Participations au concours d'...

By madelydel

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Chaque chapitre posté correspond à une participation au concours d'écriture du Discord de Tiboudouboudou. More

Je vois de la neige
Tokyo
La chanson de la mariée
A toi qui vis tant d'années plus tard
Uskoks tenez-vous fiers et braves
La première femme
Ana
Le genre de fille qu'on enchaîne
Une marche, puis une autre, puis une autre
L'amour de ma vie
Je veux jouer Cyrano
L'affrontement final

Maintenant je sais qui je suis

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By madelydel

Thème (approximatif) du concours : Vous avez perdu la mémoire. Ce n'est pas un simple oubli, quelqu'un vous a volontairement pris vos souvenirs. Allez-vous partir à la poursuite de ceux qui ont volé votre vie ? Ou allez-vous choisir de repartir à zéro ?


23 octobre 2044

Aujourd'hui j'ai un mal de tête terrible. Une douleur lancinante, une sirène hurlant sous mon crâne qui refuse de se taire. Elle m'a réveillé ce matin et m'a accompagné toute la journée. Le tremblement de la cafetière sur la table est devenu un séisme, les tapotements des doigts sur mon écran au bureau imitaient le martellement du sol par un troupeau d'éléphants et même la délicate sonnerie de mon téléphone semblait remplacée par la grandiloquence d'un opéra de Mozart. Seul le bus m'a détendu, le bus est silencieux, il glisse, presque en lévitation, et ne produit pas le moindre bruit. Le bus est calme.

Il est l'opposé de moi. Depuis des jours je sens cette étrange tension monter en moi, grandir peu à peu. Elle n'était à l'origine qu'une minuscule boule pressant contre mon cœur. Mais depuis, à chaque heure, à chaque seconde peut-être, elle s'est insinuée dans mes muscles, dans mes veines, jusqu'à serrer ma gorge, alourdir mes jambes et, ce matin, emprisonner mon crâne dans cet étau brûlant.

Que m'arrive-t-il ? Je ressens, quelque part au creux de l'estomac, la sensation étrange de manquer.

Manquer de quoi ? J'ai tout pour être heureux : un appartement pratique et agréable, un travail épanouissant, de quoi manger, de quoi me distraire. Je ne manque de rien !

Manquer de qui alors ? C'est une autre question. Peut-être est-ce cela, je me sens seul. Peut-être suis-je arrivé au moment de ma vie où mon célibat commence à me peser. J'avance seul depuis si longtemps. Depuis... Depuis si longtemps qu'il me semble ne même plus m'en souvenir.

25 octobre 2044

La douleur est partie. Mais elle a laissé place à autre chose. Et en fin de compte, je réalise que j'aurais peut-être préféré continuer à souffrir. Le sentiment de manque, la tension fantôme, tout a laissé place à autre chose. Une sensation encore plus déstabilisante, face à laquelle je suis totalement impuissant.

J'ai, depuis quelques heures maintenant, des sortes de flashs. Comme des bribes d'un rêve dont on m'aurait réveillé trop abruptement et qui ne souhaiterait pas me quitter. Dans une lumière blanche, vaporeuse, rendant les contours flous, les textures impalpables, je discerne par instants un sourire, un éclat de malice au fond d'un œil bleu ou une poupée trainant sur le sol. Je ressens sur ma peau le contact de la dentelle d'une robe, j'entends un rire. Lointain, perdu. Le rire d'un enfant. Souvenir ou rêve ? Je penche pour le rêve.

Aussi douces que soient ces images, elles me laissent un goût amer, me font perdre pied lorsque je marche dans la rue. Elles nouent un sanglot au fond de ma gorge, auquel je ne peux pas donner corps, car je n'en vois pas l'origine. Quelque chose m'échappe pour guérir de ce mal. Si seulement je pouvais saisir ces images, attraper du bout des doigts la robe qui ne fait qu'effleurer ma peau. Si seulement je comprenais.

Mais rien ne vient. C'est comme si mon corps savait une chose que mon esprit ignore. Une chose merveilleuse.

26 octobre 2044

Dan est passé aujourd'hui m'apporter mon traitement de l'humeur. Que ferais-je sans lui ? Il est mon médecin depuis toujours, mon ami depuis autant. Il est un peu un frère aussi, un grand frère protecteur et taquin. Il m'a surpris allongé dans mon canapé, épuisé par ces images qui m'étouffent.

Grâce à ce traitement antipsychotique, Dan est parvenu à un miracle psychiatrique, empêcher un malade tel que moi d'être un danger, pour lui comme pour les autres. J'ai toujours pris ce traitement, d'aussi loin que je me souvienne. Il me permet de voir le monde tel qu'il est réellement, et non pas sous un filtre obscur qui lui ferait perdre tout son sens.

Il me reste à régler le problème de ce sourire, qui ne me quitte plus. C'est celui d'une femme je crois. Doux, tendre, peut-être même aimant. Je ne le reconnais pas et pourtant, il fait naitre en moi ce je-ne-sais-quoi de réconfortant, une vague de chaleur moite dans laquelle on ne souhaite que se lover pour s'endormir. S'il n'éveillait pas aussi ce malaise dans ma poitrine, je souhaiterais presque ne plus voir que lui.

30 octobre 2044

Le sourire s'est transformé en grimace. Et il parle à présent, ces lèvres si délicates se tordent et débitent des paroles que je peine à comprendre. Elles ne les débitent pas vraiment d'ailleurs, la vérité, celle qui me glace, c'est qu'elles les hurlent. Ce sourire, si chaleureux il y a encore quelques jours, ce sourire qui me rappelait un magnifique bonheur qui n'aurait pas encore eu lieu, est maintenant en train de me persécuter. Il me supplie, il m'interroge, me pose mille questions, hurle ! Pourquoi ? A cause de qui ? Contre qui ?

Je commence à m'interroger, à m'inquiéter même, les flashs sont de plus en plus présents et je n'ai pas envie de les ignorer plus longtemps. J'ai appelé Dan, il m'a dit de me reposer, que cela passerait si, et seulement si, je n'y prêtais pas attention. Mais... Je commence à douter de son conseil. Pour la première fois de ma vie d'ailleurs. Il y a, dans les suppliques de cette bouche, quelque chose qui m'attire. Je sais que je suis concerné, que je suis en première ligne de sa détresse. Peut-être devrais-je la protéger ?

Peut-être aurais-je dû la protéger ?

Cette idée m'a réveillé en sursaut cette nuit. J'avais entendu parler d'inhibiteurs de mémoire, ils existent depuis quelques années pour aider les personnes traumatisées à se remettre de leur mal et à reprendre une vie plus facile. Ils oublient leurs traumatismes, ils oublient leur peine. Peut-être est-ce mon cas.

Aurais-je vécu une épreuve telle que les médecins m'aient jugé comme ayant besoin de ce traitement ? Mais alors, à qui est ce sourire ? Et quel affreux secret peuvent dissimuler d'aussi jolies lèvres.

3 novembre 2044

Je ne peux plus vivre ainsi. J'ai fait des recherches sur les inhibiteurs. C'est une substance qui, injectée au bon endroit du cortex (un gyrus chargé de la mémoire) permet au sujet d'oublier une période précise de sa vie ainsi que la prise du traitement. Je n'ai plus aucun doute. J'ai subi cette opération. D'après certains forums alarmistes dont je me serais moqué jusqu'à présent, la mémoire peut revenir par bribes dans certains cas. Si la personne ne souhaitait pas réellement oublier.

Je ne voulais pas oublier ! Je ne voulais pas oublier j'en suis sûr ! Comment aurais-je pu ? Ce rire que j'entends est un chant de cigales. L'enfant que j'ai fait rire ainsi devait être une merveille. Pourquoi aurais-je pu vouloir l'oublier ? Et ce sourire... Cette femme dont je ne sais rien fait pourtant s'emballer mon cœur, je n'invente rien ! Je les ressens dans mon corps, aucun produit chimique ne peut changer ça. Ces deux fantômes de mon passé sont inscrits au plus profond de moi.

Je dois me rendre à l'évidence. Je les aimais. Cette femme, cet enfant, une petite fille je pense, je les ai aimées de toute mon âme. Où sont-elles ? Pourquoi me les a-t-on fait oublier ? Et comment ai-je pu croire un seul instant que je souhaitais vraiment les effacer ?

Je reprends mon écriture après quelques heures de réflexion. La raison de ma décision inconcevable d'oublier m'est apparue, limpide. La seule douleur qui aurait pu me pousser au désespoir, à tel point que je souhaite effacer leur présence de mon âme, la seule raison de mon choix fou, est que ces deux anges que j'ai tant aimés, peut-être, m'ont-ils trahi. Peut-être les deux femmes de ma vie m'ont-elles abandonné. Et moi, dans un élan de faiblesse, j'ai pensé que la douleur de les avoir perdues était trop forte pour la joie que j'avais eu de les connaître. J'avais choisi de les oublier. Mais aujourd'hui je dois bien accepter que, mon corps ne veut pas les oublier. Quoiqu'elles m'aient fait, je ne veux pas les effacer de mon cœur.

Je vais demander à Dan de m'injecter un déshinibiteur, je sais qu'il en existe. S'il est mon ami, il acceptera bien. Je me sens prêt, à présent, à tolérer tout ce que mes aimées auraient pu me faire subir. Je veux simplement me souvenir d'elles.

4 novembre 2044

Dan refuse. Je l'ai appelé dans la journée, il a refusé. Tout simplement, tout naturellement. Il dit que je me fais des idées. Mais moi je sais ! Il me ment ! Sa trahison m'est, pire qu'intolérable, incompréhensible. Peut-être ne me croit-il pas assez fort ? Mais je ne me laisserai pas diriger par lui. Pas cette fois. Aujourd'hui je suis stable, grâce à lui aussi. Je veux affronter ce que j'ai subi. Je souffrirai, sans doute. Mais cette souffrance fait partie de mon histoire, je ne veux pas l'amputer comme un membre gangréné. Je veux vivre avec. C'est ma décision.

5 novembre 2044

J'ai harcelé Dan toute la journée. Je lui ai montré l'étendue de ma détermination et j'ai tenté de le faire avec le plus de calme possible. Je dois lui prouver que je suis stable, solide et que, quelle qu'ait été la blessure qu'on m'a infligé et sa profondeur, je serais capable de l'accueillir et de la guérir par moi-même, comme tout Homme doit le faire à un moment ou à un autre.

Il a finalement accepté de me recevoir, demain, il m'expliquera tout a-t-il dit. Il m'injectera le déshinibiteur « si tu le souhaites » a-t-il dit. Je suis sûr de le souhaiter.

Mon ami m'a inquiété cela dit. Il ne m'a pas fait douter de ma résolution mais... Ses paroles étaient étranges, très nébuleuses. Je n'ai pas tout compris. Il a conclu notre appel par une phrase quasiment mystique, on l'aurait dit sortie d'un mauvais livre de philosophie.

Malgré mon appréhension, j'ai hâte d'être à demain. Je vais connaître ma vie, dans son entièreté, et je pourrai vivre avec. Je sais que j'en serai capable, quelles que soient les fautes des gens que j'ai aimés, quelles que soient les miennes aussi, car nul n'est tout blanc lorsqu'il fait des choix.

6 novembre 2044

Dan a utilisé le déshinibiteur. Je sais maintenant. Et je n'aurais pas dû. Je me suis cru fort, je me suis cru noble. Pendant un instant, je me suis même cru victime. J'avais tort. Le sourire de ma femme a maintenant, tout un visage pour lui tenir compagnie. Ce visage me hante chaque fois que je cligne des yeux. Et le rire imitant les cigales est celui de ma fille. Etait plutôt. Par ma faute.

Je croyais avoir toujours été sous traitement. Je me trompais. Fut un temps où la vie me semblait vide de sens, le monde cruel et mes semblables condamnés à la souffrance. Alors j'ai

C'est étrange, je ne parviens même pas à l'écrire. Suis-je lâche à ce point ? Il semblerait. C'est pour cela que Dan m'a injecté l'inhibiteur la première fois. Je comprends maintenant sa question d'hier, qui m'avait paru si risible.

« Préfères-tu te savoir un monstre, ou te croire un homme bien ? »

Maintenant je sais qui je suis. Et je me hais.

La nuit est glaciale et je ne peux pas dormir. J'ai pris ma décision. Je retourne le voir. Entre le monstre et l'homme bien, entre la conscience et l'ignorance, j'ai choisi. Et tant pis si je suis lâche. Tant pis si je suis un homme faible, misérable, pathétique et méprisable. Tant pis, demain matin, je n'en aurai plus conscience.

7 novembre 2044

Ceci est la première phrase de mon « journal intime », bien que ce terme me fasse passer pour une adolescente, il reste approprié. C'est Dan qui m'a conseillé d'en tenir un, il me l'a donné aujourd'hui même. Cela aidera à doser mon traitement antipsychotique et à canaliser mes potentielles angoisses. Mais pour le moment, tout va bien. Je me sens bien.

...

3 décembre 2044

Aujourd'hui au travail, une de mes collègues est revenue de son congé maternité et nous a présenté son bébé. Une petite fille adorable. Antoine a agité son hochet devant elle et l'enfant a éclaté de rire. Je ne sais pas pourquoi mais ce rire a éveillé en moi un sentiment de bonheur extrême et, pour la même inexplicable raison, j'ai senti des larmes me monter aux yeux. Sans doute parce que ce petit éclat de rire était la chose la plus charmante que j'ai entendue. Il ressemblait au chant des cigales. J'ai prié pour que cette petite fille vive heureuse longtemps, que personne ne lui fasse jamais perdre son rire. Mais quel genre de monstre pourrait faire une telle chose ?

...

12 juillet 2045

Aujourd'hui j'ai un mal de tête terrible. Une douleur lancinante, une sirène hurlant sous mon crâne qui refuse de se taire. Elle m'a réveillé ce matin et m'a accompagné toute la journée. Le tremblement de la cafetière sur la table est devenu un séisme, les tapotements des doigts sur mon écran au bureau imitaient le martellement du sol par un troupeau d'éléphants et même la délicate sonnerie de mon téléphone semblait remplacée par la grandiloquence d'un opéra de Mozart. Seul le bus m'a détendu, le bus est silencieux, il glisse, presque en lévitation, et ne produit pas le moindre bruit. Le bus est calme.

Il est l'opposé de moi.

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