Jour de pluie, jour heureux?

22 2 0
                                    


Une foule d'individus de tous âges, de toutes nationalités, se regroupait autour du bas d'un escalier de ville. Les gens criaient, sursautaient de peur et d'autres (qui je supposais était la famille de la victime), pleuraient à chaudes larmes. On entendait les gyrophares des voitures de police qui hurlaient à pleins poumons. Il était 18 heures 43 lorsque je sortis mon carnet pour prendre des notes des évènements passés il y a quelques minutes. Il faisait noir dehors et seul deux lampadaires éloignés de plusieurs mètres éclairés l'impasse obscure. La douce brise hivernale me frôlait mes joues rougies par le froid. Les pavés au sol glissés, il avait plu tout l'après-midi, dans la ville lumière. Paris, une ville remplie de souvenirs qui ont gravés nos mémoires grâce aux manuscrits écrits depuis des siècles. Nous allions bientôt quitter les années cinquante pour passer aux décennies suivantes, et laisser une page de l'histoire s'écrire. Il s'était passé bien des choses ces dernières années ; il y a deux ans, j'étais entrée dans l'une des universités les plus prestigieuses de Paris pour y faire mes études et devenir détective. Mon entourage me répétait souvent que j'avais une certaine logique à remettre en ordre tout ce qui leur paraissait complexe et réussissait à dénicher des détails subtils qui leur semblaient totalement démesurés. Je travaillais sans relâche pour atteindre mes objectifs. Bref, ce jour-ci, si j'arrivais à faire mes preuves, je monterais peut-être des échelons pour mon futur métier. Comment avais-je su pour ce meurtre au vingtième arrondissement de Paris ? Et bien tout simplement, alors que je rentrais chez moi et que je mettais la clef dans la serrure de la porte d'entrée de mon appartement qui se situé à 5 minutes de la scène, les fourgons de police sont passés à quelques mètres de moi à toute allure suivis de près par les pompiers. J'ai vite compris qu'un évènement inhabituel s'était produit dans ce coin de Paris où habituellement, rien ne se produisait, et où seuls les chats errants sortaient la nuit pour fouiller les poubelles. Je me suis donc hâtée le plus vite possible, tenant mon chapeau de la main droite vers le lieu du crime. Comme je vous l'avais dit, ici tout était différent ; le bruit était amplifié par le silence, des hommes en costar sortaient du bureau de banque à quelques mètres du lieu du crime et s'approchaient curieusement de tout ce vacarme. Une vingtaine de personnes se trouvaient devant moi. J'essayais désespérément de me faufiler entre les personnes, mais dès que j'avançais de quelques pas, je me faisais écraser les pieds et bousculer vers l'arrière, me ramenant à mon point de départ. J'avais essayé la manière douce (qui n'avait pas fonctionné), j'allais donc passer à la manière forte et imiter la foule de gens qui se tenait devant moi. Je commençai à courir tête baissée, les mains dans les poches vers le danger imminent. Je me sentais marcher sur des pieds, bousculer des personnes et là, plus rien ! Je levai la tête ; des pompiers étaient rassemblés autour d'une personne allongée au sol. C'était une jeune femme, du moins, ça m'en avait tout l'air. Je n'arrivai pas à discerner son visage de loin, et les policiers ne laisser personne s'approcher de la victime à moins de 10 mètres. Je pris donc mon courage à deux mains, et m'approchai du policier qui me barra la route avant que je ne puisse aller plus loin.

« Bonjour monsieur, je me présente, détective De Lacourt. Je viens étudier le cas de ce crime, dis-je avec assez d'assurance pour paraître crédible.

- (Le policier me regardait avec arrogance) Vous me paraissez bien jeune, mademoiselle, dit-il d'un ton méprisant.

- (En grognant) Il n'y a pas d'âge, monsieur, pour accomplir ses rêves. Maintenant, je vous le redemande, auriez vous l'obligeance de me laisser passer, dis-je sur un ton d'ironie. »

Il m'observa de nouveau de la tête aux pieds et se poussa de quelques centimètres. Le message était très clair. Je ne pris pas mon temps à lui dire merci et traçai mon chemin droit devant moi. Un de mes gros défaut était de ne pas savoir garder mon sang-froid et de m'énerver très vite. Un adulte doit savoir garder son sang-froid, c'est pour cela que j'avais préféré ne pas répondre au lieu de m'énerver contre quelqu'un qui n'en valait pas la peine. Mon pou s'accéléra lorsque je vis l'état de cette pauvre fille. Elle n'était pas vieille du tout, bien au contraire, elle devait avoir à peine la vingtaine. Ces bras à découverts étaient couverts de sang, ce qui me donna des hauts le cœur. Son visage, bien qu'il parût jeune, était couvert de cicatrice dues (je supposai), à la chute. Ses yeux étaient grands ouverts, elle paraissait apeurée, et ses poches sous les yeux n'arrangeaient rien. Elle avait une vilaine blessure sur son front d'où s'écoulait encore un peu de sang. Je m'accroupis à ses côtés, et me l'imaginais sans toutes ses blessures. Elle n'aurait pas fait plus de quinze ans. Son teint était plus pâle que la mort, comme si elle avait vu des choses qu'elle n'aurait jamais dû voir. Je lui fermai ses paupières et me relevai. Un vent glacial s'était abattu autour de cet homicide. Je fermai mon trench et mon regard se posa sur un fil de sang assez épais qui traversait l'escalier en béton armé. Je le suivis sur plusieurs mètres, il était interminable. Soudain, mon regard se figea sur une tâche assez grossière de sang séché. Sa chute avait dû commencer quelques marches plus tôt, et je repris ma route sur une dizaine de marche. De là-haut on pouvait voir une bonne partie de Paris. La chute avait dû être terrible si elle était tombée d'ici, comme je l'avais supposée. Soudain, je me sentis observée. Pas d'en bas des marches mais sur ma droite. Je tournai légèrement la tête et vit une fenêtre ovale de taille moyenne et d'où était accroché un rideau en dentelle d'un blanc immaculé. Mais ce n'était pas tout, il y avait autre chose. C'est là que je l'ai vu, ce tenant derrière cette fenêtre qui me faisait frissonner. Cette fille, dans sa chemise de nuit du même blanc que le rideau. Elle me fixait avec ses yeux verts. Ses cheveux châtains en bataille n'avaient pas l'air d'avoir eu grands soins et elle avait un regard à faire pleurer les plus jeunes. Voyant que je la fixai également, elle partit. Je ne savais pourquoi, mais j'avais la forte impression que la jeune victime, était tombée de cette fenêtre. Ou plutôt dirai-je, qu'on l'avait poussé. Les policiers en bas de l'escalier m'appelèrent et je dus cligner des yeux plusieurs fois avant d'avoir retrouvé tous mes sens. Mon regard se posa une dernière fois sur la fenêtre, mais il n'y avait personne. Avais-je vraiment vu cette fille ? Ou était-ce juste le fruit de mon imagination ? Je ne pensai pas. Je me rappelai de tous les traits de son visage, et ça ne pouvait être une hallucination. Je descendais tranquillement les marches, les mains dans les poches. Mais mon esprit, lui, n'était pas tranquille. Ça ne pouvait être qu'une simple chute, vu la violence. Et pour qu'elle soit tombée jusqu'en bas, il fallait qu'elle soit poussée par quelqu'un de fort physiquement. Ce qui contredisait fortement mes deux idées car la fille que j'avais vu derrière cette vitre, n'aurait jamais pu pousser quelqu'un comme ça. C'était invraisemblable. Arrivé en bas de l'escalier, je revins vers la victime puis me tourna vers les personnes que j'avais vu pleurer et que j'avais prises comme étant sa famille. Je m'approchai d'eux ; ils avaient les yeux rouges et bouffis. On pouvait lire dans leurs yeux la tristesse et j'eus envie de les serrer dans mes bras, mais je me retins. Je me contentai de leur poser quelques questions au sujet de la jeune fille :

Jour de pluie, jour heureux?Where stories live. Discover now