Domaine Vissarion

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 Il y était parvenu, enfin. Après tant d'années de souffrances, après tant de douleurs, tant d'efforts, toute cette histoire trouvait une fin. Après seize ans de combats acharnés, de peur et de désespoir. Aujourd'hui, en ce jour ensoleillé du début janvier, il avait enfin accompli ce que l'on attendait de lui. Aujourd'hui, Harry Potter, le Survivant, Celui-qui-a-survécu, avait abattu définitivement Lord Voldemort, le plus grand mage noir de son temps. Et il était maintenant debout au milieu du champs de bataille, regardant de ses yeux flous les cendres du Seigneur des Ténèbres s'éparpiller dans le vent. Elles s'envolaient vers le ciel, celui-ci s'emplissant progressivement de nuages gris, lentement et sans un bruit. Le silence régnait de nouveau, résonnant comme un choc provoqué par l'instant du trépas de Tom Jedusor, ce sorcier tant obstiné par la vie éternelle.

Cependant, le jeune sauveur du monde sorcier ne ressentait aucun soulagement car il savait pertinemment que ses malheurs ne provenaient pas uniquement de son ennemi de toujours et qu'ils ne s'en iraient pas avec lui. Il n'en tirait aucune satisfaction, comment tirer de la satisfaction d''un meurtre ? Il n'en tirait aucune fierté et aucun bonheur parce qu'à aucun moment il n'avait voulu accomplir cela. Jamais il n'avait voulu être jeté sur les champs de batailles, en première ligne, servant de défense que tout le monde pensait infaillible. Jamais il n'avait voulu apprendre à se battre dés ses onze ans, jamais il n'avait voulu être un guerrier. Il n'avait rien demandé, on l'avait toujours forcé.

À aucun moment depuis sa naissance jusqu'à aujourd'hui, quelques mois après avoir eu ses dix sept ans, il n'avait eu le contrôle de sa vie. Il avait été un objet, une arme, une chose, un bouclier mais jamais il n'avait été une personne, sauf aux yeux de quelques rares se comptant sur les doigts d'une main. Il savait aussi qu'il mourrait sûrement très prochainement. Il était devenu trop puissant, le plus puissant, trop dangereux pour certaines personnes en mal de gloire et de pouvoir. Et présentement, il était incapable de se défendre contre les ennemis plus nombreux les uns que les autres qui ne tarderaient pas à se présenter, réclamant sa vie. S'il ne s'éteignait pas avant...

Il leva son visage blafard et sans expression vers le ciel, ses émeraudes presque éteintes regardant vaguement la masse de nuages qui commençait à gronder. Brisant l'immobilité qui s'était installée, une première goutte d'eau née des cieux s'écrasa sur sa joue plus froide que le liquide transparent. Rapidement plusieurs de ses consœurs en firent de même et ce fut bientôt un déluge qui s'abattit sur lui. Il accueillit l'averse sans une seule réaction. Il ne bougea pas alors qu'elle imprégnait ce qu'il restait de ses robes en lambeaux, coulant dans la moindre de ses nombreuses blessures. Il avait l'impression que chacune d'entre elles n'étaient plus qu'une traînée de lave consumant petit à petit son corps. Il sentait le liquide de vie carmin qui donnait autrefois une belle couleur rosée à sa peau, s'échapper inexorablement des ses veines. Glacé, la pluie lui donna presque l'illusion d'être chaude. Il resta sans réaction, mais bientôt, le poids de l'eau sur ses épaules eut raison de ses dernières forces. Ses genoux cédèrent sous lui sans qu'il n'y puisse rien et il chuta lourdement. Basculant en arrière, il tomba sur le dos, légèrement amorti par le tapis terreux de la clairière où il se trouvait, au beau milieu de la Forêt Interdite. Il ne put toutefois retenir un gémissement et une grimace de douleur. Elle seule trouvait encore un chemin cohérent dans son esprit. Il avait mal, tellement mal.

On ne ressortait pas indemne d'une telle bataille. Il tenta de se concentrer un moment, de se souvenir des coups qu'il avait pris, histoire de savoir s'il avait une chance ou non. La dernière blessure qu'il avait reçu était celle qui avait fortement abîmé sa main droite. Lors de l'assaut final et alors qu'il touchait enfin d'un coup fatal son ennemi, sa baguette avait simplement explosé dans sa main, cassant poignet et doigts et brûlant la peau. Il la sentait battre furieusement. Plusieurs de ses côtes étaient également en miettes rendant sa respiration lourde, difficile et extrêmement douloureuse. Il se sentait étouffer petit à petit aussi, il supposa qu'une ou plusieurs d'entre elles devaient avoir percé ses poumons. Il avait déjà ressenti cela par le passé. Son épaule droite était déboîtée, son bras gauche cassé, une longue estafilade traversait son dos en diagonale, ses avants bras étaient lacérés d'avoir trop servi de bouclier, une plaie à la tête saignait abondamment et on pouvait voir une légère trace de morsure au niveau de sa clavicule gauche. Tout cela plus les lésions internes qu'il était sûr d'avoir, les innombrables blessures qui laissaient son sang s'échapper, les bleus, les brûlures et les égratignures. Sans compter les maléfices qu'il n'avait pu éviter. Il savait qu'il ne lui restait plus beaucoup de temps.

Fadeï Serafim VassiliWhere stories live. Discover now