Lidonna était stressée constamment. Elle n'imaginait même pas si elle n'en avait pas parlé à Rordian... Au final, il avait mis au courant Xander et Firân de sa petite escapade. Ils en avaient parlé à tout le Conseil. Ils étaient donc désormais huit au courant pour Dæxor. Et donc huit à réfléchir comment sauvé les Fribhaï et les Gonzua. Presque. Firân n'était pas censé savoir et Lidonna devait acter comme si rien ne s'était passé.
« Va t'entraîner avec Sulvan, ordonna Careil. Tu ne dois pas arrêter ta routine.
— Elle peut bien louper un entraînement, grogna Rordian.
— Et puis quoi après ? Elle va louper deux entraînements ? Trois entraînements ? Et plus jamais y aller ? Comment a-t-on pu rater ton éducation à ce point ? »
Lidonna crut halluciner... Personne ne disait rien face à cette attaque. Ils se taisaient tous. Alors elle en déduisit qu'ils avaient l'habitude. Et sa mère qui soutenait son regard...
« Je vais rejoindre Sulvan, murmura la jeune fille.
— Je t'accompagne. »
La mâchoire serrée, les poings fermés, les muscles crispés.
Rordian se contenait. Il tentait de garder son calme.
Comment pouvait-on ne pas aimer ses enfants ? Même sur Hyacinthe Nils n'était pas aussi virulent avec elle. Et lui n'avait pas voulu s'occuper d'elle.
« Mes parents sont simplement deux connards. »
Elle n'imaginait pas Gia être une mauvaise mère, pas en sachant qu'elle et Willôde étaient de la même famille. Comment deux sœurs pouvaient être si différentes ?
« Et imagine, si en plus l'enfant qu'ils détestent tue celui qu'ils aiment ? »
Lidonna frissonna. Rordian n'était pas un meurtrier...
« T'en sais rien. »
Il ne voulait pas être méchant. Pas avec Lidonna. Mais parler de ses parents sans cracher toute sa haine était un exercice particulièrement difficile. A côté de lui, la tête baissée, la rouquine marchait sans savoir quoi faire. Il l'entendait vouloir engager la conversation, détendre l'atmosphère, juste l'aider... Toujours l'aider...
Ne m'en veux pas de vouloir t'aider...
Rordian sursauta.
« Toi aussi tu lis les pensées ? » tenta-t-il de plaisanter.
Rater. Ils soupirèrent tous les deux, avant de s'engager sur l'escalier de la salle d'entraînement. S'étalant sur trois étages, Sulvan appréciait les tatamis du troisième. Lidonna n'avait jamais compris ce qu'ils avaient de particuliers. Elle était plutôt persuadée qu'il la faisait monter pour l'embêter. Mais depuis le début, elle avait gagné en cardio, elle n'était donc plus essoufflée en grimpant jusqu'à la dernière salle d'entraînement.
« Le Prince t'a accompagnée aujourd'hui, remarqua Sulvan. Hum toute cette colère... je comprends mieux pourquoi tu es ici.»
Lidonna se tourna vers Rordian, surprise.
« T'es en colère contre moi ?
— Absolument pas !
— Non, ce n'est pas ce que j'ai voulu dire ! Tes parents ? » demanda Sulvan.
Rordian lui lança un regard pour lui faire comprendre qu'il rêvait s'il attendait une réponse.
« Vous devriez vous entraîner ensemble.
— Toi, tu me laisserais ta place ?
— Tu verrais les progrès de ta copine et tu te libérerais.
— Mais encore ?
— ça fait combien de temps que tu ne t'es pas entraîné ? Je veux te voir te faire battre.
— C'est donc ça. »
Rordian se tourna vers Lidonna.
« Ça te dis ? lui demanda-t-il.
— Te battre ? Bien évidemment.
— On va voir qui battra qui. »
Rordian avait retrouvé son sourire en coin.
Ils s'échauffèrent. Certes, dans un réel combat pas le temps de s'échauffer, mais autant ne pas se claquer un muscle pendant un entraînement.
« Ne me ménage pas, parce que moi je ne le ferai pas, déclara le Liseur.
— La dernière fois que Sulvan a dit ça, je l'ai laminé.
— Prêts ? demanda l'Empathe.
— Prêt. » répondirent-ils.
Alors le combat commença.
Lidonna avait toujours plutôt été sur la défensive. Elle n'était du genre à attaquer, alors elle attendait Rordian. Mais évidemment, pour quelqu'un qui ne voulait pas la ménager, il hésitait. Hésitation que la rouquine saisit. Des coups dans les jambes bien placés et Rordian se retrouva au sol.
Il se releva instantanément, un peu vexé.
« Fallait pas hésiter.» se moqua-t-elle.
Pendant que Lidonna avait baissé sa garde en le narguant il attaqua. Mais la jeune fille para chacun de ses coups. L'incompréhension commença à monter en lui. Alors il arrêta de retenir quoi que ce soit. Lidonna n'avait vraiment pas besoin d'être ménagée.
Il essaya tout. L'attaque, la défense, la surprise. Rien n'y faisait. Il s'épuisait alors que la rouquine ne recevait aucun coup. C'était comme si Lidonna avait toujours un coup d'avance. Pourtant c'était Rordian qui lisait dans les pensées pas elle ! Cependant quelque chose n'allait pas avec son pouvoir...
Lidonna s'apprêta à lui mettre le coup de grâce, mais il l'arrêta :
« C'est bon ! J'abandonne ! T'as gagné !»
Un sourire triomphant se dessina sur les lèvres de la rouquine. Mais Rordian ne partageait pas son humeur.
« Arrête d'être mauvais perdant, bougonna-t-elle devant l'air de son petit-ami.
— Je suis pas mauvais perdant, répliqua-t-il.
— Alors souris ! Réjouis-toi que je puisse te battre maintenant.»
Il secoua la tête. Il aurait aimé. Il le ferait, juste après être sûr que le souci ce soit lui.
« Sulvan, attaque-moi.
— Avec plaisir.»
Il s'approcha rapidement.
L'épaule droite, c'est un bon point.
A peine son poing parti, que Rordian le détourna de sa cible. Il attrapa son bras et le bloqua dans son dos.
« Même après un combat je te bas. » persifla le Liseur.
Il le lâcha et Sulvan se dégagea avec colère.
« Pourquoi tu lui as demandé de t'attaquer ? s'étonna Lidonna.
— On a un problème, et ce n'est pas moi.
— C'est un problème que je te batte ? répliqua-t-elle.
— Non, c'est même plutôt logique. J'ai beau lire dans les pensées, je ne suis pas un combattant contrairement à toi. Mais ta progression est trop explosive. Elle n'est pas n'est pas normale.
— Pourquoi tu penses ça ?
— Tu as prévu, tous mes coups. Tu ne t'en es pas pris un.
— Peut-être qu'elle est juste extrêmement forte, ou tu es particulièrement mauvais, répliqua Sulvan.
— L'Empathe va redescendre d'un étage, parce que si je suis particulièrement mauvais, je ne sais même pas pourquoi tu l'entraîne alors que j'ai paré facilement le premier coup que tu m'as lancé, lança-t-il avant de retourner son attention vers Lidonna. Je ne serais même pas étonné que tu remportes un combat un contre deux voire contre trois.
— Qu'est-ce qui te fait penser ça ?
— Tes pensées. C'était un bordel pas possible. Tu réfléchissais à cent à l'heure, mais pas de façon normale. C'était comme si tout était en accéléré. C'est dur à expliquer comme sensation. Mais pas normal. »
« Pas normal »... Lidonna en avait assez de ne pas être normale. Pourquoi ne pouvait-elle juste pas savoir bien se défendre ? Non il fallait que ce soit du à quelque chose d'anormal.
« Je suis désolé, murmura Rordian.
— Je vais voir Loïs. »
Dans son dos, elle entendit Sulvan et Rordian la rappeler, mais elle les ignora. Personne ne pourrait jamais comprendre le mal que lui faisait d'être différente ou anormale. Être regardée avec pitié ou dégoût. Être le rat de laboratoire.
Loïs était encore dans l'infirmerie.
« Ça va pas ? demanda son amie, Lidonna à peine entrée dans sa chambre.
— Je suis destinée à être en marge de la société.
— Pourquoi ?
— Il parait que je me bas trop bien pour que ce soit normal.
— Oh... Au moins tu te bas bien ! »
Lidonna ne put s'empêcher de rire. Loïs était nulle pour trouver les mots, et pourtant elle avait réussi à réconforter la rouquine de sa bonne humeur. L'Empathe allait tellement mieux, que Lidonna oubliait tous ses malheurs en venant rendre visite à son amie. Sa peau avait repris des couleurs et des formes. Elle avait perdu beaucoup de muscle, mais au moins on ne voyait plus ses os. Elle avait fait recolorer ses cheveux, redonnant des éclats à tout son visage.
Loïs se leva et enlaça Lidonna.
« Tu m'emmènes faire un tour s'il te plaît ?
— Je ne sais pas si c'est une bonne idée... Si Firân ou Camaé ne te laisse pas sortir...
— C'est juste pour que je ne m'énerve pas en voyant tout ce que mes frères m'ont caché ! la coupa-t-elle. Ils ne m'ont pas laissé voir Calyopé... »
Elle baissa la tête, les yeux remplis de tristesse.
« Je sais qu'elle est réveillée et je n'ai même pas le droit de la voir. Tu crois qu'elle m'a réclamée ?
— Attends, elle est réveillée ?
— Tu ne savais pas ?
— On n'a jamais été très amies. »
La porte de la chambre s'ouvrit, laissant entrer Firân. Loïs se rua vers lui, le suppliant de la laisser sortir.
« Justement, j'étais là pour ça. Il est temps pour toi de découvrir les Papillons. »
Il la laissa passer, sortir de l'infirmerie, et tomber sur un couloir.
« Qu'est-ce que tu voudrais faire en premier ?
— Voir Calyopé. »
Son frère détourna la tête, gêné et s'empressa de lui demander :
« Tu ne veux pas plutôt te balader ?
— Bon, allons nous balader alors, soupira-t-elle. Tu viens Lidonna ?
— Bien sûr ! »
Firân passa ses bras autour des épaules des deux filles. Ils se mirent à rire jusqu'à ce que Loïs aperçoive le hall. Cette salle magnifiquement éblouissante, baignée de lumière. Les grandes fenêtres laissaient le soleil se répercuter contre la colonne de verre qui s'élevait au centre la pièce.
« Comment est-ce que tu as fait pour me cacher ça tout ce temps ?! C'est juste énorme ! Tout est comme ça ici ? Mais je signe direct pour faire partie des Papillons !
— ça fait du bien de te retrouver Loïs.»
Il la prit dans ses bras, entraînant Lidonna dans le câlin.
« Ça fait du bien de me retrouver. » murmura-t-elle.
Elle serra ses bras autour de ses deux compagnons.
« Tu entendais quelque chose pendant ton coma ? questionna Lidonna quand ils reprirent leur marche.
— Non. Rien. »
La rouquine ne put s'empêcher de penser que tout leurs efforts pour atteindre son cerveau avait donc été vain, mais au moins, leurs secrets seraient bien gardés. Ils marchaient et parlaient comme si de rien n'était, comme si tout était normal. Pourtant Lidonna voyait bien que son amie était ailleurs. Elle voulait voir sa petite amie. Et elle ne comprenait même pas qu'on le lui refuse. A moins qu'il se soit passé quelque chose dont elle n'était pas au courant.
Pourtant c'est jusqu'à la zone des malades que leurs pas les guidèrent. Firân n'avait pas omis la tristesse de sa petite sœur. Il ne pouvait rien lui refuser même s'il savait ce qui l'attendait.
Loïs ne savait pas où ils se trouvaient, alors quand Calyopé apparut sous ses yeux, elle se figea, se demandant si elle était dans un rêve. Et si ses yeux à elle affichait un bonheur pure et immense ceux de la Soigneuse lui offrait de l'appréhension. Pourquoi ? A cause de l'état de son physique. Loïs ne semblait même pas apercevoir qu'elle avait bien changé. Elle la regardait dans les yeux, ses iris brillants d'amour.
Un sourire forcé s'afficha sur le visage de Calyopé.
« Je suis hideuse n'est-ce pas ? » tenta-t-elle de rire.
Loïs sembla à peine remarquer l'état de sa petite amie. Ses lèvres se cassèrent et d'un coup de la peur s'afficha dans son regard.
« Tu vas bien ?
— Oui. »
Calyopé baissa les yeux devant son mensonge.
« Non tu ne vas pas, répondit l'Empathe.
— Évidemment que je ne vais pas bien ! Tu as vu mon état ! Loïs, je ne suis plus la même à l'intérieure. J'ai changé. Je ne pourrais plus jamais me battre. Je vais devoir rééduquer ma jambe ! Même avec des béquilles je peine à marcher ! Alors bien sûr que je ne vais pas bien ! Qu'est-ce que tu croyais ? Que tout allait être comme avant ? »
La pauvre laissait exprimer toute sa rage et sa peine. Le cœur de Loïs se brisait à chaque mot.
« Mais nous on t'aidera, répliqua-t-elle d'une toute petite voix.
— Non, Loïs, non. Je ne vais pas rester ici. Dès que je peux, je pars.
— Je viendrais te voir chez...
— Arrête Loïs ! Tu ne viendras nulle part. Je te l'ai dit j'ai changé. Je suis brisée, et je n'ai pas de place pour aimer quelqu'un d'autre.
— Calié, qu'est-ce que tu fais ?
— Tu sais ce que je fais.
— Mais tu ne peux pas...
— Pourtant c'est ce que je fais. Je romps avec toi Loïs. Nous deux ça n'aboutira à plus rien. Je suis tellement désolée. »
Elle essuya ses yeux puis se tourna pour partir. Firân se précipita vers sa sœur. Il la prit dans ses bras alors qu'elle fondait en larmes. Lidonna la regarda désemparée. Elle ne savait pas ce qu'elle devait faire. Elle était tellement peu douée quand il s'agissait de réconfort. Puis elle se dit qu'elle avait déjà son frère, Lidonna serait de trop si elle restait.
Elle se retira discrètement. Les images de la rupture tournaient en rond dans son esprit. Elle se sentait tellement mal pour Loïs, puis un peu plus égoïstement, elle avait une peur bleue que Rordian lui fasse la même chose... Elle se rendit compte qu'elle n'avait aucune envie que ça se termine. Il était devenu un pilier pour elle, une marque de confiance. Sans lui elle se retrouverait totalement perdue. Et dire que lors de leur première rencontre elle avait cru ne jamais réussir à lui faire confiance. Sa vie sur Hyacinthe lui semblait si loin à présent, pourtant sa nouvelle vie n'avait démarré que sept mois auparavant. Il lui était arrivé tant de chose. Entre les entraînements, les combats, les morts les enlèvements, les trahisons, sa vie n'avait pas été de tout repos. Tout s'était enchaîné si vite...
Et elle savait que tout allait s'accélérer encore plus.
Perdue dans ses pensées elle ne remarqua pas la personne ne face d'elle et lui rentra dedans de pleine force. Quand Sam se tourna, Lidonna se jeta à son cou. Elle ne l'avait pas vu depuis tellement de temps. Toujours trop occupé à tout.
Lui aussi était devenu un pilier de sa vie, bien que pendant leur première rencontre il avait tenté de la tuer. Sa vie avait vraiment été mouvementée, et c'est vrai que parfois elle aurait aimé revenir à Hyacinthe, mais quand elle voyait ceux qu'elle aimait, elle effaçait cette pensée de son esprit.
« Tu me manques tellement, murmura-t-il.
— Toi aussi tu me manques, répondit la rouquine.
— ça va tu gères ? »
Comprenant parfaitement de quoi il voulait parler, elle eut une soudaine envie de pleurer et de se laisser aller dans ses bras. Mais elle se retint et se contenta de répondre :
« Je n'ai pas vraiment le choix...»
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Fin de chapitre 🥰
Ça y est je suis de retour de vacances donc voilà la chapitre de la semaine dernière 😂
C'était le dernier chapitre que j'ai écrit il y a trois ans, samedi vous aurez le droit à un chapitre écrit il y a deux mois 😱 j'espère que le style sera meilleure puisque j'ai eu trois ans pour m'améliorer 😂😂
Pour en revenir à ce chapitre je n'aurais que deux questions 😊
- Quel est votre avis concernant Calyopé qui rompt avec Loïs ? :((
- Que pensez vous de la relation entre Lidonna et Rordian et celle entre Sam et Lidonna ? Pensez comme elle qu'ils sont devenus des piliers de sa vie ? 😊
Voilà ! J'espère que le chapitre vous aura plus ! Et on se retrouve samedi 😍
Bisouilles 😘🦋