Mon grand-père, c'était un ancien soldat. Mais il n'en parlait jamais, de la guerre. Ma grand-mère disait que c'était très difficile pour lui de se remémorer tout ça.
Et puis un jour, un voisin a allumer des pétards pour fêter la nouvelle année.
Et mon grand-père est devenu fou.
Il s'est rué sous la table en hurlant, et il y est resté toute la nuit, tremblant, les yeux roulant comme ceux des chevaux effrayés.
J'ai eu peur, moi aussi. Je me demandais ce qu'il se passait, pourquoi est-ce qu'il était comme ça.
C'est ma grand-mère qui m'a expliqué. Elle m'a demandé si j'avais déjà entendu parler des gueules cassées. J'ai hoché la tête. La maîtresse nous en avait parlé à l'école. Alors, ma grand-mère m'a expliqué qu'être un gueule cassée, ce n'était pas seulement des blessures apparentes.
Mon grand-père, lui, c'était son cerveau qui était cassé. Ma grand-mère a dit que les pétards lui avaient rappelé les bombes, les obus, les grenades, les détonations des fusils. D'après elle, son cerveau avait assimilé le bruit des pétards à la terreur ressentie sur le champ de bataille, et c'était pour ça que mon grand-père hurlait sous la table.
-Comment on fait pour l'aider, alors ? ai-je demandé.
-On ne peut rien faire, mon chéri, a soupiré ma grand-mère. Il faut juste attendre que ça passe.
Malgré tout, je me suis avancé mon grand-père. On aurait dit un animal blessé dans les faisceaux des phares des voitures. Alors, comme je l'aurais fait avec u animal blessé, je me suis doucement approché et je me suis recroquevillé contre lui, sans geste brusque.
-Tu sais, Papi, même si ton cerveau est tout cassé, moi, je t'aime très fort.
Et cette simple phrase a poussé mon grand-père a m'enlacer comme si sa vie en dépendait, les joues ruisselantes de larmes. Et c'est là qu'il m'a tout raconté. Le barrage a cédé, et il s'est livré entièrement à moi. Et du haut de mes sept ans, j'ai compris à quel point mon grand-père était un héros, même si j'étais sans doute le seul à le connaître.
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La fleur au fusil
Historical Fiction❝LE VENT SOUFFLE SUR LES TOMBES LA LIBERTE REVIENDRA ON NOUS OUBLIERA NOUS RENTRERONS DANS L'OMBRE.❞ ᴸᵃ ᶜᵒᵐᵖˡᵃᶤᶰᵗᵉ ᵈᵘ ᵖᵃʳᵗᶤᶳᵃᶰ Parce que malgré tous ces monuments, on ne saura jamais les noms de tous ceux qui se sont sacrifiés pour la patrie...