cash, je me munissais d'un taser, d'un téléphone pourri indétectable et de munitions pour l'arme que j'avais « emprunté ». Ma vie n'avait d'ors et déjà plus aucun sens, mais j'étais bien loin d'être au bout de mes surprises. J'allais être suivis, il en était certain, mais m'avaient-ils déjà repéré ? Ou étais-je encore supposée morte aux yeux de tous, même de mes détracteurs ? Après tout, j'avais fuis le plus naturellement possible et surtout la station de métro adjacente était vide. Évidemment, ils avaient certainement préparé correctement le coup, et il fallait bien un alibi : des travaux. Mon cerveau bouillonnait et je sentais fortement la transpiration. Mais mon regard tremblant n'avait pas fait fuir Castillo qui n'avait osé poser une question qui semblait le démanger. 

Peut être : pourquoi es-tu dans cet état, Lexie?

Malgré tout, ma bougeotte devait le terroriser puisqu'il ne dit mots et se contenta de récupérer les deux cents dollars sans poser de questions.

Il fallait que je parte d'ici, mais avant tout, je devais changer d'apparence.

J'étais rentré dans une psychose presque maladive. Chacun de mes pas était calculé et ma respiration ne s'apaisait pas pour un sous. J'étais fuyante de l'inconnu. Car à l'heure de ces mots, je n'avais pas la moindre idée de ce que je combattais. L'Etat? Des terroristes?

Pourtant, les journaux eux parlaient bien d'un accident, et j'eu un léger tremblement lorsque la une de couverture des kiosques évoquait un massacre. Pas de corps, deux cents victimes, on nous prenait pour des cons. Quelqu'un allait bien s'en rendre compte? C'était pourtant simple et clair, on se foutait de notre gueule publiquement et les mines effarées des passants dans la rue ne me contredisaient pas, ils étaient sous le choc. Les familles en deuils allaient bien demander à voir les corps ? Certains allaient vouloir voir la vidéo de l'accident? L'état ne s'en sortirait pas sans peine, et ils avaient certainement d'autres choses à gérer qu'une possible fuite. Pourtant j'étais effrayée à l'idée que l'on me retrouve, et c'est seulement dans les toilettes d'un McDonald's que je me décidais à couper ma tignasse et la teindre en noire avec une teinture de supermarché.

S'il y a bien un point positif aux Etats-Unis d'Amérique, c'est que personne n'est plus étonné de quoi que ce soit dans ce pays, tant les absurdités sont courantes. Personne ne m'avait posé la moindre question, ni même n'avait prit le temps de me regarder. J'étais une folle parmi tant d'autres et j'en étais la plus heureuse pour une fois. Rassasiée, je me dépêchais de trouver un café vide et perdu pour me poser et réfléchir un instant à tout ce qui venait de m'arriver en seulement vingt quatre heures.

Et enfin, je me mis à pleurer. Pas de peine, pas de tristesse, mais de désespoir. La claque était violente, et les larmes coulaient sans arrêt sur mon visage blême et désemparé. J'étais effondrée. J'avais réussi à construire un semblant de quelque chose, j'avais un bel appartement, une famille, des amis, un avenir. Et en quelques heures seulement, tout m'avait été retiré comme si c'était la chose la plus naturelle qui soit. J'étais en colère, pourquoi moi et pas un autre ? Pourquoi j'étais dans ce métro et pourquoi on a fait foutu ma vie en l'air sans raison, sans mon consentement.

Je vous mentirais en vous disant que j'avais trouvé le courage et la force de me battre ce jour là. J'avais songé à tout. Me tirer une balle dans le crâne avec le revolver dans mon sac, me jeter sur les rails du train qui traversait la ville, où sous le métro, ce qui aurait été en toute fin, une belle métaphore. Pourtant, par je ne sais quel miracle, j'étais resté la soirée dans ce bar à boire des cafés et à me lamenter sur mon sort. Je ne pouvais ré-apparaître, c'était certain. Toute personne au courant de ma survit était potentiellement en danger. J'étais bien trop altruiste pour mettre qui que ce soit en travers de mon chemin, encore moins ma famille. Qui d'ailleurs assisterait à mes funérailles, ces mêmes visages familiers qui pleureraient ma mort.

J'étais plongé dans un enfer bien trop imprévu pour être un simple sale coup du destin. 

Et je n'avais aucune putain d'idée de comment me sortir de ce merdier. 


Metro 73 (heure bleue)Where stories live. Discover now