Un des chapitres clin d'oeil à Secret Defense d'Aimer de ma copine @Ceylogique
Les trois jours qui suivirent furent pénibles pour toute l'équipe. Alors que le Blue Squadron gagnait dans le plus grand secret le théâtre des opérations, l'équipe du Black Squadron au complet suivait les événements qui se déroulaient à la frontière entre l'Afghanistan et le Tadjikistan par l'intermédiaire des liaisons satellites. Ils effectuaient des roulements pour maintenir l'équipe en alerte, assurant à tour de rôle huit heures de garde consécutives.
Le matin du quatrième jour, Alyssandra était de permanence au QG lorsque Shadow laissa échapper une exclamation, l'œil rivé aux écrans qui retransmettaient les images du satellite en train de survoler l'Ouzbékistan, l'Afghanistan, le Pakistan et le Tadjikistan. Aussitôt en alerte, Alyssandra le rejoignit, ainsi que Ghost.
— Qu'est-ce qu'il y a, Shadow ?
— Je ne suis pas sûr, mais... j'ai l'impression que nos gars ne sont pas seuls.
— Ça, on le sait ! Il y a toute une putain de compagnie de djihadistes sur leur secteur, grommela Ghost.
— Non, je ne parle pas de ça. On a un point suspect. Là ! fit le spécialiste des liaisons satellites en montrant un point sur l'écran.
Alyssandra se pencha pour mieux voir.
— Je ne vois pas de quoi tu parles.
L'Amérindien zooma pour agrandir le cliché.
— Et là, tu vois mieux ?
— C'est quoi ? Un gros rocher, non ?
— Tu as déjà vu un rocher qui se déplace, Phénix ? Regarde, il n'était pas là lors du passage précédent du satellite.
Ghost marmonna dans sa barbe :
— Effectivement.
— Mais il était là ! pointa Alyssandra. Plus éloigné des bâtiments.
— Exact ! Vite, il faut vérifier sur les images précédentes.
Pendant que Shadow faisait défiler les photos à toute vitesse, Alyssandra le questionna :
— Qu'est-ce que c'est, d'après toi ? Tu dois bien avoir une idée.
— C'est peut-être un poste de camouflage mobile...
— Des hommes à nous ou à eux ? interrogea Ghost.
— Aucune idée.
Au fil des clichés successifs pris par les différents satellites qui survolaient la zone, la tache suspecte se rapprochait de la zone où se terraient les Seals de la Team 10. Puis elle disparut subitement à proximité d'un bosquet.
Quand Tetris et Sugar se présentèrent pour assurer la relève, ni Alyssandra ni Ghost ne voulurent quitter leur poste. Ils préférèrent rester sur place avec Shadow. Lorsque le capitaine Van Harper se présenta à son tour, l'Amérindien fit un bilan de la situation et exposa sa théorie. Aussitôt l'officier distribua des ordres :
— Sugar, entrez en contact avec le Blue et informez-les de nos soupçons. Il faut qu'on sache s'il s'agit d'hommes à nous ou si les autres enfoirés ont détecté la présence de la Team 10 ou du Blue et se préparent à les piéger. Ghost, vous venez avec moi en visio. On va avoir une petite discussion avec vos copains de l'Agence. Phénix, surveillez les coms sur le secteur. On ne sait jamais, vous apprendrez peut-être des choses sur les projets de notre cible et de sa petite armée personnelle.
Quelques minutes plus tard, Shadow reçut une transmission cryptée du Blue, qui confirma que l'élément suspect ne correspondait pas à un déplacement de leur équipe ni de la Team 10. Aussitôt, l'alerte fut renforcée et l'équipe du Black Squadron se mit en quête d'éléments nouveaux. Tandis que Shadow faisait preuve d'une vigilance accrue pour surveiller les images renvoyées pas les satellites et les communications, le reste de l'équipe se concentra sur la recherche d'informations. Ghost assura le relais avec les équipes de la CIA pendant que Sugar et Tetris faisaient tourner à plein régime leurs ordinateurs et fouillaient dans les banques de données. Alyssandra n'était pas en reste et épluchait consciencieusement toutes les retranscriptions des conversations audio ou écrites interceptées en temps réel ou collectées depuis plusieurs semaines.
En début d'après-midi, la CIA relaya une information capitale : le passage en altitude d'un engin mystérieux avait été détecté deux jours auparavant. Malheureusement, le service des renseignements n'avait pas été capable de l'identifier ni de déterminer sa nationalité. Une seule chose était certaine : compte tenu de sa vitesse de déplacement, il ne s'agissait pas d'un hélicoptère, mais d'un avion et ce n'était pas un avion de ligne. Il n'avait pas emprunté un couloir aérien et était trop petit. Les spéculations allèrent bon train au sein de l'équipe et il fallut attendre le début de soirée pour recevoir une nouvelle information : l'armée française avait reconnu avoir survolé la zone sans donner pour autant la raison de ce survol. Le capitaine Van Harper entra immédiatement en liaison avec le Blue Squadron.
— Zeus à Storm, complications sur opération Rescue Ten.
— Storm à Zeus, quel type ?
— Possibilité d'équipe étrangère en stand-by sur zone d'action. Agissez avec précaution.
— Storm à Zeus, vous pouvez répéter ?
— Je répète. Agissez avec précaution, force étrangère possiblement dans la zone.
— Storm à Zeus, bien compris.
Deux heures plus tard, le Blue Squadron entra de nouveau en contact pour donner de nouvelles informations.
— Storm à Zeus. Confirmation de deux traces thermiques isolées. Attendons les ordres.
À cette annonce, le capitaine Van Harper grimaça. Il jeta un coup d'œil circulaire autour de lui et vit que tous les membres de son équipe avaient les yeux rivés sur lui, dans l'attente de sa décision. Et merde ! S'il avait eu la certitude qu'il s'agissait d'un commando ennemi, il aurait ordonné à ses gars de les dégommer, mais là, il était pieds et poings liés. Ils ne pouvaient pas risquer un incident diplomatique s'il s'agissait de forces étrangères alliées.
— Zeus à Storm. Mission inchangée, restez en stand-by et protégez les arrières de la 10 jusqu'à ce qu'elle ait pu remplir sa mission.
— Storm à Zeus. Et pour les fantômes isolés ? À vous.
— Surveillez-les.
— Storm à Zeus. Autorisation d'aller les débusquer ?
— Négatif, Storm. Je répète, négatif ! Gardez un œil sur le viseur, mais ne tirez que si c'est nécessaire. Compris ?
— Storm à Zeus, bien compris.
— Zeus à Storm, communications restreintes sauf urgence. Terminé.
La présence de deux éléments étrangers dans la zone d'action compliquait une situation déjà difficile. D'autant plus que leurs motivations étaient inconnues. La tension monta d'un cran supplémentaire au sein de l'équipe. Le temps passant, la fatigue marquait les visages des membres de l'équipe. D'autant que les hommes sur le terrain ne donnaient pas de nouvelles. Les hommes du Blue devaient attendre soit que la Team 10 puisse passer à l'action, soit que les ennemis découvrent la planque des Seals pour pouvoir entrer en action. Et l'attente devenait insoutenable. Alyssandra se surprit même à mordiller l'ongle de son pouce alors qu'elle ne s'était jamais rongé les ongles jusqu'à présent. Épuisée, elle finit par aller s'allonger sur l'une des couchettes de la salle de repos. Ghost, Gunny et Sugar occupaient déjà les trois lits restants. Elle était tellement inquiète qu'elle s'agita, se tourna et se retourna sur sa couchette pendant un long moment avant de pouvoir s'endormir.
Deux heures plus tard, une soudaine frénésie dans la salle voisine réveilla la jeune femme en sursaut. Elle sauta de sa couchette, devancée par Ghost. Gunny était déjà devant la console centrale autour de laquelle étaient réunis Shadow, Tetris, le capitaine Van Harper et... le commandant Brickman. Les cinq hommes avaient le visage levé vers l'écran géant où plusieurs fenêtres relayaient les images enregistrées par les caméras du Blue Squadron. D'après les vidéos, les événements venaient de se précipiter, car la plupart des membres étaient en mouvement ou en train de tirer. Des hommes couraient dans tous les sens ; le chaos était total. Alyssandra s'approcha, l'œil rivé à l'écran, et demanda à voix basse à Gunny :
— Qu'est-ce qu'il se passe ?
— Saïd El Sharez, la cible de la Team 10, venait de sortir pour raccompagner son contact. Le type était sur le point de monter dans ce camion quand il a été abattu.
— Par un de nos gars ?
— Non. Mais on ne sait pas par qui.
— Une erreur de la 10 ?
— Non, ils n'étaient pas en position pour le faire, le camion faisait écran.
Le capitaine Van Harper avait entendu l'échange et il répondit sans quitter l'écran des yeux :
— Probablement un de nos fantômes.
— Il faut s'occuper de cette menace, on devrait donner l'ordre à notre sniper de les dégommer, proposa Brickman.
Le capitaine secoua la tête en serrant les mâchoires.
— Non, Brickman. Pour l'instant, ils ne nous sont pas hostiles.
— Mais ils représentent une menace potentielle pour nos hommes, objecta Ghost. Nos gars n'ont pas des yeux derrière la tête non plus.
Avec un petit mouvement de tête vers l'écran géant, le capitaine laissa tomber d'une voix tranchante :
— Pour l'instant, ils ont une menace plus importante à gérer. Les gars du Blue connaissent leur job, je suis prêt à parier que OneShot garde un œil sur eux.
Malgré ces paroles qui se voulaient confiantes, Alyssandra n'était pas rassurée et elle suivit avec anxiété la progression des hommes. Elle n'en avait pas conscience, mais elle se démarquait des autres membres de l'équipe. Si tout le monde était tendu, la jeune femme était, elle, carrément angoissée. Sa nervosité n'échappa pas à ses collègues ni au commandant Brickman. Le regard que celui-ci porta sur elle se durcit quand il vit qu'elle serrait les poings, le corps tendu et la respiration suspendue, lorsque le Blue Squadron essuya des tirs nourris. Elle vit Storm et Hurricane se précipiter pour porter secours à des Seals de la Team 10 tombés à terre. Malgré les tirs de couverture de Speedway et de Tatoo, ils durent se réfugier derrière un véhicule avec les deux blessés de la 10. Le silence oppressant qui régnait dans le QG n'était troublé que par les transmissions des hommes sur le terrain et par les détonations. Le silence radio ayant été rompu avec le début de l'affrontement, les Seals de la Team 10 communiquaient également. Les Seals sur le terrain, concentrés sur leurs objectifs, ne parlaient que pour donner des ordres ou échanger des informations importantes.
Soudain, Hurricane hurla dans son micro :
— Storm, attention à huit heures !
Le lieutenant-commandant du Blue se retourna aussitôt, juste à temps pour voir deux ennemis les mettre en joue. Alyssandra sentit son cœur chuter dans sa poitrine et un cri inarticulé se forma sur ses lèvres. Comme au ralenti, elle vit Christopher s'interposer devant le Seal de la Team 10 blessé, tout en levant son arme. Mais avant qu'il ait pu tirer, les deux terroristes s'effondrèrent l'un après l'autre. Storm ouvrit son micro pour remercier ses hommes d'avoir protégé ses arrières.
— Merci, les gars !
— C'est pas nous, répondit OneShot. Les fantômes t'ont sauvé la mise.
Une dizaine de minutes plus tard, l'échauffourée était terminée et seuls les Seals étaient encore debout. Les communications s'intensifièrent entre le QG de Dam Neck et les hommes sur le terrain. Après l'inévitable bilan humain et matériel, la question des fantômes fut abordée. Le capitaine Van Harper interrogea ses hommes :
— Zeus à Storm, que pouvez-vous nous dire sur ces fantômes ?
— Storm à Zeus, pas grand-chose si ce n'est qu'ils nous ont sauvé la mise à Hurricane et moi. OneShot pourra peut-être nous en dire plus, il devait les tenir à l'œil au cas où.
— Zeus à OneShot. D'autres infos ?
— OneShot à Zeus. Ils ont abattu plusieurs djihadistes de l'entourage de la première cible touchée. Ils sont bons, vraiment furtifs. J'ai eu du mal à les détecter. Je les ai suivis avec ma lunette quand ils ont décroché. Ils se sont rejoints pour partir vers l'est.
— Vous avez une description ?
— Négatif. Ils étaient en camouflage désert et utilisaient des munitions 7,62 OTAN. Ils n'ont pas laissé de douilles derrière eux, mais j'ai extrait la balle de leur premier target.
Gunny se précipita sur la console de communication pour entrer en liaison avec son camarade.
— Un FR-F2 français ?
— Très probable, mais je ne peux pas confirmer visuellement. Je n'ai pas vu avec précision leur armement.
— Autre chose, OneShot ? reprit Van Harper.
— Possible, mon capitaine. Je n'en suis pas certain, mais il me semble qu'ils avaient un emblème sur le haut de leur cagoule.
— Le sigle d'une unité connue ?
— Négatif. Les deux étaient différents. L'un ressemblait à un serpent dressé, un cobra probablement. L'autre avait des ailes déployées.
Le capitaine Van Harper et Ghost échangèrent un regard de connivence et l'agent de liaison de la CIA laissa tomber :
— Le Condor et Cobra.
— Oui. Les agents de la cellule CCL étaient sur place, apparemment. Et ils n'avaient pas la même cible que nous !
— Que faisaient les Frenchies là-bas ? demanda Brickman.
Le capitaine haussa les épaules.
— Aucune idée, mais ils avaient visiblement à cœur de faire un peu de ménage. Je pense que l'Agence appréciera l'information à sa juste valeur.
Tandis que Ghost allait prévenir ses supérieurs, le capitaine félicita ses hommes et leur donna l'ordre de rentrer.
— Zeus à Storm. Beau boulot, les gars. Les transports sont en chemin pour vous récupérer. Avant de partir, relevez les empreintes digitales et tirez le portrait des targets de nos fantômes.
— Storm à Zeus. Compris. Terminé.
Dès que la communication fut coupée, le capitaine Van Harper se tourna vers Alyssandra et Tetris.
— Une fois que nous aurons les identités de ces types, je veux que vous fassiez des recherches pour qu'on récupère le maximum d'informations sur eux. Je suis curieux de savoir pourquoi les Français ont envoyé leurs meilleurs snipers pour les dégommer. Nos services sont peut-être passés à côté de quelque chose d'important.