-Combien il y en a eu ?

-Deux ? Trois ? Je ne me souviens pas bien, j'étais raide mort à toutes les soirées où j'allais.

-Et alors, ça t'a challengé ?

-Non, parce qu'à chaque fois ce que j'ai préféré c'était te retrouver toi. Je sais pas si c'est parce que je suis trop vieux maintenant mais tirer un coup par ci par là ça ne me convient plus. Si mon moi de 20 ans m'entendait il se foutrait bien de ma gueule. Mais ça me dépasse de voir Guillaume ou Enzo se satisfaire d'histoires sans lendemains. Après ils n'ont jamais eu ce qu'on a eu donc ils n'ont pas de point de comparaison.

Un petit silence s'installa, qui fut interrompu par mon premier sanglot.
Un poids avait alourdi ma poitrine dès le début de cette conversation et pleurer semblait être le seul moyen de le soulager.
Croisant le regard de Lénaïc, je me rendis compte que ses yeux aussi étaient bien brillants.

-Je suis tellement désolé que j'ai l'impression que ça me bouffe. Par moments je ne pense qu'à ça. J'ai tout gâché pour du cul. Alors que t'avais besoin de moi. Ou moi de toi je sais plus trop. Et maintenant je me retrouve tout seul à presque trente cinq piges aussi paumé qu'un gamin dans une foule. Et je m'appitoie encore sur moi même. Mais c'est à cause de moi.

-Eugénie ou Raph diraient qu'il faut être deux. Reniflais-je.

-Mais on n'a jamais été comme eux.

-Je n'ai jamais voulu être comme eux.

-Moi non plus. Quoi que j'ai l'impression que ça aurait été plus simple si j'étais plus comme Raph.

-Beaucoup plus simple parce qu'on n'aurait jamais été ensemble. Raph n'aurait jamais embrassé une fille qu'il venait de rencontrer sur le bord d'un chemin. Si j'avais clairement su te dire dès le début que ça ne pourrait pas m'aller, on aurait aussi pu tout éviter. Mais t'as toujours su faire preuve d'une telle nonchalance alors que je suis toujours si rigide que j'ai pris sur moi. Parce que je pensais préférer te savoir dans les lits de toutes les filles de Paris plutôt que tu me quittes. Mais t'as fini par me quitter quand même.

-On ne pouvait plus vivre comme ça. Sourire pour les photos et s'ignorer le reste du temps.

-Non, t'as raison, c'était plus possible.

Il essuya sa joue mouillée en attendant que je poursuive.

-Mais si je te l'avais dis, peut être que ça ne serait pas terminé.

-Ou alors ça aurait été terminé plus tôt. J'étais trop buté dans mon coin pour t'entendre je crois. On a toujours fonctionné comme ça, même quand tout allait bien on se mettait des bâtons dans les roues. Comme si on devait sans cesse se prouver qu'on en faisait assez l'un pour l'autre, comme si mettre en permanence de l'huile sur le feu nous permettrait de voir lequel craquerait en premier juste pour le pointer du doigts en criant "je savais bien que je t'aimais plus !"

-Mais ça n'a jamais été une compétition. Quand je t'entends dire ça, je réalise que c'est vrai et je me demande si on s'est vraiment fait confiance en fin de compte. J'ai toujours eu l'impression de te connaître mieux que personne, de savoir qui se cachait derrière la façade du séducteur un peu macho mais quand je te vois devant moi aujourd'hui je réalise que je ne te connais pas.

-Toute ma vie d'adulte, je me suis connu à travers toi. J'ai l'impression qu'il n'y a qu'avec toi que je sortais de mon personnage mais c'était juste pour en jouer un autre. Et t'en jouais aussi un.

-Je sais. Je sais qu'être l'ex battue d'Alexander Wayne n'est pas la seule chose qui me défini mais c'était tellement omniprésent dans ma vie, sur mon corps que je n'arrivais pas à dépasser ça. Mais ça ne veut pas dire qu'on ne s'est pas aimés.

-Mais comment s'aimer bien quand on ne se connaît pas ?

-Je ne sais pas. Et pourtant je t'aime toujours.

-Moi aussi je t'aime toujours.

On pleurait tous les deux comme des fontaines et son téléphone, posé sur la table, choisi ce moment pour sonner.

-C'est ma sœur. Il faut que je réponde, c'est peut être important.

-Bien sûr vas y.

J'en profiterais pour essayer de me ressaisir.
Il se racla la gorge, attrapa son paquet de clopes et son briquet avant de décrocher en sortant sur la terrasse.

-Ouais ? Ça va ?

Il s'éloigna et je ne l'entendis plus.
Non pas que je voulais entendre sa conversation avec sa sœur.

Je ne m'en étais pas rendue compte mais j'avais entièrement mangé mon assiette de pâtes, chose qui n'était pas arrivée depuis des mois. Me levant en quête d'un morceau de sopalin pour me moucher, j'en profitais pour faire une brève visite de la maison qui ne ressemblait plus en rien à ce que j'avais connu.
J'étais aussi surprise de l'ordre qui y régnait, Lénaïc ayant toujours été un gros bordélique.
C'était si anodin comme détail mais c'était une preuve supplémentaire que l'on ne se connaissait plus et ça suffit à me bouleverser un peu plus.

Plantée face au mur du couloir fraîchement repeint, je pleurais à chaudes larmes et à gros sanglots tout ce que j'avais retenu pendant des mois.

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Nos chouchous sont tout bouleversés...
Mais c'est peut être un mal pour un bien...

Je vous fais des bisous et à tes vite !
Emma

Coup de FoudreWhere stories live. Discover now