Point de vue de Sarah
Après les cours, et de nombreuses plaintes des garçons au sujet de leur professeur de SES, nous décidons d'aller boire un verre. Alors que nous marchons pour rejoindre le Warm Coffee, une voix retentit derrière moi :
— Sarah !
Je me retourne et suis surprise de voir Raphaël en train de courir. Je fais signe aux autres de continuer sans moi.
Il se souvient même de mon prénom.
J'essaie d'ignorer cette pensée pour me concentrer sur le brun en face de moi.
— Salut, dit-il en reprenant sa respiration. Ton frère m'a dit qu'il organisait un truc demain soir mais il n'a pas eu le temps de me donner les détails. Tu pourrais me filer son numéro pour qu'on s'arrange ?
— Oui bien sûr !
Il me tend son téléphone, alors j'écris le téléphone de mon frère dans ses contacts. Quand je lui rends, je lui lance un sourire timide.
— Désolé de t'avoir dérangée.
J'aimerais être capable de lancer une conversation, mais je n'ai aucune idée de quoi dire, alors je le salue et me dirige vers le café. Après m'avoir laissé commander, Alix se penche vers moi :
— Il voulait quoi ?
— Le numéro de Clem.
— Et pas le tient ? ajoute-t-elle d'un air mesquin.
— C'est pour l'adresse et l'heure de la soirée, répond-je faussement impatientée.
En réalité, elle sait que je suis la première à en rire. Je ne peux dire le nombre de fois où on a trouvé des amis de mon frère attirant et tout fait pour réussir à leur parler. Mais il s'agit plus d'un passe-temps que de réels crush.
— Alors il vient, c'est sûr ?
Je hoche la tête, elle enchaîne avec un air très sérieux :
— Sarah, tu es ma meilleure amie. Je t'en supplie, invite-moi.
— À la soirée de mon frère ?
— Non, à son mariage. À ton avis !
— C'est la soirée de mon frère, pas la mienne. Ce n'est pas moi qui invite et je vais sûrement rester dans ma chambre.
— Alors invite moi à dormir chez toi et on se joindra à eux subtilement.
Je réfléchis un instant, ma mère n'est pas là alors c'est l'occasion idéale pour faire ce qui me chante. Et je ne risque pas de m'ennuyer avec Alix.
— Ça me va.
— Merci, je t'aime !
— Il en faut peu pour que tu sois une femme comblée, ris-je.
— C'est pas ce que me disent les mecs.
La serveuse arrive et nous sers nos commandes pendant que Gabriel reprend :
— Vous en pensez quoi de la nouvelle ?
— Louise ? l'interroge-je. On rigole bien en cours, elle est vraiment sympa.
— Je suis d'accord, répond-il.
— Elle est magnifique, ajoute Alix.
Quentin confirme ses propos avant de demander à Gabriel pourquoi il nous interroge à son sujet.
— Comme ça.
— Intéressé ? l'interroge Alix. C'est exactement ton style, une grande blonde comme Sarah.
Il lève les yeux au ciel, les sous-entendus sur notre proximité sont courants, mais c'est de l'humour pour tout le monde. Avec Gab on en rit bien, je sais que physiquement je suis son type et il l'est aussi, mais nous n'avons aucune attirance l'un pour l'autre. C'est presque mon deuxième frère et je sais qu'il pense la même chose.
— En tous cas pas elle. Je lui ai demandé si elle avait repéré quelqu'un et elle a répondu que non pour l'instant.
— Vous allez lui demander tous les jours ? ris-je. Elle vient d'arriver, laisse-lui le temps de respirer.
Nous restons ici un long moment à discuter de tout et de rien. Je déteste les cours, mais le temps scolaire a un avantage : nous sommes tous réunis. À cause d'eux, j'ai presque envie de me lever le matin et j'apprécie le lycée. Mais il est tard, alors nous nous souhaitons un bon week-end avant de rentrer chez-nous.
Une fois arrivée, je monte directement dans ma chambre. En entrant je suis surprise de voir Clément assit sur mon lit.
— Te voilà, je t'attendais.
— Ça va ?
— J'ai parlé avec maman pour l'émancipation.
— Et ça a donné quoi ?
— Elle s'est énervée, pour changer. Je lui ai expliqué mes raisons, et que dans tous les cas j'aurais dû partir l'année prochaine, mais elle a dû couper court à la conversation à cause de son train. Elle a conclu en disant simplement qu'elle était déçue de mon attitude ces derniers temps.
Il détourne le regard et je comprends que cette dernière phrase l'a beaucoup blessé. Depuis le retour de Chris, notre relation avec notre mère se complique, elle est dure avec nous et ça brise le cœur de Clément. Sans compter qu'elle est à Paris pour quelques jours, il va devoir attendre avant de pouvoir lui parler.
— Ça a dû lui faire énormément de peine que tu lui demandes ça.
— Mais j'en ai besoin.
Cette phrase laisse place au silence. Je décide de changer de sujet.
— J'ai croisé Raphaël, je lui ai donné ton numéro.
— Oui je sais, il m'a envoyé un message tout à l'heure.
— D'ailleurs Alix vient dormir ici demain.
Il acquiesce avant d'émettre un léger sourire.
— Ça fait du bien d'avoir la maison que pour nous.
— Ça va être de plus en plus rare maintenant que Chris est là.
— Sauf s'il décide de suivre maman comme un petit chien à chaque fois.
Je confirme d'un haussement de sourcil. Il est de retour dans nos vies mais c'est presque une plante verte. Il est simplement là où maman est. Comment croire qu'il veut vraiment renouer les liens familiaux ? Il n'intervient que dans les situations où il ne devrait pas.
— Ça te dit une série ? continue-je pour oublier tout ça.
Il accepte sans attendre, j'espère que ça lui fera oublier ses problèmes quelques heures. Son esprit semble vouloir exploser, il pense trop, tout va mal dernièrement.
Nous descendons et pendant qu'il remet l'épisode où nous nous sommes arrêtés, je vais dans la cuisine prendre des gâteaux et deux verres de jus d'orange. Je pose tout ça sur la table basse et m'installe sur le canapé. Depuis tout petit on regarde presque toutes nos séries et films ensemble. Encore quelque chose qui va changer s'il s'en va.
***
Je me réveille dans le canapé. Décidément ces derniers temps j'ai tendance à être infidèle à mon lit. Hier soir nous avons fini toute la saison de notre série. Ensuite on a regardé les appartements qu'il y avait en ville même s'il y a peu de chances que Clem déménage, ça nous amuse. J'ai fini par m'endormir pendant qu'il continuait de s'intéresser aux annonces.
Je décide de regarder l'heure et remarque que j'ai trois appels manqués d'Alix. Je la rappelle et me sers en même temps un café.
— Ça fait une heure que j'essaie de te joindre ! s'emporte mon amie. J'ai cru que tu étais morte !
— Et bien je suis toujours en vie, qu'est-ce qu'il se passe ?
— Il faut que j'apporte quoi ce soir ?
— Clem s'occupe de tout.
— Il doit bien y avoir un truc qui vous manque que je peux emmener ! C'est important Sarah.
— Euh, bafouille-je face à son air si sérieux, vraiment rien, Clem a tout prévu.
— Très bien ! Tu peux retourner te coucher c'est tout ce que j'avais besoin de savoir ! À ce soir.
Elle raccroche. Tout ça pour ça. Je fronce les sourcils, secouée par ce réveil étrange.
— Qu'est ce qui te fais soupirer d'aussi bon matin ? demande mon frère en entrant dans la pièce.
— Le fait de devoir attendre un an avant la prochaine saison. C'est abusé.
Il rit et s'installe à côté de moi.
— Regarde cet appartement, j'ai un coup de cœur.
J'observe une à une les photos, m'intéressant aux moindres détails que je peux remarquer.
— C'est super grand !
— Je sais que maman n'acceptera pas que je parte, mais je ne m'empêche pas de rêver.
— Tu as des nouvelles d'elle ?
— Elle m'a envoyé un message pour me prévenir qu'ils étaient bien arrivés, mais c'est tout. Je pense qu'elle m'en veut vraiment.
Pourtant sa requête était sérieuse, elle réagit comme une enfant vexée et incapable de se mettre à notre place. Je pense que Chris chamboule tout le monde, mais son effet sur ma mère est probablement le pire.
Je finis mon café et m'en vais dans ma chambre pour travailler. Durant ses heures, je ne suis coupée qu'une seule fois par Clément qui m'apporte un déjeuner.
Je continue de travailler toute l'après-midi, c'est seulement vers 18 heures que je suis sortie de mes pensées par la sonnette de la maison. Je descends et, sans surprise, découvre Alix derrière la porte.
— J'ai pris des apéros !
— Je t'avais dit que Clem s'occupait de tout !
— Ah oui ? Tant pis, y'en a jamais trop !
Cette fille est épuisante, mais qu'est-ce qu'elle me fait rire. Nous montons dans ma chambre et nous nous installons sur mon lit pour discuter. À chaque fois que nous parlons, ça dure des heures. Évidemment elle ne manque pas d'évoquer Raphaël qu'elle décrit comme un dieu vivant.
Elle m'explique ensuite que les apéros ne sont pas ici à cause de son côté étourdie, c'est un moyen de s'incruster à la soirée sans être suspect. On descendra quand ils auront assez bu soi-disant pour prendre un saladier. Forcément, ils nous proposeront de rester avec eux pour partager. C'est beaucoup trop réfléchi pour simplement être accepté dans le groupe de mon frère, mais c'est malin.
Deux heures plus tard, quelqu'un d'autre sonne et plus le temps passe, plus le brouhaha s'intensifie au rez-de-chaussée. Quand Alix décide que le bon moment est arrivé, nous descendons, découvrant le salon comme je ne l'ai jamais vu.
Clément a installé des lumières tamisées et a déplacé la plupart des meubles, ce qui me perturbe. Sans compter le nombre de personnes qui boivent et dansent dans tous les coins du salon. Normalement, je ne descends jamais lors de ses soirées, et au vu du malaise que je ressens, je comprends pourquoi.
Je suis Alix qui se dirige vers la cuisine, il y a moins de monde ici, ils discutent simplement en préparant des pizzas. Ma meilleure amie prend ses aises, comme si elle venait simplement prendre à boire et mettre nos apéros dans un plat pour une soirée film. Clément entre dans la pièce et m'aperçois, alors il me rejoint, suivit de Raphaël.
— Salut Sarah, lance ce dernier avec son sourire habituel collé aux lèvres.
Je suis perturbée une seconde par le fait qu'il me porte de l'attention, mais j'essaie de ne rien laisser paraître.
— Hey, Raphaël.
— Tout se passe bien là-haut ? m'interroge mon frère.
Je lui fais signe que oui, alors il acquiesce avant de s'éloigner, partant aider ses amis à approvisionner les plats.
— Tu es dans ta chambre depuis le début de la soirée ? s'étonne Raphaël.
J'ai à peine le temps de lui faire signe que oui avant qu'Alix réapparaisse à mes côtés. Elle lui tend sa main sans attendre.
— Enchantée, moi c'est Alix.
Il se présente rapidement avant de reporter son attention sur moi.
— Vous devriez venir dans le salon avec nous, la soirée est sympa.
— Il faut que je voie avec Clem, j'ai peur qu'il refuse.
— Je vais le prévenir si tu veux, allez profiter.
— Tu es un ange ! s'exclame Alix.
Elle prend ma main pour me tirer vers le salon, mais je la ralentis pour poser mon regard sur Raphaël.
— Merci.
Il me répond d'un signe de tête avant que je m'en aille. Ma meilleure amie pars directement se servir à boire, et la soirée peut réellement commencer.
***
J'ouvre les yeux et vois Alix étalée dans mon lit. Hier soir, elle a encore beaucoup trop bu et j'ai dû faire du baby-sitting toute la soirée. Ce n'était pas la seule à être dans le mal, Clément a dû s'occuper de pas mal de personnes aussi. Personnellement, j'essaie d'éviter l'alcool. Je sais que je perds facilement le contrôle et que je regrette après, alors j'évite, même si ça m'arrive de ne pas résister. Tout dépend de la journée que j'ai passée et de ma volonté.
Je décide de me lever sans faire de bruit pour ne pas la réveiller et je descends prendre un café. Une fois en bas je tombe sur Emma, la copine de mon frère. Je lui ai vaguement parlé hier mais elle n'avait pas vraiment les idées claires.
— Salut, lance-t-elle, bien dormi ?
— Oui.
— T'es pas du matin c'est ça ? Clem m'avait prévenu.
— Dans ce cas-là, ne parle pas.
Cette phrase est sortie toute seule et je culpabilise directement. Je fais semblant de rire pour faire croire à une blague, mais honnêtement c'est très peu crédible. Qu'est ce qui m'a pris de lui parler comme ça ?
— Et toi ? dis-je pour essayer de me rattraper.
— Très bien. T'es en Première c'est ça ?
Je hoche la tête en me servant mon café.
— Et ça va le lycée ?
— Plus ou moins.
— Tu fais d'autres choses en dehors des cours ?
— Non.
Je vois qu'elle est à court de questions. Notre "discussion", si on peut appeler ça comme ça, est interrompue par Clem qui arrive dans la cuisine.
J'en profite pour sortir rapidement et me dirige vers la terrasse pour être tranquille. Seulement cette dernière est occupée par quelqu'un d'autre. Je m'approche pour essayer de voir qui est ce brun assis devant ma table. Je reconnais rapidement Raphaël, ce qui me soulage, et décide d'aller m'installer à côté de lui.
— Eh, mais c'est mini Lebon.
— Euh, ouais c'est ça.
— Tu préfères Lebon junior ?
— Pas vraiment non, j'ai un prénom.
— Je sais, Sarah, on appelle ça de l'humour.
— Et bien, t'as de l'énergie dès le matin.
— Toujours, dit-il en souriant malgré ses yeux marqués par la fatigue. Par contre toi ça a l'air plus compliqué.
Il me regarde dans les yeux et je comprends pourquoi Alix l'apprécie autant. Il a une étincelle dans le regard qui m'empêche de m'en détacher, comme s'il m'avait ensorcelée. Son sourire ne quitte pas une seconde son visage, le rendant encore plus attirant. Et encore, contrairement à ma meilleure amie je préfère les blonds, alors je n'imagine pas l'effet encore plus marqué qu'il doit avoir sur elle.
Nous continuons de parler pendant un bon moment. J'entends subitement la porte de la terrasse s'ouvrir et me retourne. C'est Alix, avec sa tête de lendemain de soirée et un café dans la main. Elle semble ne pas savoir ce qu'elle est en train de faire et regarde autour d'elle comme si elle ne connaissait pas cet endroit, ce qui déclenche directement notre rire.
— Eh, je vous vois vous moquer de moi vous deux, grommelle-t-elle en venant s'asseoir vers nous.
Elle soupire avant de mettre sa tête dans ses mains.
— Je ne boirais plus jamais !
— Tu dis ça à chaque fois Alix, soupire-je en me levant.
Hier soir, elle et Raphaël ont passé pas mal de temps ensemble pendant que je ne faisais que danser, et j'ai hâte qu'elle me raconte tout. Alors je décide de m'éclipser pour les laisser parler en tant que personnes sobres. En entrant, je tombe nez à nez avec mon frère.
— Je peux te parler deux minutes ? demande-t-il.
J'accepte avec appréhension, ce genre de phrase n'est jamais bon signe.
— Emma m'a dit que tu te comportais super bizarrement avec elle, voire méchamment.
— Pas du tout, je ne suis pas du matin tu le sais bien. Je n'ai pas voulu la vexer.
— T'as recommencé ce matin ? Elle m'a seulement parlé d'hier soir.
J'ai peut-être tenté d'effacer ce détail de ma mémoire, mais c'est vrai, hier soir ma rencontre avec Emma était aussi catastrophique que ce matin. Je ne sais pas pourquoi, elle a quelque chose qui me repousse. En fait je le sais, elle pue l'herbe à des kilomètres et a des mimiques insupportables.
Je ne devrais pas juger si facilement, mais je ne peux pas m'en empêcher. Tout ça ne colle pas avec Clem et ça m'inquiète plus qu'autre chose. Comment est-ce qu'elle l'influence ? Est-ce qu'elle a de bonnes intentions envers lui ?
— Sarah, qu'est-ce qui te prend ?
Elle pourrait lui briser le cœur, cette idée me terrifie. Mais je me ressaisis directement, c'est impossible, il ne s'attachera plus jamais à une fille. Depuis son ex, il n'a jamais laissé quelqu'un lui refaire du mal, il se protège à sa façon.
— J'en sais rien, je ne suis pas à l'aise avec elle. Et puis je n'ai pas envie de te revoir dans le même état qu'après ta rupture avec Julie.
— Je ne prends aucun risque Sarah. Maintenant que j'ai conscience qu'aucune relation ne dure à vie, je sais à quoi m'attendre. Alors s'il te plaît, sois sympa.
Mon frère ne croit plus en l'amour éternel, ce qui est plutôt étrange à vrai dire. Il est convaincu qu'aucune relation ne dure à vie et qu'il faut simplement l'accepter pour être heureux. Accepter la temporalité des sentiments et de l'amour, ça me parait tellement triste.
— Je vais faire des efforts, promis.
Il me lance un léger sourire et s'en va à l'étage. Je me pose sur le canapé du salon et aperçois Raphaël et Alix dehors qui discutent. Tout à l'air de bien se passer pour l'instant.
En attendant qu'ils aient fini et qu'Alix puisse enfin me faire son debrief, je ne peux pas m'empêcher de penser à ce que Clément a dit. Comment je suis censée ne pas m'inquiéter pour lui ? J'ai un mauvais pressentiment envers elle, elle dégage quelque chose de mauvais, en plus de l'odeur du cannabis.
Je parle d'amour et de relations comme si je m'y connaissais mais en réalité je ne pense pas avoir réellement aimé quelqu'un dans ma vie. J'ai déjà été en couple et j'avais forcément des sentiments, mais rien d'incroyable. C'est plutôt positif dans un sens car je n'ai jamais souffert autant que mon frère d'une relation ou d'une rupture.
Mais d'un autre côté ça doit faire du bien de se sentir réellement aimée, d'avoir quelqu'un sur qui compter. Parfois, ça me semble compliqué, je ne sais pas si j'y crois réellement. Peut-être que les personnes qui se disent amoureux sont simplement amis et se mentent à eux même pour se sentir moins seuls. Parfois j'ai l'impression que tout ça n'est qu'une mascarade, que tout le monde se ment. J'en arrive à croire que l'amour n'est pas seulement temporel mais qu'en réalité il n'existe même pas. C'est encore plus triste.
Alors que je suis perdue dans mes pensées, Alix entre dans le salon et me fait signe de la suivre à l'étage.
Une fois dans ma chambre je la supplie de tout me raconter. J'ai peut-être une vie sentimentale peu animée mais avec toutes les histoires qu'Alix me raconte, je commence à m'y connaître. Elle m'explique que même si ces souvenirs d'hier soir restent un peu flous, elle sait qu'ils ont beaucoup dansé et ri ensemble.
Ce matin c'était plus compliqué avec la gueule de bois qu'ils avaient mais apparemment le courant passe plutôt bien entre eux. Il sait surtout quoi faire pour plaire, c'est une sorte de fuckboy mais intéressant d'après elle.
Quelques heures plus tard, Alix doit s'en aller. Tous les amis de Clem sont partis, il ne reste que nous. Je fais alors mes devoirs avant de me mettre à dessiner. J'attends ça toute la semaine : mon moment seule avec mon crayon. Tous les soirs je dois travailler pour être prête pour les cours du lendemain. Seulement j'ai l'impression de ne jamais avoir le droit à une pause. Le week-end, je trouve enfin du temps pour moi.
Malheureusement, plus je grandi, plus ce temps se réduit. Et il y a autre chose : j'ai beau aimer passer du temps avec les gens que j'aime, parfois j'ai besoin de me couper du monde, d'avoir des moments seule avec moi-même pour me "recharger" en quelque sorte.
C'est pour ça que je sors peu, contrairement à ma meilleure amie on me voit rarement aux soirées. C'est à se demander comment on peut si bien s'entendre avec des caractères aussi opposés. J'admire vraiment sa sociabilité, peu importe qui elle rencontre, elle sait toujours quoi dire. Elle n'a pas peur d'agir, de faire ce qui lui plaît et elle ne le regrette jamais.
J'aimerais avoir cette aisance un jour.