2. Douche froide

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Je ne savais même pas qu'une cuisine d'une telle taille pouvait exister. En réalité, je le savais, mais je n'en avais jamais vu de pareille !

Et il ne s'agissait pas seulement d'une cuisine.

La pièce, rectangulaire, était gigantesque. Des canapés en cuir disposés l'un en face de l'autre au bout, une table pour dix personnes entourée de chaises au milieu, et la cuisine sur ma droite. Côté jardin, une verrière remplaçait le mur ''sur toute la longueur.

Tout était blanc ou noir, vitré ou laqué. J'avais peur de poser un doigt quelque part et d'y laisser mes empreintes.

L'îlot central était aussi grand que la table de la salle à manger : je m'imaginais déjà confectionner des tonnes de plats et de gâteaux !

J'aimais faire la cuisine. Et tout le monde appréciait ma cuisine. Surtout Ethan. Ma gorge se serra. Je repoussai la vague de nostalgie qui m'envahissait et pensai au message réconfortant de ma mère : Tout va bien ici. Nous t'aimons tous les deux très forts. Maman.

Bon. Au travail. Petit déjeuner à 8 heures précises ! Je fouillai les placards, cherchant farine, œufs, lait, beurre, poêle... J'eus bien du mal à faire fonctionner la machine à café ultrasophistiquée et la plaque à induction pour préparer les pancakes de M. Thomas. J'étais bien loin de ma ridicule cafetière à l'italienne et de ma petite gazinière !

Finalement après un bon quart d'heure, je vins à bout de ma tâche. J'avais suivi les instructions à la lettre. Assiette de six pancakes, sirop d'érable, mug de café sans sucre mais avec une lichette de lait, le tout disposé sur un plateau, je pouvais enfin servir M. Rick Thomas – alias Wolverine !

J'avais soigné mon apparence, ne voulant pas, une fois de plus, passer pour une souillon et avais enfilé une combinaison noire, large, ceinturée à la taille d'un lacet en cuir. Une queue-de-cheval pour ne pas être gênée par mes cheveux pendant les soins et juste une pointe de rimmel sur les cils. Pas de fond de teint ni de fard à joue, l'air humide et chaud, au-dehors, ne le permettait pas !

Mon plateau dans les mains, je frappai à la porte de Rick et, après avoir entendu un « entrez » sec et autoritaire, je m'exécutai.

Les rayons du soleil pénétraient dans la chambre à travers la grande baie vitrée. Je devinai l'entrée d'une salle de bains face à moi. Une grande penderie soutenait la tête du lit dans lequel je vis les deux jambes et le bras droit, plâtrés, de Rick Thomas. Au fond de la chambre, je vis un fauteuil roulant et d'autres appareils médicaux. Face au lit, un meuble hi-fi et un écran plat colossal diffusaient les informations locales.

J'avançai jusqu'au lit.

— Bonjour, M. Tho...

Oh ! Merde ! Mon malade n'était pas un vieillard à la peau flétrie par l'âge, mais un putain de jeune homme ! Mon cœur avait littéralement sauté de ma poitrine ; j'en aurais fait tomber le plateau si je n'avais pas été adroite et surtout si mes muscles ne s'étaient pas figés.

La bouche ouverte, les yeux exorbités, je ne savais plus quoi faire : sortir et rentrer une fois calmée ? Poser le plateau et revenir dans une heure ? Mon pouls s'affolait alors que deux yeux bleus me détaillaient avec hostilité.

Enfin, une réaction de mon corps : mes joues se mirent à rougir devant l'homme allongé dans son lit médicalisé.

— Quoi ? hurla-t-il. Je fais pitié à ce point ?

Comme si j'avais reçu un électrochoc, ma bouche se referma et mes muscles se relâchèrent (enfin). La tête du lit se releva pour lui permettre d'être en position demi-assise. Il grimaça légèrement. Je me retins de lui demander s'il avait mal. Je le détaillai : cheveux en bataille châtain clair, des yeux d'un bleu moucheté de marron surmontés d'épais sourcils, un nez trapu mais court, une mâchoire saillante dotée d'une ombre de barbe, une bouche aux lèvres charnues. Par pitié, non ! Pas ça !

Brisé(e) (BlackMoon Romance)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant