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Un cri.

Un cri strident fit écho dans la pièce après que la sage-femme eût mis une fessée au nourrisson. C'était un beau bébé. Un gros bébé. Quelques mèches noires se battaient sur le haut de son couvre-chef en guise de cheveux. Ce bébé bavait en pleurant, gigotant ses petits bras avec beaucoup de peine, il pouvait à peine bouger. Ses yeux n'étaient pas visibles jusqu'à ce que ses sanglots s'apaisent.

Au chaud, envelopper dans une serviette douce réchauffée au préalable, dans les bras de cette dame. Le bébé après avoir suffisamment pleuré selon lui, fixait cette grande dame avec étonnement. C'est marrant, elle lui semblait familière, mais cette tâche de plusieurs couleurs qu'il n'arrivait pas à distinguer le rendait confus.

« Quelle belle petite fille ! »

Son regard curieux se dirigeait vers d'autres personnages, qui étaient déformés par la même sorte de tâche que la dame qui la tenait. Des reniflements se faisaient entendre. Mais elle n'arrivait pas à comprendre ni à savoir d'où cela venait-il.

« Qu'elle est belle ! C'est ma petite sœur ? »

Elle entendait des bourdonnements et sentit qu'on la bougeait. Avec désaccord, elle se mit à hurler. Mais le bercement qu'exerçait cette personne qu'elle ne connaissait pas finit par la consoler.

« Je promets que je te protégerais, je t'apprendrais tout pleins de choses et je t'aimerais toujours ! Je promets ! »

Avec un doux ronflement, le bébé s'endormit.


Des cris.

Il ne s'agissait pas de les siens, les leurs. Papa et Maman se criaient dessus. Il y eut un vacarme retenti fortissimo, puis le silence. Et des sanglots. Iris descendit des escaliers trois par trois, elle regardait à travers les espaces des rampes d'escalier pour voir. Pour voir Maman au sol qui pleurait, elle saignait.

« Maman ? »

Iris descendit le reste des escaliers pour aller voir Maman. Elle ne s'arrêtait pas de pleurer. Lissia lui dit de remonter, qu'elle avait la situation en main. Qu'elle s'en occupait. Iris n'y crut pas.

« J'en ai assez, je veux mourir, je veux mourir, je n'en peux plus. »

Maman murmurait en sanglotant. L'air était glacial dans le couloir. C'est vrai, nous étions en décembre, et le vent d'hiver n'avait jamais paru aussi froid. La porte d'entrée restait vacante.

« Il est où papa ? »

Lissia la regardait peinée alors que Maman pleurait de plus belle. Iris se déplaçait prudemment, doucement, calmement pour enlacer Maman. Elle avait une odeur étrange, un mélange de feu et de poussière médicamenteuse.

« Il n'est plus là, je ne veux plus le voir. »

Iris et Lissia restèrent toute la nuit auprès de Maman.


Les cris et rires des enfants laissaient un brouhaha permanent dans la salle de classe. Iris ne savait pas pourquoi elle était la seule qui n'avait pas d'amis. Elle n'était pas plus bête qu'eux, ni plus laide qu'eux. Mais elle n'avait pas d'amis. En fait, personne ne l'avait regardée avec autre chose que de la moquerie. En quoi était-elle différente ? Savait-il pour Maman et Papa ? Était-ce pour cela qu'on la traitait comme un paria ?

« Hé Iris, passe-moi ton goûter. »

Elle levait ses yeux noisette vers son interlocuteur. Il voulait son goûter ? Elle le fixait béat un instant avant de sourire avec le peu de dents de lait qu'elle avait.

« Et on sera copain ? »

Le garçon avait l'air surpris, puis un sourire mutin se dessinait sur ses lèvres. C'est avec un air riant au visage qu'il lui répondit :

« Bien sûr ! »

Il la fixait, alors qu'elle était assise avec sa veste trop grande qui lui pendait sur l'épaule même fermée, ses vieilles chaussures Tintin avec ses lacets traînant au sol parce qu'elle ne savait pas les faire et son pantacourt troué ici et là. Qu'elle tête d'idiote celle-là ! Qu'elle tête de garçon avec ses cheveux gras, en bataille et mal coupés jusqu'aux oreilles et son sourire niais. Elle lui donna son goûter avec un grand sourire et un babillage de joie alors qu'elle se dirigeait pour l'enlacer. Il prit le goûter de ses mains avec un air satisfait pour la repousser avec dégoût ensuite. Elle tombait au sol avec disgrâce.

« Beuuuuuurk ! La pouilleuse, la gouine m'a touché ! C'est dégueulasse ! »

Elle entendit des cris de dégoûts, les yeux s'embuant de larmes, se précipitant vers les toilettes alors que les vociférations de répulsion continuaient de jaillir au loin étouffées par ses plaintes. Elle ne comprenait toujours pas pourquoi elle n'avait pas d'amis.

À la sortie de l'école, Maman l'attendait avec un sourire. Iris se précipitait dans ses bras, ignorant ceux qui s'était moqué d'elle la fixer avec les yeux et des sourires railleurs.


Elle se fixait dans la glace, perchée sur sa chaise. Elle essayait avec peine de remettre sa veste beaucoup trop large pour elle, dévisageant sa plastique avec colère dans le reflet du miroir. Une révélation lui vint dans son esprit d'enfant de 6 ans, elle était laide, disgracieuse. Elle n'avait pas de belles dents, ni de cheveux propres, soyeux et longs ni de beaux vêtements. 

Sa plaie lui faisait mal après sa chute et aucun adulte n'avait pris le temps de s'occuper de son genou saignant. Personne ne l'avait défendue. Personne n'était venu la réconforter. Personne ne se souciait d'elle. Elle n'existait aux yeux de personne. 

Maman lui avait dit qu'elle était sa princesse, mais une princesse avait de beaux cheveux, de beaux vêtements, de belles dents et elle n'était pas traînée dans la boue. Maman lui avait dit qu'elle était belle. Mais c'était parce qu'elle était sa Maman qu'elle lui avait promis une chose pareille. Elle comprit que Maman lui avait menti.


Lissia l'avait accompagnée à l'école et Iris ne pensait plus aux mots cruels qu'on avait pu lui cracher. Lissia lui avait acheté une briquette de jus de fruits, et Iris en était très heureuse. Aujourd'hui, on ne prendrait pas son goûter. 

Iris était maintenant dans la cour, profitant de son premier temps de récréation assise à côté d'un arbre. Elle fixait le sol, observant des fourmis passer sous ses chaussures pour en sortir par l'extrémité. Sa briquette de jus bien en sécurité dans son cartable. 

Le garçon qui lui avait pris son goûter et qui l'avait poussé, s'était moqué d'elle se présentait de tout son aplomb. Iris regardait Lissia qui la surveillait le temps de sa récréation. 

« Je n'ai pas de goûter aujourd'hui. »

Il lui lançait un regard dédaigneux. Pleins de ressentiments, pleins de taquineries. 

« Donne-moi ta briquette alors. »

Iris écarquillait les yeux, sa briquette de jus de fruits que Lissia lui avait acheté ? Non, ça non. Pas question. Elle préférait la donner à quelqu'un qui en avait plus besoin qu'elle. Son regard se posait sur l'arbre de la cour et ses yeux s'illuminèrent. L'arbre avait besoin d'eau. Et les jus de fruits contenaient beaucoup d'eau, c'était Lissia qui lui avait dit.

Iris se leva, et versa sa briquette de jus de fruits sur l'arbre sous le regard choqué du garçon et les cris de protestation de sa grande sœur. Elle ne donnerait pas son goûter aujourd'hui.

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⏰ Última actualización: May 08, 2019 ⏰

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