Le Sang des Alchimistes - Tome 1 : Géode

Chapitre 2 : La prodige (1/4)

- Cesse de louvoyer ainsi Cirta. Que désires-tu au fond ?

- Rien ne vous échappe. S'il m'est permis, je vous implore de m'aider à asservir l'intégralité d'Odéon.

- Réalises-tu l'ampleur de ce que tu me demandes ?

- Vos pouvoirs sont sans limite divin Archoracle.

- Mais pas ma magnanimité.

- Loin de moi l'idée de profiter de votre prodigalité sans contrepartie.

- Ne me sers pas tes boniments Cirta, rappelle-toi à qui tu t'adresses.

- Pardonnez-moi divin Archoracle. Je ne tenais pas à vous manquer de respect.

- Il existe éventuellement un soutien que je serais disposé à t'accorder, mais pour cela il faudra d'abord me prouver ta dévotion.

- Commandez et je vous obéirai.

- Les Anciens ont restreint mes pouvoirs. Aide-moi à les récupérer et je répondrai à tes attentes.

- Je vous suis tout ouïe.

- Il existe un lieu appelé le sanctuaire d'Ancolie dont l'emplacement m'est inconnu. Trouve le pour moi Cirta.

- Vos désirs sont des ordres. Je vais immédiatement lancer mes meilleurs hommes à sa recherche, mais cela pourrait prendre des cycles.

- Le temps n'a pas d'importance, seuls comptent les résultats.

- Bien-sûr divin Archoracle. Pardonnez mon impudence, mais en quoi ce sanctuaire peut-il vous aider à récupérer vos pouvoirs ?

- Des sacrifices Cirta. Offre-moi des sacrifices en ce lieu et mon autorité retrouvera sa toute-puissance. Fais cela pour moi et je te ferai don d'une arme qui terrassera tes ennemis.

***

Adossé à un arbre en retrait de la lisière, Aegis tenta de retrouver son calme, mais son cœur continuait de battre énergiquement dans sa poitrine. Il n'aimait pas s'emporter. Plus précisément, il n'aimait pas perdre le contrôle. Il se tourna vers la clairière et observa la vieille Lisa qui finissait de recueillir les fleurs échappées de son panier. Bien que trop éloigné pour distinguer son visage, il la connaissait suffisamment pour savoir qu'il lui avait fait de la peine. La colère qu'il ressentait encore fit place à un fort sentiment de compassion et de culpabilité. Il avait été injuste avec elle. De toutes les sœurs, elle était la seule à avoir fait preuve de bienveillance à son égard. Alors pourquoi avait-elle remué le couteau dans la plaie ?

Il regarda la paume de ses mains. Sur chacune d'elles était dessinée une marque arrondie. Cela n'avait rien d'exceptionnel, tout le monde était né avec les empreintes alchimiques. Évoluant entre la naissance et le premier cycle pour devenir parfaitement circulaires, ces marques adoptaient en changeant de teinte l'un des six éléments qui composaient le monde : la terre, le bois, le métal, l'eau, le feu et l'air. Arrivées à maturité, elles conféraient aux habitants d'Odéon le pouvoir de décomposer n'importe quelle matière pour la transformer en l'élément de leur caste. Un pouvoir communément appelé : transmutation.

Cependant, chez Aegis, ces empreintes alchimiques s'étaient figées en deux marques grises inachevées, faisant de lui un être unique et marginal. Non seulement il ne pouvait s'identifier à aucune caste, mais il lui était en plus impossible d'amener une transmutation jusqu'à son terme. Toutes ses vaines tentatives avaient toujours été bloquées juste après la décomposition de la matière.