Ana

15

Mia, il faut que tu te réveilles, je t'en supplie, ouvre les yeux

Je suis là... Je n'arrive juste pas à ouvrir les yeux, pourquoi c'est aussi dur ?

Josh, je suis désolée de devoir te dire ça, mais il va falloir se faire à l'idée qu'elle ne va pas se réveiller...

Quoi ? Mais je suis là

Eva je sais ce que j'ai vu, elle a ouvert les yeux une fois, elle peut le faire à nouveau

-Josh...

Allez Mia, juste un tout petit effort, je sais que je peux le faire. J'ai juste à ouvrir les yeux, ce n'est pas grand-chose après tout, alors pourquoi j'ai cette impression que je ne vais jamais y arriver ?

Je me concentre. Je mets toute ma force. Je sais que je peux le faire, je sais que j'en suis capable, je suis forte.

J'arrive à bouger lentement un doigt, puis deux, puis tous les doigts. Un léger sourire se dessine sur mes lèvres. Je n'ai jamais été aussi fière de moi.

Eva, regarde, elle bouge les doigts dit Josh.

- Oh mon Dieu, Mia je sais pas si tu m'entends mais je t'en supplie, bats-toi, essaye d'ouvrir tes yeux suit Eva.

Je sens une main se poser sur la mienne.

Je sais que je suis prête à me battre, j'ai besoin d'une deuxième chance, j'ai besoin de prouver à la vie que j'en suis capable. J'ai besoin de montrer au monde entier qu'on peut s'en sortir, je veux me prouver à moi-même que tout est possible avec de l'espoir.
J'ai besoin de montrer à toutes ses personnes qui se sont moquer de moi, de mon physique, de mes cicatrises, à toutes ses personnes qui n'ont jamais cru en moi,  j'ai besoin de leur montrer que j'ai été capable de me guérir, que je ne suis pas qu'une faible, que je vaux mieux que ça.

J'ai besoin de montrer à mon père que je ne suis pas une cause perdue, que je suis pas qu'une égoïste suicidaire et anorexique.
Je veux qu'il soit fier de moi, qu'il me regarde avec ce sourire sur les lèvres, et qu'il se dise à quel point il aime sa fille, j'aimerais qu'il me dise de belles choses, j'aimerais qu'il ne touche plus à une goutte d'alcool, j'aimerais qu'il ne lève plus la main sur moi, j'aimerais qu'il ne m'abandonne pas comme tout le monde.

Je suis un être fragile, j'ai besoin de repère, j'ai besoin d'un père.

Si j'ouvre les yeux, je n'aurais qu'une faveur à lui demander, qu'il soit présent pour moi, qu'il soit le père qu'il aurait toujours dû être.
Je ne veux pas te détester papa, je veux pourvoir être fière de parler de toi aux autres, leur dire à quel point tu es un homme exemplaire, qui est présent pour sa famille, qui se crève pour sa famille, qui serait prêt à mourir pour elle.
J'ai souvent eu honte de toi papa, de toi et de ton alcool, honte de l'image que tu montrais à tout le monde. Et tu m'as blessé, tu m'as putain de blesser, alors s'il te plaît papa, je vais ouvrir les yeux, mais ne me déçois pas, je t'en supplie, je n'aurais pas d'autre choix que  de te détester.

Mes paupières sont lourdes, mais elles s'allègent de plus en plus. Mon œil droit s'ouvre lentement, puis le gauche. La lumière blanche dans la chambre me fait plisser les yeux.

Je sens ma main qui se serre.

Reste avec moi je t'en supplie me dit Josh.

Je tourne lentement la tête vers lui, sans parler. Je me contente de le regarder. Je me sens épuisée, j'aurais juste aimé me rendormir mais je ne peux pas, il faut que je me battre.

J'ai l'impression d'avoir dormi pendant un siècle dis-je en chuchotant.

- C'est le temps qu'on a eu l'impression d'attendre qui tu te réveilles enfin reprend Eva en souriant légèrement.

Elle embrasse lentement mon front.

Je vais vous laisser d'accord ? Je pense que vous avez pas mal de truc à vous dire dit-elle avant de partir de la chambre.

Je ferme doucement les yeux. Je suis épuisée.

Je sens la main de Josh lentement lâcher la mienne pour me caresser les cheveux.

Si tu savais à quel point j'ai eu peur, à quel point je me suis détesté, à quel point je t'ai détesté me dit-il.

J'ouvre à nouveau lentement les yeux dans sa direction.

Quand j'ai appris que tu avais fait une tentative de suicide, j'ai eu cette impression que le monde me tombait sur les épaules, j'ai eu l'impression de payer les conséquences de mes actes. Je me détestais parce qu'il y avait tellement de choses que je voulais te dire, j'avais cette impression que le temps m'avait rattrapé, que je n'aurais plus jamais cette chance à nouveau, de pouvoir te parler, de pouvoir te dire ce que je pense

Avant même que je puisse ouvrir la bouche, il me stoppe.

Laisse-moi te dire tout ce que j'ai besoin de te dire. J'ai été un gros con, j'en ai conscient, j'ai été qu'un abruti qui à jouer avec tes sentiments, avec ton cœur, absolument personne ne mérite ça, encore moins toi. Je me suis pris à mon propre jeux, je me suis rendu compte à quel point tu es devenue importante dans ma vie, je pensais être un enfoiré sans cœur, et tu m'as prouvé le contraire, tu m'as montré que moi aussi je pouvais aimer à en crever, aimer sans en avoir honte. Quand j'étais avec toi Mia, je ne voyais plus personne autour de moi, c'était juste toi. Et putain que j'adorais ton sourire. J'aimais te faire rire, tu sais, je pensais même que pour faire tomber amoureuse une femme il fallait la faire rire, mais je me suis rendu compte que c'est moi qui tombait amoureux à chaque fois que tu riais. Je sais que ça peut être bateau, beaucoup trop à l'eau de rose, et tu sais à quel point ce n'est pas du tout mon style mais putain, Mia, j'ai tellement eu peur de te perdre, j'ai tellement peur de te perdre une seconde fois, que je préfère le dire pour que tu saches ce que je pense de toi, que tu saches à quel point tu me rends fou, à quel point tu es magnifique, peu importe ton poids, et à quel point j'ai eu tort de te traiter comme ça, comme si tu t'en sortirais jamais, comme si tu n'en étais pas capable, je t'aime Mia, et j'ai besoin que tu le saches

Je le regarde. Je sais pourquoi, je me bats maintenant, je sais que ça vaut le coup de se battre.

Tu ne m'as jamais dit ce genre de chose dis-je en le regardant, j'espère que je pourrais te rendre fière

- Tu n'as pas besoin de le faire, je suis déjà fier de toi, à mon tour de te montrer que je suis prêt à être là pour toi

Il embrasse lentement mon front.

Je ferme les yeux sous son baiser. Puis je réalise quelque chose.

Ana, ou es-tu passé Ana ?
Ana ?
Pourquoi tu ne me réponds pas ?
Est-ce que c'est vraiment toi que j'ai vu dans ce long couloir ?
Tu es vraiment parti ?

Je réalise qu'Ana est vraiment parti, je n'aurais plus sa douce voix qui me chuchotera quoi faire dans le creux de mon oreille, plus de voix pour me dire quoi manger, pour me détester, pour me haïr, pour me faire de mal, plus personne, juste moi et moi seule.

Ana est parti dis-je en regardant à nouveau Josh.

- Vraiment parti ?

J'hoche doucement la tête.

Alors tu vas pouvoir te battre, te battre pour t'en sortir me dit-il en serrant doucement ma main.

Ana n'est plus là, c'est mon combat qui commence.
Ça va être dur, mais je vais y arriver.
Je sais que je peux le faire.

Et je sais aussi que tu peux le faire, Mia, je crois en toi.