Coeur de Lionne *En pause*

By SageLionne

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Vous voyez la petite fille-lionne avec des oreilles d'elfe trônant fièrement à la place réservée à ma photo d... More

1. Sept silhouettes
2. La Guilde de la Clé

Prologue

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By SageLionne

Les flammes ardentes, l'obscurité menaçante. La vallée de pierres noires était devenue un véritable champ de bataille où différents camps s'entre déchiraient dans une rencontre ensanglantée. Des cris de guerre faisaient écho aux pétrifiants hurlements de douleur. Les cieux étaient voilés de lourds nuages sombre-ardoise, ces derniers exprimant leur rage par leurs rugissements, faisant trembler la terre et leurs éclairs aussi rapides et mortels qu'une morsure de vipère.

Un jeune homme à la silhouette souple vêtant une côte de mailles argentée, ainsi qu'une tunique azure, suivait de ses yeux bridés et céruléens les affrontements en contre-bas, dissimulé sur une colline, derrière un mur de pierres. Il s'abaissa vivement lorsqu'une flèche enflammée fila vers lui, pour ensuite s'enfoncer dans l'herbe sèche. Avant que les voraces flammes dévorent la piètre végétation, le jeune homme ouvrit d'un geste habile la gourde à sa ceinture et en fit jaillir une gerbe d'eau cristalline d'un geste de la main. Ses doigts scintillant d'une lueur bleutée, il abaissa ses bras ensanglantés et aussitôt, le liquide s'abattit sur les flammèches naissantes. Satisfait, le jeune guerrier secoua sa tête à la dense chevelure noire ponctuée de billes azurs.

— Lunaïl? demanda alors une voix légèrement inquiète, jaillissant de la petite grotte juste à côté.

Lunaïl se redressa et en prenant la peine de jeter un dernier regard prudent aux alentours, s'enfonça dans les ténèbres du refuge. Une main sur une des parois rocheuses recouverte d'une pellicule d'eau glacée, le jeune guerrier s'engouffra dans la noirceur huileuse à grandes foulées.

— Oui?

Un soupir de soulagement l'accueillit et une douce lumière blanche éclaira le visage amoché du guerrier de l'Eau.

Lunaïl s'approcha de la jeune fille d'où émanait des arabesques de lumière immaculée, ces dernières entourant un corps ensanglanté. Le guerrier enjamba avec mélancolie les blessés râlant et gémissant, enrobés de bandages déjà tachés d'écarlate et s'agenouilla auprès de Naghiam, l'Élue Guérisseuse de l'ancestrale Prophétie Dynastique. Ils étaient sept élus à défendre la paix dans le monde, dont lui, avec son pouvoir sur l'Eau, et Naghiam, avec sa faculté de guérison. Les cinq autres, leurs amis fidèles, guerroyaient férocement contre l'adversaire. Enfin... tous sauf un.

— Comment va-t-il? souffla doucement Lunaïl, inquiet, en indiquant de ses prunelles scintillantes la victime de guerre au front vermeil et à la cape déchiquetée. Le personnage entouré des rayons de lumière blanche guérissant une à une ses plaies durement remportées lors de la bataille.

Naghiam resta silencieuse un long moment, balança doucement ses paumes illuminées d'orbes magiques argentées sur le crâne transpercé du blessé. Sa chevelure de jais tigrée de nacre cascadait sur ses épaules tremblantes. La dense fourrure argentée recouvrant ses épaules s'hérissait nerveusement tandis que son regard doré analysait frénétiquement la gravité des blessures. La félinaroise finit par articuler :

— Et bien... je... je ne vais pas te mentir... pas énormément bien. Il a été touché gravement en plein sur son troisième œil spirituel, et en tant que l'Élu Prophète, c'est de mauvais augure car c'est là qu'est stocké sa puissance dynastique. Sa guérison est fondamentale pour notre victoire sur l'ennemi... car sinon, nous ne serons plus que six, à se battre aveuglement sans aucune vision, ni aucun signe pouvant faire souffler le vent de notre côté car, avoue-le, leurs forces militaires sont beaucoup plus puissantes que les nôtres. Notre arme secrète, c'était lui.

Lunaïl soupira profondément, et porta son regard bridé sur son cher comparse souffrant. Doux et sage pour son âge, Stellarius nouait un lien solide avec les esprits et ses visions étaient très révélatrices. Cheveux bruns mi-longs retenus en une natte, yeux quasiment violets et malheureusement aveugles, c'était un jeune druide compatissant et respectueux qui avait aidé Naghiam à ses débuts dans la guérison. Grâce à ses facultés extraordinaires, sa cécité n'était en rien un handicap car il voyait tout, seulement, d'une autre manière. Enfin, il était un dragonnier.

En effet, Naghiam et Stellarius faisaient tous les deux parties de deux races particulières, faisant d'eux des hybrides : Un dragonnier et une félinaroise. Ils pouvaient autant devenir complétement humain que complétement animal. L'un devenait un immense serpent violet moucheté d'or aux grandes ailes membraneuses s'apparentant à celles des dragons, tandis que l'autre prenait la forme d'un grand félin à la fourrure argentée tigrée et tachetée de noire, aux oreilles pointues ornées de touffes de poils, ainsi qu'à la longue queue aux anneaux sombres.

Mais voir Stellarius ainsi abîmé et Naghiam aussi bouleversée contrastait avec leurs forces intérieures d'antan.

Stellarius avait le teint blême, le visage crispé ainsi que les dents serrées. Sa grande robe de mage violacée aux arabesques dorées était encrassée et transformée en haillons éclaboussés de pourpre. Ses jambes étaient ensanglantées, marquées, égratignées, tout comme ses bras, couverts d'écailles éclatées, dont l'un était bizarrement tordu. Du sang s'écoulait de sa bouche entrouverte et une balafre horrible transperçait son front, pile sur son troisième œil. De la plaie jaillissait un flot écarlate, et noyé dans le rouge, quelques étincelles indigo brillaient timidement, pour ensuite s'éteindre. La magie de Stellarius le quittait doucement.

— Pourrais-tu le rafraîchir? murmura Naghiam en déposant ses paumes au-dessus du front de Stellarius, ce dernier se mettant à respirer rauquement, la sueur perlant sur ses tempes.

Lunaïl allait obéir, faisant jaillir le restant d'eau de sa gourde de cuir d'un geste de la main, mais il se figea brutalement lorsque Stellarius se mit à marmonner d'une voix profonde, comme venant d'outre-tombe :

Le soleil de l'espoir sera voilé

Les étoiles guides, dissimulées

Les ténèbres commenceront à régner

D'une main de fer, dans l'obscurité

Stellarius poussa un profond soupir tremblotant, les derniers mots mourant sur ses lèvres craquelées. Lunaïl jeta un regard stupéfait à Naghiam, mais cette dernière s'affairait déjà, très concentrée.

— On aurait dit... débuta fébrilement Lunaïl.

— Une prophétie, affirma la guérisseuse en farfouillant dans un sac de toile. Il m'a fait le coup l'autre soir, avec le chamane. Il faut qu'il poursuive!

Naghiam émergea de son sac une merveilleuse et délicate couronne se portant sur le front. Faite de fins entrelacements en or où trônait au centre une majestueuse pierre violette tirant sur le rosé, il y était gravé avec minutie le symbole du Prophète, une lune avec des arabesques, ainsi que trois petites étoiles. La gemme luisait de mille-feux.

Naghiam l'enfila à Stellarius et grimaça lorsque la pierre tomba pile sur l'horrible plaie au centre de son front. La gemme se mit à scintiller de plus en plus fort, illuminant le visage tordu de son propriétaire d'une lueur indigo. Tout d'un coup, le bijou libéra des rayons de lumière, éblouissant Lunaïl et Naghiam qui se protégèrent les yeux avec leurs mains. C'est alors que les paupières de Stellarius s'ouvrirent brusquement, et tout en débitant le reste de la prophétie, ses iris se mirent à luirent.

Mais les cieux veilleront toujours

En déposant les héros de ces noirs jours :

Le feu, admiré, mais terré parmi les glaciers

La terre, chassée, sillonnant les boisés

Le vent, traqué, fuyant l'obscurité

L'eau, dissimulé, inconscient de ses facultés

L'un doté du sang d'un roi redouté

L'autre élu par le ciel comme messager

Et ces Élus aux cœurs purs

Du retour de la lumière ils en trouveront la serrure

Naghiam et Lunaïl, complétement abasourdis, sursautèrent lorsque Stellarius se redressa brusquement en prenant une grande goulée d'air pour ensuite retomber sur le dos, la lueur de sa pierre et de ses yeux s'éteignant subitement. Il papillonna des paupières, respirant rapidement, affolé.

— Stellarius? demanda Naghiam en posant une main rassurante sur son épaule.

Le jeune prophète lui jeta un regard affolé pour ensuite faire volte-face vers Lunaïl.

— Vi...vite! Aloulane, il...

Stellarius fut saisit par une violente quinte de toux qui le secoua sans pitié. Vivement, il agrippa le bras de l'Élu de l'Eau :

— Il est... en danger! Aux... trônes des Trois Pierres Souveraines!

Lunaïl hocha la tête et s'élança aussitôt au secours d'Aloulane, l'Élu de la Lumière.

Il bondit de pierre en pierre, lançant des gerbes d'eau pour ensuite la faire devenir glace sur ses adversaires, frappant et évitant avec une froide détermination.

— Va surveiller la grotte! ordonna-t-il à l'un de ses soldats, à qui il avait offert une petite partie de ses pouvoirs sur l'eau.

Ce dernier acquiesça sans hésitation pour ensuite se fondre dans la foule du champ de bataille. Il était hors de question que Naghiam se fasse attaquer. Se défendre elle-même et Stellarius, elle en avait les capacités, mais pas tous les blessés en même temps.

Lunaïl sentit soudainement quelque chose lui foncer dessus et s'écrasa dans le mur de pierres, pour ensuite s'effondrer au sol, le souffle coupé. Il leva lentement la tête, des gravillons dévalant ses mèches noires barbouillées de poussière.

Grand et élancé, de la brume noire enrobait ses poings égratignés, sa chevelure blond cendré virevoltant dans la brise. Un guerrier Obscurar.

Lunaïl lui lança aussitôt une pointe glacée, que son assaillant évita de peu. Le jeune Élu bondit sur ses pieds et revint à l'offense avec un lasso d'eau, le faisant claquer comme un fouet sur les poignets de son adversaire. Ce dernier hurla et fonça sur lui, le plaquant contre la pierre grise qui s'effrita dans une myriade de poussière et d'éclats de roche dans son dos. Lunaïl cria, avant de recevoir un coup de poing au visage qui le fit gémir de douleur. Ses doigts s'illuminèrent d'une lueur bleutée lorsqu'il tenta désespérément de faire obéir la flaque d'eau à ses pieds, mais l'Obscurar lui bloqua les poignets, avortant toute chance de riposte. Ses yeux d'ambre à l'éclat meurtrier se plongèrent dans l'océan déchainé par la panique du regard de Lunaïl, qui commença à se débattre en serrant les dents et en gémissant. Malgré ces quinze ans, il possédait une force extraordinaire, développé par les longues et tortueuses poursuites des troupeaux de gibier à travers le Grand Nord avec sa tribu, fouetté par les blizzards et transpercé par le froid mordant.

L'Obscurar bloqua la gorge de Lunaïl avec un de ses bras, lui coupant le souffle, son autre poing vers le visage de sa victime, des brumes noires crépitant dans un bruissement menaçant. Paniqué, Lunaïl frappa, se tortilla dans une série de sons étranglés et de gémissements de rage et de souffrance, lorsqu'un hurlement déchirant traversa les cieux ténébreux, glaçant le sang et faisant trembler le jeune guerrier de l'Eau de tout son corps.

Lunaïl fit volte-face, l'horreur et la terreur façonnant ses traits, ses yeux bridés brillant de stupeur. Un éclair, lumineux et gracieux, souligna la plainte éperdue, illuminant le visage crispé du jeune Élu ainsi que sa longue chevelure lisse retenue en une couette éparse, ses cheveux emmêlés et encrassés ponctués de petites et délicates billes azurées.

Lunaïl resta figé un moment, les crépitements des flammes et les fracas des rochers des guerriers combattant vaillamment parvenant à peine à ses oreilles. Finalement, il murmura :

— Aloulane...

L'Obscurar, surprit par le soudain relâchement de son ennemi, abaissa sa défense, mais il reçut aussitôt un violent coup de pied dans le genou qui le fit trébucher en hurlant. Toutefois, il ne lâcha pas l'un des poignets du jeune homme, qui, la colère étincelant dans ses prunelles glaciales, fit s'élever grâce à son autre main une bulle d'eau impressionnante, qui s'abattit avec fureur sur l'Obscurar. Le soldat se débattait, mais le liquide qui l'enveloppait se modelait à ses mouvements saccadés et frénétiques. Complétement affolé, il abandonna ses techniques d'attaque pour des mouvements de brasse énergiques, relâchant le poignet de Lunaïl qui aussitôt, posa ses paumes illuminées sur la bulle. Lentement, l'eau se durcit et devint d'un argent pure et blafard luisant sous la foudre, dans un chant de craquements secs.

C'est alors qu'une dague fila dans les airs et se planta dans la glace, qui se fendilla dans un râle sinistre. Lunaïl tourna la tête, alerte, et aperçut aussitôt d'autres Obscurars à l'air mauvais accourir dans leur direction, armés jusqu'aux dents. Lunaïl ne demanda pas son reste et partit aussitôt en retraite vers les trônes des Trois Pierres Souveraines, espérant ne pas arriver trop tard.

Dissimulé par les ténèbres, l'Élu de l'Eau gravit agilement un mur abrupt de rochers craquelés, vieux de plusieurs millénaires, s'effritant au moindre souffle de vent. Ses doigts s'abîmaient contre les éclats de pierre, laissant des empreintes écarlates sur son tortueux sillage. Lunaïl se hissa finalement au sommet, hors d'haleine. S'accroupissant au pied d'un ruisseau cristallin gargouillant dans son petit lit de sable et de galets, il remplit de nouveau sa gourde d'eau pour ensuite accourir vers les trois rochers herculéens se dressant dans la vallée, les Trois Pierres Souveraines.

« J'arrive Aloulane, tiens bon mon ami! »

Lunaïl se plaqua contre l'une des pierres et jeta un coup d'œil furtif dans la petite clairière sacrée : Trois guerriers Obscurars. Un retenait Aloulane à genoux pendant que le plus grand, encapuchonné, s'approchait de l'Élu d'un pas silencieux et déterminé. Le dernier retenait Groundor, l'Élu de la Terre, dans une flaque d'eau pour compliquer sa maîtrise terrestre. Enfin, la délicate Ailaïnée, Élue de l'Air, était inconsciente au pied de l'une des Pierres Souveraines, le visage en sang.

— ­LAISSEZ-LE TRANQUILLE! hurla Groundor, ses prunelles émeraudes luisantes de rage, avant de se faire rabattre violemment le visage dans la flaque à l'eau huileuse et noire.

Plus petit que Lunaïl mais possédant une force extraordinaire se forgeant à sa silhouette massive et musclée, Groundor avait été engagé dans l'armée militaire du Duc des Montagnes dès son plus jeune âge, jusqu'à ce que sa quête de paix en tant qu'Élu de la Terre lui explose en plein visage. Il fut obligé de déserter les troupes, car le général refusait catégoriquement son départ, vu une bataille territoriale imminente contre les hommes du Prêtre du Dragon. Ces prêtres-guerriers maîtrisant le feu, dit plus simplement des Fleurials, étaient particulièrement belliqueux et la guerre faisait rage pour élargir leurs terres sur les montagnes. C'est ainsi que pendant sa fuite, Groundor tomba sur une troupe de barbares faisant parti du village du Dragon Noir, qui l'emmena aux arènes, où il rencontra Loriflamme, Élue du Feu, qui se démarquait par son incroyable nombre de victoires en tant que gladiatrice.

Les cheveux brun café, tiré en une toque serrée, le teint basané, Groundor avait un visage carré surmonté de deux yeux émeraudes et scrutateurs, presque toujours brûlant de colère. Habillé de son armure vert profond et ambrée ainsi que de ses solides épaulettes, l'Élu de la Terre était redoutable, qui plus est, avec son inséparable hache et son pouvoir sur la roche, le sable et la terre. En plus de sa férocité, les valeurs d'un soldat juste et loyal étaient profondément ancrées en lui.

Aloulane se débattait comme un fou, mais la fatigue rendait ses gestes maladroits. Il poussa alors un horrible râle lorsque l'homme encapuchonné le fit se cabrer vers l'arrière, une main plaquée au milieu de son dos et l'autre couvrant le dessus de sa tête, tirant sur sa dense chevelure dorée encrassée de poussière. Les yeux orangés d'Aloulane étaient dilatés, comme fou, figés dans leurs orbites. Sa tunique beige aux épaules d'or était déchirée par endroit, ensanglantée et noircie de terre, pareillement pour ses pantalons et ses bottes longues en cuir de combat. Sa longue et délicate épée gisait pitoyablement, éclatée en mille morceaux au pied de la Pierre Souveraine derrière laquelle Lunaïl épiait, figé d'horreur. Il inspira un bon coup et analysa rapidement sa position. Il avait l'effet de surprise, mais son coup devait être à la fois fatal et précis, sous peine d'être rapidement acculé par le troisième individu, ce dernier scrutant les alentours, alerte. ­­

— Et bien, et bien! clama le personnage encapuchonné, retenant toujours Aloulane d'une poigne de fer. Groundor, Ailaïnée et Aloulane... quel plaisir de vous rencontrer en personne.

Lunaïl fronça les sourcils. Groundor, ayant de nouveau émergé, cracha avec une hargne non retenue :

— ­Qui êtes-vous?

— Vous n'avez donc pas deviné? L'assiégement des villes et villages du Duc des Sables, la guerre civile à Givrace...

Plus il en énumérait, plus Lunaïl pâlissait. Il savait pertinemment quel rôle jouait ce personnage voilé sous ce lourd tissu impeccable, mais était secoué que tous ses stratagèmes, tous ses plans tordus étaient issus d'une simple et unique personne. Les styles utilisés étaient si différents à chaque fois! En plus, les quelques Obscurars ayant changés de camp avaient tous révélés des noms de meneurs différents. C'était tout bonnement incroyable.

En Lunaïl naquit une colère froide, givrant ses entrailles et affûtant ses réflexes. Délicatement, l'Élu de l'Eau glissa ses doigts fins vers le bouchon de sa gourde, sans quitter des yeux son adversaire.

Groundor avait serré les poings, ses yeux profonds lançant des éclairs meurtriers.

Vous! Après toutes ces années à envoyer des misérables fidèles corrompus à votre place, vous vous êtes finalement décidé à nous faire face! J'avoue que je ne m'y attendais plus.

— Quel caractère...

L'homme encapuchonné fit un signe de tête au soldat qui retenait le guerrier de la Terre et Groundor se mit à rugir dans la flaque d'eau souillée, se débattant comme un beau diable. Peu à peu, ses forces se mirent à fondre, ses mouvements, de plus en plus désespérés pour tenter d'émerger s'affaiblissaient, mais l'Obscurar le retenait avec force, un sourire carnassier aux lèvres.

Lunaïl, complétement horrifié, réagit sans tarder. Il éleva sèchement ces deux mains vers le haut, pour finalement les redescendre avec lenteur, creusant la flaque d'eau pour laisser de l'air à Groundor. Ce dernier aspira une grande goulée d'air avec empressement, un sourire triomphant éclairant son visage détrempé. L'Obscurar resta figé de stupeur, et son étonnement lui coûta : l'eau insipide de la flaque s'éleva devant lui pour ensuite le plaquer contre l'une des Pierres Souveraines. L'eau commença à se glacer, emprisonnant le soldat ennemi dans une prison sale et froide.

Groundor bondit vivement sur ses pieds, déjà en position d'attaque.

— Merci! cria -t-il à la cantonade, avant de lancer d'un mouvement sec une pierre grosse comme son poing sur les assaillants d'Aloulane.

Lunaïl esquissa un sourire et grâce à sa maîtrise de l'eau, se propulsa au sommet de la Pierre Souveraine derrière laquelle il espionnait la scène, bondissant gracieusement et silencieusement tout en suivant avec attention l'affrontement se déroulant à ses pieds.

Le deuxième guerrier Obscurar se battait avec acharnement contre Groundor, animé par la rage, tandis que le meneur, sans lâcher Aloulane, fouillait, scrutait l'obscurité, dans l'espoir de repérer le responsable de l'assaut. Heureusement, l'idée de regarder au sommet des monuments sacrés ne semblait pas l'animer, par chance pour Lunaïl qui lui adressa discrètement une grimace moqueuse. Avec rapidité, il retira le bouchon de sa gourde et fit jaillir l'eau à l'intérieur avec des mouvements lestes, la transformant progressivement en un massif pic de glace luisant d'une lueur azurée. Lunaïl glissa son doigt sur la pointe et inspira un bon coup. Le guerrier éleva le pic au-dessus de sa tête. Il ne fallait pas qu'il manque sa cible.

Groundor esquiva un coup d'épée et rétorqua avec une giclée de sable mouillée dans les yeux de son adversaire qui toussa rauquement en titubant vers l'arrière, aveuglé. Il se passa vivement un bras sur le visage et resta interloqué : Groundor avait disparu. Le soldat se mit à tourner sur lui-même, méfiant, quand deux mains jaillirent du sol et lui agrippèrent solidement les chevilles. L'Obscurar s'écroula au sol et se retrouva dominé par un guerrier couvert de terre le vrillant d'un regard noir. Groundor leva les poings et l'immobilisa grâce à des murs de pierre qui émergèrent du sable, le bloquant au sol.

Au moment où Groundor faisait volte-face vers l'homme encapuchonné, un pic de glace fila dans un sifflement aigu à son oreille pour se ruer sur le meneur Obscurar. Ce dernier n'eut pas le temps d'esquiver, l'assaut glacé le percuta de plein fouet. À la stupéfaction de Lunaïl, le pic éclata en morceaux sur le visage de sa cible, qui s'effondra dans un bruit sourd, le tissu voilant ses traits mystérieux glissant vers l'arrière. Aloulane s'écroula face contre terre, papillonnant frénétiquement des paupières, comme paralysé.

Il eut un long silence. Lunaïl bondit gracieusement aux côtés de Groundor, liquéfiant les fragments de glace en laissant léviter l'eau autour de ses mains, méfiant. Les deux Élus s'échangèrent un regard tendu, avant de s'approcher prudemment du corps inerte, aussi silencieux que des ombres. Lunaïl esquissa un mouvement hésitant vers Aloulane, mais le ton horrifié de Groundor le figea net :

— Lunaïl... il faut que tu vois ça! C'est lui... je n'arrive pas à y croire...

L'Élu de l'Eau accourra à ses côtés et resta médusé devant le personnage étendu devant lui. Ce visage longiligne, cette barbe noire, ce nez cassé et cette cicatrice si particulière en forme de croix au milieu du front...

— Lui? murmura Lunaïl en inspirant un bon coup. Le responsable de tous nos malheurs?

Groundor secoua la tête.

— Il semblerait bien que...

C'est alors que l'homme ouvrit brusquement les yeux et avant même que les deux jeunes combattants aient eu le temps de réagir, il se jeta sur Lunaïl avec sauvagerie, un couteau à la main. Ce dernier poussa un cri de surprise avant d'être cloué violemment au sol, une lame tranchante sur la gorge.

— Plus un geste, Lunaïl, cracha l'homme en resserrant sa prise sur son arme.

L'Élu de l'Eau tenta de se débattre, mais toutes ses forces se noyèrent dans un flot d'étranges sensations déroutantes, comme si une précieuse partie de son être lui était arrachée et emprisonnée...

Lunaïl se figea. Oh non. Il fut envahi d'une panique incontrôlable. Il tenta de retenir sa magie, mais elle lui glissait lestement entre les doigts.

Non...! Non! Pitié!

Mais sa puissance dynastique, son pouvoir de l'eau, se logeait docilement à l'intérieur de son chakra sacré, sous la volonté de l'homme à la cicatrice. L'eau brillant toujours autour de ses poings s'éteignit et s'écrasa à terre.

Lunaïl eut un spasme et s'effondra au sol lorsque son assaillant le lâcha. Le jeune guerrier avait les yeux écarquillés, le souffle rauque. Il tenta de se redresser, tremblotant, et agita faiblement la main vers la flaque gisant à ses côtés, mais elle ne broncha pas. Il réessaya, en vain.

— Non, non, non...non... gémit frénétiquement Lunaïl.

Groundor se campa devant le corps frémissant de son camarade.

— Vous! Comment osez-vous! Après tout ce que nous avons fait...!

L'homme ricana, tout en s'avançant vers Aloulane, ses prunelles noires scintillantes d'une lueur machiavélique.

— Ce monde est rempli de dangers et de tromperies Groundor...!

— Sale traître! Ne touchez pas à un seul cheveu d'Aloulane, sinon vous allez le regretter!

— Tu crois? sourit l'homme en lui jetant un regard narquois.

À ce moment, une main se plaqua contre la bouche de l'Élu de la Terre, le renversant vers l'arrière. D'autres poignes de fer se refermèrent sur ses bras et ses jambes, l'immobilisant au sol tendit qu'il gesticulait et hurlait de rage. L'homme agrippa de nouveau Aloulane, une main plaquée sur sa tête.

Soudainement, une violente bourrasque percuta trois guerriers Obscurars, qui esquissèrent un vol plané pour s'écraser contre l'une des Pierres Souveraines.

Groundor leva la tête, surpris, et sourit en apercevant Ailaïnée, l'Élue de l'Air, lévitant au-dessus du champ de bataille, un air déterminé peint sur ses traits ensanglantés. Elle piqua vers l'assaillant d'Aloulane, sa longue chevelure argentée tourbillonnant autour d'elle. L'homme l'esquiva de justesse, et la jeune fille fonça droit dans la masse de guerriers ennemis qui retenait Groundor, en assommant plusieurs avant de mordre la poussière. Elle se releva aussitôt, mais une douzaine de guerriers Obscurars l'encerclaient déjà, tous armés. Ailaïnée tenta de s'envoler, mais l'un d'entre eux lui agrippa le pied et la tira vers le sol, où elle fut tout de suite immobilisée.

Soudain, un cri de pure terreur déchira le ciel, suivit d'une lumière aveuglante. Groundor et Ailaïnée firent volte-face vers Aloulane, qui, à genoux, le dos courbé vers l'arrière, tremblait de tout son corps. L'homme, une main sur son crâne, semblait très concentré, un rayon doré jaillissant de la tête de sa victime.

— NON! hurla Groundor en se débattant.

C'est alors que doucement, la lumière s'obscurcit, devenant d'un noir brumeux, comme une ombre. La chevelure dorée Aloulane devint d'un gris cendré terne, ses vêtements furent envahis d'une vague noire comme le jais. L'Élu de la Lumière jeta un dernier regard désolé à ses amis, avant de fermer les yeux, une délicate larme cristalline roulant sur sa joue. Les dernières étincelles dorées s'éteignirent, laissant place à un silence de mort.

L'homme retira sa main du chakra de la couronne de sa victime, affichant un air satisfait et épuisé. Aloulane ne se releva pas. Il resta à genoux, le menton contre son torse, comme si toute vie l'avait quitté.

Ailaïnée étouffa un sanglot. Brusquement, Alouane ouvrit les yeux, se redressa, un air absent sur son visage. Le sourire du meneur Obscurar s'élargit; on aurait dit un fou.

— Ténèbros! Je te nomme lieutenant! s'exclama-t-il. Je te souhaite la bienvenue chez les Obscurars.

Il eut des sifflements stridents, des acclamations sauvages. Le nouveau lieutenant des Obscurars ne broncha pas. Il foudroya avec dureté les deux Élus anéantis lui faisant face.

Ailaïnée et Groundor se retournèrent l'un vers l'autre. Des larmes lourdes de sens brillaient dans leurs regards. Le Grand Noir avait la victoire au bout des doigts.

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Ainsi, voilà le début de ma première véritable histoire sur Wattpad! Youpi! 

Bon, je vous avoue, je fais partie d'une espèce très rare de tortue ayant toujours un crayon à la main, dotée d'une minutie particulière... Donc ne vous attendez pas à un horaire régulier...! :) Mais je ferrai de mon mieux, ne vous inquiétez pas. 

J'espère que ça vous a plu, et n'hésitez pas à voter,  ou encore à laisser un commentaire! 

SageLionne

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