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    Elle n'avait plus aucun vêtement. Une robe mauve, moulante et décolletée ? Déjà utilisée, c'était celle de leur rencontre. Une jupe évasée avec col roulé près du corps ? Elle l'avait mis pour aller récupérer son soutien-gorge. Un pull aux manches lacées avec un jean pattes d'éléphant ? C'était ce qu'elle portait pour aller chez le gynécologue. Une jupe longue avec des cuissardes ? C'était ce qu'elle avait le jour de son avortement. Un top noir en lin avec pattes d'éléphant en coton ? Elle portait cela lorsqu'Ino était venu la réconforter. Un cache-cœur vert avec une jupe fendue sur le côté ? C'était ce qu'elle portait lorsqu'elle avait recouché avec Ino. Un corset noir sur une longue chemise de la même couleur et des bottes à lacets ? C'était ce qu'elle avait lorsqu'elle était allée au restaurant pour la première fois avec lui. Une robe courte dos nu avec un collant et des bottes ? C'était ce qu'elle portait lorsqu'elle était allée au cinéma avec lui et leurs amis !
    C'était une véritable catastrophe, elle avait utilisé tous ses plus beaux ensembles de vêtements pour voir Ino, et aujourd'hui, elle n'avait plus rien à se mettre ! Ino l'avait vue dans ses plus belles tenues, et il retenait toujours ce qu'il voyait, alors il s'en souvenait forcément ! Mai ne pouvait pas aller chez lui dans une tenue qu'il connaissait déjà, pas aujourd'hui, c'était hors de question. Dans moins d'une heure, elle partirait chez lui pour lui avouer ses sentiments, et cela la mettait dans un état d'angoisse inimaginable. Elle était presque sûre qu'il ne l'aimait pas, alors elle comptait sur son physique pour le faire changer d'avis. Ce n'était pas une bonne idée, elle savait qu'elle valait plus qu'une paire de seins, mais elle ne voyait pas d'autres solutions pour garder Ino auprès d'elle. C'était peut-être pitoyable, mais Mai s'en fichait, elle préférait faire cela plutôt que le perdre.
    Mais si elle voulait faire en sorte qu'Ino s'intéresse à elle, il fallait déjà qu'elle trouve quelque chose à se mettre, et ce n'était pas une mince affaire... Mai poussa un soupir de frustration, et ferma les portes de son armoire, avant de se laisser tomber sur son lit. Elle n'avait rien, absolument rien. Elle n'allait tout de même pas se présenter chez Ino en sous-vêtements ! Quoique, elle pourrait le faire, il allait adorer ça. Elle l'avait même déjà fait. C'était la semaine dernière, après qu'Ino ait osé dire sur leur groupe qu'il préférait sa première fois à son dernier rapport sexuel. Mai n'avait pas du tout apprécié cela, et lorsqu'Ino lui avait dit de venir chez lui pour s'excuser, elle avait décidé de lui montrer ce qu'elle valait. Elle avait mis son plus bel ensemble de lingerie, un soutien-gorge noir balconnet, avec de la dentelle fleurie rouge, un tanga échancré dans le même tissu, et des porte-jarretelles en soie. Elle avait caché le tout sous un long manteau sombre et des bottes hautes, et elle était sortie ainsi. Elle n'habitait qu'à quelques minutes de chez Ino et elle n'avait pas eu à prendre le métro, mais cela ne l'avait pas empêchée d'avoir peur sur le chemin et de mourir de froid. Mais elle ne regrettait pas cette folie, elle en valait le coup. Ino avait adoré la voir ainsi, et une fois sa surprise passée, il l'avait plaquée contre un mur pour lui faire l'amour toute la soirée. Mai n'était pas peu fière de l'effet qu'elle avait sur lui, et cela lui avait permis de rentrer chez elle avec des vêtements d'Ino.
    Ils étaient maintenant rangés dans son armoire, et elle n'avait aucune intention de lui rendre. Elle pourrait réitérer l'expérience et aller chez Ino en sous-vêtements, mais si elle faisait ça, elle finirait dans son lit avant de lui avoir parlé. La partie lâche d'elle en avait envie, tout serait plus simple si elle ne lui disait rien et qu'elle se contentait de leur relation actuelle... Mais la partie raisonnable d'elle l'obligeait à parler. Elle ne pouvait pas rester dans cette situation, elle avait besoin de savoir si son amour était réciproque. Elle ne voulait pas continuer d'espérer en vain, elle devait savoir si elle devait l'oublier ou non. Mai se retourna sur le ventre pour saisir son téléphone, posé sur son oreiller, et regarda l'heure. Il lui restait encore une demi-heure pour choisir ses vêtements. Elle se sentait ridicule à se prendre ainsi la tête pour de simples vêtements, ses amies n'auraient jamais passé autant de temps devant leurs penderies avant d'aller voir leurs petits amis... Le pire était qu'elle ne s'habillait jamais pour un homme ! Elle s'habillait bien pour se sentir belle, pour accepter son corps, pour se faire complimenter par des femmes... Mais recevoir les compliments d'un homme était la dernière de ses priorités. Et pourtant... Elle avait besoin de recevoir ceux d'Ino. S'il ne l'aimait pas, elle avait au moins besoin de savoir qu'il la trouvait belle.
    Pour la première fois de sa vie, elle avait peur d'échouer, et elle n'était pas prête à le perdre. S'il la rejetait, il pouvait au moins toujours vouloir des relations sexuelles. Il fallait l'espérer en tout cas. Ino était le seul homme de son entourage qui n'avait aucun défaut (excepté le fait qu'il ait des origines américaines...), elle tenait sincèrement à lui, elle ne pouvait pas le perdre maintenant. Et il était le seul à être au courant de ses problèmes, il se souciait d'elle et l'avait toujours soutenu, même lorsqu'ils se connaissaient à peine. Mai n'avait jamais eu quelqu'un comme ça dans sa vie. Les hommes de son clan étaient tous plus misogynes les uns que les autres, elle n'arrivait pas à se sentir proche de Maki, elle ne parlait jamais de sa vie privée à Megumi, ni à Satoru et Suguru, elle n'était pas proche de Tsumiki ou des jumelles, Toji n'était jamais là, et elle ne réussissait pas à parler de ses problèmes à ses amis proches. Il n'y avait que Nobara, Maki, Yuko et Yuki qui étaient au courant de son avortement, mais là encore, elles n'étaient pas au courant de ses problèmes familiaux. Même Maki n'était pas au courant que Naoya surveillait toujours leur vie...
    Parmi toutes les personnes qui faisaient partie de sa vie, il n'y avait qu'Ino qui était au courant de tous ses problèmes. Il était le seul à pouvoir être vraiment là pour elle, et c'était la première fois que quelqu'un en savait autant sur elle. Elle ne pouvait pas le laisser partir.
    Une sonnerie retentit soudain dans son appartement, et Mai bondit de son lit. Les voilà enfin ! Comme elle ne savait pas comment s'habiller et qu'elle était en situation d'urgence, elle avait appelé ses amies en renfort ! Mai se précipita dans son entrée et ouvrit la porte sans attendre. Nobara se trouvait sur le pallier, et Yuko et Maki se trouvaient derrière elle.
    — Ça fait une heure que je vous attends ! s'exclama-t-elle avec impatience.
    — On a croisé Ino et il nous a fait un interrogatoire, on se déplaçait en bande alors il savait qu'on allait te voir ! expliqua Nobara en entrant rapidement dans l'appartement.
    — Quoi ? Qu'est-ce que vous avez dit ?
    — On lui a dit qu'on partait acheter des sextoys pour Yuko !
    — C'était la honte de ma vie, soupira Yuko.
    — Ma pauvre... Avec un peu de chance il le répétera pas à Yuji, dit Mai en posant sa main sur son épaule.
    — C'est pas grave, t'inquiète pas. Alors, qu'est-ce qu'il t'arrive ?
    — J'ai plus rien à me mettre Ino connaît déjà toute ma garde-robe ! Soit il l'a vue en vrai, soit il l'a vue sur mes post ! s'exclama Mai avec désespoir.
    — Et c'est vraiment grave ? demanda Maki.
    — C'est très grave.
    — Les garçons se souviennent pas de ce qu'on porte de toute façon.
    — Ino si, il se souvient de tout !
    — Yuji aussi. Surtout si c'était des tenues marquantes, il va s'en souvenir, ajouta Yuko.
    — C'est pas grave, on peut trouver de nouveaux assemblages à faire, déclara Nobara en se dirigeant vers sa chambre. T'as une idée de ce que tu voulais porter ?
    — Il me faut quelque chose de sexy, qui mette en valeur mes formes. Comme ça, s'il m'aime pas, il aura au moins envie de moi donc il me proposera de rester sexfriends.
    — Il t'aime, t'as pas besoin de faire ça tu sais, dit Yuko.
    — Permets moi d'en douter, répliqua Mai.
    Elle se dirigea vers son armoire alors que ses amies se laissaient tomber sur son lit, et commença à fouiller dedans. Elle en sortit trois ensembles de lingerie, tous transparents, seulement ornés de fleurs colorées cousues. Le premier était blanc, avec des pensées bleues et un tanga. Le second était composé d'un petit corset aux broderies noir, avec des roses sur les tétons, et d'une culotte échancrée. Le dernier était bordeau, avec des coques en forme de coquillage, et un porte-jarretelles. Mai se tourna vers ses amies et montra les trois ensemble, en les posant tour à tour sur elle.
    — Lequel je mets ?
    — Les trois sont incroyables, dit Nobara d'un air penseur.
    — Le trois est trop osé je trouve, c'est pas adapté à la situation, dit Maki.
    — Je suis d'accord. Je trouve que le bleu est le plus beau, il t'irait super bien, dit Yuko.
    — Très bien alors je mets celui-là, répondit Mai en jetant les autres sur son lit. Est-ce que je mets une culotte ?
    — Quoi ? s'exclama Maki en écarquillant les yeux. Comment ça « est-ce que je mets une culotte » ?
    — Parce que tu comptais pas en mettre ? demanda Nobara en éclatant de rire.
    — Quoi ?! Quand ? Avec Ino ? Mais non ! Mai tu mets pas de culottes ? s'écria Yuko d'un air incrédule.
    — En fait la culotte c'est assez optionnel quand je vais chez lui...
    — Quoi ! Pourquoi t'en mets pas ?!
    — Pour qu'il me mette ses doigts, répondit Mai comme si c'était évident.
    — Oh mon dieu..., dit Yuko d'un air choqué. Elle met pas de culotte...
    — Mai, tu ferais mieux d'en mettre une, c'est plus prudent dans la rue ! dit Nobara avec hilarité.
    — Ok, de toute façon je vais pas coucher avec lui, ou alors pas tout de suite, finit par dire Mai. Et qu'est-ce que je mets ? Une robe ? Un pantalon ? Une jupe ?
    — Un pantalon, tu vas attraper froid sinon, dit Maki.
    — Ça mettra pas en valeur mes fesses.
    — On s'en fiche Mai, tu vas lui parler en face-à-face, il va pas regarder tes fesses !
    — Si ! S'il me repousse, je me retournerai pour partir, il va regarder mes fesses, il se dira que je suis bonne quand même, et on couchera ensemble !
    — Mai, il s'en fiche de ton corps !
    — Pas du tout, il a dit qu'il était attiré physiquement par moi et j'aimerais bien que ça reste comme ça !
    — Il a dit ça au début de votre relation, maintenant ça a évolué, rappela Nobara. Il est pas juste attiré par ton physique, c'est bien plus que ça !
    — J'y crois pas, et si ça vous dérange pas, j'aimerais bien trouver une tenue sexy pour sortir.
    — Justement, ça me dérange. Tu dois pas tout miser là-dessus, t'es pas juste un corps Mai, et si Ino est pas capable de s'en rendre compte, c'est que c'est pas la bonne personne pour toi.
    — Je suis d'accord, dit Maki en croisant les bras sur sa poitrine. Et puis le corps ça change, alors il doit t'aimer pour ta personnalité, pas pour ce à quoi tu ressembles aujourd'hui.
    — Je vous ai pas demandé votre avis, répliqua Mai avec agacement. Je vous ai fait venir là pour avoir votre aide, pas pour que vous me fassiez une leçon de morale.
    Nobara et Maki s'échangèrent un regard en silence, et Mai se détourna d'elles pour sortir de sa chambre, et partir se changer dans la salle de bain. Elle ne prit pas la peine de fermer la porte entièrement, et retira le pyjama qu'elle portait pour mettre ses sous-vêtements. Elle sortit ensuite sa trousse de maquillage, et se pencha vers son miroir pour tracer son eye-liner sur ses yeux. Elle n'en voulait pas à ses amies d'essayer de la faire changer d'avis sur ses vêtements, c'était normal. Elle était la première à dire à ses amies de ne jamais s'habiller pour un homme car aucun n'en valait la peine. Elle répétait toujours à Yuko qu'elle n'avait pas à mettre de décolleté pour Yuji, et à Yuki qu'elle n'avait pas à s'habiller de manière « féminine » pour Choso. Elle refusait qu'une femme se réduise à un bout de tissu et à la manière dont il cachait ses seins. Elles valaient bien plus que cela, aucune d'elles ne devait s'enfermer dans des codes vestimentaires pour plaire à quelqu'un. Mai le savait et elle était prête à se battre tous les jours pour cela. Et pourtant... Elle n'arrivait pas à écouter ses propres paroles.    
    Il était tellement plus simple de se cacher que de s'assumer... Elle voulait suivre ses valeurs, vraiment, elle ne voulait pas se résumer à sa poitrine ou ses fesses... Mais en même temps, elle ne pouvait pas s'empêcher de le faire. C'était pitoyable, honteux, désespérant, mais elle le faisait malgré tout. C'était tout ce qu'elle avait... C'était la seule chose qu'elle était certaine de pouvoir faire aimer à Ino, et si cela suffisait pour qu'il continue à s'intéresser à elle, elle était prête à se mettre sur son trente-et-un tous les jours. Elle avait une personnalité difficile à apprécier, mais au moins elle avait son physique alors... Autant s'en servir.
    Quelques coups frappèrent à la porte, et Yuko entra, suivit de Nobara et Maki. Elle fit quelques pas hésitants vers elle, et déposa des vêtements sur son lavabo.
    — Je pense que ces vêtements sont parfaits pour l'occasion, dit-elle doucement. Un cache-cœur vert pour mettre ta poitrine et ton teint en valeur, et un pantalon pattes d'éléphant pour te faire des grandes jambes et des belles fesses, ça devrait convenir, non ?
    — Merci, répondit Mai avec un petit sourire.
    — Et si Ino t'aime pas, tu te déshabilles devant lui et tu lui demandes son avis sur ton string, ça lui remettra les idées en place, ajouta Maki.
    — S'il t'aime pas on te récupère et on fait un plan à quatre ensemble, dit Nobara en l'enlaçant par-derrière pour poser sa tête sur son épaule.
    — Ouais, on apprendra à Yuko à coucher comme ça, ajouta alors Maki.
    — Ça me va, je suis sûre que Yuji serait d'accord, en plus, renchérit Yuko avec sérieux.
    — On vérifiera que ça rentre bien en bas, dit alors Mai avec un clin d'œil.
    — Oh non, arrêtez c'est super gênant, gémit Yuko. Les filles vraiment je sais pas comme vous avez fait, parce que vraiment c'est... Ça fait vraiment peur...
    — Tu sais c'est pas si grand que ça, c'est la taille du gloss de Mai, dit Maki en lui montrant l'objet en question.
    — Parle pour ton ex oui, répliqua Mai en lui prenant le gloss pour en mettre sur ses lèvres. Ino fait bien plus que ça.
    — Ah oui ? Mais c'est déjà grand ça, dit Yuko d'un air inquiet.
    — Tu sais combien il a de centimètres Ino ? questionna curieusement Nobara.
    — Oui, je l'ai mesuré. Mais je vous dirais rien, je lui ai promis de garder le secret parce que c'est trop intime.
    — On est au-dessus des dix centimètres j'espère ?
    — Bien sûr qu'on est au-dessus, sinon on serait pas sexfriends, répliqua Mai d'un air entendu.
    Elle saisit une brume parfumée pour en répandre sur ses sous-vêtements, une précaution non-négligeable à prendre lorsqu'elle se rendait chez Ino, et commença à s'habiller. Ses amies la regardèrent faire, avant de l'aider à placer son cache-cœur de manière stratégique sur sa poitrine. Encore une fois, il fallait mettre toutes les chances de son côté. Les mains de Mai commençaient à être moites et la cadence de son cœur accélérait progressivement. C'était peut-être idiot, mais elle ne pouvait pas s'empêcher d'angoisser et de s'imaginer tous les scénarios possibles. Et s'il la repoussait ? Et s'il disait qu'il ne voulait que du sexe avec elle ? Et s'il était gêné au point de ne plus vouloir la voir ? Pire ! Et s'il l'aimait, mais qu'il lui demandait un couple libre ? S'il osait faire ça, elle le tuerait probablement à mains nues, et sans aucun remord.
    Non, mieux valait ne pas penser à cela, elle n'avait aucune envie de le tuer...
    — Il va falloir que j'y aille, j'ai pas envie de partir trop tard, dit-elle, le regard perdu sur son reflet dans le miroir derrière elle. Comment est-ce que je lui dis que je l'aime ?
    — Dis-lui que ses centimètres sont les seuls qui comptent pour toi, proposa Nobara avec sérieux.
    — Dis-lui juste que tu as des sentiments pour lui et que tu aimerais que votre relation évolue. Tu peux lui reparler de la proposition très ambiguë qu'il t'a faite, lui demander s'il parlait de se mettre en couple, et si lui aussi il t'aime de cette manière, répondit Yuko, répondit Yuko avec sérieux.
    — Et s'il m'aime pas ?
    — Tu lui dis que tu préfères arrêter de le voir. Ça sera mieux pour toi, tu pourras pas l'oublier et passer à autre chose si tu continues de coucher avec lui.
    — Génial, donc je vais probablement perdre mon ami et mon sexfriend, répondit Mai d'un ton cynique.
    — Tu le perdras pas, tout se passera bien, répondit Nobara d'un ton catégorique. Il t'a presque déjà demandé d'être en couple, s'il te repousse maintenant ça serait vraiment illogique. Et ça le rabaisserait au niveau des autres hommes.
    — Et dans ce cas-là, ça serait pas une perte de plus le voir, ajouta Maki en haussant les épaules.
    — On va dire ça, répondit Mai d'un air peu convaincu.
    Elle coiffa rapidement ses cheveux avant de les attacher en queue-de-cheval, aspergea de nouveau ses vêtements de brume, et sortit de la salle de bain. Elles partirent toutes dans l'entrée et enfilèrent leurs manteaux et leurs chaussures, avant de sortir dehors.
    — Vous rentrez aussi ? demanda Mai en fermant la porte de son appartement.
    — Non, on part enquêter sur le terrain, répondit Nobara.
    — Enquêter ? Sur qui ?
    — Je sais pas, Yuki nous a dit d'aller voir un garçon et de voir s'il traînait avec quelqu'un ou s'il agissait bizarrement.
    — Apparemment c'est un collègue de Yuji, mais on en sait pas plus, dit Yuko.
    — Je vois, répondit Mai avec surprise. Bonne chance alors.
    — À toi aussi, je suis sûre que ça va bien se passer. Tu nous appelles si ça se passe mal, et tu nous envoies un message si tout se passe bien et que tu décides de rester chez lui pour fêter votre couple, déclara Nobara alors qu'elles sortaient dans la rue.
    — Je vous appellerai si je meurs pas de honte entre temps, répondit Mai avec sarcasme.
    — Tu vas t'en sortir, on croit en toi. Si moi j'ai pu y arriver, tu y arriveras aussi, dit Yuko.
    — J'espère. À plus les filles, dit Mai en leur faisant un signe de main.
    — Bonne chance, dit Maki.
    — Et si ça marche pas, dis toi que tu trouveras un autre homme avec plus de centimètres ! lança Nobara.
    Mai ne put s'empêcher de rire en entendant cela, tandis que Yuko suppliait Nobara de ne pas parler de centimètres en pleine rue et aussi fort.
    Il faisait encore jour, bien que la lumière solaire disparaissait peu à peu, et que l'air se rafraîchissait davantage. Il neigeait, le sol de la rue était couvert de neige, les vitres des voitures étaient givrées, et des flocons volaient dans la lumière des réverbères, déjà allumés. Il faisait froid, Mai était déjà gelée et tremblait, d'autant plus qu'elle n'était pas très couverte. Elle resserra les pans de son manteau pour essayer de garder sa chaleur corporelle autour d'elle, et leva les yeux sur les immeubles autour d'elle. La plupart avait des guirlandes de Noël à leurs balcons, des sapins décorés apparaissaient à leurs fenêtres, et de la fausse neige avait été répandue sur leur vitre pour dessiner des formes, comme des cadeaux, des pères Noël ou encore des rennes. Mai n'avait pas pris la peine de décorer son appartement pour Noël, elle n'avait même pas de guirlandes. Elle ne prêtait pas vraiment attention à cette fête, et elle trouvait cela trop déprimant de décorer son appartement pour rester seule le soir de Noël.
    Noël était dans deux jours... Ce n'était peut-être pas une bonne idée de parler à Ino maintenant. S'il la repoussait, cela voudrait dire qu'ils ne passeraient pas Noël ensemble, c'était dommage. Mai s'arrêta sur le chemin, prête à faire demi-tour. Oui, il valait mieux ne rien dire maintenant. C'était mieux d'attendre le passage des fêtes, ce temps était déjà suffisamment déprimant, Mai n'avait pas envie de vivre en plus une peine de cœur. Et puis, maintenant qu'elle y pensait, elle devrait aussi attendre le nouvel an. Le nouvel an était une fête vraiment agréable ! C'était le moment de s'amuser avec ses amis, de danser toute la soirée, de s'endormir dans les bras de celui qu'on aime... Cette fête était idéale pour passer la soirée collée à Ino. Mai ne pouvait pas le perdre avant ça, elle voulait commencer la nouvelle année avec lui...
    Bien, alors elle rentrait ! Elle avait toute sa vie devant elle pour avouer ses sentiments !
    Non, elle ne pouvait pas faire ça, elle devait lui parler. Elle ne pouvait pas fuir éternellement, c'était lâche de repousser sans cesse le moment d'avouer ses sentiments. Elle était une femme forte, elle pouvait le faire. Yuko avait réussi à sortir avec Yuji alors qu'elle était timide et qu'elle pensait qu'il ne l'aimait pas ! Elle pouvait le faire aussi !
    Non, elle ne pouvait pas, c'était trop lui en demander. Elle avait toute sa vie devant elle pour le faire, alors pourquoi ne pouvait-elle pas attendre le passage des fêtes ?
    Parce qu'elle venait parler, et maintenant ! Elle pouvait le faire ! Si elle ne le faisait pas maintenant, elle trouverait toujours des excuses !
    Oui mais, c'était pour la bonne cause... Attendre quelques jours n'allait pas la tuer... Peut-être même que ça allait l'aider...
    Un miaulement retentit lorsqu'elle fit demi-tour pour rentrer chez elle, et Mai sursauta. Elle se tourna et inspecta la rue du regard, pour chercher le chat qui venait de miauler. Elle connaissait ce miaulement, elle était presque sûre de l'avoir déjà entendu, elle pourrait le reconnaître entre mille. Un second miaulement se fit entendre, et Mai traversa la route pour se rapprocher du bruit. Il y avait des traces de pattes dans la neige, signe qu'un chat venait de passer par là. Impatiente, elle tourna à l'angle d'un mur et trottina rapidement, suivant les traces de pattes, avant d'apercevoir une fourrure orange courir vers elle.
    — Tweedle ! s'exclama-t-elle en s'accroupissant devant lui. Mais qu'est-ce que tu fais là !
    Le chat miaula une nouvelle fois et frotta sa tête à ses genoux, avant que Mai ne le soulève pour le serrer contre elle. Elle vérifia le collier qu'il portait, et vit que « Tweedledum » était inscrit dessus. C'était bien le chat d'Ino ! Son pelage était mouillé et des flocons se mélangeaient à ses poils, mais il avait l'air d'aller bien. Il n'était pas blessé, et il n'avait pas l'air plus affamé que cela, peut-être qu'il avait trouvé de quoi manger. Le revoilà enfin ! Mai commençait à s'inquiéter pour lui, il avait disparu depuis plusieurs jours et personne ne l'avait aperçu ! Mais que faisait-il ici ? S'était-il perdu ? Sûrement, personne n'avait l'air de l'avoir pris et de lui avoir fait du mal.
    — T'étais passé où toi ? demanda Mai en caressant sa tête. Tu sais que ton papa était super inquiet ?
    Tweedledum lui répondit par un miaulement, et frotta sa tête contre sa poitrine en se mettant à ronronner.
    — Ben voyons, t'es bien comme ton père toi. Je vais te ramener à la maison et tu seras privé de sortie, ça t'apprendra à fuguer, dit Mai en se relevant, tout en le gardant dans ses bras.
    — Mai ! appela soudain quelqu'un.
    Le cri résonna avec tant de force dans la rue que Mai se figea, pétrifiée par la voix qui venait de l'appeler, et le vent cessa de siffler. La voix qui l'avait appelée était grave, rauque, remplie de fausses notes de gaieté. Mai déglutit difficilement, elle resserra ses bras autour de Tweedledum, qui continuait de ronronner contre elle, sans s'en rendre compte, et tendit l'oreille. La personne qui l'avait appelée ne devait être qu'à quelques mètres d'elle, elle pouvait presque déjà entendre sa respiration. Elle sentait d'ici que sa carrure était imposante et qu'il devait faire au moins deux têtes de plus qu'elle. Ses pas étaient lourds, la neige craquait sous ses chaussures, comme s'il voulait à tout prix laisser une trace de son passage dedans. Sa simple présence suffisait à rendre l'air oppressant et à donner l'impression que la rue était devenue très étroite.
    — Qu'est-ce que tu fais ici ? demanda l'homme derrière elle.
    — Je devrais te retourner la question, répondit Mai d'une voix froide, en se tournant vers lui pour lui faire face.
    — Tu n'as pas l'air très heureuse de voir ton cousin dis-moi. Ça fait des mois qu'on ne s'est plus croisé pourtant.
    — Aucune femme n'est heureuse de te croiser Naoya, répliqua Mai d'un ton sec. Qu'est-ce que tu veux ?
    Comme à son habitude, Naoya ne répondit pas et se contenta de sourire d'un air mystérieux, ce qui agaça encore plus Mai. Pourquoi fallait-il qu'elle le croise maintenant ? C'était tout sauf le moment de discuter avec lui. Il n'avait pas changé en plus de cela, ce qui agaça Mai. Il avait toujours cette même façon de la regarder avec condescendance, comme si elle n'était qu'une enfant en pleine crise d'adolescence. Il se tenait droit, le menton légèrement relevé, ses cheveux impeccablement coiffés, et son costume taillé sur mesure qui montrait quelle position sociale il occupait. Son apparence suffisait à énerver Mai, il respirait l'arrogance, la richesse et la misogynie. Qu'est-ce qu'il pouvait bien faire ici ? Naoya était censé vivre à l'autre bout de Tokyo, c'était bien pour ça que Mai habitait ici. Il était peut-être là pour le travail... Ou bien pour fouiner, ce qui était plus probable, puisque c'était sa principale occupation. Naoya passait son temps à se mêler des affaires de tout le monde, il avait même fait des recherches pour savoir où habitaient Mai, Maki et Megumi. Il était incapable de rester à sa place, s'en était presque maladif.
    — C'est ton chat ? questionna Naoya en tendant la main vers Tweedledum. Je croyais que tu n'aimais pas les animaux ?
    — Le touche pas, répondit Mai en reculant. C'est pas mon chat, j'allais le rapporter à quelqu'un.
    — Très bien, je vais t'accompagner alors.
    — Je t'ai rien demandé et j'ai aucune envie de rester avec toi.
    — C'est pas prudent pour une femme de se balader seule à cette heure-là, et puis tu as vu comment tu es habillée ? fit remarquer Naoya en la regardant de bas en haut.
    — C'est de rester avec toi qui n'est pas prudent pour une femme.
    — Ce n'est pas plus imprudent que de rester avec toi pour un homme, répliqua Naoya avec calme.
    — Moi au moins je sais ce qu'est le respect et le consentement, dit sèchement Mai, en se détournant de lui pour s'en aller.
    — Et à qui appartient ce chat ? demanda Naoya en la suivant.
    — Une amie.
    — Qui s'appelle comment ?
    — Mêle-toi de ton cul. Tu la connais pas ? Bizarre puisque tu mets ton nez partout tout le temps.
    — Ne me parle pas comme ça, soit respectueuse, dit Naoya d'un ton dur.
    — Et toi arrête de te mêler de ma vie, je te signale que je suis plus dans le clan, je te dois rien. Pourquoi est-ce que tu passes ton temps à t'occuper de nous ? T'as pas de vie ou quoi ? Parce que je-
    — Fais attention à ce que tu me dis Mai, coupa Naoya en l'attrapant soudainement par le bras. J'ai toujours été patient avec toi, mais si tu me manques de respect, je vais devoir te remettre à ta place, et crois-moi tu n'en as aucune envie.
    — C'est quoi ton problème ! répliqua Mai sans se débattre. Tu me fais pas peur Naoya, et si tu me lâches pas dans deux secondes, je te coupe la main.
    — Mon problème c'est vous, répondit Naoya en la tirant vers lui, ses ongles enfoncés dans sa chair.
    — Qu'est-ce que tu veux dire ? Qui ça « vous » ?
    — Toi qui sors comme une pute, Maki qui embrasse des filles en pleine rue, et Megumi qui se tape un homme ? Je peux savoir à quoi vous jouez ? murmura Naoya d'un air menaçant. Vous vous croyez libre de faire ce que vous voulez ?
    — Je vois pas de quoi tu parles, répondit Mai en essayant de se reculer. Et tu sais quand on est homophobe à ce point, c'est qu'on assume pas sa vraie nature. Tu aimes les hommes, c'est ça ? Tu peux le dire, on jugera pas-
    Naoya resserra sa poigne sur son bras, si fort qu'une marque rouge apparut sur sa peau, et la tira de force avec lui sans lui laisser le temps de terminer. Mai gémit de douleur et tenta de se débattre, tout en maintenant Tweedledum contre elle, mais Naoya ne la laissa pas s'échapper. Il la traîna dans la rue à toute vitesse, avant de la conduire dans une ruelle, et de la pousser contre un mur. Mai retint une grimace de douleur et garda son air provocateur, elle se baissa avec calme pour poser Tweedledum dans la neige, en priant pour qu'il retourne auprès d'Ino, et se releva. Elle plongea son regard noir dans celui de Naoya sans laisser la peur faire trembler ses iris, et croisa les bras sur sa poitrine. Elle le connaissait, elle savait très bien qu'il voulait l'intimider, mais elle n'allait pas se laisser faire. Elle n'avait pas peur de lui et de ce qu'il pouvait lui faire, et Naoya la sous-estimait, il n'avait aucune idée de ce qu'elle pouvait faire pour se défendre.
    — Si tu lèves la main sur moi ou que tu me touches, je te jure que je passerais le reste de ma vie à tout faire pour me venger, que j'engagerais une femme pour qu'elle t'épouse, et que je la paierais pour qu'elle te couple les couilles au sécateur en pleine lune de miel, menaça Mai d'un ton glacial.
    — Pour te toucher il faudrait déjà que tu sois désirable, mais à part ressembler à une pute, tu ne fais pas grand-chose, répliqua Naoya près de son visage.
    — Je t'en supplie Naoya, innove un peu dans les insultes. Si tu veux me rabaisser, compare-moi à quelque chose d'humiliant, pas à des femmes qui ont bien plus de couilles que toi. Elles au moins elles assument de sucer leurs clients, alors que toi...
    — Ne joue pas à ça avec moi Mai, tu sais très bien que tu vas perdre à ce jeu. Je t'interdis de me parler comme ça.
    — Perdre ? Contre toi ? Toi qui trébuchais de peur devant Toji ? Toi qui est original au point de m'insulter de pute ? Laisse-moi rire, répondit Mai avec un sourire. Sérieusement, on t'a déjà dit que tu ressemblais à un ado en colère ? Ça fait pitié.
    — C'était pas une insulte, c'est un fait. Non ? répondit Naoya en penchant la tête sur le côté.
    — Non pas du tout, j'ai jamais utilisé mon corps, pas comme toi qui t'es senti obligé de t'ouvrir un compte only fan pour poster tes nudes parce que personne ne veut les voir en vrai.
    — Je me trompe ? Pourtant j'étais presque sûr que tu te faisais baiser tous les soirs par le voisin de Megumi, répondit Naoya sans tenir compte de sa remarque. Comment il s'appelle déjà ? Takuma ?
    — Je vois pas de qui tu parles, répondit Mai en haussant les sourcils. Et je me fais baiser par personne, pas comme toi qui te fais baiser par tes concurrents quand-
    — Fais-moi encore une remarque comme ça et je te jure que je te tue ici et maintenant, coupa Naoya en prenant soudain son visage entre ses mains.
    — Vas-y, ça me dérange pas. Il y aura tes empreintes sur moi, Megumi aura aucun mal à prouver que c'est toi qui as fait ça, répondit Mai, qui était forcée de lever un peu plus la tête vers lui.
    — J'ai fait disparaître plus d'un corps, et j'aurais aucun mal à m'occuper de toi. Mais si tu veux pas qu'on en arrive là, tu vas gentiment m'écouter et faire ce que je te dis, murmura Naoya.
    Il serra un peu plus sa main sur sa mâchoire, écrasant ses joues rougies par le froid, et fit un pas vers elle. Son torse frôla le sien et son souffle s'écrasa son visage, envahissant alors ses poumons. Il était chaud, alcoolisé, et il donna la nausée à Mai. Mais elle ne dit rien, et se contenta de fixer Naoya avec fureur sans essayer de le repousser. Évidemment, il savait pour elle et Ino. Il avait dû faire ses recherches, surveiller leurs réseaux, ou même les suivre. Mai n'était pas surprise, elle savait que ce n'était qu'une question de temps avant qu'il ne le découvre.
    — Je peux pas t'écouter, ton haleine me donne envie de vomir, répondit-elle dans un souffle.
    — Et le sperme que t'as dans la bouche tous les soirs, ça te donne pas envie de vomir ? répondit Naoya en écrasant ses joues.     
    — T'es jaloux ou quoi ? répliqua Mai, qui peinait à articuler correctement.
    — Jaloux d'une salope comme toi ? C'est difficile à faire...
    — On dirait vraiment que t'es jaloux, répondit Mai d'un air insolent.
    — Toi et Maki vous avez toujours ouvert vos cuisses à n'importe qui et je vous ai laissé faire, mais si jamais vous portez atteinte à la réputation du clan, je m'arrangerais pour vous faire disparaître. Je t'avais trouvé de très bons partis et ils t'auraient permis de réintégrer le clan Zenin, alors pourquoi est-ce que tu préfères te faire sauter par un cascadeur ?
    — Peut-être parce qu'il me saute bien.
    — Ah oui ? Et qu'est-ce qu'il te fait ?
    — Quoi ?
    — Qu'est-ce qu'il te fait pour te sauter aussi bien ? Je suppose qu'il te fait ce que toi tu veux ? Il te met sa langue, c'est ça ? demanda Naoya en la forçant à lever un peu plus son visage vers lui. Il te met combien de doigts ?
    — Quoi ?!
    — Allez réponds-moi. Deux ? Trois ? Toute sa main ?
    — Arrête, t'es dégueulasse, dit Mai en tentant de l'écarter d'elle.
    — Si tu ne veux pas le dire c'est qu'il ne doit pas être exceptionnel. Tu mérites plus ça Mai, dit Naoya en passant son pouce sur sa joue.
    — Il faut croire que je préfère les mecs médiocre, répondit Mai dans un murmure.
    — Me dis pas que tu es amoureuse, dit Naoya avec un rire moqueur.
    — Qu'est-ce que ça peut te faire ?
    — Non... Vraiment ? s'exclama Naoya en éclatant de rire. Parce que tu penses vraiment avoir une chance avec lui ? Oh Mai... Je savais déjà que t'étais pas très intelligente, mais je pensais pas que c'était à ce point...
    — Je t'ai rien demandé, répondit Mai, en réussissant enfin à le repousser.
    — Mai, aucun homme ne sortirait avec toi sans être payé, dit Naoya en continuant de rire. Regarde-toi, tu t'habilles comme une traînée, toi aussi tu sais que c'est le seul moyen d'attirer l'attention de quelqu'un !
    — Moi au moins je suis pas une connasse.
    — Non, pas vraiment. Mais t'es qu'une maquilleuse qui a même pas été foutue d'obtenir ses diplômes. T'es dyslexique, dyscalculique, myope, et t'as pas ton permis de conduire. Tu fais jamais le ménage, tu sais même pas cuire du riz, regarde-toi Mai, c'est ça être une femme pour toi ? lança Naoya d'un air dédaigneux. Tu te respectes pas, tu sais même pas t'habiller et prendre soin de toi, c'est le minimum des choses pour une femme. Ouvrir les cuisses c'est pas toujours suffisant tu sais... À mon qu'il te paye pour que tu le suces ?
    — Qu'il le fasse ou non, qu'est-ce que ça peut te faire ? répondit Mai d'une voix moins assurée.
    — Honnêtement ? Ça me ferait mal de savoir que tu es tombée aussi bas, répondit Naoya en revenant vers elle. Pour Maki c'est différent, ça m'étonne pas de savoir qu'elle couche avec des femmes, elle en a toujours fait qu'à sa tête. Et Megumi vit avec les deux plus gros pédé que j'ai jamais connus, alors je m'attendais pas à grand-chose avec lui. Mais toi tu étais gentille, tu te sentais bien au clan. Pourquoi ne pas revenir avec nous ?
    — Ah ça y est, j'ai compris. Toutes les femmes du clan sont parties alors tu essayes de récupérer les anciennes, dit Mai avec un sourire.
    — Pas du tout, j'essaye juste de t'aider à te remettre sur le droit chemin. Tu pourrais revenir et rencontrer des personnes, te trouver un mari convenable... À moins qu'il t'est encore mise enceinte ?
    — Quoi ? demanda Mai en fronçant les sourcils. Comment ça « encore » ?
    — Je sais qu'il t'a mis enceinte et que tu as avorté, déclara Naoya.
    — Non je...
    — C'est pas la peine de nier, je t'ai vu à l'hôpital et je suis allé voir ton médecin. Ça me déçoit Mai, ça me déçoit vraiment, soupira Naoya d'un air accablé. Tu as tué ton bébé...
    — Non, c'était pas un bébé, dit Mai en secouant la tête.
    — Il était dans ton ventre, il ne demandait qu'à vivre, dit Naoya en posant sa main sous son manteau pour la poser sur son ventre. Imagine qu'il soit là, au chaud dans ton ventre, prêt à t'aimer et à remplir ta vie de bonheur... Tu peux presque le sentir, imaginer son cœur qui bat avec le tien, les mouvements de son corps... Il ne demandait qu'à survivre...
    Mai resta immobile, incapable de le repousser. Elle baissa les yeux sur sa main et la regarda couvrir son ventre, comme si elle cherchait à protéger le bébé qui aurait dû grandir en elle. Elle avait l'impression de ne plus avoir de salive dans sa bouche, elle ne réussissait pas à parler, elle était à court d'arguments. Le froid qui l'envahissait la paralysait, ses lèvres tremblaient, et ses yeux brillaient étrangement. Comment Naoya pouvait-il savoir qu'elle avait avorté ? Comment avait-il pu la voir ? Les médecins n'étaient-ils pas tenus au secret médical ? L'avait-il répété au reste du clan ? Avait-il eu accès à son dossier médical ? Savait-il qu'elle était hyperfertile ? Savait-il qu'elle avait déjà avorté ? Non, ce n'était pas possible, il ne pouvait pas le savoir... Il n'avait pas le droit d'enquêter de cette manière sur elle, elle ne faisait plus partie du clan, elle avait sa propre vie, il n'avait pas le droit de s'en mêler ainsi. Elle ne lui devait aucun compte ! Il n'avait pas le droit d'utiliser cette corde sensible, c'était trop lâche, il n'avait pas le droit de faire cela...
    Et Ino alors ? Naoya savait qu'ils se connaissaient depuis le début ? Savait-il comment il s'était rencontré ? Avait-il enquêté sur Ino et sur sa vie ? Savait-il qu'il avait vandalisé sa voiture ? Le cœur de Mai se mit à s'accélérer à cette pensée, et sa poitrine commença à se soulever rapidement pour chercher son air. Et si Naoya s'en prenait à lui ? Et s'il commençait à se mêler de sa vie aussi ? Et s'il lui attirait des problèmes ? Et s'il se débrouillait pour lui faire perdre son travail, ou pire, pour lui faire tout perdre ? Il en était capable, il avait beaucoup d'influence, il obtenait toujours ce qu'il voulait...
    Non, il ne fallait pas qu'elle commence à angoisser pour cela, pour l'instant Naoya n'avait rien fait, et peut-être qu'il n'avait pas l'intention de s'en prendre à lui. Il n'avait aucune raison d'agir contre eux, Mai n'était plus associée au clan et personne ne connaissait Ino, alors ils étaient libres de faire ce qu'ils voulaient... Naoya n'avait pas de raison de s'en prendre à eux, il essayait juste de faire pression sur Mai pour la forcer à revenir dans le clan et reprendre le contrôle sur sa vie...
    — Tu n'as pas été gâtée par la vie, tu n'as aucun don, dit Naoya en continuant de caresser son ventre. Mais au moins tu sais faire des enfants, et c'est le plus important, non ? En tant que femme, c'est ton rôle de faire ça.
    — Arrête...
    — Tu devrais revenir au clan, te trouver un mari, et lui faire des enfants, parce que c'est ce que tu sais faire de mieux. Sers à quelque chose une fois dans ta vie et fais nous d'autre descendants, tu sais qu'on en a besoin.
    — Non, arrête, me touche pas.
    — C'est ta seule option Mai, tu le sais, continua Naoya en la prenant par la taille pour murmurer à son oreille. Et je sais qu'un jour, tu reviendras en rampant vers nous pour nous supplier de te reprendre. Parce que c'est tout ce que tu vaux, il n'y a que le clan qui peut te faire survivre. Qu'est-ce que tu crois ? Que tu vas rester avec ce garçon, que vous serez heureux ensemble, que vous ferez votre vie ensemble ? Tu crois qu'il va t'épouser et te faire des enfants, qu'il va rester avec toi pour les élever ? Mais toi, qu'est-ce que tu as à lui apporter ? T'es même pas capable de lui préparer un petit-déjeuner, qu'est-ce que tu espères ? Tu crois que coucher avec lui ça va lui suffire ? Tu crois qu'aller chez lui habillée comme ça suffira à le garder ? Tu crois qu'ouvrir les cuisses suffira pour rester avec lui ? Réveille-toi, c'est pas ça la vie Mai. Aujourd'hui il couche peut-être avec toi, mais un jour il rencontrera une autre fille, plus jeune, avec des plus gros seins, des plus grosses fesses, et il t'oubliera, parce que tu compteras jamais vraiment pour lui. Tu sais ce que t'es pour lui ? Juste un trou dans lequel se vider. Rien d'autre. Tu vas finir seule et tu le sais, parce que tu es incapable de garder un homme dans ta vie, tu es incapable de faire en sorte qu'il t'aime. C'est pour ça que tu te caches derrière ces couches de vêtements, derrière ce maquillage, derrière cette attitude. Parce que tu sais que tu n'as rien d'autre, que tu ne vaux rien, et que sans nous, tu finiras seule. Alors arrête de faire ta tête de mule et reviens dans le clan tant qu'il est encore temps. Ok ?
    Une larme tomba sur la joue de Mai, mais elle ne réussit pas à répondre.
    — Réponds-moi. Tu vas revenir ? demanda Naoya d'une voix plus sévère.
    — Arrête, je t'ai déjà dit non, murmura Mai en essayant de le repousser.
    — Tu vas finir par revenir, et Maki aussi, je le sais.
    — Va te faire foutre Naoya.
    — C'est ça, continue comme ça. Je vous connais, vous allez...
    — Hé te voilà ! lança soudain quelqu'un au bout de la ruelle. Ça fait dix minutes que je te cherche !
    Des pas firent craquer la neige, et Mai et Naoya tournèrent vivement la tête pour voir qui les avait interrompus. Une jeune femme blonde trottina vers eux avec un sourire, guidée par Tweedledum qui courait devant elle, et s'arrêta à leur hauteur. Elle enroula son bras autour de celui de Mai, obligeant Naoya à s'écarter, et la tira vers elle avec une force surprenante. Mai la regarda faire sans comprendre, incapable de reconnaître son visage. Elle était plus petite qu'elle, elle avait de longs cheveux blonds qui tombaient en cascade sur ses épaules, et des yeux ambrés. Mai n'avait aucune idée de qui était cette jeune femme !
    — Vous vous connaissez ? demanda Naoya sans comprendre.
    — Oui, on est amies, dit la jeune femme en haussant un sourcil. On avait rendez-vous ensemble.
    — Tu la connais ? répéta Naoya en lançant un regard perçant à Mai.
    — Arrête de te mêler de ma vie, répondit simplement Mai en se penchant pour reprendre Tweedledum dans ses bras. Et t'approche plus de moi.
    — Comme tu voudras, répondit Naoya.
    Il lui fit un dernier sourire entendu, et la jeune femme qui serrait le bras de Mai la tira vers elle pour s'en aller. Mai se laissa faire et se fit violence pour ne pas se retourner et vérifier que Naoya ne les suivait pas. Elle ne connaissait pas le moins du monde cette jeune femme, mais elle lui était reconnaissante de l'avoir aidée à se sortir de là, elle n'aurait pas réussi seule. Tweedledum avait dû sentir que Naoya représentait un danger pour elle, alors il avait dû partir chercher quelqu'un pour l'aider. Ce chat était un véritable cadeau du ciel, sans lui Mai serait sûrement toujours coincée avec Naoya. Elle avait bien cru qu'elle ne s'en sortirait pas...
    Personne ne parla pendant un moment, la jeune femme marchait vite et ne semblait pas très rassurée, et Mai avait du mal à retrouver ses esprits. Elle tremblait toujours de peur et de froid, et elle avait encore du mal à respirer, son cœur battait à tout rompre dans sa poitrine et elle avait la gorge sèche. Les paroles de Naoya résonnaient déjà dans son esprit, elles tournaient en boucle, comme un CD rayé. Naoya envahissait son esprit, il parlait de plus en plus fort, d'une voix de plus en plus moqueuse, et la sensation de sa main sur son ventre ne la quittait pas. Elle se sentait sale, comme si elle était tombée dans un bain de boue. Elle avait besoin de se laver, de s'enfermer dans sa salle de bain, de plonger dans un bain et de ne pas en ressortir avant une éternité. Elle voulait que son corps se couvre d'eau chaude, qu'il devienne moite, que l'eau frappe sa peau jusqu'à ce qu'elle ne la sente plus. Elle voulait enfouir sa tête sous l'eau, arrêter de respirer, ne plus rien entendre, et ne plus penser à rien. Elle avait besoin d'oublier tout ça.
    — Je suis désolée, j'ai vu qu'il te collait et que tu n'avais pas l'air bien, alors je me suis dit que tu avais peut-être besoin d'aide, s'excusa la jeune femme au bout d'un moment.
    — Merci d'être intervenue, répondit Mai d'une voix perdue. Comment est-ce que tu m'as trouvé ?
    — J'ai vu ton chat dans la rue, il arrêtait pas de miauler et j'avais l'impression qu'il voulait me montrer quelque chose, alors je l'ai suivi. Tu veux discuter ?
    — Pas vraiment, et il m'a rien fait, ça va, dit Mai en secouant la tête.
    — Tu le connaissais ?
    — Oui, c'est quelqu'un de ma famille. C'est mon cousin en fait...
    — Ton... Cousin ? Mais il... Il était très proche de toi...
    — Il est toujours comme ça, il se colle à toutes les femmes qu'il voit, dit Mai en essuyant sa joue humide. Mais ça va, t'inquiète pas.
    — Ok. Tu veux que je t'accompagne quelque part ?
    — Non, je vais rentrer chez moi, ça va aller, dit Mai avec un reniflement.
    — Tu es sûre ? Tu veux que j'appelle mon copain pour qu'il te ramène en moto ? insista la jeune femme d'un air inquiet.
    — Non, vraiment ça va. Est-ce que tu... Tu peux me rendre un service ?
    — Oui bien sûr !
    — Tu peux amener ce chat à son propriétaire ? C'est pas le mien, il était perdu et je sais à qui il appartient.
    — Oh oui, d'accord. À qui je dois le rendre ?
    — Son propriétaire s'appelle Ino, dit Mai en lui tendant Tweedledum. Il habite juste à côté, tu vas jusqu'au bout de la rue, ensuite tu tournes à gauche, et ça sera l'immeuble avec une cour. Il habite au sixième étage, c'est la porte à droite, et il y a un interphone pour entrer.
    — Ino, dans l'immeuble avec une cour, sixième étage, porte à droite, répéta la jeune femme.
    — Il ressemble à ça, dit Mai en lui montrant une photo de lui. Et s'il est pas là, tu peux laisser le chat à son voisin ou à celle d'en dessous.
    — D'accord.
    — Et... Lui dis pas que c'est moi qui l'ai trouvé, ni ce que t'as vu. Dis lui que c'est toi qui l'as trouvé.
    — Euh, d'accord... C'est ton petit ami ? demanda la jeune femme.
    — Non c'est... C'est pas mon petit ami, c'est juste un ami.
    — Parce que tu as l'air d'avoir... Beaucoup de photos de lui, dit la jeune femme avec un petit sourire.
    — Oui mais... Y'a rien entre nous, on est pas fait pour être ensemble de toute façon. C'est compliqué... Enfin je vais pas commencer à te raconter ma vie.
    — Ça me dérangerait pas si t'en as besoin. Et si tu veux parler de ce qu'il s'est passé, on peut aussi le faire.
    — C'est gentil mais j'ai juste envie de rentrer chez moi. Merci encore d'être venue me chercher et de déposer le chat.
    — De rien, c'est normal de s'entraider, répondit la jeune femme avec un sourire. Rentre bien, j'espère que ça ira pour toi.
    Mai lui répondit par un sourire, et se détourna d'elle pour s'en aller.
    Confier Tweedledum a une inconnue n'était pas la meilleure idée, Ino risquait de lui en vouloir, mais tant pis. Mai ne pouvait pas aller le voir. C'était ridicule... Naoya avait raison, elle-même savait qu'un jour Ino finirait par la remplacer. Elle n'avait rien à lui offrir... Comment avait-elle pu envisager de lui avouer ses sentiments ? C'était stupide...
    Elle ferait mieux de ne plus le voir, leur histoire était vouée à l'échec...

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Désolée de poster tardivement, mais je suis en pleine révision donc mes cours passent en priorité :)
J'espère que le chapitre vous a plu (moi ça m'a tendu de l'écrire, vraiment les Naoya je peux pas). En vrai je suis contente de ce chapitre, j'étais à l'aise en l'écrivant, malgré N le maudit, et j'avais hâte d'arriver aux chapitres spéciaux Takumai 🎀

À mercredi !

Insta Jujutsu KaisenWhere stories live. Discover now