Restart with Song [Publié chez Hugo Poche]

II - Léo

Ce que je n'aime pas dans ma putain de vie, c'est bien ce défilé de filles en chaleur auquel j'ai du assister pendant tout l'après-midi.

-       Deux heures d'audition je suis vanné ! Lance Gaspard de l'autre côté de la scène.

Il est en train de ranger ses baguettes et ses caissons dans ses housses. S'il avait pu, je suis certain qu'il serait resté affalé sur un canapé à nous regarder ranger.

-       Je crois que je vais faire une cure de son avec mon Ipod ce soir, grommelle Paul en réponse.  J'ai entendu plus de rock pour gonzesses que je ne peux en supporter.

-       Arrête ! Intervient Gaspard, je t'ai vu bander à chaque fois que l'une d'elle t'interpréter du Avril Lavigne.

-       Mais c'est parce qu'elles étaient bandantes !

-       Connard !

Je ne prends pas part mais je ne peux m'empêcher de ricaner dans mon coin. Ils ont beau la jouer « joute verbal », ces deux-là s'adorent. Autant qu'ils adorent reluquer et enchainer les filles prêtes à se jeter à leur cou. Avec son sourire de sale gosse, Paul revient à la charge.

-       En tout cas, j'ai assez de numéro pour remplir mes soirées solitaires pendant un mois.

Gaspard lève les yeux aux ciels. Lui aussi a reçu des propositions pas très honnêtes,  mais entre lui et Paul la compétition a toujours été de mise. Heureusement pour le groupe, tout cela n'est que bon enfant.

-       Et toi Léo ?

Ha non pitié !

-        J'en ai vue plus d'une qui t'ont lancé des regards très prometteurs.

-       A quoi bon garder ces merdes, grogne-je sans les regarder.

J'hausse les épaules. En réalité, même si la plupart des filles vues aujourd'hui étaient plutôt agréable à regarder, me retrouver face à des groupies venues nous admirer plutôt que chanter, très peu pour moi.

-       Je ne me rappellerai même pas leurs visages, continue-je malgré moi.

-       Mais ce ne sont pas leurs visages que j'ai envie de revoir moi, rétorque Paul.

-       On pourrait regarder dans leur dossier, s'enthousiasme Gaspard le regard plein de convoitise lancé en direction de l'ordinateur de notre leader.

-       Pas touche.

Cette fois, Jules intervient. Concentré depuis dix minutes, il n'a pas pris part au jeu de notre petit trio mais il y est resté attentif.

De nous tous, il est celui qui se concentre le plus sur notre réussite artistique. Il ne reste pas vraiment en retrait mais il ne peut s'empêcher de jouer les arbitres. Tout ce qui lui importe, ce sont les milliers qui nous attendent après un enchainement de concerts et de tournées. La musique, c'est sa vie, son gagne pain. Et nous, ses meilleurs amis, nous sommes la cerise sur le gâteau. Il se fait plaisir chaque jour, mais le dernier mot est pour lui. Du moins, depuis que je me suis effacé.

-       Bon les gars, tant que c'est frais dans nos esprits, reprend-t-il en se levant, des feuilles au creux de sa main. Je voudrais voir si vous êtes d'accord avec moi.

Cette fois, il a toute notre attention.

-       J'ai retenu quatre filles pour la suite. Mais je veux être certain qu'on soit sur la même longueur d'onde.

-       Quatre ? Mais comment c'est possible de n'en retenir que quatre ? S'indigne Paul.

-       C'est vrai, on en a vue plus d'une centaine.