Chapitre 13

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Chapitre 13

(PDV de Nihal)

Il était si calme... Et moi je bouillais de l'intérieur. Tout ce dont je rêvais, en ce moment, c'était de lui lancer mon poing sur ma figure, et de lui casser toutes ses dents parfaites. Je sursautai en captant le fil de mes pensées, et m'évertuai à garder mon calme. J'étais une femme, je me devais de catalyser mes pulsions... Je pris une grande respiration, et réussis à retrouver une paix intérieure relative. Puis je lui fis un sourire le plus charmant possible, et il fronça les sourcils, l'air de se demander ce qui pouvait bien me faire sourire ainsi. Mais lui aussi retrouva un masque sans fissure, et ouvrit la porte avec une grande clef en fer. Le bruit du déverrouillage de ma porte de cellule retentit dans le silence. Ma tante le regardait d'un air serein, mais je savais qu'intérieurement, elle le maudissait. Leith me fit signe doucement de me lever et de le suivre, ce que je fis avec le plus de grâce possible, malgré l'humidité et la boue qui  maculaient ma longue tunique, me rendant bien moins que royale. Sa grande main vint entourer mon bras maigre et faible — pour l'instant -, près de l'épaule dans une poigne ferme, mais assez douce pour me guider hors du couloir sombre.

Autrefois, ce simple toucher aurait fait flamber mes sens, mais aujourd'hui, il fallait que je me retienne pour ne pas m'échapper de sa poigne. Il ne me conduit à aucun endroit que j'avais déjà visité dans cette grotte. D'un autre côté, tous les couloirs se ressemblaient tellement... Finalement, il sembla que nous étions arrivés, puisque Leith s'arrêta soudainement dans ce que je supposais être une chambre. Il me retourna rapidement face à lui, me transperçant de son regard sombre et trop inquisiteur. Je m'efforçai de tenir en place le masque neutre qui s'était fermement ancré sur mon visage. Ne lui montrer aucune faiblesse, c'était la clef. Il pourrait l'exploiter, c'est ce que m'avais dit Maître Khawarizmi.

-Nihal... souffla-t-il très doucement, gravement, avec de grands yeux tristes qui me fendirent le cœur.

Mais je n'en montrai rien. Je me contentai de l'observer, de chercher des signes de ses mensonges sur son corps, sur son visage.

-Leith, répondis-je simplement.

Il soupira de nouveau, baissant les yeux vers le sol une fraction de seconde. Bien... Je l'avais étonné. Peut-être s'attendait-il à ce que je me jetai sur lui comme je l'aurai fait quelques jours plus tôt. Mais il persévéra.

-Tu n'étais pas supposée être de ce voyage, murmura-t-il.

-Donc, tout ce que tu voulais, c'est faire du mal à mon frère. C'est vrai que c'est tellement plus louable, observais-je.

-Tu ne comprends pas. On ne peut pas s'opposer à Roi Malek.

-Surtout lorsque on n'en a pas l'intention...

Il soupira pour une énième fois, mais j'étais loin de me sentir mal de lui rendre sa tâche plus dure. C'était un lâche, pour la solde de personnes malfaisante, et il s'y complaisait. Ça faisait de lui une personne malfaisante. Et je le détestais ardemment.

-Je ne veux pas voir cette haine dans tes yeux, souffla-t-il, les iris sombres.

-Alors ferme tes yeux...

-Pourquoi ne te forces-tu pas à essayer de comprendre?

-Je suis loin d'en avoir envie. Tu m'as condamné, et mon frère aussi, à une vie de souffrance mentale et physique. Savais-tu que ma tante Lanie était ici? Savais-tu que cela faisait au moins une semaine qu'elle n'avait pas mangé? Et tu sais pourquoi? continuai-je en m'emportant. Parce que les gardes de sa cellule mangent ses portions. Elle était au bord de l'évanouissement, et si je ne lui avais pas donné ma ration, elle serait probablement gravement malade. Et maintenant, toi tu arrives, et tu me demande de comprendre? Comprendre quoi? Que tu es un lâche et que tu ne veux pas risquer ta vie pour quelque chose de bien? Je te déteste tellement!

Tout le long de ma tirade, il avait gardé les yeux sur le sol, sans dire un mot. Et cela ne me faisait enrager qu'encore plus.

-Avant, repris-je d'un ton plus calme, je t'appréciais réellement, dis-je sur le ton de la confidence. Plus que ça, je n'ai pas honte de l'avouer, je t'aimais, et pas comme une sœur.

À ces mots, il releva vivement la tête, les yeux écarquillés. Je plissai les paupières.

-Ne fais pas semblant que tu ne le savais pas. Tout le monde le savait, sifflai-je.

-Je... Je te jure que je ne le savais pas.

-Peu importe. Ça ne signifie plus rien, maintenant. Parce que ces sentiments ont été complètement détruits lorsque je t'ai vu ici, sain et sauf, collaborant avec ces enfoirés! Je ne ressens plus que de la haine. C'est ce qui m'aide à avancer, et toi tu veux m'enlever ça aussi... Tu es sans pitié.

Ses yeux avaient l'air beaucoup plus sombres que lorsqu'il était venu me chercher, plus tristes, plus torturés. Et je me félicitai de lui avoir fait sentir ne serait-ce qu'une fraction de la douleur qui m'enflammait. Parce que même si je le détestais, il n'en restait que sa trahison me poignardait dans le cœur, me faisant hurler intérieurement de douleur.

-Si c'est ainsi que tu penses, je ne crois pas en effet que cela serve à quelque chose que je t'explique quoi que ce soit.

Je soupirai de soulagement en comprenant qu'il allait me reconduire en cellule, et que j'allais pouvoir panser mes blessures dans le calme. Il s'écarta de moi lentement, puis repartit vers les prisons, sans s'assurer que je le suivais. Ce que je fis tout de même, parce que je n'étais tout de même pas assez stupide pour rester au milieu des grottes à attendre qu'un sans doute très gentil garde me trouve. Leith marchait rapidement, les mouvements saccadés et brusques, voulant sûrement se débarrasser de moi le plus vite possible, voyant que ses airs de chien battu n'avait pas fonctionné avec moi. Finalement, je vis les portes métalliques et massives des cellules crasseuses se dresser devant moi. En un certain sens, j'étais reconnaissante à Leith de m'avoir fait sortir quelques minutes hors de la pestilence des cachots. Mais j'avais hâte de m'assurer de l'état de ma chère tante. Lorsque je l'avais quittée quelques minutes plutôt, elle semblait avoir repris des forces, mais je ne pouvais m'empêcher de m'inquiéter pour elle. Je courrai presque dans le couloir devant les cellules et regardai avidement le garde jouer avec ses clefs avant de m'ouvrir l'épaisse porte coulissante. Je m'avançai doucement à l'intérieur, ne prêtant aucune attention au claquement sonore de la porte derrière moi et regardai avec attention la forme recroquevillée de ma tante, complètement recouverte d'une couverture de toile rêche. Je m'accroupi devant elle, un étrange sentiment me serrant la gorge.

-Tante Lanie? Tu vas bien? demandai-je d'une voix douce malgré la panique qui monta en moi en n'entendant aucune réponse de la part de ma tante. Tante Lanie?

J'avançai la main vers le rebord de la couverture, la tirant vers moi pour dévoiler le visage complètement tuméfié de mon aïeule. Mes yeux s'écarquillèrent d'effroi, pour ensuite se plisser sous la vague de haine qui me submergea. Comment avaient-ils osés? Comment pouvaient-ils blesser aussi gravement une pauvre femme sans défense? Puis, une peur immense me serra les tripes lorsque la pensée qu'elle pouvait bien être morte traversa mon esprit. Je n'osai pas mettre deux doigts sous sa mâchoire, par peur que ma terreur ne soit fondée. Se pouvait-il qu'elle ait réellement succombé à ses blessures. Selon leur emplacement et leur couleur, je serais tentée de dire que oui, un coup d'une telle force aurait pu achever le feu qui brûlait en elle. Mais je me devais de savoir la vérité.

D'une main tremblante, j'approchai deux doigts les posa légèrement contre la peau tendre de son cou, avant de prendre une grande inspiration et de les presser...

J'aurais pu en pleurer de joie. Elle était vivante.

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J'espère que vous avez apprécié la petite dispute d'amoureux entre Nihal et Leith. Je me suis un peu cassé la tête, mais laissez-moi un feedback. C'est toujours très utile.

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Laety B.

Les Héritiers de Perse - Tome 2Where stories live. Discover now