Niki Darkwhisper enfila ses grandes bottes moulantes noires et se leva de son lit pour mieux s'observer dans le miroir. Elle passa une main dans ses cheveux pour les démêler mais ses doigts restèrent coincés dans ses mèches et elle dut violement tirer dessus en laissant s'échapper un petit cri de douleur de sa bouche. Elle se maudit elle-même d'avoir une coiffure si contraignante à entretenir mais était heureuse d'avoir retrouvé ses cheveux frisés contre les lisses qu'elle portait au Palais des Plaisirs.
Elle passa un coup de bombe « Super Coloration Express Rouge Sang : Pour les femmes dangereusement dangereuses ! » aux extrémités de ses cheveux avant de quitter la chambre temporaire qu'on lui avait attribuée.
Le BS-Pandora était un énorme vaisseau grouillant de vie et exclusif à la générale Karenalistika. Un vaisseau de guerre impénétrable que personne ne pouvait approcher sans la permission de la passerelle sous peine d'être annihilé sur le champ.
Ses bottes couinaient presque sur le sol blanc et chaque pas l'énervait de plus en plus mais elle devrait faire avec. Aujourd'hui était un jour important, sa dernière opportunité : le BS-Pandora arriverait le lendemain à la station de la Confédération et Flamingo serait transféré dans une des prisons les plus inaccessibles de l'univers.
« Arsène Flamingo. Qui aurait pu un jour imaginer que j'allais sauver cet énervant narcissique ? » se dit-elle avait d'entrer dans la salle des communications.
Elle s'installa à un poste et brancha la clé USB volée deux jours plus tôt. Après quelques manipulations, elle réussit à envoyer le fichier compromettant, celui où Karenalistika avouait son erreur d'arrestation, au capitaine Aukanai ainsi qu'à une autre adresse cryptée. Une adresse du nom de « Esp3r3enzaXOC », celle que Cox utilisait pour laisser des commentaires sur les forums de discussion de la série « Amour et Espoir » et dont Flamingo lui avait brièvement parlé lors de leur discussion en pleine partie d'UNO.
Niki savait que Cox et le reste de l'équipage devaient avoir de la rancune contre elle mais si elle réussissait à libérer le capitaine, tout serait pardonné. Enfin en théorie.
La lieutenant se dirigea vers le poste de commandement et y retrouva sa générale en train de lire différents rapports. Elle leva vaguement les yeux vers Niki avant de caresser une de ses énormes cornes blanches comme une mèche de cheveux.
« Permission de m'entretenir avec le prisonnier Arsène Flamingo ? » demanda-t-elle en gardant son salut militaire. Karenalistika lui jeta un regard méfiant avant de se lever et d'examiner sa lieutenant.
« Accordée. Mais je vous surveillerais du poste de contrôle. » dit-elle d'un ton presque irrité.
« Elle est jalouse ou quoi ? » se demanda Niki avant de se diriger vers la cellule de Flamingo. Elle s'arrêta devant la porte et passa une main derrière son oreille. La pièce immaculée s'ouvrit et elle découvrit un Flamingo faisant les cent pas et ne remarquant pas sa présence.
« Capitaine Flamingo ? » demanda-t-elle en se rapprochant de lui. Il s'arrêta et se tourna enfin vers elle et cette dernière fût surprise de voir l'état dans lequel était le capitaine après plus de quatre jours d'emprisonnement : sa peau était miraculeusement encore plus pâle que d'habitude, les cernes sous ses yeux lui donnaient un air de dépressif et sa très fine barbe était légèrement plus épaisse.
Le capitaine prit quelques secondes pour se rendre compte de qui il avait devant lui avant de faire un petit sourire et de s'assoir sur le sol blanc.
— Tu m'excuseras mais je suis fatigué...
— Tu n'as pas dormi depuis quand ? dit-elle d'un ton inquiet qui l'a surpris elle-même.
— Depuis... Attends. La veille de ma venue sur Vuivis-440. Un vrai sommeil je parle, j'ai fait des microsiestes sinon.
— Ce n'est pas possible...
— Sans mes médocs, j'ai VRAIMENT du mal à dormir.
Niki se massa les tempes avant de le rejoindre au sol. Arsène regarda la caméra dans le coin du mur et fit un signe de la tête à la lieutenant en lui murmurant : « Je préfèrerais que l'on se parle en anglais ». Elle approuva d'un hochement de tête en croisant ses jambes.
*Le texte ci-dessous est dit en anglais*
— Je te manquais trop chaton ?
— Ahah. Ah. Ah. Tu imagines bien que non. Je suis juste là pour réparer mon erreur, tu ne méritais pas d'être emprisonné pour ce motif absurde.
— D'accord... Tu es venue me libérer alors ?
— Oui mais tu vas devoir jouer le jeu. J'ai dans ma main mon épingle à cheveux que je vais te passer. Dans cinq heures, je viendrais te chercher pour soi-disant t'emmener à Karenalistika. Tu profiteras de notre passage dans le couloir pour déverrouiller tes menottes discrètement et je t'emmènerai à la passerelle où tu pourras voler une navette de secours. Elles sont capables de résister à un passage dans un trou de ver et la zone que l'on va traverser dans quelques heures en sera presque infestée. Tu pourras t'enfuir à ce moment-là.
— ...Tu peux répéter moins vite ? L'anglais n'est pas ma langue maternelle !
Niki répéta plus lentement le plan tout en variant ses expressions faciales pour ne pas être démasquée sur la vidéo. Elle glissa ensuite sa main sur celle de Flamingo et approcha sa bouche de sa joue, mimant un baiser qui lui permit de lui transmettre discrètement l'épingle. Il se contenta de faire un grand sourire lorsqu'elle s'éloigna de lui.
— J'ai tellement envie de te frapper, Flamingo. Ma réputation va en prendre un coup à cause de ça.
— Entre nous, on sait que tu ne peux résister au magnifique Arsène Flamingo !
— Ne me fais pas regretter ma décision.
« J'aime jouer avec toi chaton. » dit-il dans un français parfait que Niki ne comprit pas mais qu'elle trouva... charmant ?
— C'est comme ça que tu charmes tes gazelles, flamant rose ?
— C'est comme ça que je charme les lionnes, dit-il en arquant un sourcil avec les yeux pleins de malice.
Niki mourrait d'envie de le frapper mais se contenta de poser une main sur son épaule avant de quitter la pièce. Elle fut surprise de se retrouver nez à nez avec la générale Karenalistika qui la regardait sévèrement, les bras croisés. La lieutenant s'attendit à tout sauf à ces mots :
« Il y a un truc entre vous et Flamingo ? »
Niki retint un fou rire en imaginant la possibilité qu'il y ait quelque chose entre elle et ce pervers avant de répondre en jouant la comédie devant sa générale :
— C'est dur de résister à Arsène Flamingo, générale. Vous en êtes bien consciente, non ?
— Hmhm. Je ne pense pas que vous soyez son type de toute façon.
— C'est vrai... Comment pourrais-je rivaliser avec la femme qui l'a enfermé dans une cellule et qui ne se rend même pas compte que cet homme est incapable de dormir sans ses médicaments ?
Karenalistika ouvrit grand les yeux mais ne dit rien, laissant de longues et interminables secondes silencieuses s'installer entre elles. Niki tenait tête devant sa supérieure, n'ayant aucune raison d'avoir physiquement peur d'elle car si elle se sentait menacée, la générale serait déjà au sol en train de retenir le sang coulant de sa gorge.
— J'espère que vous n'êtes sérieusement pas attirée par lui ? finit-elle par dire. Ce type ne vous apportera que des problèmes.
— De toute façon il va être emprisonné à la station, exact ? Et puis moi, les hommes à problème, c'était mon quotidien sur Terre. Flamingo n'est qu'une passade, comme il l'a été pour vous n'est-ce pas ?
La générale ne répondit pas et se contenta de froncer les sourcils avant de retourner vers le poste de pilotage. Niki expira bruyamment mais était convaincue que son jeu avait fonctionné : elle avait été espionne et n'avait rien perdu de sa faculté à mentir aisément à n'importe qui.
⭐⭐⭐
[5 heures plus tard]
« Ci-joint les codes pour les caméras. Xoxo. Esp3r3enzaXOC »
Niki relut plusieurs fois le message reçu de la part de Cox ainsi que les codes à entrer dans un des terminaux de communication pour couper les caméras de surveillance, codes que Cox avait volé lors de la précédente altercation entre Karenalistika et Flamingo.
Elle fit mine de déambuler dans les couloirs avant de croiser un groupe d'agents criant « MARDI PIZZA ! MARDI PIZZA ! » et en tapant dans leurs mains leur enthousiasme. L'amour de la pizza n'avait aucune limite, pas même dans l'espace.
La lieutenant se rendit dans le poste de contrôle et informa les deux agents surveillant Flamingo qu'elle devait l'emmener vers Karenalistika et... que c'était le MARDI PIZZA. Ils firent abstraction de la première information pour courir vers la seconde.
Niki fila ensuite jusqu'à la chambre du capitaine et le retrouva en train de dormir au pire moment. « Il ne dort pas pendant des jours et me fait ce coup-là maintenant ? Mais quel enfoiré ce Flamingo... » pensa-t-elle avait de le secouer par les épaules et de le gifler violemment, ce qui le fit sursauter.
Elle ne lui dit rien et passa les menottes à ses poignets en lui faisait signe de la suivre. Ils réussirent à passer presque inaperçus grâce aux menottes mais surtout à l'agitation du MARDI PIZZA.
— Bordel comment j'ai envie d'une pizza, lâcha-t-il presque en salivant. Y'a pas moyen qu'on passe par la cafétéria ?
— Non ! s'écria Niki en lui tirant sur les menottes. La priorité c'est que tu t'échappes le temps qu'Aukanai te défende devant le conseil de la Confédération avec l'enregistrement. Dans ta fugue tu auras le temps de te trouver un fast-food.
— Tu refuses de nourrir Arsène Flamingo ? Eh bien Arsène Flamingo se nourrira seul !
Le capitaine se mit à courir devant Niki et bifurqua vers la cafétéria avant que Niki le rattrape en plaquant son visage contre le mur.
— Ce n'est pas un jeu Flamingo !
— Apporte-moi une part de pizza et je me tiendrais à carreau.
Elle leva les yeux au plafond et lui fit signe de se cacher dans un placard à balais. Elle passa rapidement devant les cuisiniers de la cafétéria qui lui donnèrent une grande part de pizza avant de retourner vers Flamingo « l'impatient ».
Il savoura sa part comme jamais en poussant des soupirs de satisfaction qui exaspéra Niki.
— Tu sais ce qui serait bien en plus de cette part ?
— Oui, ma main dans ta gueule.
Elle le tira hors du placard avant de rejoindre la passerelle. En lui assurant qu'elle lui renverrait dès que possible ses gadgets lorsqu'elle y aurait accès, elle lui trouva une bonne capsule bien résistante pour deux. Flamingo la regarda puis tapota le siège à côté d'elle pour qu'elle s'assoit un instant avec lui.
Il resta silencieux avant d'enfin la regarder et de lui faire son éternel sourire.
— Merci Niki. Enfin techniquement je ne devrais pas te remercier parce que c'est à cause de toi que je me suis retrouvé dans cette merde...
— Ouais bon... voilà quoi... on fait tous des erreurs. Et puis enfermé dans les prisons de la Confédération, je n'aurais plus eu aucune chance de te tuer de mes mains.
— Tu aurais dû dire adieu à la perfection qui se tient à côté de t- Aie !
— Tu le méritais flamant rose.
Il rigola doucement avant de regarder la vitre devant lui montrant l'immensité de l'espace, les milliers d'étoiles et surtout les nombreux trous de ver aux alentours. Flamingo actionna la commande l'autorisant à quitter la passerelle avant de se tourner à nouveau vers Niki.
— J'imagine que je ne te propose pas de me rejoindre dans la fuite ? dit-il d'un ton presque moqueur. Ce sera pour une autre fois, je l'espère !
— Mmm...
— Est-ce que tu es en train d'hésiter Kitty ?
— Non c'est bon, tu m'as refroidi avec ton « Kitty ».
« Ben tiens, c'est presque mignon ! »
Ils se tournèrent tous les deux devant la source de leurs ennuis : Barbara Karenalistika, un pistolet chargé en main, visant le capitaine.
— Tu sais que j'ai tendance à te surveiller assez souvent Arsène, dit-elle d'un ton irrité. Te retrouver ici me déçois tellement, je vais devoir être obligée de te retenir par la force.
— Tu ne vas pas me tuer Barb, je sais que tu me veux entier pour pouvoir faire des folies avec mon corps parf-
*PIOU*
Arsène Flamingo cria soudainement en se tenant l'épaule, là où la générale n'avait pas hésité à le blesser, il la regarda comme le jour où elle lui avait tranché l'œil et ses yeux remplis de haine perturbèrent un instant Karenalistika. Un instant suffisant pour que Niki ferme les portes des capsules et fasse démarrer la capsule en vitesse en prenant les commandes. La passerelle s'ouvrit automatiquement en les voyant arriver et ils furent propulsés dans l'espace en un instant.
Niki, n'ayant presque jamais piloté de sa vie, tenta de diriger la capsule le plus loin possible du BS-Pandora avant que la générale ne se dépêche de rejoindre son poste de commandement pour leur tirer dessus. Flamingo retenait tant bien que mal ses cris de douleur et le sang teintant son t-shirt col roulé et sa veste en cuir.
La situation était vraiment critique et sans trop réfléchir, elle dirigea la capsule au hasard sur l'un des trous de ver trop étroit pour le gigantesque vaisseau de la générale. La capsule fut malmenée pendant de longues minutes et Niki crut un instant qu'ils allaient mourir jusqu'à ce qu'ils sortent du trou de ver les ayant entraînés dans une autre galaxie.
Elle poussa un rapide soupir de soulagement avant d'ouvrir grand les yeux en regardant Flamingo pâle comme un linge, les yeux fermés et son sang continuant de couler. Elle n'eut pas le temps de réagir que la capsule fut entraînée par le champ de gravité d'une planète très proche d'eux.
L'entrée dans l'atmosphère fut violente et Niki savait que l'atterrissage serait catastrophique alors elle prit la décision de prendre le capitaine dans ses bras pour faire bouclier en cas de choc.
La capsule s'écrasa et rebondit violemment avant de s'arrêter au contact de l'eau. Niki attrapa le corps évanoui de Flamingo et le tira de la capsule avant qu'elle ne coule et s'engouffre dans la mer turquoise. Elle nagea quelques mètres, le capitaine sur ses épaules, et le jeta sur la plage de sable blanc.
La respiration haletante, Niki ne perdit pas de temps en enlevant ses bottes devenues lourdes et en déchirant une des manches de son uniforme bordeaux. Elle retira la veste en simili cuir du capitaine avant d'hésiter une demi-seconde sur son t-shirt : Flamingo ferait le susceptible, lui qui avait honte de sa pâleur, mais il comprendrait que c'était une situation d'urgence.
La lieutenant fouilla dans sa petite sacoche accrochée à sa ceinture en cherchant une pilule de soin n'ayant pas souffert des turbulences et, son bonheur enfin trouvé, elle l'a mis de côté pour le capitaine.
Elle se décida enfin à enlever le t-shirt col roulé de Flamingo et ferma les yeux tant la réflexion de sa peau blanche sous les intenses rayons de soleil de cette planète inconnue était forte. Elle se mit enfin au travail en enroulant l'épaule du capitaine et serra pour improviser un garrot de fortune. Niki lui souleva la tête et lui fit avaler la pilule avec difficulté mais succès.
La lieutenant expira de soulagement avant de ressentir une violente douleur au niveau de sa cuisse droite. Elle n'eut pas besoin de l'examiner longtemps avant de constater qu'elle avait un bout d'une des barres de métal appartenant à la capsule qui transperçait sa cuisse. Elle déchira l'autre manche de son uniforme puis tira violemment sur la barre en poussant un cri de douleur retenu par le mordillement de sa lèvre. Niki empêcha, grâce à sa manche et sa ceinture, au sang de couler.
Elle s'allongea à côté de Flamingo pour tenter de reprendre sa respiration puis fouilla à nouveau dans sa sacoche à la recherche d'une autre pilule magique en bon état, mais rien.
« Quelle journée de merde. »
Qu'avez-vous pensez du sauvetage de Niki malgré sa trahison ? Flamingo l'a-t-il vraiment aussi facilement pardonné ?
De la jalousie de Karenalistika ? De leur départ précipité du SS-Barbara et de l'arrivée en catastrophe sur une planète inconnue ?
Des théories sur la suite des événements ?
N'hésitez pas à voter et donner votre avis en commentaire !
[Correction du 5 décembre 2020]
Musique ♫ Voyage - Dynamic