Two Sides (Rafe Cameron)

Chapitre 8

- 14 octobre 2022, Betty-

Je suis assise depuis un peu plus de 10 minutes dans le bureau de Ward Cameron, absorbant ses explications avec une attention partagée entre l'urgence et le scepticisme. Il a besoin de moi pour une mission délicate : voler un kook. Monsieur Philipps, un habitant des quartiers aisés voisins des Cameron, est la cible. Ward décrit Philipps comme un peintre et collectionneur d'œuvres d'art, résidant dans l'opulence.

Je me sens comme une actrice dans une pièce grotesque : endosser le rôle d'une kook, me fondre dans leur monde superficiel en adoptant leurs codes vestimentaires et comportementaux. Mon apparence et mon comportement devront tromper Philipps, masquant ma véritable identité de pogue.

Ward m'expose minutieusement mon rôle : je vais devoir me rendre chez Philipps sous prétexte de discuter d'art, un domaine que je maîtrise à peine. Heureusement, Cameron m'a transmis une liste des œuvres de Philipps pour que je puisse m'en sortir. De plus, il m'informe que Philipps conserve une somme conséquente dans son coffre-fort, constituant le but ultime de cette mission : dérober cet argent pour le remettre entre les mains de Ward.

« Bon, Philipps est chez lui, alors va te préparer, et file le voir. » M'ordonne Ward.

Je hoche lentement la tête, absorbant encore les détails de la mission confiée par Ward. Chaque pas que je fais en sortant de son bureau semble lourd de responsabilité, chaque instant chargé d'une tension palpable. À peine franchis-je le seuil que je me retrouve face à Rafe, dont le front se plisse instantanément à ma vue, traduisant un mélange de curiosité et de méfiance.

« Qu'est-ce qu'il te voulait ?

- Rien qui te regarde, Cameron. »

Je traverse le seuil avec précaution, mais avant même que je puisse m'éloigner, sa poigne se referme sur mon poignet, arrêtant mon mouvement de manière abrupte. Son geste est à la fois rude et captivant, me contraignant à lui faire face, mes yeux cherchant instinctivement à lire les intentions dissimulées derrière les siens.

« Maybank, je suis sérieux.

- Ouais, moi aussi. Et ça ne te regarde pas. Maintenant, lâche-moi. »

Je me dégage de son emprise avec une légère crispation dans mes gestes et me dirige vers la chambre de Sarah. Profitant de son absence, je fouille discrètement dans son armoire, à la recherche d'une tenue adéquate. Mon regard s'attarde sur un top à fleurs assorti à une jupe, que je saisis avec empressement. Les enjeux sont grands, et je suis prêt à tout pour protéger ma propre peau ainsi que celle de JJ.

Débarrassé de mon haut et de mon jean, j'enfile rapidement le top et la jupe, avant de jeter un regard critique à mon reflet dans le miroir. Un soupir amusé m'échappe alors que je réalise l'absurdité de la situation. Malgré mon apparence peu convaincante, je décide de faire avec ce que j'ai. Une rapide séance de coiffure et un peu de mascara, emprunté à Sarah, viennent compléter mon accoutrement. Pas parfait, mais ça devrait faire l'affaire, du moins je l'espère.

Je quitte la pièce avec une certaine hâte, mais ma progression est freinée par la présence persistante de Rafe, dont le regard scrutateur parcourt chacun de mes mouvements, ses sourcils toujours froncés dans une expression d'interrogation silencieuse.

« Pourquoi tu ressembles à ma sœur ?

- Ça ne te regarde toujours pas.

- Tu vas voir un mec, c'est ça ?

- Ouais. Il sera peut-être meilleur que toi, qui sait. »

Je lui adresse un geste peu amène de mon majeur et descends rapidement jusqu'à l'entrée, où je retrouve Ward. D'une voix discrète mais assurée, je lui assure que l'argent sera entre ses mains très prochainement. Il acquiesce d'un léger signe de tête, et je quitte la maison, ressentant une légère tension monter en moi. Voler dans les magasins ou chez des particuliers fait partie de nos habitudes, JJ et moi, mais cette fois-ci, la situation est différente. En plein jour, le risque d'être repéré est bien plus élevé. Normalement, nos méfaits se déroulent la nuit, lorsque les propriétaires sont absents, minimisant ainsi les chances d'être attrapés.