Chapitre 20

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J'imagine que le moment est venu de tout t'expliquer...

Je fuyais son regard, mes mains ne cessaient de frotter mon short. Ma respiration s'alourdit, en même temps que les battements de mon cœur s'accélérèrent. Des milliers de mots remontèrent dans ma gorge, mais restèrent bloqués au milieu, un nœud s'était formé. Je sentais son regard sur moi tandis qu'elle continuait de manger. Je le sentais me traverser, tout entier, mais je ne pouvais pas lever la tête. J'étais paralysé à cette chaise, à ces aveux que je ne parvenais pas à formuler.

– Tu sais que tu peux tout me dire, Louis. Mais ne te forces pas si tu n'es pas prêt.

– Non, non, je suis prêt. Oui, je le suis. C'est juste que je ne veux pas te faire souffrir. Tu comptes beaucoup pour moi.

Son visage se fendit en un doux sourire. Elle reposa sa fourchette sur son assiette et se pencha sur le côté. Je la vis chercher quelque chose dans son sac, ses sourcils se froncèrent avant que tout son visage ne s'éclaire. Elle sortit un petit objet, une balle ronde qu'elle fit rouler dans ses paumes.

Intrigué, je relevais la tête vers elle. Elle souriait et me le tendit. Je l'attrapais délicatement.

– C'est une balle anti-stress. Il m'arrive de faire des crises, parfois, et depuis que je l'ai je vais mieux, je parviens à les maîtriser. Tu peux t'en servir pour me dire ce que tu as à me dire, si tu veux.

– Tu fais des crises de panique ?

– C'est tout ce que tu as retenu ? Plaisanta Elena.

– Pardon, c'est juste que je ne savais pas... Pourquoi tu ne m'en as jamais parlé ?

Elle soupira, son regard me fuyait désormais. Ses épaules s'abaissèrent légèrement, son dos se voûta. Je la regardais s'affaisser, comme un ballon qu'on s'amuse à dégonfler, lui retirant toute sa raison de vivre. J'avais l'impression qu'Elena venait de se vider de son bonheur, ou du moins du sourire qui ne quittait jamais ses lèvres.

Un peu comme si, le temps de se regonfler, elle laissait apparaître son cœur brisé.

– Je sais pas, l'occasion ne s'est jamais vraiment présenté... Et puis, personne n'est au courant. C'était plus facile de faire semblant, que d'assumer que mes sourires manquaient de sincérité.

Je lui attrapais aussitôt la main pour la serrer dans la mienne. Je vis ses yeux briller sous la lumière des lampes au plafond. Elle fixait son assiette, me fuyait en même temps. Et son air absent sur son visage me laissait croire qu'elle se fuyait elle aussi, depuis peut être trop de temps. Alors je lui caressais le dos de sa main, amicalement, pour lui témoigner mon soutien. Mon geste la fit sourire.

– Tu veux en parler ? Lui demandais je doucement.

– De mes crises d'angoisse ? Pas vraiment... Mais tu devais me dire quelque chose, non ?

Et je la vis reprendre son masque, son sourire, cette lueur dans son regard. Je la vis se regonfler de vie, de bonheur. Elle se métamorphosa sous mes yeux en la femme que je connaissais depuis quelques années, laissant son réel elle enfoui au fond de son cœur.

Dans ma paume, je serrai cette balle et étrangement, je me sentais un peu plus serein. Et sa main dans la mienne me donnait le courage de tout lui avouer. Je respirais un bon coup, notre appétit à tous les deux coupé, et ancra mon regard dans le sien.

– Je ne sais pas trop comment formuler cela, Elena. Je ne sais pas comment te le dire sans te faire souffrir.

– Je souffre déjà de cet amour que tu ne partages pas, autant y mettre enfin une fin. Dis le avec tes mots, et ça ira pour moi.

L'inconnu aux deux visagesUnde poveștirile trăiesc. Descoperă acum