Après être sortis de la grotte nous avions dû marcher encore sur un ou deux kilomètres avant d'arriver aux abords d'une route. C'est là que nous avions attendu Cléo afin qu'elle vienne nous chercher. Apparemment nous étions trop loin de la ville pour rentrer à pied, surtout vu l'état dans lequel nous étions Maya et moi. Nous nous étions posée sur le bas-côté et nous profitions du spectacle que la nature nous offrait. J'avais l'impression de redécouvrir le monde sous un nouveau jour, encore plus beau et plus intéressant qu'avant. Je m'arrêtais sur toute sorte de détails insignifiants, de la couleur de l'herbe, les feuilles mortes sur le sol, jusqu'au ciel plein de nuages, tout était magnifique.
- Tiens enfile ça tu vas attraper froid.
Cally me tendais son pull que je m'empressais d'attraper et d'enfiler. Il était vrai que maintenant que nous ne bougions plus je commençais à grelotter. Je tournais la tête vers Maya pour l'observer. Elle aussi devait avoir froid, elle n'était pas plus vêtue que moi après tout.
- Tu pourrais peut-être faire apparaître un autre pull pour maya ? demandais-je à Cally. Tu sais avec tes supers pouvoirs de super Dieu.
Il me fixa quelques instant avant de s'approcher de mon amie et de se concentrer en fermant les yeux. Quelques secondes plus tard Maya fut recouverte d'un épais pull bordeaux. Il n'appartenait pas à Cally à coup sûr, il ne mettait que du noir. Maya siffla un petit « merci » encore interloquée par la soudaine apparition du vêtement.
Après un petit moment à se délasser, nous entendîmes des moteurs vrombir au loin signe que des véhicules approchaient. J'eu une certaine appréhension, peut-être n'était-ce pas Cléo mais des vampires venus nous ramener de force dans la prison ? Je sentais mon ventre se tordre d'angoisse. Je fixais l'horizon pour essayer d'apercevoir les véhicules. A mon grand soulagement je vis arriver le 4x4 de Cléo suivi d'une bonne vingtaine d'autres voitures, remplies de membres de la meute pour la plus part.
Le cortège s'arrêta à notre hauteur et quand je vis ma rouquine sortir de sa voiture je ne pus m'empêcher de courir vers elle pour lui sauter dans les bras. Elle aussi m'avait manqué et la revoir me faisait un bien fou, j'étais aux anges vraiment.
- T'es vivante... Oh punaise Cassiopée t'es vivante, murmura-t-elle à mon oreille la voix chargée d'émotion.
- Qu'est-ce que tu croyais ? tu ne vas pas te débarrasser de moi aussi facilement !
Elle me serra un peu plus avant de me relâcher pour m'observer de haut en bas.
- Prend le pas mal mais tu fais vraiment peur à voir, dit-elle soucieuse.
- Hum, ouais sûrement, ce n'est pas comme si j'avais eu un miroir pour m'observer.
Elle ria timidement avant de s'approcher de Callypsow, tout en jetant quelques regards curieux à Maya qui était toujours assise à terre.
- J'ai ramené environ cent vingt loups, commença-t-elle.
- Super, répondit Cally, j'y retourne avec eux, toi ramène les filles au chalet je vous rejoins après.
- Pardon ? m'exclamais-je, tu ne rentres pas avec nous ?!
- Ils vont avoir besoin de moi là-bas, je suis leur Alpha.
- Mais moi aussi j'ai besoin de toi ! tu n'as qu'à demander à Zack de diriger, il est le beta de la meute!
Callypsow s'avança vers moi et encadra mon visage de ses mains, me caressant les joues avec ses pouces.
- Je ne serais pas long, je te promets de rentrer avant la tombée de la nuit, en attendant va te reposer. S'il te plait.
- Je te préviens Cally si tu ne reviens pas avant le coucher du soleil c'est moi qui vais venir te chercher et ça va très mal se passer pour toi !
Il se contenta d'hausser les épaules à l'entente de ma réflexion. Il tourna ensuite les talons en criant des ordres aux loups qui s'étaient réunis autour de nous. Ils partaient de ce pas à la chasse aux vampires. Cléo et moi aidâmes Maya à se relever en attrapant chacune l'un de ses bras, la pauvre était vraiment dans un sale état. Il lui fallait des soins et de la nourriture de toute urgence.
Une fois toute les trois installées dans la voiture, Cléo démarra et nous prîmes enfin la direction de Glasby. Mon cœur se remplit de joie à cette idée, j'allais enfin retourner chez nous. Je songeais à la première chose que j'allais pouvoir faire... Probablement dévaliser le frigo tout en regardant une bonne vielle série sous un épais plaid. Oui c'était une excellente idée. Pour mon plus grand bonheur le trajet se déroula sans encombre et après presque vingt-cinq minutes de route nous arrivâmes enfin au niveau du grand panneau indiquant l'entrée de la ville. La première fois que j'avais passé cette frontière j'avais failli faire une dépression, aujourd'hui j'étais tellement heureuse et émue d'y retourner que j'en avais les larmes aux yeux.
Arrivées à destination, le chalet semblait nous accueillir à bras ouvert. Je m'empressais de descendre de la voiture pour courir jusqu'à l'intérieur ou brûlait un feu de cheminée. Cléo arriva peu de temps après, suivi de Maya.
- Bon retour chez toi Cassy ! s'exclama Cléo.
- Ça m'avais tellement manqué, répondis-je avec une pointe de nostalgie, je ne suis partie que cinq jours mais j'ai eu l'impression d'avoir était enfermée durant des siècles !
- Ne t'en fais pas maintenant tout est rentré dans l'ordre il ne t'arrivera plus rien, tu es en sécurité.
Une partie de moi avait envie de la croire mais au fond je savais que je ne serais plus vraiment en sécurité nulle part tant que les vampires continueraient de roder, tant qu'Antoine serais en vie.
- Bon Maya si on allait désinfecter toutes tes plaies ? proposais-je, tu pourras manger et te reposer ensuite.
Mon amie acquiesça et nous montâmes toutes les trois à l'étage. Il ne nous fallut pas loin d'une heure pour nettoyer et penser l'intégralité des plaies de Maya. Je n'avais même pas osé me regarder dans le miroir de peur de m'effrayer face à mon propre reflet. Cléo avait ensuite emmené Maya dans l'une des chambres d'amis et nous lui apportâmes un plateau repas digne de ce nom qu'elle engloutit à une vitesse effarante. Nous la laissâmes ensuite se reposer et nous descendîmes à la cuisine. A mon tour de manger maintenant ! Je sortis du frigo une pizza ainsi qu'un bol de pâte avant de me jeter sur le placard à biscuits ou je pris une boite de cookies ainsi que des chocolats. Cléo me regardait faire d'un œil amusé et elle m'aida ensuite à tout porter jusqu'au salon.
- Tu crois vraiment que tu vas réussir à tout avaler ? demanda-t-elle dubitative.
- Certaine !
Cléo ne rajouta rien et se contenta d'allumer la télévision, la série Dexter était rediffusée et nous regardâmes le temps de mon repas. Une fois l'estomac remplis je sentis mes paupières devenir extrêmement lourdes et je ne pus résister plus longtemps à l'appel de la fatigue. Pour la première fois depuis cinq jours j'étais au chaud et allongée dans un canapé plus que confortable avec une amie pour veiller sur moi. Juste avant de sombrer j'eu une dernière pensée qui me fit frémir. Est-ce que Cléo était au courant pour sa mère ? Il allait falloir en discuter, de même qu'il allait falloir discuter de Swann, son amie dont je venais de tuer la louve.
J'étais au milieu de l'arène, nue et frigorifiée. Je jetais des regards paniqués autour de moi et je finis par remarquer que cinq loups me faisaient face. Cinq loups à l'apparence beaucoup trop familière. Je me frottais les yeux énergiquement comme pour me convaincre qu'il s'agissait bien d'une hallucination. Quand je les rouvris ils étaient toujours là, plantés devant moi, pire, mes mains étaient recouverte de sang... leur sang... j'avais tué tous ces loups, ils étaient mort par ma faute et ils venaient me hanter. Je me laissais tomber à genoux tout en murmurant des « je suis désolée » presque inaudibles tellement j'étais secouée par de violents sanglots. J'étais recouverte de sang et peu à peu les pelages des loups se tintèrent de rouge eux aussi. Un par un ils s'effondrèrent sur le sol tandis que j'hurlais à pleins poumons. J'essayais de m'approcher d'eux pour les sauver mais des mains me retenaient. Celles d'Antoine, de la femme en blouse blanche, de Jérémy et de la mère de Cléo. Ils me maintenaient tous fermement et des rires horribles s'échappaient de leur gorge. Je paniquais totalement ça ne pouvait pas être réel, ça ne pouvait pas...
- Cassiopée réveille-toi !
Cette voix... J'ouvris brusquement les yeux avant de me redresser en toute hâte. Mon dieu ce n'était qu'un cauchemar, un affreux cauchemar. Ma respiration était haletante et mon pull était plaqué sur mon corps à cause de la transpiration.
- Ça va ?
Je tournais la tête vers la voix, Cally se tenait à côté de moi, ses yeux inquiets essayant de me sonder.
- Est-ce que ça à l'air d'aller d'après toi ? lâchais-je sèchement.
- Oh du calme, il leva les mains en signe d'apaisement, range les crocs princesse.
- C'est toi qui me dis ça ? Pourtant ça n'avait pas l'air de te déranger de sortir les crocs quand tu les as plantés dans la gorge de l'autre vampire... Alors dit moi toi aussi t'es un suceur de sang ? Toi aussi tu tues des êtres humains pour te nourrir ? réponds !
- Oui.
Je m'apprêtais a lui demandais une nouvelle fois de me répondre, je ne m'attendais pas du tout à ce qu'il me réponde aussi facilement. Il m'avait juste balancé ce oui en pleine figure comme si c'était la chose la plus banale du monde. Il sembla remarquer mon air perplexe et il s'empressa de continuer.
- Ecoute, tu veux que je te dise quoi ? Je me nourris de sang, qu'il provient d'un humain, d'un loup-garou, d'un vampire ou même d'un dieu si tu veux tout savoir. C'est comme ça, je ne peux pas changer ma nature et quand bien même, je ne le ferais pas. Ça ne change absolument pas qui je suis, depuis qu'on se connait j'ai toujours été le même.
C'était quand même assez dur à encaisser et j'aurais préfèré qu'il ait cet élan de franchise un peu plus tôt, mais bon au moins il n'avait pas cherché à nier... Enfin je ne voyais pas vraiment comment il aurait pu après la petite scène de tout à l'heure, quand il a vidé le vampire de son sang sous mes yeux.
- Pourquoi me l'avoir caché ? demandais-je plus calmement.
- Je ne te l'ai pas caché, juste je ne voyais pas vraiment l'utilité de te parler de cette petite « particularité ».
- C'est bien ce que je dis tu me l'as caché !
- Cassy...
Une question me vint alors à l'esprit.
- Pourquoi tu manges comme nous alors ? des pizzas, de la viande, des biscuits...
- Tout simplement parce que ça à bon goût. Mais pour moi ça n'a aucune valeur nutritive, ça ne me nourrit pas tu comprends ?
- Hum, dis-je en haussant les épaules.
C'était quand même vachement compliqué d'assimiler toute les « particularités » de Callypsow ! Entre les pouvoirs, le régime alimentaire, son mode de vie... ça me donnait le tournis.
- Rien d'autre à m'avouer ?
- Hum... à part un petit truc à propos de ta mère... non rien d'autre. Enfin je crois.
- Quel truc à propos de ma mère ? demandais-je inquiète.
- Oh ce n'est pas grand-chose... Mais avant on va monter pour se laver.
- Cally...
- Y'a pas de Cally qui tienne, accroche toi.
Je m'exécutais et j'enroulais l'un de mes bras autour de sa nuque tandis qu'il passait une main dans mon dos et l'autre sous mes genoux pour me porter. Il gravit les escaliers et nous enferma dans la salle de bain. La maison était calme ce qui m'aida à m'apaiser. Cally me déposa sur un meuble avant de faire couler l'eau du bain tout en prenant soins d'y verser une bonne dose de bain moussant. A vrai dire j'avais bien besoin d'un bon décrassage ! Cally revint doucement vers moi et quand le bain fut rempli il retira le pull que je portais ainsi que la « robe » ou devrais-je dire le lambeau de tissu qui me couvrait depuis cinq jours. Il était doux et attentionné, faisant attention à mes récentes blessures. J'aurais du me sentir gênée d'être nue devant lui mais à vrai dire j'avais mis ma pudeur de coté depuis mon enlèvement. Des centaines de vampires m'avaient vu dans mon plus simple appareil lorsque je devais me transformer, alors Cally... ça ne me dérangeait pas plus que cela.
Une fois déshabillée il me porta et me déposa délicatement dans l'eau chaude. L'effet fut instantané, mes muscles se détendirent, libérant toute la pression des derniers jours. Je poussais un soupir de contentement avant de regarder Callypsow.
- Tu ne viens pas ?
- Bien-sûr que si, ria-t-il, tu permets que je me déshabille avant ?
Pour toute réponse je lui lançais un peu d'eau au visage. Il se déshabilla, je devins rouge pivoine. Qu'il me voit nue me dérangeait moins que de le voir nu lui. J'étais gênée et je détournais le regard. Je ne reposais les yeux sur lui qu'une fois qu'il fut entré dans l'eau et installé dans la baignoire. Il me tira ensuite vers lui et commença à me laver. En le voyant comme ça je n'aurais jamais imaginé qu'il puisse faire preuve d'autant de délicatesse, il ressemblait plus à une grosse brute qu'à un gentleman. Bon une magnifique brute mais une brute quand même.
- Bon alors ma mère ?
J'entendis son bras retomber dans l'eau, ce qui n'augurait rien de bon si vous voulez mon avis.
- D'abord promet que tu ne t'énerveras pas.
- Cally... dis-je froidement.
- Bon ok. Elle est passée au chalet aujourd'hui, commença-t-il, et il se peut que je me sois légèrement emporté.
Je me retournais vivement pour lui faire face.
- Qu'est-ce que tu as fait ?!
- J'ai un peu perdu le contrôle, dit-il en se passant nerveusement la main dans les cheveux. Elle a vu mes yeux virer au rouge... et mes crocs aussi... et je lui ai grogné un peu dessus... mais rien de grave ! elle est toujours vivante !
Je n'en croyais pas mes oreilles. Pourquoi avait-il fait une chose pareille ? C'était stupide et irréfléchi de sa part. Et bon sang il avait grogné sur ma mère !
Il avait plutôt intérêt à avoir une bonne excuse !