II- Les démons du passé

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- Lord Alexander je vous présente ma fille Lucy Rose de Farells.

    A l'annonce de l'identité de l'individu confortablement avachi dans les coussins je me retourne étonnée. Oublié le désordre ambiant. Ce lord ne cesse de croiser mon chemin. Voilà bien longtemps que je n'avais été présentée à une personne. Peu connaissent mon existence.

    Alexander bondit sur ses pieds pour s'approcher de moi et se saisit galamment de ma main avant d'apposer un baiser dans le creux de mon poignet.

- Ravi de vous rencontrer mademoiselle, prononce d'une voix rauque le jeune homme une lueur espiègle dans les yeux.

    Je feins de le voir pour la première fois à mon tour, suivant son petit manège.

- Tout le plaisir est pour moi, articulais-je avec soin en effectuant une rapide révérence.

    Les présentations officielles accomplies nous nous installons dans les sofas. Ma mère en face d'Alexander et moi à ses côtés.

- Vous n'avez pas d'autres enfants ? s'étonne le lord en me fixant un peu trop longtemps.

- A mon plus grand regret non, répond sèchement ma mère. Lucy est ma fille unique.

    Une bouffé de rage m'envahit. Fille unique. Fille unique. Je voudrais crier à l'imposture, au mensonge. Me relever et dire la vérité. Ma langue me brûle. Ma mère peut bien me critiquer, me rabaisser, m'abandonner elle ne peut pas nier cette partie d'elle. Elle ne peut pas faire comme si elle n'avait jamais existé. Non c'est tellement injuste.

    Mais si je parle. Si j'ouvre la bouche et que je crache la vérité comme un venin qu'on répandrait alors tout sera fini. Je ne serais jamais en mesure de rivaliser avec ma mère. On la croira toujours à moi. Après tout qui suis-je ? Uniquement sa fille. Personne n'oserait remettre sa parole en doute. En revanche une pauvre petite fille dont personne n'a entendu parler qui délire voilà qui est bien plus logique.

    Je dois conserver mon sang-froid. Alors je plante mes ongles dans la paume de ma main. De petits croissants creusent ma peau. Et la douleur me maintient à la surface. Je n'entends que brièvement la conversation. Je suis comme plongée sous l'eau, hagarde. La façon dont elle a supprimé ce problème, dont elle traite cet évènement me donne envie de vomir. Mes oreilles bourdonnent alors que le sang pulse dans mes veines. Non, menteuse. La gorge sèche et nouée j'assiste impuissante à ce spectacle.

    Oh Katerina, je suis tellement désolée. Je me souviens de toi, je me rappelle de tout. Je te jure qu'un jour je te vengerais.

- Lucy ? m'interpelle Alexander en posant avec douceur sa main sur le creux de mon bras pour me ramener à la réalité.

    Les meubles de la pièce sont agités de petites secousses presque imperceptibles. Un vase se renverse au loin sans que je ne m'y attende. Le bruit du verre qui explose. La destruction. Je sens les regards des autres occupants de la pièce peser sur moi. N'éveille pas les soupçons. Ce n'est pas un tremblement de terre. C'est ma magie qui s'échappe par tous les pores de ma peau. J'enfonce encore plus profondément mes ongles dans mes chairs jusqu'à sentir le sang.

    Je me racle la gorge pour me débarrasser de cette boule qui me gêne. Et aussi soudainement que les tremblements ont commencé tout se stoppe. Je porte alors mon attention sur Alexander.

- Il ne me semble pas vous avoir autorisé à me tutoyer, relevais-je incapable de dire quoique ce soit d'autre n'ayant pas entendu un traître mot de leur discussion.

- Je l'ai fait, m'apprend d'un ton tranchant ma mère me signifiant qu'elle n'apprécie pas la façon dont je traite son invité.

    Je l'ignore de manière évidente, haineuse envers elle. Cette fois je ne baisserais pas la tête en l'entendant déblatérer ses sornettes. Le chagrin me submerge comme une digue qui viendrait de se rompre. Elle m'a enlevé la personne que j'aimais le plus. Comment une mère peut-elle faire ça. Alors je rétorque froidement en m'adressant au petit invité de ma mère :

Sapphire ImmortalityWhere stories live. Discover now