Elian descendit les dernières marches avec une lenteur presque cérémoniale, son cœur tambourinant dans sa poitrine comme un écho sourd. En bas, Alcyon attendait, ses mains glissées dans les poches de son pantalon, le regard rivé sur lui. L'air semblait lourd, chargé d'une tension douce, presque insupportable, comme si le moindre mot pouvait briser l'équilibre précaire entre eux.
Ils étaient si proches, et pourtant une distance invisible subsistait, un espace empli de ce qui n'était jamais dit. Elian hésita, ses doigts jouant nerveusement avec le bord de sa manche, incapable de soutenir le regard de Alcyon trop longtemps. Ce dernier esquissa un sourire, doux et chaleureux, mais Elian savait qu'il n'était qu'à moitié sincère. Alcyon souriait souvent pour cacher ses propres hésitations, et Elian le voyait, comme on perçoit une étoile vaciller dans la nuit.
"Tu as pris ton temps," murmura Alcyon, sa voix teintée d'une légèreté feinte.
Elian haussa les épaules, cherchant ses mots. Mais qu'aurait-il pu dire ? Que chaque pas le rapprochant de Alcyon amplifiait cette chaleur dans sa poitrine ? Que les regards volés et les silences partagés lui faisaient plus peur que les serments solennels de l'Ordre ?
Ils se tenaient maintenant face à face, si proches que Elian pouvait percevoir la légère odeur de savon qui émanait de Alcyon, mêlée à une note boisée, familière. Alcyon bougea, imperceptiblement, un geste si petit qu'il aurait pu passer inaperçu. Mais Elian le sentit, chaque mouvement de Alcyon résonnant comme une onde dans son propre corps.
"Tu es prêt ?" demanda Alcyon.
Elian hocha la tête, bien que la réponse réelle soit plus compliquée. Était-il prêt ? À affronter ce qui les attendait, oui, peut-être. Mais à affronter ce qu'il ressentait ? Il en doutait.
Un souffle. Une hésitation. Puis Alcyon leva une main, comme pour effleurer la joue de Elian. Mais il se ravisa au dernier moment, laissant sa main retomber doucement, un geste à peine esquissé.
"Tu n'as pas besoin d'avoir peur," murmura-t-il, sa voix si basse que Elian ne fut pas certain d'avoir réellement entendu les mots.
Elian sentit un frisson parcourir sa peau, comme si les paroles de Alcyon avaient réveillé quelque chose d'endormi en lui. Il releva enfin les yeux, plongeant dans ce regard vert qui semblait tout comprendre. Pendant un instant, il oublia le monde, l'Ordre, les devoirs, et même ses propres peurs. Il n'y avait que Alcyon et lui, deux âmes suspendues dans un instant fragile, à la lisière de quelque chose de plus grand qu'eux.
Leurs regards s'accrochèrent, et Elian sentit son cœur ralentir, comme s'il s'accordait au rythme de celui de Alcyon. Un sourire timide apparut sur ses lèvres, hésitant, mais sincère. Alcyon répondit par un sourire éclatant, comme un rayon de soleil perçant à travers les nuages.
Aucun mot ne fut échangé. Aucun n'était nécessaire. Leur silence était leur langage, un terrain sacré où ils pouvaient se comprendre sans artifice, sans avoir à mettre des mots sur ce qu'ils n'étaient pas encore prêts à nommer.
Les marches du temple semblaient plonger directement dans le ciel, telles des flèches de pierre dressées contre l'éternité. Le temple lui-même, imposant et solennel, semblait fusionner avec le paysage désertique qui l'entourait. Les murs étaient taillés dans une roche noire scintillante, parsemée de stries argentées qui capturaient la lumière du soleil, donnant l'impression que l'éclipse elle-même avait forgé cet édifice.
Autour des deux garçons, une brume subtile, presque irréelle, dansait au gré du vent, comme si l'air portait les secrets de l'Ordre. Le sol, craquelé et jonché de poussières d'or et de sable rouge, évoquait une terre ancienne, marquée par des siècles de rituels et de serments. Les ombres des colonnes massives se projetaient sur le parvis, dessinant des motifs complexes semblables à des constellations.
Au sommet des marches, le temple semblait vivant. Les statues d'anciens Noone, figées dans des postures martiales ou méditatives, gardaient l'entrée, leurs regards vides semblant juger quiconque osait s'approcher. L'architecture, à la fois épurée et monumentale, rappelait les grandes cités antiques, avec une touche futuriste. Des bas-reliefs finement gravés racontaient des histoires oubliées, des batailles et des alliances scellées dans le sang et l'honneur.
Au loin, des dunes ondulantes se dressaient, leur surface brillante sous un soleil pâle, donnant l'impression qu'un océan doré entourait le temple. Et au-dessus, le ciel était étrange, miroitant comme une toile tendue entre le jour et la nuit, où une éclipse partielle persistait, projetant une lumière éthérée sur la scène.
C'était un lieu où le temps semblait s'arrêter, où les mortels venaient pour toucher l'immortalité et où chaque pierre portait le poids des promesses passées. Un lieu digne de l'Ordre de l'Éclipse, et de ceux qu'il appelait à transcender leur humanité.
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Noone (extrait, version soft)
Science-FictionDans un village reculé, une tradition sombre et implacable subsiste depuis des siècles : à l'âge de 17 ans, tous les garçons sont arrachés à leur famille pour être transformés en Noone, des super-soldats formés et conditionnés pour servir l'Ordre de...
