Montez !

Chapitre 32 - Les pieds dans le plat !

- Mais non t'es pas une autruche ! Mais ce que je veux dire c'est que pour avancer, le docteur à la télé, il l'avait dit là sur France 5, pour avancer dans la vie, faut affronter..comment il disait déjà ..faut affronter ses peurs ! Non pas ses peurs ! Ahh ! Comment ils disait déjà !?

Et Papou, qui jusque là était muet, ouvrit la bouche et émit des sons :

- ses démons !

- ah oui c'est ça ! Ses démons !repartit la grand mère qui avait dû boire 12L de café pour tenir une telle logorrhée ! Voilà oui ! Ses démons ! Il faut faire face à ses démons qu'il disait le docteur je sais plus comment il s'appelle d'ailleurs !

François tenta une diversion :

- Mamou ! Ton gâteau est super bon ! Et je voulais te dire que...

- oui merci ! Et donc mon petit François il faut faire table rase du passé ! C'est ça qu'il voulait dire le docteur machin chose sur France 5 ! Tu comprends ? C'est pour ton bien que je te dis ça.

Le grand père profita d'une seconde de répit pour placer :

- Michel Cymès ! Le Docteur c'est Michel Cymès !

- Ah oui Michel Cymès c'est ça ! Reprit Mamou qui ne faisait qu'une micro pause verbale.
Merci mon chéri t'es un amour ! Moi j'oublie tout avec l'âge ! C'est fou ! Après c'est bien des fois d'oublier des choses ! Hein mon François ! Si tu arrives à oublier tous tes petits malheurs tu devrais aller mieux ! Oh moi aussi j'aimerais bien oublier plein de choses qui m'ont fait souffrir ! Mon père il était dur avec nous ! On osait rien dire ! Mais bon c'est comme ça ! On en est pas mort pour autant hein ?

Elle plongea dans ses pensées...et là....incroyablement inattendu...un grand silence profond dans la pièce, juste le bruit des cuillers qui cognent les assiettes pour découper des morceaux de gâteau.
Tout le monde était abasourdi et à demi hypnotisé par ce monologue assourdissant, ce mitraillage de mots continu, cet flot incessant de phrases. La grand-mère avait cette capacité presque inhumaine de tenir le monologue le plus long du monde, et de passer d'un sujet à l'autre comme un cabri sautillant gaiement de pierre en pierre au dessus d'un ruisseau. C'était remarquable le souffle qu'elle avait pour enchaîner toutes ces locutions, et fabuleux cette façon de passer du coq à l'âne de façon si naturelle.

Après cette petite minute de calme, de repos, de silence, de paix intérieure pour les convives, la grand mère relança la machine.

- Ben alors vous dites rien ? Vous êtes muets ? Vous me racontez rien ? Je vais quand même pas parler toute seule toute la soirée !

Des regards entendus se croisèrent...

François prit l'initiative :

- Mamou, je comprends que tu t'inquiètes pour moi mais ...c'est pour ça que je suis pas venu depuis tout ce temps. Je vous cause que des soucis !

- Mais non mon petit François ! Dis pas ça ! On est ravi de te recevoir à la maison ! Mais c'est juste que nous, tu sais, si on peut t'aider, on le fera ! Les yeux fermés ! Enfin on aura pas les yeux complètement fermés non plus ! Hé hé !

Mamou était pleine d'humour.

- oui ! donc ! c'est pas un problème ! Y a pas de problème ! Y a que des solutions ! C'est pas Michel Cymès encore qui disait ça ?

Papou plaça mollement et avec un léger sourire :

- non ! Je crois pas non !

- oui bon c'est pas grave qui a dit ça ! L'important c'est ce qui est dit ! Donc oui mon Fran-Fran, il faut faire face ! Affronter l'ennemi intérieure ! Se battre ! Pas se cacher comme la tortue !