Quelques jours plus tôt:
-Nora, je te remercierai jamais assez d'avoir accepté.
-Bah, c'est rien. Et puis, ça me permet de cumuler trois semaines de vacances d'affilées, qui ne seront pas vraiment des vacances.
-Certes. Mais ça m'a bien aidé. J'espère que tu vas enfin pouvoir te reposer, même un peu.
-Ça ne risque pas. J'ai pas mal de truc à faire, avec les préparatifs du mariage, la soirée où je dois accompagner mon père et le défilé de ma sœur...
-On dirait que tu vas être pas mal occupée.
-Je te le fais pas dire. Mais j'avoue que les chatons vont me manquer.
-Bah si y'a que ça, je t'enverrais des photos de ces adorables boules de poils.
-Tu es un ange.
-Tout comme toi. C'est pour ça qu'on s'entend si bien. Au fait, ton père t'en veux toujours d'avoir choisi une autre voix?
-Oui.
Si seulement elle savait. Mon père me fait la guerre pour que j'abandonne mon rêve de petite fille. Travailler avec les animaux. C'est grâce à ma mère que aujourd'hui je suis auxiliaire vétérinaire et qui sait peut-être que je deviendrai vétérinaire. Enfin ça, c'est si mon père ne fait pas capoter ma demande auprès de l'école. Et il en est bien capable. Mon père a tellement fait de mal autour de lui que plus personne ne l'approche. Je comprends mieux pourquoi ma mère s'est tirée avec un autre.
-Enfin il n'arrivera pas à me faire changer de voie. Je dois le voir en sortant du travail et je crois qu'il est plus que temps de mettre les choses au clair. Sinon, il ne viendra pas à mon mariage.
-Bien dit ma grande.
Kate et moi sommes sur le point de retirer notre blouse quand on frappe à la porte des vestiaires.
-Oui !
La porte s'ouvre. Sony entre avec une immense enveloppe marron. Elle me la tend.
-On a déposé ça pour toi à l'accueil.
-Euh merci.
Elle hausse les épaules et sort. Toujours aussi bavarde cette fille. Je me tourne alors vers Kate qui lève les yeux au ciel et me fait signe d'ouvrir l'enveloppe. Donc ni une ni deux je l'ouvre et là...
Je tombe nez à nez avec des photos de mon fiancé nu avec ma propre sœur et une autre fille que je ne connais pas. Sur l'une de ces photos, Marc a la tête entre les cuisses de ma sœur, cette dernière en pleine séance de roulage de pelle avec l'autre fille. La seconde photo montre ma sœur en train de prodiguer une fellation à Marc. La troisième les montre dans une position à laquelle je ne peux pas donner de nom. Je laisse tomber les photos au sol et me dirige aux toilettes pour vomir.
-Nora, ma belle ça va? Ce mec est vraiment un connard. Tu peux remercier ton père de t'avoir prévenue.
Mon père. J'abaisse le levier et mon renvoi disparaît. Là, j'ouvre la bouche, me dirige au lavabo, me passe un coup d'eau sur le visage, me lave les mains et prend la feuille que me tend Kate.
« J'ai pensé qu'il était grand que tu ouvres les yeux ma chérie. Et puis, c'est également pour donner un petit coup de pouce à ta sœur qui ne savait pas comment te le dire.
Ps: Tu trouveras beaucoup mieux que lui. »
Nan, mais alors là, c'est une méga grosse blague. Ok, je crois qu'il est grand temps d'aller voir mon très cher papa. Je retourne dans les vestiaires attrape mon sac à main et sors de la clinique sans prendre la peine de me changer ou de répondre à la question de Kate. Ma voiture étant garée juste là. Enfin, je n'ai pas mis longtemps à y entrer et démarrer.
Tout le long du chemin qui m'emmène à la maison, enfin je dirais plutôt la villa de mon père. Je réfléchis à ce que je vais lui dire, mais surtout à comment je vais lui dire. Enfin de toute façon, peu importe il trouvera bien quelque chose à redire.
Je me gare devant chez mon père après une bonne vingtaines de minutes de trajet. Mais avant de descendre de la voiture, je me regarde dans le rétroviseur intérieur. Allez Nora, tu peux le faire. Tu peux lui balancer ce que tu as sur le cœur.
Toc,toc,toc...
À ce son, je sursaute. Je tourne la tête et croise le regard de Sam, qui se tient debout de l'autre côté de la portière. Sam est l'un des hommes de main de mon père. C'est bien le seul avec qui je m'entends bien. Il me fait signe d'ouvrir la vitre.
-Punaise Sam, tu m'as fait peur.
-Désolé mademoiselle.
-La prochaine fois, ça sera moi qui te feras peur.
-Vous venez voir votre père mademoiselle Nora ou votre sœur?
-Mon père pour le moment, mais si les deux sont là...
-Et bien votre sœur est en rendez-vous à l'extérieur, quant à monsieur votre père, il est là mais en rendez-vous avec un éventuel futur partenaire en affaire. Donc...
Je referme la vitre. Tu parles, un partenaire en affaire. Pour ne pas dire trafic d'armes, de drogue et tout ce qui s'ensuit. Et ouais, mon père est un putain de parrain de la mafia. Bien sûr, je ne le crie pas sur tous les toits et hors de question que je mette ça sur mon cv. Déjà que c'est un peu compliqué pour trouver du travail. Pour la clinique, j'ai vraiment galéré. Mais ma mère m'a aidée, du coup j'ai eu le poste. Bref, j'ouvre la portière et Sam se pousse.
-Mademoiselle Nora, je ne pense pas que cela soit une bonne idée.
Je lui fais alors voir les photos et visiblement il n'a guère l'air surpris.
-Tu étais au courant.
-Votre père m'a demandé de suivre votre fiancé et...
-Je vois.
Donc c'est Sam qui a fait le sale boulot. Pas étonnant qu'il ne soit pas surpris par ce que je lui montre. Je lui reprends les photos des mains et me dirige vers l'entrée de la villa.
-Mademoiselle !!!!
Il arrive très vite à ma hauteur.
-Écoute Sam, il faut vraiment que je parle avec mon père là maintenant.
Il pousse un soupir, mais m'invite à le suivre. Par l'enfer merci. Sam ouvre la porte de la villa et me conduit jusqu'au jardin. Mais juste avant que je ne me rende auprès de mon père qui est en pleine conversation avec un homme et une femme, Sam pose une main sur mon avant bras droit.
-Mademoiselle Nora faites attention. Votre père vous aime mais...
-Je sais Sam, mais ça va aller.
Le message est bien passé. Certes, mon père m'aime, mais à la moindre occasion il peut se débarrasser de moi. Enfin, je ne pense pas qu'il irait jusque là. Du moins, je ne l'espère pas. Ne dit-on pas que les parents sont prêts à tout pour leurs enfants? Je m'approche de mon père d'un pas décidé et laisse tomber les photos sur la table basse ou se trouve leur verre. Il relève la tête vers moi et me lance un petit sourire.
-Ah ma chérie, je vois que tu as eu mon message.
-Ouais et devant mes collègues de travail. Ça t'amuse de me faire du mal? Bon ok, c'est pas toi directement.
-Monsieur De Medici, la demoiselle malpolie ici présente, n'est autre que mon adorable fille Nora.
L'homme en question me lance un regard, suivi d'un "mademoiselle". La femme, enfin la pouffiasse à côté de lui, me lance un regard noir. Enfin peu importe, je me concentre sur mon père.
-Tu n'avais pas à faire ça papa. C'est ignoble. Je ne suis pas un de tes ennemis que tu dois mettre au tapis, je suis ta fille bordel de merde.
-Nora pouvons-nous parler de cela plus tard, je suis en rendez-vous là.
-Toujours une excuse !
-Nora, ça suffit maintenant ! Si tu veux qu'on parle de ça, on le fera en privé. Maintenant, je te demande de bien vouloir partir.
-Si ça avait été ma très chère soeur, tu n'aurais pas tenu le même discours. Le pire, c'est que tu ne rends même pas compte que tu me fais du mal. Je comprends mieux pourquoi maman est partie avec un autre.
-Nora, je t'interdis de me parler de ta mère. Maintenant, Sam va te raccompagner jusqu'à chez toi et je passerai une fois que mon rendez-vous avec Monsieur De Medici sera fini. Sam.
Et ni une, ni deux, Sam me soulève du sol comme une vulgaire gamine. Papa 1-Nora 0. Fait chier. Et dire que je voulais vraiment lui dire tout ce que j'avais sur le cœur, mais Monsieur est trop occupé.
Sam me dépose devant ma voiture avant que je ne dise ouf. Il me regarde d'un air désolé.
-Mademoiselle Nora...
-Je sais Sam. Maintenant, je vais être un gentil petit soldat et rentrer chez moi pas la peine de me raccompagner. Parfois, j'aimerais juste avoir un peu plus de caractère et lui dire merde une bonne fois pour toute.
-Je ne devrais pas dire cela, mais ce que vous lui avez dit, était déjà un grand pas mademoiselle Nora.
-Merci Sam. Tu pourras m'envoyer un message pour me dire quand le seigneur et maître part du château pour venir me voir.
-Bien sûr.
-Merci.
Je monte dans ma voiture et démarre. Un vrai boulet, voilà ce que je suis. Et cette fois, je fonds en larmes. Je déteste ma vie.