XXV - Au bord du précipice

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- Roseline, croyez-vous possible après m'avoir monté mon petit-déjeuner, de me préparer un bain. Je vous avoue qu'après ces derniers jours, plonger dans de l'eau chaude sera réconfortant.

Je vis les épaules de ma chère servante s'affaisser. Je savais pertinemment que ce que je venais de lui demander, correspondait à une bonne heure de travail avec les autres domestiques pour remplir notre baignoire.

Nous avions l'électricité c'était un fait mais n'avions pas encore installé de chauffe-eau. Caché dans la cloison de notre salle bain, un astucieux système de monte-charge, en communication directe avec la cuisine, permettait d'acheminer les brocs d'eau chaude. Mais évidemment cette logistique nécessitait une patience d'ange.

- Très bien Madame Louise, je vous fais préparer votre bain, Madame Louise. Me répondit-elle d'une voix marquée d'une résignation très professionnelle.

- Merci Roseline.

Elle sortit de la chambre les bras ballants et revint quelques minutes plus tard avec mon plateau pour déjeuner.

- Posez-le sur la petite table, Roseline.

J'avais eu beaucoup de difficultés durant ces dernières semaines, à me faire à l'idée d'être servie constamment. Je ne pouvais presque rien faire par moi-même et cela me minait franchement. Mais j'avais accepté ce fait, car vu les yeux que me faisait soit Roseline, soit Victor, ou encore Adelin et d'autres, j'étais bien obligée de me plier à leurs manières de vivre.

Enfin, trêve de tergiversation, Roseline venait de sortir et j'avais des journaux à trouver.

Je bondis de mon lit et me dirigeai de suite dans le couloir où ils devraient se situer. Alors, si je suivais le fil de mes souvenirs, cela devait se trouver à peu près au milieu de cette coursive, derrière ce panneau-là exactement. Je m'accroupis pour examiner attentivement la plaque de bois. De mes mains j'en touchai les contours méticuleusement espérant sentir un bouton ou un mécanisme quelconque. Le panneau semblait un peu bancal d'un côté, j'appuyai sur cette partie. Mon cœur se serra quand sous la pression que je venais d'exercer, j'entendis le petit clic d'un mécanisme se déclencher. La boiserie s'entrouvrit. J'avais réussi sans difficulté, finalement cette journée s'annonçait plutôt bien.

Fébrilement, j'ouvris le portillon. Ma joie me transporta lorsque je trouvai à l'intérieur cinq autres tomes des journaux de Louise. Je pris celui du dessus et le serra bêtement contre moi, trop heureuse de ma découverte. J'allais enfin pouvoir répondre aux questions qui m'avaient taraudée toute la fin de la journée d'hier.

Adelin l'avait d'ailleurs remarqué au diner. Il n'avait cessé de s'inquiéter de mon manque d'appétit, puis de mon air distrait et préoccupé. J'avais évidemment éludé toutes ces questions en lui affirmant que c'était le contrecoup de nos mésaventures et de nos découvertes de l'après-midi. A ces dernières paroles, il s'était renfrogné et subrepticement, j'avais vu passer dans ses yeux un éclair de colère, qui s'était éteint aussitôt qu'il avait posé son regard sur moi, laissant place à la compassion. A la fin du repas, il m'avait raccompagné jusqu'à ma chambre, très protecteur il s'était penché vers moi et m'avait souhaité bonne nuit.

Le journal de Louise dans les mains, je décidai de m'installer sur la méridienne. Avec attention, je refermai ma cachette secrète et y reviendrais plus tard pour chercher les autres.

A présent installée avec le cinquième journal de Louise, j'étais prête à plonger dans la vie trouble de mon arrière-arrière-grand-mère. Et vu les dernières pages que j'avais lues hier, j'étais loin d'être au bout de mes surprises.

Celui-ci démarrait au dix-sept-novembre mille-huit-cent-quatre-vingt-trois sur les phrases suivantes :

« Cet homme est un rustre, je ne supporte plus ses coucheries. Je vais reconsidérer mes dispositions quand à mon grand projet et y apporter le soutien financier qui y sera nécessaire. »

Le pendule de Huygens [Tome 1] : La synchronisation des balanciersOpowieści tętniące życiem. Odkryj je teraz