Chapitre 15 : Les Pécheresses

Începe de la început
                                    

Cela faisait des années qu'elles vivaient ici, financées par l'Église qui les prenait pour des grenouilles de bénitier. Heureusement que les inspections ne se faisaient jamais en la présence de Madeleine...

-Donc, les anges veulent ta peau parce que tu fricotes avec ton Barbatos ? résuma Louise, l'Envie. Comme j'aimerais être à ta place... Ce n'est pas à moi qu'il arriverait ce genre de chose...

Sur quoi elle se mit à pleurer, se mouchant par intermittence dans sa coiffe de bonne sœur. Marie soupira. L'Envie était un sentiment qui pouvait vous rendre dépressive à force. Louise en était une bonne preuve. Néanmoins, les trois quarts du temps, elle parvenait à gérer. Preuve de sa force morale d'avant le Péché.

-Je ne couche pas avec Barbatos, je vous l'ai déjà dit.

-Ouais, enfin, ça ne change rien à la situation, râla Caroline, l'Orgueil. Tu es revenue ici, ce qui signifie que tu as ramené tous les ennemis à notre porte avec ce déchu ! Les anges et les démons veulent sa mort ! Et les Vertus sont de nouveau focalisées sur nous ! Tu imagines le risque que cela représente !?

-Et que voulais-tu que je fasse, hein !? Il est trop tard ! Quoi qu'il arrive, les Vertus et les anges seraient venus ici, tôt ou tard ! Vous êtes des Pécheresses, tout comme moi ! S'ils en ont après moi, ils en ont après vous !

-Tu n'es qu'une petite égoïste !

-Tu veux mon poing dans la gueule, l'Orgueil !?

-Ramène-toi, la Colère ! On va voir qui de nous deux est la plus forte !

-La ferme, bande de sales gosses ! rugit Élisabeth en tapant du poing sur la table. Je déteste perdre mon temps avec de telles conneries !

Marie et Caroline se regardèrent, avant de décider de sagement s'asseoir. Juliette la Paresse ricana, tandis que la Gourmandise, la bouche pleine, les observait avec amusement. La fausse Mère Supérieure n'était pas quelqu'un à embêter.

Se pinçant l'arête du nez, Élisabeth poussa un soupir exaspéré. Elles devaient toutes réfléchir à une idée, et se préparer au...

-Bonsoir, mesdames.

Elles sursautèrent toutes. Barbatos venait d'entrer dans la grande salle de repas, avec un sourire contrit à leur encontre. Boitant légèrement, il était pieds et torse nu. Sur sa peau d'une blancheur sans défaut, il n'y avait plus de signe de sa blessure. Pas un cercle rouge, rien. Marie fronça les sourcils.

-Qu'est-ce que tu fais debout !? Normalement, même avec mes soins tu aurais dû émerger dans quatre jours au mieux !

-Je ne suis pas un humain, Marie, rétorqua-t-il en s'asseyant sur le tabouret à côté d'elle. Je guéris beaucoup plus vite que toi.

-Et ton aile ?

Il fit apparaitre sa paire dans son dos, avant de rabattre l'une d'elles devant lui, afin d'inspecter ses plumes. Elles étaient de nouveau toutes là, ainsi que les os sectionnés par le coup d'épée. Visiblement satisfait de ce qu'il voyait, il les fit de nouveau disparaitre.

-Je peux de nouveau voler, c'est le principal. Ne t'en fais pas.

-Je ne m'en fais pas pour toi. Mais bordel, tu peux m'expliquer ce que c'était que tous ces démons !? Pourquoi y en avait-il autant !? Qu'est-ce que tu as fichu quand tu as disparu, cette nuit-là !?

Barbatos grimaça, avant de se rendre compte que toutes les autres Pécheresses présentent le fixaient avec un air ahuri.

-Ah... Désolé, mesdames, je ne me suis pas présenté.

Se relevant, il s'inclina avec respect devant ces demoiselles.

-Je m'appelle Barbatos, Séraphin déchu de mon état. Je suis désolé d'avoir brisé votre vitrail à l'atterrissage. Et de vous avoir prise pour des ennemis.

Marie jeta un coup d'œil à ses sœurs. Ce qu'elle vit manqua la faire s'étouffer. Pour un peu, elle aurait vu des paillettes jaillir des yeux des Pécheresses. Les mains jointes comme dans une prière, elles souriaient jusqu'aux oreilles.

-Ah... Ça faisait longtemps qu'un bel homme ne nous avait pas aussi bien parlé, fit Caroline avec émotion.

-Marie, tu as bien fait de l'avoir ramené, approuva Louise en bavant presque en le regardant. Mais il est à toi... Comme je t'envie...

Sur quoi elle se remit à pleurer dans un mélange d'émotion et d'envie. Bon sang !

-Il est à personne ! s'exclama-t-elle, exaspérée. Barbatos, je te présente les autres Pécheresses. Caroline, Louise, Margareth, Juliette et Élisabeth. L'Orgueil, l'Envie, la Gourmandise, la Paresse et l'Avarice, dans l'ordre.

-Enchanté, fit-il avec un beau sourire.

Droit au cœur. Les cinq gourdes furent d'autant plus sous le charme. Bordel ! Elles étaient restées beaucoup trop longtemps dans l'abbaye, celles-là !

-Bon, et ces démons ?

-Oh, c'est tout à fait normal, déclara-t-il en se rasseyant. Je suis resté un bon moment en stase, donc vous ne me connaissez pas, mesdames, mais j'étais un des soldats du Créateur.

-Tous les anges sont des soldats du Créateur. Pour autant, des milliers de démons ne les attendent pas à la sortie d'une grotte pour les massacrer.

-Oui, bon... On m'appelait le Fléau des Démons. Je suis responsable de la mort de bon nombre d'entre eux durant les grandes guerres.

Barbatos baissa les yeux sur ses mains. Marie connaissait ce regard. C'était celui d'un homme, ou d'un ange, qui voyait le sang qui les tacherait à jamais. Pourtant, quand il releva la tête, il soutint son regard sans fléchir.

-Je te dirai volontiers que je partirai pour te laisser en sécurité, Marie. Mais les choses ne fonctionnent pas ainsi. Ils m'ont vu te protéger, tout comme ils t'ont vu m'arrêter dans les Thermes de Trajan. S'il y a un protocole de non-agression là-bas, cela ne signifie pas que les rumeurs sur mon retour et sur ton implication dans ma vie ne se sont pas propagées. Tu es en danger avec moi, mais si je te quitte, tu ne pourras plus non plus m'utiliser comme bouclier.

-Je te remercie, mais je sais me défendre.

-On ne parle pas des Vertus, ici. Je te parle de démons, Marie. Tu as l'habitude de les côtoyer dans les Thermes, mais as-tu l'habitude de les affronter dans des combats à mort ?

Elle fronça les sourcils, l'esprit en ébullition. Non. Elle n'avait pas l'habitude de ça. Et il le savait. Hochant la tête face à son expression, il se tourna vers toutes les Pécheresses, qui observaient l'échange sans mot dire.

-Que vous le souhaitiez ou pas, je resterais ici pour les affronter. Ce n'est plus qu'une question d'heures avant qu'ils n'arrivent.

-Comment ça ? cingla Élisabeth en dépit de son cœur conquis par son physique et ses paroles. Vous vous êtes transféré ici, d'après ce qu'a dit Marie. Ils ne vous trouveront pas de si tôt.

Barbatos se releva de la table, en secouant la tête en signe de dénégation.

-Le problème, mesdames, c'est que j'ai été trahi par mes anciens frères. Un ange leur a dit où je me trouvais, pour la grotte. Il y a donc fort à parier pour qu'il leur ait déjà dit où se trouve l'abbaye.

-Attends, attends ! s'exclama Caroline, les yeux écarquillés. Ça veut dire qu'une armée de démon va venir ici !? Pour te tuer ?

-Moi, et vous, qui m'avez hébergé. Alors, restez à l'intérieur, et ne vous mettez pas dans mes jambes, s'il vous plait. Ah...

Il releva brusquement la tête, empêchant Marie de l'engueuler vertement. Sourcils froncés, il fit jaillir un cristal du sol de la salle. Élisabeth poussa un juron, comme quoi les réparations des dalles de pierre allaient lui couter une fortune. Mais elle se tut lorsque le cristal tomba en poussière, dévoilant en son cœur une épée façonnée dans sa masse.

-Ils sont là, déclara Barbatos d'une voix lugubre en saisissant son arme.

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