29 Février 2016, 16:34 (1)

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Je range dans ma valise le petit tas de vêtements qui a été lavé aujourd'hui, tout en écoutant mon frère, me demandant rapidement ce qu'il pouvait raconter pour vouloir poursuivre là où il s'est arrêté

— Tu nous décrivais ton apnée prolongée, déclare l'un des deux garçons à la fois amusé et intrigué avec un fort accent espagnol, donc sûrement Sydney.

Je pouffe, donc c'était ça. Ça ne devrait même pas m'étonner en connaissant mon frère, il est bien sûr question de natation. Qu'est-ce que ça pourrait être d'autre ? Ce qui est plus « surprenant » par contre, c'est l'air profondément intéressé d'un de ses amis. Je ne contesterais pas que c'est bien que mon jumeau ait une passion, c'est juste qu'il n'est pas forcément passionnant quand il en parle...

— Ah oui ! Je vous jure, je suis resté beaucoup plus longtemps que d'habitude. Enfin, vous vous en êtes bien rendu compte. Mais j'y étais tellement bien. Vous savez bien que l'eau est mon élément, mais ça n'a jamais été aussi vrai qu'aujourd'hui. Aujourd'hui, je n'avais pas envie de sortir, mais en plus, je n'en avais pas besoin, j'avais presque l'impression de respirer sous l'eau ! J'y étais tellement bien ! Franchement, je n'en aurais pas vu vos têtes inquiètes, j'y serais encore ! Je rigole bien sûr, ce n'est pas possible, mais j'en avais vraiment l'impression, c'était impressionnant !

Tandis que je fais le tour de la pièce, vérifiant une énième fois que je n'ai rien oublié et que tout ce qui reste dans la pièce doit effectivement attendre demain matin pour rejoindre mes cartons, je me demande à quel moment mon frère s'est mis à raconter autant de conneries.

— Définitivement une journée trop bizarre aujourd'hui, rigole Jenny.

Je me fige, le cœur battant à tout rompre. Ça recommence. Je ne demande rien d'autre que de la tranquillité et de la normalité, et cette journée semble me harceler de regards étranges et d'autres bizarreries. Je ne sais pas si c'est le mot de trop ou le fait que je suis pour la première fois à l'abri des regards, mais de frustration, mes yeux me piquent et mes mains tremblent. Je me sens tellement stupide de me mettre dans un état pareil juste pour ça, cette journée a été dure mentalement. J'ai peut-être fait une fixette sur tout ce qui sortait de la normale, mais ça fait beaucoup. Je ne demande rien d'autre que de la normalité et de la tranquillité et pour la première fois en seize ans, je vais bientôt l'obtenir. Plus de famille défectueuse qui déménage tous les quatre matins, plus d'aller-retour, enfin pouvoir faire mes études normalement et tranquillement, enfin pouvoir vivre avec mes meilleurs amis. Et cette dernière journée avant, d'être normale et tranquille s'acharne à être bizarre et inexpliqué.

— Ce que je ne comprends pas, c'est qu'est-ce qu'il y avait dans notre eau ce midi... Non, mais je suis sérieux ! continue le deuxième garçon, sûrement Irving, un peu agacé. C'est quand même trop bizarre ! Franchement, j'ai presque l'impression qu'on est en train de devenir fou.

Tremblant encore, je m'assois sur le bord du lit et enlève mes lunettes. Il faut que je me calme.

— Pas la moindre idée, mais c'était génial en tout cas, remarque le supposé Sydney.

— Bah moi je trouve ça effrayant, insiste l'autre.

— Tu n'es vraiment pas... audacieux Irving, reproche Jenny, cynique.

— Eh bien moi non plus. Je vous laisse résoudre le mystère de l'eau ensemble, personnellement, je n'en ai pas la moindre idée. En attendant que vous trouviez la réponse, je vais parler un peu à ma sœur si ça ne vous dérange pas, conclut mon jumeau ne laissant que peu de place à la discussion.

Prise de court, j'essuie mes yeux et reprends mes activités, me rendant compte que je me suis arrêtée pour écouter. J'ai honte. Ça ne me ressemble pas d'espionner qui que ce soit et je devrais arrêter de penser à tout ça. Me reprenant en main, je sors et allume mon ordinateur, continuant ma liste d'objectifs de la soirée comme si de rien n'était. Quand Cameron rentre dans notre chambre à peu près au moment où je m'installe à mon ordinateur sur le bureau.

— Alors comme ça tu abandonnes des invités ? remarqué-je en rigolant

— Oh ils me pardonneront.

— Papa et maman ne sont pas là ? demandé-je pour vérifier, même si je devine déjà la réponse.

— Non, papa a eu une panne à Glasgow, il n'est pas encore parti, il prendra peut-être une chambre pour la nuit s'il n'arrive pas à faire réparer son camion avant que les garages ferment. Et maman a décidé de faire des heures sup' au pub du coup. On ne mange que tous les deux ce soir... remarque-t-il embarrassé en passant la main dans ses cheveux rendus raides et sombres par l'eau de la piscine. Mais j'ai été acheter un petit gâteau et maman a dit qu'on pouvait se préparer ce qu'on voulait... ajoute Cameron, comme si ça compensait l'absence de nos parents pour nos seize ans...

Elle T1 : La Comptine Du Papillon (Terminé)Where stories live. Discover now