— Je ne pourrai pas venir au stade aujourd'hui mon ange.
— Pourquoi Maman ? Tu m'as dit hier que tu allais mieux. Je voulais que tu me vois marquer un but.
— Je sais trésor. Moi aussi j'ai envie de voir mon champion en action. Viens me faire un câlin.
Une femme très pale et maigre, couchée dans un lit, tient son fils dans ses bras comme si c'est la dernière fois qu'elle le verrait. Le petit garçon enlace sa mère tendrement, ne pouvant la quitter. Lorsqu'il ouvre les yeux, il tombe nez à nez avec une bouteille de whisky à moitié vide sur la table de chevet. Lorsqu'elle le remarque, elle se dégage avec délicatesse de cette étreinte pour ne pas le brusquer. Ce dernier est habitué à la voir boire, il a de la peine.
— Tu devrais y aller, Julien et toi devez garder le moral haut pour le match. Et ne t'inquiète pas, je te soutiendrai depuis la maison.
— Julien est nul au football ! On lui prend toujours le ballon. Si il n'était pas mon meilleur ami, j'aurais arrêté de le fréquenter. Il me fout la honte.
— Chéri, tu n'as pas le droit de dire ça. Jul n'est pas seulement un ami pour toi, c'est ton frère. Lorsque quelqu'un t'embête à l'école, il est le premier à prendre ta défense, quand tu fais des bêtises, il dit toujours que c'est lui le fautif, quand tu dis que tu veux quelque chose, il fait tout pour te l'obtenir. Julien est prêt à plein de choses pour toi, et c'est comme ça que toi tu le vois ?
Le petit garçon à la chevelure noire de jais baisse la tête, rouge de honte devant sa mère. Il regrette ses paroles et s'excuse. C'est vrai que son meilleur ami est très spécial pour lui, il est si important à ses yeux qu'il ne peut imaginer sa vie sans lui.
— Ce n'est pas à moi que tu dois des excuses. Je veux que tu comprennes que le lien que vous partagez est bien plus important que ça. Tu es jeune, mais je sais q-
La femme tousse violemment. Du sang jaillit de sa bouche, elle se tient le ventre parce qu'elle ressent une douleur abominable lui déchirant les entrailles. Le petit garçon panique et soutient sa mère à la manche de sa chemise de nuit, secouant celle-ci de toutes ses forces. Le personnel de la maison pénètre pour s'occuper de leur employeuse. Une domestique saisit l'enfant en l'entourant de ses bras pour le décoller de sa mère.
— MAMAN ! MAMAN !
Marc se réveille brusquement du cauchemar lui remémorant son enfance. La sueur dégouline de son front à son menton, retombant sur son torse musclé encore recouvert de ses vêtements de la veille. Il secoue la tête pour s'assurer qu'il était bien réveillé.
— Freddy, ça va ?
Ce surnom. Marc reconnaît cette voix suave très douce, il soulève la tête pour croiser le regard inquiet de son meilleur ami, déjà en tenue décontractée. C'est à cet instant que le français réalise à la clarté de la chambre, qu'il partage avec kevin, que le matin est levé.
En se rappelant de son compagnon de chambre, il scrute la pièce pour le chercher. Ses yeux tombent sur le jeune pubère au coin qui lui aussi semble inquiet. Derrière lui, le japonais avec qui son ami partage la sienne évite son regard. Sûrement pour ne pas l'embarrasser. Cette idée lui retourne l'estomac.
Que font-ils là ? se demande-t-il encore étourdi.
Le noiraud se redresse et repousse Jul de son bras gauche. Un geste machinal qui vexe son ami, mais ce dernier ayant bien vu l'embarras sur son visage, ne fait aucune remarque et marche en direction des deux autres au coin. Jul connaît les accès de rage du beau français, il ne veut en faire les frais quand ils sont devant des inconnus. Maintenant bien réveillé, Marc regarde la rolex qu'il porte encore au poignet, 8h38. Julien, ayant digéré son attitude, lui parle.
— Tu dois avoir oublié que nous devions prendre la route ce matin. Nous sommes en retard, le groom est passé nous avertir. Ça m'étonne de toi, tu te réveilles toujours à 5h d'habitude.
— Peut-être est-ce le décalage horaire ? dit Kevin, moi aussi j'ai eu du mal à me lever ce matin. En plus j'avais un mal de crâne qui ne dit pas son nom.
Comme pour confirmer les dires du garçon, un mal de tête s'empare du français, lui arrachant un gémissement de douleur. Par réflexe, Nagato s'approcha de lui pour l'examiner, il n'a pas le temps de poser sa main sur le visage de Marc, qu'il frappe celle-ci. D'abord confus, le japonais devine son erreur et sort une carte de son portefeuille en la tendant de la façon coutumière des japonais. La carte tenue par les deux mains, et la partie haute du corps inclinée en avant. Le français perplexe, la récupère.
— Hein ? Tu es médecin ?
— Oui. J'ai juste oublié de le dire hier à table, dit-il en éclatant de rire.
Son rire aigu surprend tout le monde, surtout que la veille il était toute la soirée. Comme contaminé par la situation, Kevin se met à rire, rejoignant Nagato. Marc, intrigué, regarde Julien pour demander une explication. Son ami feignant le désintérêt pour lui payer l'affront de tout à l'heure, hausse les épaules. Le français gêné, deviné que c'est le moment adéquat pour s'excuser.
— Je suis désolé les gars. Je ne voulais pas être désagréable ce matin. J'ai fais un petit cauchemar et ça m'a un peu irrité.
— Un peu ? minaude Julien.
— Ok. Beaucoup, dit-il en roulant des yeux.
Ce comportement enfantin arrache à nouveau un rire aux autres, cette fois accompagné de celui de Jul. Malgré la pièce remplit de rire, le noiraud reste subjugué par le rire cristallin du francoitalien. C'est étrange comment cela a tant d'effet sur lui, sur son moral. Marc content d'avoir réchauffé l'atmosphère les rejoint. Même s'il participe à cette compétition par nostalgie des instants magiques passés avec sa mère, la journée d'hier n'était pas un bon début pour lui.
Premièrement, croiser Jul dans le même hôtel et découvrir que c'est lui qui l'a inscrit à son insu dans le jeu, Marc allait l'étrangler. Ce dernier à souvent la mauvaise manie de les embarquer dans des coups foireux qui nécessitent toujours un plan très complexe pour s'en sortir ! Deuxièmement, apprendre que la chambre était à partager avec un autre candidat, Kevin, le français a dû se contenir pour ne pas s'énerver. Et troisièmement, rencontrer une femme qui est le sosie de sa pauvre mère, il croyait perdre la tête. Marc ne se souvenait pas quand est-ce qu'il s'est endormi, surtout que le traumatisme de la soirée d'hier l'empêchait de fermer l'oeil. Le voici tout frais et tout habillé pour le voyage.
Les quatre candidats descendent, bagages en main, au restaurant où le groom a dit que les autres déjeunaient. Les garçons pénètrent pour ne croiser que trois personnes. Le dentiste, le photographe et l'avocate. Barbara et Steven partagent la même table, tandis que Joseph mange seul sur une table à l'extrémité de la pièce. En dehors des trois participants et du personnel, pas de signe d'un tiers.
Marc voit Kevin marcher en direction de la table de l'avocate. Ces derniers le remarquent et s'arrêtent de discuter pour lui accorder leur attention. De là où ils se tiennent, il ne peut entendre leur échange. Julien le priend par le bras pour s'asseoir.
Nagato un peu gêné, ne sait s'il devrait s'asseoir avec eux ou prendre place ailleurs. Mais le Franco-italien lui fait le geste de les rejoindre, le japonais est reconnaissant envers le bouclé. Kevin les rejoint et s'asseoit entre Nagato et Jul. Ils commandent leur petit déjeuner. En attendant l'arrivée de leur casse-croûte, le camerounais s'adresse à ses aînés.
— Je demandais à Madame Geller et Monsieur Lee où sont les autres candidats.
— Wouah, tu es très poli toi. Tu les appelles en y mettant la forme, coupe Marc.
Jul lui donne une tape derrière la tête. Nagato s'étouffe de rire. Kevin ne sait s'il s'agit d'une moquerie ou d'un compliment, il laisse sa timidité l'envahir. La serveuse vient déposer le petit déjeuner, Jul en profite pour proposer à Kevin de continuer.
— Bien. Je disais que la moitié d'entre-nous est déjà partie.
— QUOI ? hurlent les trois autres. Recevant les regards interrogateurs des participants dans la salle.
— Apparemment, deux mini-bus ont été mis à notre disposition. Pour ceux qui ont pu se lever tôt, ils ont pris le premier. Nous les retardataires prendront le second.
— Nous sommes sept, donc neuf sont déjà partis, affirme Nagato.
— Non. J'ai demandé si il n y a que nous, et Monsieur Lee a dit qu'en dehors de nous, l'homme arabe, l'homme entièrement recouvert et Maxime, ne se sont pas présentés.
Marc fronce les sourcils un peu étonné que dans une aussi grande institution, on utilise que des mini-bus pour aller dans les contrées et qu'en plus on n'insiste pas pour que les participants se lèvent plus tôt.
Les aînés remercient le plus jeune pour l'information et commencent à manger. Quelqu'un pénètre le restaurant juste après. Kevin très curieux de nature, lève la tête de sa tartine pour voir Maxime discuter avec un groom. Il les observe un petit moment, mais retourna son attention sur son toast.
* *
*
Huit personnes attendent dans le hall. Une heure s'est écoulée entre la fin du petit dej' et la réunion des candidats dans le hall. Le bus garé à l'extérieur remplit de bagages, attend le départ, mais deux candidats manquent à l'appel.
Joseph impatient demande une énième fois à la réceptionniste d'appeler les deux retardataires par téléphone. Celle-ci explique qu'elle l'a déjà fait à cinq reprises, mais personne ne répond. Il demande le numéro de leurs chambres, 161 et 83, puis s'approche de trois hommes aux couleurs de l'hotel, avant de monter avec un garçon d'étage à sa suite.
Encore une fois Kevin remarque le même homme de tout à l'heure. Mais ce n'était pas réellement lui qui attire son attention. C'est l'action que les deux hommes ont posées. Joseph a avancé vers eux et a dépassé le premier groom pour s'adresser au second. Pourquoi a-t-il scillamment éviter ce groom ? Même pas un contact visuel, même pas un bonjour ? S'interroge l'adolescent. Comme si c'était prévu dès le départ qu'il amènera le deuxième homme avec lui. Alors que jusqu'ici ils avaient pas prévu l'absence de deux candidats.
Les deux hommes reviennent bredouille. Le groom prend une autre direction et Joseph se rapproche de ses compagnons.
— Allons dans le bus, Breenan a dit qu'il nous rejoindra plus tard. L'autre orientale là... euh... Bellaba ou Jalala ou... bref, il dit qu'il n'a plus envie de jouer, annonce celui-ci.
— Pourquoi c'est maintenant qu'ils changent d'avis ? demande Barbara. Et comment ce Breenan compte nous rejoindre ? Il ne connaît pas où nous allons.
— Je ne le sais pas. Ils disent avoir des affaires à régler, répond Joseph, désintéressé.
Barbara, bien que n'étant pas convaincue de cette explication, sort de l'hôtel et s'engouffre dans le bus. Les autres suivent directement. Nagato se tourne vers Kevin qui a le regard rivé sur un groom. Il lui demande s'il a un problème. L'adolescent lui répond que tout va bien et s'empresse de monter dans le véhicule.
Nagato l'observe de dos sans rien dire. Côte à côte dans le bus, il ne cesse de cogiter. Il choisit de rester aux côtés de Kevin pendant le voyage. Le médecin se rappelle d'un détail et demande au plus jeune si par hasard il a bu de l'eau hier soir dans la salle de conférence. Celui-ci affirme que oui. Nagato prend un air pensif un instant et note mentalement que ses soupçons sont fondés. Depuis ce matin il a constaté que les retardataires étaient ceux ayant consommés cette eau.
Les candidats ayant bu de cette boisson sont exactement les mêmes présents. Sauf que Joseph n'en a pas pris. Pour le jeune médecin, Breenan devait être fatigué, raison pour laquelle il n'a pas voulu voyager. Mais pour quelle raison nous auraient-ils drogués ? Les autres invités n'en ont pas pris, savaient-ils qu'ils n'en buveraient pas ? s'interroge-t-il. Qu'est-ce qui se cache derrière cet acte criminel ?
Nagato commence à réfléchir sur la véritable tournure de cette histoire. L'enjeu de ce jeu pourrai dépasser leur entendement. Il décide de mettre de côté toutes ses interrogations et de se concentrer sur le long voyage qui les attend. Rejoindre les autres sains et saufs, devient le seul objectif qui l'accapare.
À suivre.
*******
On commence à savoir ce qui rend les candidats si intéressants. Le voyez-vous ?
Chaque détail compte...