Cire et alcool

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Troisième partie de la nouvelle :)

*


– J'espère que tu trouveras le numéro 13 avant minuit Fleur ! lance non sans sous-entendu Jacky en souriant largement.

Sans le vouloir, il me donne un indice de taille, mais il est hors de question que je vienne bavarder avec eux. Ils ont suffisamment ri sur mon sort pour obtenir un peu de mon attention. Le mec qui possède aussi le numéro 13 viendra à moi.

Nous entrons dans la maison décorée pour l'occasion, citrouilles taillées à la main sur la table, grande bassine de ponch orangé et rouge plus loin. Biscuits et gâteaux en forme de cercueil, cranes, yeux en pâtes à sucre. Et d'autres choses peu comestibles à mon avis.

Au plafond est accrochée une immense citrouille orange, son sourire sadique illuminé par une bougie à l'intérieur. Je relève la tête pour observer de plus près les détails du monstre légume, quand de la cire bien chaude coule le long de sa large bouche et s'écrase sur ma joue.

Seigneur c'est horriblement chaud et collant sur mon visage. Je me tiens la moitié du visage en me pliant sur moi-même. J'aurais voulu le faire exprès, que je n'aurai pas réussi à me placer juste pile en dessous de la bougie. Je recule précipitamment quand je sens une seconde goutte tomber sur moi. Personne ne se brûle à la cire, sauf moi.

Dans mon mouvement, mon corps bute contre quelque chose de chaud, mais doux à la fois. Mon chapeau s'est enfoncé dans mon crâne, brouillant ma visibilité. La cire chaude m'empêche de convenablement ouvrir un œil, donc je tâte à l'aveugle ce truc qui a ralenti ma fuite.

Mes doigts se posent sur quelqu'un, même sans bien voir, je peux sentir sous ma paume, un large torse masculin légèrement musclé se contracter sous mon toucher et sentir son cœur battre. Calmement. Alors que le mien est en train de battre si fort dans ma poitrine qu'il pourrait faire le grand plongeon dans le lac derrière la ville.

– Oups, désolé me précipité-je en retirant cette main curieuse et intrusive.

– Merlin ramène toi !

Cette phrase lancée à la volée semble lui être adressée parce qu'il tapote délicatement sur mon chapeau de sorcière, l'enfonçant encore plus sur ma tête et me masquant complètement la vue. Merlin ? Est-ce qu'il a été jusqu'à se donner un surnom magique pour la soirée ? Est-ce que son chaudron est posé quelque part avec lui ?

Le temps de retirer mon haut, le décoller des restes de toiles d'araignée fictives, me revoilà seule devant le grand buffet. Le groupe de toute à l'heure est maintenant avachi sur les canapés en cuir. J'aperçois le superman faire de l'œil à un squelette plutôt frêle. Le cupidon sourire à une belle brune, les autres boivent de longues gorgées de leur cocktail, riant à gorge déployée. Mon regard tombe sur l'un d'eux déguisé en elfe, il semble avoir aperçu la scène avec ce « Merlin » puisqu'il sourit largement.

Un sourire moqueur et en même temps provocateur. Je me détourne de son visage en sentant mes joues prendre une vive couleur rouge tomate. Son regard est si perçant que j'ai l'impression qu'il lit en moi comme dans un livre ouvert. Même si je suis une fille trop prévisible. Je me hâte vers le buffet pour me servir un verre de cocktail, Gwen me salut de loin.

Mademoiselle vient de s'asseoir avec l'un des garçons du groupe sur le canapé. Traitre. Elle ose me lâcher seule dans cette grande maison. Sait-elle que je suis aussi douée qu'un éléphant dans un magasin de porcelaine ?

Mes gestes trahissent mes pensées et sans le vouloir en attrapant la louche pour me servir, non seulement je la lâche et de la boisson m'éclabousse, mais je bouscule aussi la bouteille de rhum posée juste à côté et sans bouchon dans l'énorme saladier. Mauvaises circonstances m'aurait juste dit mon père en voyant les dégâts.

Je me penche pour essayer de récupérer le peu d'alcool restant, sachant que je viens de ruiner la boisson de la soirée. Quand une main large dépasse la mienne et finit par vider le reste du contenu de la bouteille en verre. Son corps est collé au mien, coincée entre lui et la table recouverte d'une nappe en papier que j'ai inondée au passage.

Mes sens me mettent aussitôt en alerte, je reconnais l'odeur du type d'avant, j'ai envie de dire quelque chose à ce fameux Merlin. Mais il parle le premier, son souffle chaud ricochant contre ma nuque.

– C'est sympa d'avoir corsé la boisson, la fête sera plus folle...

Sa voix grave et légèrement suave me faire perdre pied. Non en fait ma chaussure vient de déraper sur du jus d'orange tombé au sol. La large main de Merlin agrippe ma taille, elle est brûlante, mais mon corps calcine de l'intérieur. Je suis gênée, je sens mon sang ne faire qu'un tour, ma poitrine me brûle, le souffle me manque.

Quand je reprends contenance, je ne sens plus sa présence derrière moi. Encore il s'est échappé tel un fantôme apparu de nulle part. Je le cherche du regard, prends la bouteille vide pour la déposer dans la cuisine quand mon épaule tape légèrement contre un type. Le fameux moqueur de toute à l'heure. Je n'ai pas le temps de dire quoi que ce soit, que quelqu'un arrive précipitamment dans la cuisine pour vider toutes ses tripes dans le lavabo.

Pour une fois que ce n'est pas sur moi, la chance aurait-elle frappé à ma porte ce soir ?


Ma Poissarde Bien-Aimée ( Nouvelle )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant