Le lendemain, j'étais en train de surveiller le réfectoire comme tous les midis lorsque j'ai entendu quelqu'un siffler. J'ai tourné la tête en direction du son et j'ai vu Konan au loin me faire signe de venir vers lui.
— « Ça fait dix minutes que j'siffle comme un piaf, tu m'entends pas ou quoi ? » Commença-t-il en me voyant arriver.
— « Le réfectoire est super grand, Konan. »
— « Ouais bah tend l'oreille la prochaine fois. Enfin bref, Mely j'te présente Moussa. C'est mon pote. Moussa elle c'est Melyna, ma petite sœur. »
Ledit Moussa, un renoi assez musclé qui était assit à côté de lui, me tendit la main.
— « Enchanté, miss. »
— « De même. » Répondis-je en serrant sa main avec un petit sourire.
— « Reste tranquille par contre ! » Lâcha Konan en séparant nos deux mains.
— « Wesh j'dis juste bonjour ! » S'écria Moussa en riant.
Konan lui lança un regard suspicieux avant de détourner son attention sur moi.
— « Y'a deux autres bougs que j'dois te présenter aussi. »
— « Ah ouais ? Qui ça ? »
— « Deux autres gars que j'ai rencontré ici. Ils sont là d'ailleurs. »
J'me suis retournée et j'ai vu deux rebeux arriver vers nous avec leur plateau en main. Un était assez massif et l'autre un peu plus fin.
— « Vous étiez où wesh ? » Commença Moussa.
— « C'est cet abruti là ! Ça fait dix minutes qui m'fait faire des pompes dans la cellule, à croire on est à BasicFit ici ! » Répondit le plus fin des deux.
— « Remercies-moi de t'entraîner déjà, parce que toi et ton corps de barrette de shit vous en avez bien besoin. » Déclara le plus baraqué avant de s'asseoir juste en face de mon frère.
— « Vos gueules, vous m'faites mal à la tête. » Soupira mon frère. « J'vous présente ma sœur, Melyna. »
Y'a eu un blanc de cinq secondes durant lesquelles les deux m'ont regardé avant de regarder mon frère puis de faire les gros yeux.
— « Mais nan ! C'est ta sœur ?! » S'exclama le plus fin des deux.
Konan lui donna un coup derrière le crâne.
— « Tu veux que toute la prison le sache ou quoi, arrête de crier Imbécile ! » Répondit mon frère. « Melyna j'te présente Amine l'armoire et le ficello qui crit toujours pour rien c'est Bilel. »
— « Enchantée les gars. » Dis-je en souriant.
Ils m'ont salués en retour puis les garçons ont commencé à parler entre eux et moi j'les écoutais. Ils étaient sympas et plutôt drôles d'ailleurs et ils m'ont rapidement mise à l'aise. J'me suis rendue compte que j'avais eu l'occasion de rencontrer Bilel hier à la visite médicale et que j'avais déjà aperçu Amine dans le réfectoire auparavant.
[...]
Après le déjeuner j'suis retournée à mon cabinet où j'ai fait un peu de rangement. L'après-midi fut calme et c'était rare que j'ai autant de temps pour moi alors j'avais décidé de le rentabiliser en m'attaquant au rangement de l'armoire à pharmacie qui avait l'air abandonnée depuis des mois.
Y'avait au moins une centaine de boîtes qui s'entassaient que je devais trier et répertorier.
J'étais penchée sur le bureau en train d'écrire le nom d'un médicament dans un carnet quand ça a toqué à la porte.
— « Entrez ! » Criai-je sans relever la tête.
Un gardien entra, accompagné d'un détenu menotté.
— « Il "prétend" avoir mal au crâne alors occupez-vous de lui. » Cracha-t-il sèchement.
— « Pardon ? » Je levai les yeux vers lui en fronçant les sourcils.
— « Vous avez très bien entendu. Si vous avez besoin de moi j'suis derrière la porte. »
Il poussa le détenu vers moi et quitta la pièce sur ces mots.
Malgré mon envie d'ouvrir ma bouche face à ce gardien irrespectueux je m'abstins de faire tout commentaire n'ayant pas envie de faire mauvaise impression alors que je n'étais là que depuis quelques jours.
Je reportai mon attention vers le détenu que le gardien venait d'amener et en m'apercevant qu'il s'agissait de celui du QHS je devins blême.
— « Vous pouvez me rappeler votre nom ? » Demandai-je avant de me racler la gorge.
— « Isaac Mobali, mais tu peux m'appeler daddy si tu préfères. » Répondit-il nonchalamment en allant s'allonger sur le lit prévu pour les patients.
J'ignorai sa remarque et allai chercher son dossier. Lorsque je mis la main dessus j'y inscris la date d'aujourd'hui et au moment d'ajouter le motif de sa visite je levai les yeux vers lui.
— « Pourquoi vous êtes là ? »
— « Tu peux me tutoyer tu sais. »
— « Je viens de vous poser une question ! » Répétai-je en fronçant les sourcils.
— « Et moi j'viens de te donner un ordre bébé. »
Je posai fermement son dossier sur la table. Si il croyait que j'allais me laisser intimider dans mon propre cabinet il rêvait. Je m'approchai de lui et pointai mon doigt dans sa direction.
— « Peut-être qu'en dehors de ces murs t'arrives à intimider tes petits camarades mais ici c'est pas le cas t'as compris ? » Prononçai-je sur un ton qui se voulait menaçant.
Moi qui pensait qu'il prendrait mon coup de pression au sérieux, à ma grande surprise il se contenta d'esquisser un sourire en coin en me regardant de haut en bas.
— « C'était une tentative d'intimidation ça ? »
— « Ça t'arrive de prendre les avertissements au sérieux ? » Demandai-je en plissant les yeux. »
— « C'est la première fois qu'on a une infirmière aussi fraîche en tout cas. »
Je soupirai en constatant qu'il n'en avait rien à faire de tout ce que je disais.
— « Qu'est-ce que t'es venu faire ici, concrètement ? » Demandai-je en commençant à perdre patience.
— « Je suis venu te voir de plus près. »
Je fronçai les sourcils.
— « Me voir de plus près ? »
— « Pour une raison que j'ignore t'as piqué ma curiosité. »
Il a attrapa mon menton d'une main et observa ma tête en détail. Je sais pas ce qu'il espérait trouver dans mon regard mais il plongea ses yeux dans les miens pendant une bonne dizaine de secondes avant de scanner chaque recoin de mon visage en s'attardant longuement sur ma bouche. Il me fallut quelques instants pour réaliser ce qu'il se passait avant de m'écarter de lui.
— « Gardien ! » Criai-je en le toisant du regard. « Vous pouvez venir le récupérer, j'en ai fini avec lui ! »
Ce dernier pénétra dans la pièce et enfila les menottes à Isaac avant de le pousser vers la porte.
— « Allez on y va, Mobali. »
— « J'en ai pas fini avec toi. » Prononça-t-il avant que le gardien ne referme la porte derrière eux.
La pièce redevint tout à coup silencieuse et pour une raison que j'ignorais, un petit sourire avait prit place sur mon visage.
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