Chapitre 3: Une vieille amie à la rescousse

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L'aube venait caresser de ses doux rayons les hauts murs du palais royal, enrobant les tours ancestrales dans sa lueur dorée. Les habitants du château commençaient à peine à s'éveiller, laissant apparaître un soupçon de vie derrière les vitraux. Dans l'appartement du dixième étage, pourtant, un homme n'avait pas fermé les yeux de la nuit.

Rigor Hidalf s'était en effet enfermé dans son bureau à l'instant même ou lui et sa famille étaient rentrés de l'école de l'élite, et s'était muré dans le silence depuis. Debout devant la large fenêtre, il n'avait pas non plus fait le moindre geste en cinq heures, même quand la nymphette qui éclairait la pièce s'était assoupie, épuisée après des heures de vol statique, plongeant ainsi le bureau dans le noir complet.

Personne dans le royaume ne pouvait se douter de la peine qu'il ressentait à ce moment même. Les mauvaises langues diraient sûrement que le sous-consul devrait être ravi de la disparition de son fils, ce génie du mal qui avait passé son existence à chercher tous les moyens possibles et imaginables pour humilier son père. D'ailleurs la disparition du génie de la bêtise ne tarderait sans doute pas à faire la une de tous les journaux du pays.

Cependant, allant à l'encontre de tous les on-dit, le père de Mathieu était profondément meurtri par la disparition de ce dernier. Malgré leur relation tumultueuse, il restait son enfant, son unique fils et il ne pouvait s'empêcher de ressentir une immense fierté devant l'intelligence de son garçon même s'il en était souvent la victime. Le sacrifice qu'il avait accompli aujourd'hui était néanmoins la preuve selon lui de la bonté qui se cachait au fond du cœur de Mathieu.

Il n'avait toujours pas pris de nouvelles de sa femme réalisa-t-il soudain. En réalité, il n'avait même pas été capable de la regarder dans les yeux après avoir appris la nouvelle. C'est à peine s'il avait été capable d'échanger quelques mots avec Méphistos Pompous lorsque celui-ci était venu lui partager sa tristesse et il se rendait compte maintenant qu'il avait fallu que les deux hommes soient confrontés à la perte d'un de leurs fils pour qu'ils parviennent à une trêve.

Un rayon de soleil vint heurter la joue de Rigor Hidalf et fit scintiller une unique larme qui roula jusqu'au bas de son menton. Il ne prit pas la peine de l'essuyer. Pour la première fois depuis des années, il accepta avec soulagement les sanglots qui lui enrouèrent la gorge et lui entrecoupèrent le souffle.

***

En haut de la tour Directrice, Armance décida de redescendre dans son appartement personnel pour se changer et se rafraîchir un peu avant la longue journée qui l'attendait. Sa robe était couverte de tâches de boue et ses cheveux s'étaient détachés de son chignon, encadrant son visage de longues mèches noires.

Une fois dans sa chambre, elle se dirigea directement vers la salle de bain d'un pas mécanique et arrivée devant le lavabo jeta un regard dans la glace en face d'elle. Malgré l'épuisement, son visage était étonnamment apaisé et ses joues encore légèrement rougies par le whisky. Passer la soirée avec ses amis lui avait fait le plus grand bien et même le manque de sommeil ne pourrait pas lui faire regretter ce moment.

En enlevant enfin sa robe, Armance fut brutalement ramené à la réalité par ce qu'elle aperçut dans le miroir. Sur sa poitrine, au niveau du cœur, s'étendait une large brûlure causée par l'attaque sur son arbre. Elle pensait que le tiraillement qu'elle avait ressenti jusque-là était plus psychologique qu'autre chose, un contrecoup émotionnel ou bien une réaction de son arbre doré tentant de se reformer. Naïvement peut-être, elle n'avait absolument pas envisagé une blessure physique.

Observant la peau abîmée et suintante, elle hésita un moment à aller chercher de l'aide chez le docteur Soupont avant de se raviser et d'aller chercher son nécessaire de premier soin dans sa salle de bain. Méticuleusement, elle désinfecta la peau à vif avant d'appliquer un baume cicatrisant puis fouilla dans la trousse espérant trouver de quoi faire un bandage. Elle abandonna rapidement l'idée, constatant les limites de la médecine fait-maison, et se contenta d'enfiler délicatement une robe propre.

Après la bataille (Mathieu Hidalf - Fanfiction)Where stories live. Discover now