Novembre 1917 (2)

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Lorsque je me réveillai,la première chose que je fis fut de regarder autour de moi. Je n'étais plus sur le champ de bataille mais sur un brancard dans un véhicule. Ou en tout cas c'est que j'en ai déduit vu les secousses.


Un gémissement au-dessus de moi m'alerta du fait que je n'étais pas seul. Le véhicule était rempli de poilus, leurs uniformes me le confirmèrent. Ils avaient l'air aussi mal en point que je l'étais. Je n'avais même pas la force de soulever la couverture pour voir ce qu'il était advenu de ma blessure à la jambe. Et sans m'en rendre compte, je sombrai de nouveau dans un sommeil profond.


Je repris connaissance dans une pièce complètement blanche et dépourvue de miroir. Une infirmière était assise sur une chaise à mon chevet, je dus faire un bruit puisqu'elle leva les yeux du livre qu'elle lisait. Elle me sourit et dit d'une douce voix : "Ah vous êtes enfin réveillé! "


J'essayai de répondre mais la seule chose qui quitta ma bouche fut un râle. Elle me tendit alors un verre d'eau que je bus d'une traite. Pendant que je buvais,elle se leva et prit ce que je pense comme étant ma fiche de renseignements qu'elle feuilleta pendant quelques instants.


"J'ai...J'ai mal."Articulai-je difficilement, ayant l'impression qu'on me poignardai tla jambe plusieurs fois.


Les yeux de l'infirmière,"Adèle" comme il était écrit sur son badge, s'adoucirent et ses yeux se dirigèrent vers mes jambes. Elle soupira et m'informa que la morphine circulait en faible quantité dans l'établissement et qu'elle devait donc avoir l'autorité de son supérieur avant de m'en donner.


Heureusement pour moi, son supérieur, le médecin Dubois, arriva vite. À ses côtés, je reconnus mon commandant. Et alors qu'ils approchaient de moi, la peur de ce qu'ils allaient m'annoncer vint s'emparer de mon être. Adèle se lève et va leur parler, je n'entends que des bribes de conversations.


Le commandant dit qu'il est heureux que j'aie survécu mais que ma blessure va m'empêcher de retourner au front. Quelle blessure ? Celle à ma jambe qui me tiraille ? Adèle hocha la tête plusieurs fois avant de partir chercher quelque chose précipitamment. Le médecin Dubois se dirigea alors vers moi pendant que le commandant se dirigeait vers un autre blessé.


"Bonjour, je suis le médecin Dubois, je suis celui qui s'est chargé de vos blessures."Il récita tout d'une voix forte mais calme en me tendant sa main mais je n'avais pas la force de la serrer. "Selon ce qui est écrit dans votre dossier, vous avez été confronté aux barbelés.Ceux-ci vous ont lacéré la peau et vous avez passé tellement de temps dans votre trou que votre plaie s'est infecté."Il releva la tête de son cahier et me regarda longuement. Il prit ensuite une longue respiration, comme s'il redoutait ce qu'il avait à m'annoncer. " Nous avons été dans l'incapacité de sauver votre jambe, nous avons donc dû procéder à une amputation."


Il continua de parler mais je n'entendais plus rien.Ma main trembla alors que j'essayais de soulever ma couverture pour voir ce qui se cachait en dessous.Rassemblant mes dernières forces, j'y arrivai et ce que je vis me glaça le sang. À la place d'une jambe parfaitement constituée se trouvait un moignon.


Je me mis alors à crier de toutes mes forces comme pour me réveiller d'un mauvais rêve.Mais cela ne servait à rien, c'était bien réel. Adèle arriva alors en courant, une seringue à la main. La dernière chose dont je me souviens c'est la douleur que produit l'enfoncement de l'aiguille dans ma veine et le visage inquiet de l'infirmière.

Les oiseaux du frontWhere stories live. Discover now