Le lendemain, avant que l'aube pointe du nez, Mme Soko arriva avec un panier rempli de produits de beauté. Elle réveilla l'adolescente, lui prépara un bain, qu'elle soupoudra de feuille à la menthe, alluma de l'ensens pour bien parfumer la chambre. Puis, une fois Lilith levée, elle la conduisit vers la baignoire, lui conseillant de bien se laver. Lilith avait l'impression qu'on doutait de son hygène. La vieille dame brossa ensuite sa chevelure en y mettant de l'eau de rose avant de lui dicter les vêtements à porter, un ensemble de robe gris bleuté longue avec des sandales de coton. Sobre, décent. Lilith n'était pas d'humeur à discuter, elle était suffisement anxieuse à l'idée de rencontrer le criminnel qui avait été à l'origine de son kidnapping.
- Yoko san a le sang du Dragon. Feu, tenacité et audace, opina la vieille femme, pour l'encourager. Tout se passera bien, Yoko san
Mme Soko appliqua de la crème sur son visage, ses mains son cou. Aucune partie fut oubliée, même ses pieds furent hydratés. Elle avait le sentiment d'être une mariée qui s'apprête à recevoir l'approbation de son époux.
- J'aimerai en être convaincue, fit l'adolescente, sombrement
Elle n'était pas prête. Elle l'avait répétée mille fois à Ken, mais il n'avait pas voulu écouter. Elle regarda avec dédain le pendentif qui reposait sur la table de chevet. Il lui semblait qu'il émettait une onde négative. Elle décida de ne pas le porter, au diable le yakuza!
Ken vint la chercher. Il la contempla dans un mutisme glacial. Lilith ne força pas la conversation, elle en avait assez de tenter de complaire les attentes et aspirations de tous et chacun. Qui souciait de répondre à ses besoins à elle? Ici, tout ce qui comptait c'était la famille!
- Avant de te présenter à Goda, tu dois apprendre les 9 lois de cette famille l'instruisit Ken, brissant le silence
Lilith soupira. Cette maison avait plus de règles que dans un monastère. Elle le suivit jusqu'au bout du couloir qui était désert.
- Primo, le plus essentiel c'est de ne pas offenser les bons citoyens. Il faut se montrer cool, traiter les non initiés, c'est-à-dire la population locale comme des petits chiots innocents
- Je suis une chienne innocente? S'enquit-elle
- T'es innocente. Tu es une fille, une étrangère, un oeuf sorti de la poule, quoi
Lilith eut l'impression qu'il la prennait davantage pour une écervélée.
- Secundo, tu ne prendras pas la femme du voisin, fit le beau brun, avec une grimace étrange. Goda y tient morticus. Il a déjà expédié ton grand-père loin dans les entrailles du Japon pour avoir un peu trop fricotté avec sa belle-soeur. Famille c'est sacré.
Lilith retint cette information. Peut-être était-ce pour cela que Kaeto n'avait pas éte élevé par ses parents.
- Quelle belle-soeur?
- Pas important.
Elle trouvait au contraire que cela méritait sa place parmis les secrets d'Etat à transmettre au peuple. Mais Ken ne souhaitait vraiment pas s'y attarder.
Ils arrivèrent devant la porte à codes. Il tapa quelques chiffres.
- Identifiez-vous, fit une voix métallique
Ken regarda la caméra.
La porte s'ouvrit. Lilith retint son souffle alors qu'ils longeaient un vaste couloir aux murs tapissés d'illustres toiles. Chacune d'entre elles représentait la vie quotidienne des anciens seigneurs et leurs familles. Des lampes illuminaient chaque recoin du couloir. Plusieurs portes rouges sang contrastaient avec le couloir doré. Tout était immensement luxeux.
- Tertio, tu ne voleras pas la famille, poursuivit Ken, indifférent au décor. Pour éviter des problèmes, oncle Asami gère les finances, si il manque un yen, il fouillera jusqu'au fond des poubelles pour le trouver
- Est-ce que je rencontrerai un jour toute la famille? Demanda-t-elle en apercevant quelques gardes qui patrouillaient les lieux, tous vêtus de noir, tous le visage féroce et intimidant
- Quand tu seras prête, répondit Ken, sec
Elle remarqua que plusieurs des gardes leur jetaient un regard peu amène comme si il s'opposait à sa présence sur ces lieux. Elle bomba le torse. Bande de cons!
- Quatro, tu ne te drogueras pas, poursuivit Ken en faisant un signe à un des hommes qui signalait leur présence par cellulaire. On fait du bussines, un homme esclave de son vice ne peut pas servir deux maitres.
Elle fut surprise de constater que même les criminnels avaient des standards.
- Rien à signaler, fit le garde
- Le boss? Questionna Ken
- Il est avec God. Il n'a pas dormi de la nuit
Lilith fronça les sourcils, ne comprennant pas cet étrange échange. Qui était God? Le boss n'avait pas dormi? Cela sous-entendait une conversation privilégiée avec l'au-délà? Ken poursuivit son chemin.
- Quinto, tu devras obéissance et respect à ton supérieur, fit-il. Faut vraiment travailler très fort cette clause.
- Je m'y aplique, renchigna Lilith. Ce serait facile si l'autre partie me respectait aussi
Ils croissèrent une bonne qui portait un enfant enveloppé dans une serviette. De toute évidence il sortait du bain et claquait les mains heureux heureux d'en être sorti vivant. Sa présence était insolite au milieu d'une bande de yakuzas.
- Ken san, l'interpella la bonne. La maitresse voudrait que vous alliez vérifier ce qui est arrivé à sa voiture
- D'accord, je m'en occupe
Lilith n'aimait pas la demande faite par la bonne, c'était comme si Ken était un simple employé! L'enfant poussa un petit cri strident, détournant ainsi leur attention. Ken pinça son nez et il partit d'un gazouillement sonore.
- Il ne voulait pas sortir du bain, expliqua la femme avec un doux sourire. C'est un enfant robuste comme son papa
- Préparez-le, le Houda voudra le voir avant de partir
- D'accord
Lilith se demanda bien qui était le géniteur. Cela se pouvait-il qu'il soit de Ken? Elle se retint de rire.
- Qui est le...
- Sexto, tu accepteras de mourir pour ton Houda où aller en prison pour lui, fit Ken en poursuivant son chemin, sourd à sa question. D'ailleurs le fils d'Ayame purge une peine en ce moment. Quand il sortira, il sera promu au sein de la famille. C'est un grand honneur.
Lilith n'était pas du tout prête à aller en prison pour qui que ce fut.
- Septimo, tu ne parleras de la famille à quiconque qui n'est pas des nôtres.
Son ton était lugubre. Elle inspecta les murs, le couloir, ne vit pas de caméras nulle part, se pourrait-il que l'allée des dortoirs soit moins surveillée?
- Même si je parlais personne me croirait, soupira Lilith
- Ce n'est pas un choix, insista Ken sombrement. Pour tous ceux qui travaillent ici, tu es une invitée. Ta responsabilité c'est de ne pas leur causer des problèmes. Le boss ne serait pas aussi clément si par ta faute, un autre accident arrivait
- Ma faute? Je n'ai pas demandé à être frappée! Si Akira avait fait sa job je ...
- Akira a fait ce pourquoi il était entrainé, coupa Ken. Tu ne peux pas parler d'affaires que tu ne comprends pas
- Si tu m'expliquais ça illuminirait mon pauvre cerveau de femme!
Il la toissa de haut. Elle tint tête. Elle avait assez de son attitude! Il était peut-être plus grand et robuste mais elle avait sa langue comme arme.
Son cellulaire sonna. Ken décrocha;
- Pas maintenant, grommela-t-il
Elle entendit distinctivement le cri de frustration typiquement féminin avant que Ken raccroche. Le cellulaire sonna de nouveau, il le mit en sourdine.
- Octavo, il n'est pas permis de fréquenter un katagi sans la permission de Goda, poursuivit le beau brun, en lui tournant le dos
Elle soupira, et lui emboita le pas. Visiblement il fuyait la confrontation!
- Qu'est ce un katagi? Demanda-t-elle, tendue
- Un étranger à la famille
Elle songea à ses parents. Était-ce la raison pour laquelle Kaeto avait coupé les ponts avec eux? Elle ouvrit la bouche pour demander plus d'explication.
- Goda déjeune tôt, l'informa-t-il, d'une voix tranchante
Il frappa à une porte gardée par deux hommes, toujours remonté.
- Quel est le neuvième commandement? Souffla-t-elle, entre les dents
Ken eut un sourire sans joie .
- Tu vas bientôt le découvrir, fit-il en poussant la porte baignée d'or