Nick avait voulu les prévenir. Il savait et il avait informé Lidonna. Mais ils avaient été trop bêtes, encore une fois, pour interpréter correctement les informations. Et maintenant, par leur faute, Loïs était vouée à une mort certaine parce qu'Harrgos ne leur donnerait jamais l'antidote.
Lidonna était en colère et elle était terrifiée. Elle ne voulait pas perdre encore quelqu'un. Elle ne le supporterait pas. Ils devaient faire quelque chose. Ils devaient aller chercher ce remède. Mais ils ne pouvaient rien faire sans l'accord du Conseil.
Camaé avait endormi de force Loïs pour l'empêcher de souffrir et ils s'étaient précipités, à trois, dans le bureau de Careil et Gia pour les attendre. La grand-mère de Xander était restée auprès de la jeune femme pour surveiller son état. Ils avaient été rejoints par Rordian, qui venait également parler à ses parents, et Lidonna savait parfaitement de quoi. Mais ce n'était absolument pas la priorité.
La jeune femme l'ignora. Elle lui en voulait encore. Un peu. Alors c'est Firân qui lui expliqua la situation, la voix tremblante. Rordian s'approcha alors de lui pour le prendre dans ses bras. Il jeta un regard rapide à sa petite amie, mais cette dernière ne voulait vraiment pas lui parler. Ni même le regarder. Elle était assise seule, dans un coin, les yeux fixés sur ses mains. Elle angoissait. Et elle ressassait. Il fallait que le Conseil prenne au sérieux la situation, mais si Rordian leur parlait de son rêve, de la mort de la fausse Éthène, Raya comme il l'avait appelée, serait au centre de l'attention, elle le savait. Sa mort aurait plus de conséquences que celle de Loïs. Et elle était bien plus facilement évitable.
Lidonna n'avait aucune envie de se disputer avec Rordian, encore une fois, mais elle était prête à le faire si ce dernier engageait les hostilités.
« Je ne veux pas me battre avec toi ! » ne put-il s'empêcher de s'écrier.
Ils sursautèrent tous. Le Liseur avait brisé le silence un peu brutalement.
« Alors laisse tomber ! répliqua la jeune femme.
— Tu sais autant que moi que je ne peux pas ! Ce que tu m'as appris est trop grave.
— Tu m'as dit toi-même qu'on n'annulerait pas la fête alors quel intérêt de leur en parler maintenant ?
— Ne pas annuler ne veut pas dire ne rien faire pour assurer sa sécurité enfin !
— Mais... »
Lidonna se tut. Elle n'avait rien à dire. Il avait raison et en soit elle le savait. Mais il ne prenait pas en compte une donnée essentielle.
« Loïs pourrait mourir bien avant Raya ! »
Rordian ne répondit rien. Ce qui eut le don d'énerver ou de blesser Lidonna.
« Le sort de Loïs ne t'importe pas ?!
— Lidonna... » murmura Firân.
Il tenta de la calmer mais Lidonna voulait que Rordian lui rende des comptes. Alors elle insista.
« Tu n'en as rien à faire de Loïs ?
— Mais bien sûr que si ! explosa-t-il. J'ai le cœur brisé. Loïs est comme ma petite sœur ! Tu me penses à ce point insensible ? Je pensais que toi et moi on avait dépassé ce stade depuis longtemps !
— Mais on parle de Loïs... »
Sa voix se brisa et elle ne put retenir ses sanglots. Rordian se précipita vers elle pour la prendre dans ses bras.
« Je sais... »
Il caressa doucement ses cheveux et réussit lentement à la calmer. Alors le silence redevint roi. Lidonna dans les bras de Rordian. Firân aux côtés de Rivel. Ce triste tableau était figé dans le temps. Il exprimait toute la détresse de ces corps. La peur, la culpabilité, le chagrin, l'inquiétude, la compassion. Ce mélange de sentiment était clair et précis. Personne ne pouvait passer à côté en observant cette œuvre.
Lidonna reniflait toujours contre le t-shirt de Rordian quand ses parents entrèrent dans leur bureau. Ils furent immédiatement surpris d'y voir autant de monde. La rouquine se décolla et essuya rapidement son visage.
« Que faites-vous tous ici ? » finit par demander Careil en voyant que personne ne bougeait.
Les personnages du tableau reprirent vie et les grands yeux qui les fixaient se réanimèrent. Ils s'échangèrent des regards interrogateurs. Qui allait commencer ? Avec la dispute que venait d'avoir Rordian et Lidonna, Firân et Rivel n'osaient rien dire.
Lidonna elle attendait. Elle attendait que Rordian cède parce qu'elle ne le ferait pas. Alors quand il lui offrit un hochement de tête presque imperceptible, un grand soulagement l'envahit.
« On a deux nouvelles à vous donner, commença alors Lidonna. Deux mauvaises nouvelles. »
Careil soupira puis se dirigea à son bureau pour s'asseoir. Gia le suivit de près.
« Nous vous écoutons, déclara-t-elle.
— Je vais commencer. Loïs a été empoisonnée quand la bombe a explosé et le seul antidote existant, c'est Harrgos qui l'a. Il faut qu'on l'aide et qu'on aille chercher ce remède !
— Comment tu sais ?
— C'est Rivel qui nous l'a expliqué. »
Les têtes se tournèrent vers l'intéressé. Rivel bomba le torse en reculant les épaules pour rester fier.
« C'est un poison qu'il a créé.
— Dans quel but ?
— Faire du chantage. Il empoisonne les gens puis réclame quelque chose en échange. Il fait ça avec Nick.
— Il empoisonne sa mère pour l'obliger à rester. » comprit Lidonna.
Il hocha la tête pour acquiescer. A ce moment, la rouquine se sentit encore plus coupable. Elle en avait énormément voulu à Nick pour sa trahison. Mais pourquoi avait-il refusé de lui expliquer ? Pourquoi avait-il encaissé sa haine alors que Lidonna aurait parfaitement compris ? Il voulait simplement protéger sa mère, c'était tout à fait compréhensible.
« Mais alors... remarqua Firân. Pourquoi ne nous a-t-il encore rien demandé contre l'antidote ? »
Rivel secoua la tête en haussant les épaules.
« Je n'en ai aucune idée. »
Dans un même son, Firân et Lidonna laissèrent échapper un gros soupir douloureux.
« Votre deuxième mauvaise nouvelle ?
— Vas-y Lidonna, c'est à toi de leur annoncer ça aussi. » déclara Rordian.
La jeune femme hocha la tête, reconnaissante. C'était son rêve, son vécu. Elle était heureuse que le Liseur la laisse faire. Elle leur expliqua donc sa prémonition. Careil et Gia étaient dépités d'entendre ces nouvelles. Mais il fallait bien se douter que les Ombres n'allaient pas les laisser tranquilles. Ils ne cessaient de les attaquer pour qu'ils n'aient pas d'autres choix que de se défendre continuellement. Pour avoir le dessus ils devaient prendre des initiatives et pour l'instant ils n'en avaient pas le temps et avec un taupe toujours aussi indétectable, impossible de prévoir quoi que ce soit.
Careil soupira puis se prit la tête entre les mains. Ils étaient tout simplement dans une impasse. Et encore une fois ils n'avaient pas le choix de jouer le jeu des Ombres. Harrgos tirait les ficelles. Il semblait avoir tout prévu. Il n'avait pas un coup d'avance mais au moins cinq ou six.
« Réunissons le Conseil. Rivel, Firân, merci d'être venus nous prévenir. »
Ils hochèrent la tête, convenus, puis sortir.
Le Conseil n'était d'accord sur rien en ce moment. Mais le problème c'est qu'ils se disputaient. Encore. Ils ne s'écoutaient pas. Et s'ils ne s'écoutaient pas, ils ne pourraient aboutir à rien. Ce conflit portait sur tout un tas de sujets mais il était dû à une fatigue et une lassitude extrêmes.
Annuler ou ne pas annuler la fête ? Annoncer ou ne pas annoncer la mort de la véritable Éthène ? Cacher ou ne pas cacher Raya le temps qu'ils soient certains qu'elle ne risque plus rien ? Lui assigner ou ne pas lui assigner une garde rapprochée ? S'occuper en premier du de Loïs ou de celui de Raya ?
En fait, cette dernière question, Lidonna était la seule à la défendre. D'un accord tacite, ils s'étaient tous mis à débattre de la problématique de la Reine. Pourtant la rouquine n'en démordait pas. Loïs mourrait avant Raya. Ils devaient l'aider elle d'abord ! Mais elle sentait bien, que pour une première réunion en tant que membre officiel du Conseil, elle était seule.
« Nous pouvons faire un premier vote, que nous aurions dû faire dès le début. Devons-nous nous occuper de l'affaire de Loïs ou de Raya ? »
Pour la première depuis une heure ils acquiescèrent tous. Mais alors que cette question se voulait être une concession, Lidonna avait vraiment peur du résultat.
« Que ceux qui votent pour que l'on discute du problème de Loïs lève la main. »
Ils furent trois à s'exécuter. Quand Lidonna remarque qu'ils n'étaient pas assez pour gagner le vote, elle tomba de haut. Elle vit parfaitement les coups d'œil gênés de ses camarades alors qu'elle baissa lentement le bras. Puis elle lança un regard reconnaissant à Sam et Xander qui avaient pris son partie, mais trois... Ce n'était pas suffisant.
« Écoute Lidonna, commença Quire. Ça ne nous fait pas plaisir, mais pour sauver une vie nous en sacrifierons peut-être des dizaines. Ça ne vaut pas le coup. »
Elle ne comprenait pas... Ils étaient prêts à la laisser mourir en toute conscience... Ils auraient pu simplement en discuter ! Mais c'était visiblement trop pour eux. Ils avaient préféré directement enterrer le sujet pour ne plus jamais y revenir dessus.
Xander serra les poings de colère, mais tout comme Lidonna il ne fit pas de commentaires. Ils avaient voté, ils ne pouvaient rien faire. Ils ne s'occuperaient pas de Loïs et la laisseraient mourir.
Lidonna eut l'impression de ne pas assister à la suite de la réunion. Tout était flou, comme loin d'elle. Elle n'était pas concentrée et il fallait avouer qu'elle s'en fichait pas mal. Ils avaient décidé que la vie de Loïs n'était pas importante... Leurs voix paraissaient comme sourdes, elle ne distinguait pas ce qu'il se racontait. Elle était assise sur sa chaise, entre Sam et Méréla. Mais son esprit était concentré sur une phrase qui tournait en boucle : Loïs va mourir.
Elle ne sentit pas les nombreux coups d'œil que Rordian lui lançait parce que dans sa tête à lui aussi tournait cette maudite phrase. Elle ne comprit pas qu'ils tentèrent de lui demander si elle avait des idées sur comment protéger Raya. Elle n'entendit pas quand ils la questionnèrent sur son rêve. Elle était physiquement présente mais mentalement, elle était ailleurs.
« Lidonna ? Lidonna ! »
Une main secoua son épaule. Elle sortit alors de son état de choc. Et la colère s'empara d'elle. Ils ne pouvaient pas laisser son amie mourir !
« Je vais te ramener dans ta chambre. » déclara Rordian.
Lidonna ne protesta pas. Elle n'avait aucune envie de rester dans ce bureau. Elle était trop en colère pour ça. Il fallait qu'elle se calme, elle le savait. Alors elle attrapa de bon cœur la main de Rordian.
« Je suis désolé, déclara-t-il de but en blanc immédiatement quand ils furent sorti.
— Et pourquoi ? demanda-t-elle méchante.
— J'ai failli voter pour elle, mais...
— Il n'y a pas de mais. Tu n'as même pas voté pour la sœur de ton meilleur ami... »
Sa voix était pleine de reproches. Et Rordian s'en voulait vraiment.
« Je sais. J'aurais dû. Je m'en veux tellement.
— De toute façon, ta voix n'aurait rien changé. » soupira Lidonna.
La culpabilité qui pesait sur le cœur de Rordian était énorme. A tel point qu'elle était lisible sur son visage. Comment lui en vouloir ? La situation était compliquée pour tout le monde. Il s'en voulait. Lidonna n'allait pas ajouter un poids à sa charge. Alors elle resserra la pression qu'elle exerçait sur sa main et se rapprocha de lui.
Mais elle ne pouvait pas oublier Loïs. Elle ne pouvait pas ne rien faire. Le Conseil avait décidé qu'ils ne parleraient pas de Loïs, mais ils ne lui avaient jamais interdit d'essayer de la sauver. Elle devait récupérer cet antidote. Mais comment ?
Il fallait qu'elle contacte les Ombres. Dæxor ou peut-être Harrgos lui-même ?
« Nick, déclara Rordian.
— Quoi ?
— Si tu veux contacter quelqu'un, essaie Nick. » lui conseilla-t-il.
Lidonna se figea, extrêmement étonnée qu'il l'aide mais qu'en plus il lui préconise Nick.
« Tu as raison, s'expliqua-t-il. Loïs mérite qu'on se batte pour elle. Alors oui, je veux t'aider. Si tu veux bien de moi.
— Je voudrais toujours de toi. »
Il lui sourit de soulagement. Puis ils reprirent leur route.
« J'ai l'impression que tu as une idée derrière la tête, constata Lidonna.
— Tout à fait. Tu es une Rêveuse et si j'ai bien compris tu peux t'introduire dans la tête des autres quand ils dorment.
— Mais, je n'ai aucune idée de comment faire ça moi.
— Mais c'est bien pour ça que je suis là. »
Un sourire un coin se dessina sur ses lèvres. Ce sourire malicieux, Lidonna ne l'avait pas vu depuis longtemps et elle se rendit compte qu'il lui manquait. Il lui allait bien, ce sourire.
« Je te ferais remarquer que tout me va bien, mon ange. »
Elle lui offrit un grand sourire avant de l'embrasser pour le distraire de sa vantardise.
« Aller viens, allons dans ma chambre. » déclara-t-il d'un ton grivois.
Rordian ne put s'empêcher de rire face à la double lecture de sa propre phrase.
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Fin de chapitre 🥰
Voilà le Conseil a statué que le sort de Loïs était moins important que celui de Raya :((
Que pensez vous de cette décision ?
Mais heureusement Lidonna n'est plus du genre à abandonner ! Et finalement elle sera épaulée par Rordian !
Mais que pensez vous de son hésitation ?
D'ailleurs maintenant qu'on est sûr que Nick reste chez les Ombres simplement pour sa mère, votre avis le concernant a-t-il changé, ou c'est toujours le même ? 😊
En tout cas j'espère que ce chapitre vous aura plu ! Et on se retrouve la semaine prochaine !
Bisouilles 😘🦋