Chapitre 1: Les classes

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Mon moral est au plus bas en ce mois de décembre 1970, comme ces nuages gris qui entourent le pic de l'étoile.

Devant moi, l'imposante grille à l'entrée du camp de Sainte Marthe, semble m'attirer vers elle comme un aimant, pourtant mon aversion envers cette armée qui m'est imposée, est bien présente et réelle.

Un soldat, bien jeune dans un treillis bien trop grand, monte la garde transi de froid, dans une guérite. Une fois celle-ci dépassée, je pénètre dans de ce qui doit être mon univers pendant les prochains douze mois.

Ma feuille d'incorporation à la main, je me présente devant un sergent qui va me diriger, avec mes compagnons d'infortune, vers cette nouvelle vie pleine d'incertitude, que j'aurais voulu éviter.

Passé la poterne, une route goudronnée, pleine de nids de poule, nous amène au cœur de la caserne où se trouve, en enfilade, une dizaine de bâtiments laissant présumer un confort spartiate. Ils sont tous construits sur le même modèle, mur de brique rouge et toit en tôle ; ce doit être le royaume des courants d'air : froid l'hiver, chaud l'été. Sur le moment cela ne me contrarie pas trop car je ne pense pas m'éterniser longtemps dans ce paradis.

Nous sommes rassemblés sur la place d'armes au milieu de laquelle, agité par un léger mistral, flotte le drapeau tricolore en haut d'un mât blanc fraîchement repeint.

Cela fait maintenant plus d'une heure que nous attendons, gelés, que l'on nous indique enfin la marche à suivre.

Mon pied commence à me faire souffrir, j'espère que la blessure que je me suis faite il a trois mois, me permettra d'être enfin réformé et ainsi d'échapper à cette vie de galère qui se profile à l'horizon.En effet, cela faisait un an que je travaillais dans un Ets horticole, soulageant un peu ma mère pécuniairement et d'autre part me procurant une certaine autonomie financière, lorsqu'en effectuant un travail de compostage de terre, j'ai malencontreusement marché sur un tesson de bouteille. Celui-ci m'a traversé la chaussure et occasionné une méchante blessure ayant nécessité le transport aux urgences, ainsi que la pose de dix points de sutures.La proximité de cet accident et les séquelles en résultant, me donne bon espoir de pouvoir atteindre mon but.

Enfin trois gradés, encadrant un capitaine bedonnant, procèdent à l'appel général. Une fois celui ci effectué, nous sommes alors dirigés vers nos baraquements.Ce n'est pas du quatre étoiles, la porte en bois laisse apparaître deux rangées de lits métalliques et nous prenons possession à tour de rôle de notre couchage. Le brigadier chef nous stipule que nous devons faire notre lit « au carré » tous les jours, que le juteux (adjudant chef de « carrière ») affecté à notre section, est très pointilleux sur cet état de fait.

La matinée se passe lentement. Je dévisage les gars autour de moi, beaucoup de recrue de 18 ans à peine, très peu sont de mon âge. Je pense qu'il n'y a pas trop de sursitaire et les discussions s'articulent autour de cette autonomie de vie fraîchement découverte. Pour la plupart de ces jeunes, enfin sortis du cocon familial, cela est ressentit comme une certaine émancipation.

Sur le coup de midi moins le quart, rassemblement par deux pour se rendre au réfectoire où m'attend mon premier repas de bidasse. Un brouhaha indescriptible nous accueille jusqu'à ce qu'un adjudant hurle un ordre sec, qui a pour effet immédiat de faire cesser cette cacophonie.La nourriture n'est pas mauvaise, et j'en suis agréablement surpris.

Je suis assis à côté d'un gars de Fréjus avec qui, très vite, je noue le contact. Ce n'est pas difficile car nous nous trouvons des liens communs, tout comme moi il pratique la pêche sous marine et ce qui ne gâche rien il me semble un peu plus adulte que tous ceux qui m'entourent.

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⏰ Última atualização: Feb 27, 2021 ⏰

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