Chapitre 8 : Le trou.

Depuis le début
                                    

- Pas de problème. A ce midi alors.

Nous nous sourions une dernière fois et je retourne travailler.

J'amène le premier détenu chez le médecin psychiatre.

Puis le deuxième ;

Le troisième ;

Le quatrième ...

Et je perds le fil. Certains me parlent, mais je n'écoute pas. D'autres se taisent et je fais de même. Je ne suis pas d'humeur depuis que je sais qu'il n'est pas là. L'absence de réponse me ronge.

11 h approchent.

Je me dirige vers la salle de pause.

Arrivée, je m'assois directement. Et je patiente, j'attends Pierre. En effet, je me languis de pouvoir l'interroger à propos de Lorenzo.

20 minutes se sont écoulées.

Il ne me reste plus que 10 minutes de pause, je désespère de le voir arriver.

Plus que 5 minutes.

C'est la fin.

Il n'est pas venu.

Ainsi, nonchalante, je pars à la bibliothèque effectuée mon quart d'heure de surveillance.

Miracle, alors que je n'y croyais plus Pierre y est. Un sourire s'écrase sur mon visage. Je vais directement le voir.

On se lance tout d'abord des banalités. Puis je lance le sujet :

- J'ai cru comprendre que le détenu de la cellule n°3 avait été déplacé ?

- Ah, oui. Répond-il simplement.

Trop simplement. J'insiste.

- Pourquoi ?

Il me regarde et semble réfléchir.

- Lors d'une fouille nocturne, on l'a retrouvé en possession d'un téléphone. Ce qui est formellement interdit au sein de l'établissement.

- Comment il a pu s'en procurer un ? Demandais-je intéressée. Trop intéressée.

- On ne le sait pas justement, donc jusqu'à nouvel ordre, il sera enfermé au trou.

- D'ailleurs, c'est quoi la différence entre une cellule et le « trou » ? Dis-je en mimant les guillemets.

- C'est une cellule aux conditions plus rudimentaire, on va dire.

- Comment ça ?

- Déjà, c'est au sous-sol de la prison. On n'y éteint jamais la lumière.

- Pourquoi ?

- Premièrement, pour les empêcher de dormir. Et deuxièmement pour qu'ils n'aient pas la notion du temps.

- Ils ne peuvent pas dormir ? M'exclamais-je.

- Si, mais difficilement. En plus, la lumière fait un bruit horrible. Un bourdonnement assourdissant.

Il s'arrête un instant et reprend :

- Aussi, ceux qui y sont enfermés ne peuvent pas sortir. La récréation est interdite pour eux. Certains passent un mois entier sans avoir vu la lumière du jour.

- Un mois entier ?! Répondis-je affolée.

- En prime, le trou est deux à trois fois plus petits que leurs cellules habituelles, il fait environ 4 m2 avec les sanitaires.

Trop choqué pour répondre, Pierre ajoute :

- Et interdiction aux surveillants de leur parler. Au trou, l'ignorance est à son paroxysme.

Je réalise alors que Lorenzo est à cet endroit. A cet instant même, il est dans une cage, sans pouvoir parler à quiconque, sans pouvoir dormir, sans pouvoir sentir les rayons du soleil sur sa peau. Pendant une durée indéterminée. Une tristesse insoupçonnée s'empare de moi.

Face à mon silence, Pierre finit par donner son avis :

- Je pense que le pire là-bas, c'est l'ennui.

Je finis par répondre simplement :

- Non.

Trop simplement puisqu'il me demande pourquoi.

- Le pire ce n'est pas l'ennui. Mais la solitude.

La cellule n°3.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant