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Mon bâillement me surprend moi-même et ne me laisse pas le temps de mettre une main devant la bouche. J'ai mal dormi. Ce n'est plus réellement la présence de Louis à un mètre de moi qui m'a gêné, mais plus les rêves que j'ai faits de lui. Je crois vraiment que la vision de son torse, hier soir, m'a perturbé.

Je passe une main dans mes mèches pour les ramener en arrière tout en attrapant de l'autre un élastique qui traine sur le comptoir qui sépare la cuisine de la salle à manger. Je me fais un petit bun sur le haut de mon crâne avec mes cheveux qui sont beaucoup trop longs à présent.

Je sursaute un peu quand le grille-pain se déclenche et libère mes toasts. Une fois mon assiette pleine, je rejoins la salle à manger puisque la cuisine n'a pas de table. Lottie y est déjà installée et mange des céréales en silence, le nez plongé dans son téléphone. Je lui embrasse le crâne sans ouvrir la bouche et m'assois à côté d'elle.

Le matin, à la maison, il est très rare que quelqu'un ouvre la bouche. Enfin, là, il est presque midi donc le matin est presque fini mais l'idée est toujours la même. Laisser les gens se réveiller en paix. Même les jumelles qui sont toujours surexcitées, ont bien compris que le silence est maître pendant le petit-déjeuner.

— Bonjour quand même !

Mes yeux se relèvent de mon toast et se posent sur Louis qui est assis sur un fauteuil du salon en face de moi. Il a un sourire que je n'arrive pas à traduire. Faux, carnassier ou enthousiaste. Toutes les images de mes rêves se bousculent dans ma tête me faisant grimacer aussitôt. Pour seule réponse, je grogne avant de reprendre mon petit-déjeuner.

— OK ! Tu es du genre mauvais poil le matin... Je ne l'aurais jamais deviné après ta bonne humeur au dîner.

J'ai envie de lui faire un doigt d'honneur mais quelque chose en moi me dit qu'il apprécierait un peu trop et puis ce n'est pas mon genre de faire ça. Je préfère lever les yeux au ciel pour lui montrer ce que je pense de son bavardage.

— Vraiment agréable dès le réveil, ça fait plaisir à voir !

Je prends une bouchée de pain de mie et malgré moi, mon regard retrouve à nouveau Louis dont son attention est maintenant fixée sur son écran de téléphone. Il tape à toute vitesse et je me demande à qui il peut écrire. Sa mère ? Un vieil ami d'ici pour ce soir ? Un ami de l'université ? Ou alors sa petite-amie ?

Les minutes s'égrènent. Il ne lâche pas une seule fois son mobile, comme s'il n'y avait rien de plus important et quand je bois ma dernière gorgée de jus de pomme, je me rends compte que moi, de mon côté, je ne l'ai pas lâché du regard...

Je secoue la tête pour me reprendre. Quand je me lève pour aller mettre mes affaires au lave-vaisselle, je ne peux m'empêcher de lui faire une remarque :

— Je croyais qu'il n'y avait que les merdeux d'ados qui ne pouvaient pas vivre sans leur iPhone ?

— Vu que je vais passer la journée avec vous, j'essaie de me mettre à votre niveau ! crie-t-il au moment où j'entre dans la cuisine.

Je pose – ou plutôt balance vu le bruit que ça a fait – mon assiette sur le plan de travail et fais demi-tour en m'exclamant :

— Quoi ? Quoi ? C'est quoi cette histoire de rester ensemble la journée ? C'est quoi cette histoire, Lottie ?

A trente centimètres du visage de Charlotte, j'attends sa réponse. Je ne sais pas pourquoi le fait de passer ma journée avec Louis me perturbe autant. Me stresse. Oui, ça me stresse. Je sens l'angoisse monter en moi rien qu'à l'idée de passer la journée dans la même pièce que Louis et je n'arrive pas à la refouler.

— Parce qu'il est à la maison, dit-elle simplement, ne comprenant pas mon comportement.

— Et alors ? Je vais pas me le farcir parce qu'il squatte la baraque !

Mon ton frôle carrément l'impertinence mais ce n'est pas moi qui parle. Ce n'est plus moi, c'est l'angoisse.

— Baisse d'un ton, Harry ! intervient Louis, sûrement pour défendre Lottie mais s'il savait le nombre de fois où nous nous parlons comme ça, il serait surpris.

Je me redresse et remarque alors qu'il est debout, de l'autre côté de la table où j'ai pris mon petit-déjeuner, les bras croisés devant lui. Il veut sûrement me montrer que malgré le fait qu'il soit plus petit que moi, il est prêt à défendre bec et ongles sa petite sœur.

— C'est la deuxième fois que tu me dis ça !

J'essaie de bomber le torse pour lui montrer qu'il ne m'impressionne pas alors que je peux voir ses tatouages à travers son T-shirt blanc et que ça me trouble un peu trop à mon goût.

— Va falloir que tu te fasses à l'idée que je n'ai pas l'intention de suivre tes ordres. Je ne suis pas ton frère !

— Et bien, commence Lottie, en levant son index au niveau de son visage. Un peu...

— Ce n'est pas mon frère ! la coupé-je, horrifié par cette idée.

Je leur tourne le dos et retourne dans le hall où Niall fait son apparition. On se connaît depuis tellement d'années qu'il entre ici comme s'il était chez lui. Si je me souviens bien, il doit même avoir une clé de la maison. Il me fait un grand sourire, heureux de me voir ou juste parce que Niall est comme ça. Souriant à toute heure du jour ou de la nuit.

— Alors il est où ce grand frère ? s'exclame-t-il, joyeusement, en ouvrant ses bras.

— Ce n'est pas mon putain de frère !

Sans attendre, je monte les marches deux à deux alors que la voix de ma mère s'élève dans la maison :

— Tu vas me changer ce langage tout de suite, Harry, sinon ta soirée en boîte, tu la passeras dans ton lit !

— Merveilleuse idée ! hurlé-je avant de faire claquer ma porte de chambre.

Je donne un coup de pieds dans le matelas sur lequel Louis a dormi cette nuit et m'assois sur mon lit. Je me prends la tête entre les mains puis une profonde inspiration pour essayer de me calmer mais qu'est-ce qui me prend ? Je ne me reconnais pas, ça ne me ressemble pas de hurler après tout le monde, de perdre mon sang froid, de paniquer ainsi...

My Dear JealousyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant