L'Empire des Lumières / SOUS CONTRAT D'ÉDITION

Never break the chain

Dans sa chambre bleue, avec la fenêtre qui donne sur la rue, avec les posters sur les murs, avec les livres qui s'empilent, il s'observe. Il ne fait pas encore nuit. Mais c'est tout comme. Et TaeHyung est là. Il s'observe dans le miroir. Le costume est sombre. La chemise est blanche, mais pas complètement non plus. Cette fois, il a renoncé à la cravate. Il passe un doigt sur son front, puis sur les plis qui se dessinent quand il fronce les sourcils, puis sur les bords de ses lèvres. C'est étrange. Tout a l'air tellement réel vu comme ça. Il se demande ce que ça veut dire « beau ».

Quand le klaxon retentit dans la rue, il détourne les yeux de son reflet. Le bruit résonne dans la rue un peu plus longtemps que nécessaire. Alors TaeHyung entend sa mère qui l'appelle à travers les escaliers. Il se tourne à nouveau vers le miroir. Là, il se regarde dans les yeux et prend une grande inspiration. Après ça, il éteint les lumières et dévale les escaliers. Sa mère lui dit qu'il est « beau ». Elle lui souhaite même une bonne soirée. TaeHyung sourit. C'est sa façon de dire merci.

Dehors, Jimin fait encore un vrai vacarme. Il a passé sa main à travers la fenêtre et semble à deux doigts de lancer encore quelques coups de klaxons pour fêter l'arrivée de TaeHyung qui traverse l'allée et monte sur la banquette arrière où Hoseok est déjà occupé à se rouler une cigarette. Dans la voiture, c'est un sublime désordre.

« -Jimin arrête de crier à chaque fois qu'on s'arrête quelque part.

-Par contre Hoseok, tu fumes pas dans la voiture.

-T'inquiète.

-Ouais mais non mais je te connais, c'est la caisse de ma mère.

-T'inquiète.

-Et elle capte que cette station là ta mère ?

-Quoi ? JungKook touche pas à ça, t'es dingue.

-Hé, c'est du parfum que je sens ? »

JungKook qui est assis sur la place passager avant, se tourne vers TaeHyung et approche son nez de son cou.

« -Sympa.

-TaeHyung a pas mis de cravate ! Je t'avais dit que ça faisait ringard d'en mettre une.

-Mais tu es ringard.

-Très drôle.

-Bon ça y est, tu démarres ? On va pas passer la nuit ici. »

Jimin embraye et démarre la voiture. Alors qu'ils s'éloignent de la maison de TaeHyung, il se met à brailler très fort les paroles de la chanson qui passe à la radio. Ce soir sa mère a bien voulu lui laisser la voiture pour qu'il les conduise tous à la fête. Et pendant qu'ils roulent sous les lampadaires oranges et le ciel violet, ils arrêtent pas de parler en même temps à l'avant, et Hoseok regarde par la fenêtre, et TaeHyung essaie de tout voir et de tout entendre. Et c'est encore le bordel.

En arrivant sur le parking du lycée, Jimin se fraie un chemin à travers la masse d'élèves et gare la voiture en deux temps trois mouvements. Ils descendent, et alors Hoseok allume sa cigarette. JungKook lui, s'étire, met ses mains dans ses poches, se tourne vers TaeHyung et lui fait un clin d'œil. Puis ils se mettent à marcher vers le gymnase.

Running in the shadows
Damn your love, damn your lies

Dans le gymnase, dans la foule, dans le chaud, dans le froid et dans la nuit, ils dansent comme des fous. On a accroché une banderole avec écrit « Bal de la rentrée » en grand et avec des petits dessins tout autour. Et ils dansent comme des fous. Les gens se sont faits moins beaux qu'au bal de promo. Mais on s'en fout. Il n'y a toujours pas une goutte de rhum dans le ponche. Et eux, ils dansent comme des fous. Il y a toujours les mêmes musiques, toujours les mêmes couples – enfin presque – toujours les mêmes profs dans un coin, et toujours les mêmes gens qui osent pas se bouger des gradins. Et puis il y a ces quatre gars qui sont comme des dingues.