Episode 1 : la forêt maudite

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Episode 1

∞∞-∞∞ Dans la forêt ∞∞-∞∞

D'un geste leste, Ngalifourou se cacha derrière un des vieux arbres centenaires de la forêt maudite tandis qu'une femme déposait un bébé à l'entrée d'une des nombreuses grottes dissimulées derrière les branchages. Il faisait trop sombre pour qu'elle puisse distinguer ses traits et deviner de quelle tribu elle provenait. Après s'être agenouillée devant l'enfant pour embrasser son front, la femme dont elle pouvait percevoir le gémissement de douleur, s'en alla sans se retourner malgré les vagissements du nouveau né. Ngalifourou rangea son vieux coutelas dans sa ceinture de cuire et se rapprocha de l'enfant pour le prendre dans ses bras avant qu'un des nombreux animaux sauvages de la forêt ne s'en délecte comme amuse gueule. Il était tout malingre mais tellement vigoureux par ses cris. Elle tenta vainement de le calmer. Il devait surement avoir faim. Pourquoi avait-on rejeté celui-ci du grand village pour venir l'abandonner dans cette forêt maudite?

— Es-tu comme moi mon ami ? demanda-t-elle au nourrisson qui darda sur elle ses grands yeux noirs curieux.

Le grand village regroupait les descendants de quatre grandes tribus dont les sites originels étaient situés aux quatre coins de leur monde. Elle examina l'enfant ainsi que le tissu qui le recouvrait pour déterminer sa tribu mais ne trouva aucun indice.

De quel peuple était-il ?

Celui de l'eau où naissaient les plus grands guérisseurs ? Celui de l'air, qui accueillait des artistes visionnaires, des griots magnifiques maitre de l'art oratoire. Celui de la terre, riche de trésor souterrains ou de plantes prodigieuses? Ou encore le plus terrible de tous, le peuple du feu, aux guerriers sans peurs?

Sans plus attendre, elle dévêtit l'enfant et déchira l'étoffe qui le couvrait. Pour simuler le déchiquètement par les crocs d'une bête, elle se coupa la paume et macula de son sang l'amas de tissus pour simuler la mort de l'enfant au cas où la mère reviendrait sur ses pas. Puis d'une démarche toujours aussi leste, elle s'éloigna à son tour sans un regard en arrière.

Depuis que le monde était monde, le commun des mortels des quatre villages naissaient avec des dons individuels particuliers : manier le feu sans en ressentir la morsure, nager des heures durant dans l'eau sans remonter à la surface, connaître les vertues des plantes-sacrées, voir l'avenir pour certains. Les dons étaient aussi nombreux qu'il y avait de familles dans chaque tribu mais toujours lié à une des quatre sources de vie ; le feu, la terre, l'air et l'eau.

A la naissance de leurs enfants, ceux de la tribu du feu posaient une pierre chaude sur le front des nourrissons mâles et dans la paume des nourrissons femelles. Les enfants du feu, ne pleuraient jamais au contact de la chaleur. Tout au plus geignaient-ils au contact de la pierre brulante mais jamais ils ne pleuraient. La tribu de l'eau quant à elle plongeait les nouveaux nés dans la rivière de mamiwata. Le bébé se calmait alors et sans qu'on ne l'y pousse se mettait à nager pour s'éloigner de la rive. Dès qu'ils nageaient, on les sortait de l'eau et un nom leur était attribué. Ceux qui n'y arrivaient pas étaient d'office condamné à une mort certaine. Soit leur mère les noyait devant tout le village, soit elle le donnait en offrande aux dieux dans la forêt maudite pour que la prochaine grossesse soit porteuse d'un meilleur fruit. Le rite de la tribu de la terre, consistait à présenter au nourrisson deux objets : une simple feuille d'herbe et un diamant aussi brillant que le soleil. Les vrais fils de la terre choisissaient toujours l'herbe... Et les enfants qui ne le faisaient pas, finissaient enterrés vivant ou abandonnés dans la forêt maudite.

Les dons étaient donc toujours liés à la naissance dans une des quatre tribus et déterminaient la place de chacun dans la société. Mais si on avait le malheur de naitre sans don, les anciens jugeaient qu'on venait pervertir le sang de la tribu et on était abandonné dans la forêt maudite qui abritait déjà les criminels bannis qu'on appelait communément les hyènes.

FoudreWhere stories live. Discover now