-Tu veux être Juliette Blanchard 2.0.

-Exactement ! Et Juliette Blanchard 2.0 n'a pas envie de se laisser dicter sa vie par des cons !

-Bien dit ça !

-Tu te cherches donc un riche mari pour subvenir à tes besoins jusqu'à la fin de tes jours pendant que tu te prélasses au bord d'une piscine ?

Je ne pensais pas que le sujet des amours arriverait aussi vite. Je me cachais une nouvelle fois derrière mon verre, ce qui me valu un coup de coude de la part de Gèn.

-Tu as déjà un riche prétendant ?

-Tu vas pas faire ta cachotière avec tes copines ?

-J'ai revu Len. Annonçais-je timidement tout en me resservant du vin pour éviter leurs regards.

-Quoi ?

-J'ai revu Len.

La stupéfaction sur leurs visages m'aurait fait beaucoup rire si je n'appréhendais pas autant leurs réactions. Eugénie fut la première à s'en remettre.

-Ici ? A Paris ?

-Non en Bretagne, je suis allée le voir.

-Quand ?

-Il y a quelques jours, je suis rentrée ce matin.

-Pourquoi ?

-On ne s'est pas bien quittés, on était tous les deux pris dans un tourbillon qui a fait qu'on a fini par tout gâcher en se sabotant. Je suis passée plusieurs fois à son appart pour discuter mais il ne répondait pas donc je lui ai envoyé un message et il m'a dit que je pouvais venir en Bretagne, ce que j'ai fais.

-Vous avez eu besoin de plusieurs jours pour discuter ?

-Je suis arrivée dans la soirée le premier jour. Je me suis sentie conne de débarquer comme ça chez ses parents sauf que ce n'est plus chez ses parents parce qu'il a racheté leur maison. J'ai encore plus flippé d'être toute seule avec lui mais j'ai été tellement surprise de le voir comme ça.

-Comment ?

-On se connait par cœur lui et moi mais pour la première fois j'avais devant moi un Lénaïc complètement différent. Il ne m'a jamais paru aussi beau, aussi... authentique je dirais. Il s'est enfin remis en question sur son hygiène de vie, sur le sens qu'il donnait à sa vie, sur ses priorités. Je l'ai toujours connu faisant passer les autres avant lui et là il prend soin de lui, il se soigne, il prend le temps de se remettre loin des garçons.

Je ne voulais pas non plus leur faire un déballage complet des épreuves de Len qu'il ne partageait même pas avec ses meilleurs amis.

-On a vraiment pu parler, avec une sincérité plus profonde qu'on ait jamais eu. Toute la rancœur, toute la colère de nos derniers mois n'était plus présente, il y avait beaucoup de culpabilité, de regrets, de remords, on a beaucoup pleuré en vidant nos sacs. Et même si c'était dur de tout aplanir, je me sentais super bien avec lui là-bas, loin de Paris, loin de tout.

-Est-ce que tu étais bien parce que tu n'étais plus à Paris ou parce que tu étais avec lui ?

Les filles avaient chacune le coude sur la table avec le menton posé dans leur main et un froncement de sourcils trahissant leur concentration. Je pensais devoir faire face à la police anti ex mais me trouvait face à la brigade des introspections.

-Les deux. C'était la rencontre de Juliette 2.0 et de Lénaïc 2.0, les versions adulte stables et responsables des gamins qu'on était. C'était ridicule mais j'avais des papillons dans le ventre rien qu'en sentant son regard sur moi ! J'ai toujours fui la routine et eu peur qu'on s'enlise comme un vieux couple mais pendant ces quelques jours on était tous les deux dans la maison à faire nos petites vies et j'ai eu envie de ça, de cette tranquillité, de cette routine sans aucun stress. J'ai plus envie de stress.

-Mais t'as envie de lui ?

-Oui ! On était au calme comme un vieux couple tout en étant aussi maladroit que des adolescents. Alors que c'est Len ! Mais je découvre une nouvelle facette de lui, c'est la première fois que c'est lui en position de fébrilité et moi en position de force. C'est un peu flippant parce que j'ai peur de le faire flancher ou qu'on retombe dans nos travers mais il y a toujours cette attraction entre nous, ça a toujours été, dès notre premier regard et je me rends compte que ça le sera toujours. Je suis toujours amoureuse de lui, j'ai jamais cessé de l'être mais j'arrive pas à l'expliquer mais on se redécouvre et c'est bien. Enfin je crois. Vous en pensez quoi ?

-Pourquoi tu es rentrée à Paris si tout était bien ?

-Je ne voulais pas que ça aille trop vite, qu'on reprenne tout comme avant comme si de rien n'était, que je replonge dans mes travers, qu'il replonge dans les siens après tout le chemin qu'on a parcouru. Je veux lui laisser la place de terminer ce qu'il a commencé, je voulais qu'on s'éloigne un peu pour prendre du recul sur ces quelques jours et voir si c'était réel ou si c'est juste parce qu'on n'a pas connu d'autre histoire que la notre. Claire me tannait aussi pour que je mette les choses au clair avec Dior.

-Et donc ?

-Prendre du recul pour vous c'est faire un bilan alors que je l'ai quitté ce matin ?

-T'as eu tout le temps de cogiter non ?

-Oui mais... Je pensais que vous me secoueriez pour me dire que c'est mon ex et que c'était une mauvaise idée !

-Juliette. Commença Eugénie. Ton histoire avec Lénaïc c'est un autre monde. C'est pas un ex, vous vous êtes séparés parce que vous traversiez des mauvaises passes, vous avez des carrières de dingue, des agendas de dingue. Si c'était un ex banal t'aurais pas voulu avoir une discussion pour mettre les choses à plat. Tu pensais que ça te permettrait de classer votre histoire mais t'oublies pas tant d'années de relation en quelques mois.

-Tu dois être soulée qu'on te rabâche ça mais Len et Juju ça a toujours été hors des codes des relations. Nous tout ce qu'on veut c'est que tu sois heureuse. T'as toujours été extra lucide sur votre relation, la dernière fois quand tu nous disais que les choses n'allaient pas du tout et les causes de votre rupture tu te voilais pas la face. Si vous avez mis les choses à plat, que vous sentez que vous êtes encore faits pour être ensemble c'est à vous de voir. Si vous vous sentez tous les deux apaisés là que vous êtes dans des creux de vos carrières, tu dois aussi te dire que ça risque de repartir et que vous risquez de vite retomber dans vos travers des combien ? Dix dernières années ?

-C'est clair que vous avez toujours été dans des montagnes russes mais t'as l'air tellement apaisée ma Juliette, j'ai pas le souvenir de t'avoir déjà vu comme ça. Tu rayonnes !

-Vous avez couché ?

-Non. On s'est bécoté comme des gosses hier soir en gloussant pendant des heures.

-Tu rougis depuis tout à l'heure pour des petits bisous ! Juliette ! Je croyais que t'avais eu une nuit de folie moi !

-Ils prennent leur temps Clem ! Il a prévu de rentrer à Paris ?

-Pas tout de suite.

-Donc tu vas y retourner ?

-J'aimerais attendre quelques jours mais je regardais déjà les billets de train à peine partie. Il me manque déjà.

-Suis ton instinct. Me conseilla Eugénie. La vie est beaucoup trop courte pour perdre du temps qu'on peut passer à s'aimer.

Une petite étincelle brilla dans ses yeux, me poussant un instant à lui demander s'il n'y avait pas un sens caché plus personnel à ses paroles. Un petit doute tenta de pointer le bout de son nez, appuyant sur le fait qu'elle n'était plus avec celui que le destin semblait lui avoir choisi et qu'elle avait su s'en remettre et passer à autre chose. Mais elles avaient raison, notre relation avec Len avait toujours été dans une case à part, personne à part nous ne pouvait réellement comprendre le lien qui nous unissait. Il ne tenait qu'à nous de reprendre notre histoire, sans nous soucier des regards extérieurs et comme l'avait si bien dit Eugénie : la vie était trop courte pour perdre du temps que l'on aurait pu passer à s'aimer.

A peine furent-elles parties un peu plus tard que je prenais un billet de train pour la Bretagne.

Coup de FoudreWhere stories live. Discover now