Il sortit du chalet sa main toujours refermée sur la mienne. Il se dirigeait vers la forêt, il faisait sombre et le vent glacé qui traversait mes vêtements me faisait frissonner. Soudain quelque chose dans ma tête bloqua, je ne pouvais pas aller dans la forêt, cet endroit me faisait peur. À chaque fois que j'y avais mis les pieds quelque chose m'était arrivé. Mes pieds s'enfoncèrent d'eux même dans le sol stoppant Cally dans son élan. Il me regarda un peu surpris avant de sentir mon appréhension. Il posa sa main libre sur ma joue tout en la caressant avec son pouce, ce geste m'apaisa, Davana semblait comblée. Elle était vraiment une louve facile !
- Ça va aller fait-moi confiance, je suis là pour te protéger maintenant.
Je lui jetais un regard avant d'acquiescer. Il me fit l'un de ses terribles sourires avant de reprendre son chemin à travers les bois. Le moindre craquement me faisait sursauter. Callypsow et Davana semblaient désespérés par mon cas. D'ailleurs je ne sais pas ce qu'il restait de la main de Cally car à chaque fois que j'étais surprise je la serrais inconsciemment de toutes mes forces. Nous avions finalement rejoint un petit sentier qui nous mena en haut d'une magnifique cascade. La lune se reflétait sur l'eau rendant le paysage féerique. Je n'avais jamais rien vu de tel, les arbres avaient laissé place à une sorte de champs de fleurs dont émanait un doux parfum. On avait même l'impression que la température avait augmenté de quelques degrés et le vent ne soufflait plus.
Cally m'emmena sur un rocher plat surplombant le paysage ou nous nous sommes assis. Il s'était placé derrière moi et avait posé la tête sur mon épaule. C'était assez bizarre de l'avoir si près de moi. Au bout de quelques minutes, je me détendis et profitais de cette belle soirée étoilée. Nous ne dimes rien pendant un moment, le silence nous suffisait. Davana elle était plutôt agitée, j'avais l'impression qu'elle voulait se dégourdir les pattes.
- Je dois t'avouer quelque chose, commença Cally brisant le silence.
- Quoi ? En réalité tu m'as amené ici pour me manger ? tu vas me démembrer et me donner en pâture a des loups affamés ?
- Ne dit pas n'importe quoi ! dit-il
- Alors quoi ? tu vas me déclarer ta flamme ? dis-je en riant.
Il me fixa droit dans les yeux un air grave sur le visage. Il avait l'air tellement sérieux ! Il n'allait quand même pas faire ça, après tout ça ne faisait que quelques jours que nous nous côtoyions vraiment. Il ne pouvait pas avoir des sentiments pour moi, pas quelqu'un comme lui. J'étais beaucoup trop banale après tout. Mon cerveau marchait à mille à l'heure. Il ne disait toujours rien. Je voyais son visage au-dessus de mon épaule, il avait toujours la même expression et je me mis à paniquer.
- Euh... je... enfin tu...
Un grand sourire apparu sur son visage.
- Tu y as cru ? dit-il en commençant à rire.
Je le regardais hébétée, alors ce n'était qu'une blague ? J'étais soulagée d'un poids et en même temps je ne pouvais m'empêcher d'être un peu déçue.
- Tu n'es qu'un abruti ! lui dis-je tout en me refermant sur moi-même.
- Oh allez ne boude pas, c'était juste une petite blague avant d'attaquer les choses sérieuses.
Il avait pris mon menton entre ses doigts et me forçait à le regarder. Je m'affairais à lui jeter des regards menaçants pour lui montrer à quel point j'étais fâchée, mais cela semblait l'amuser plus qu'autre chose. Je ne devais pas être assez intimidante pour lui.
- Bon alors qu'est-ce que tu dois m'avouer de si important.
- D'abord promet moi que tu ne m'en voudras pas !
- Quoi ? pourquoi qu'est-ce que tu as fait ? demandais-je inquiète.
- Promet !
- Non. Dis-je d'un ton ferme.
Cally poussa un soupire et sembla réfléchir un instant. Il attrapa ensuite mes poignés pour me les maintenir vers le bas. Il les tenait assez fermement pour que je ne puisse pas bouger les bras, mais pas assez pour me faire mal. Pour seule explication il me glissa un petit « simple précaution » et Davana grogna mécontente.
- Alors... Par où commencer... Tu vois la nuit ou tu t'es retrouvée dans la forêt alors que tu dormais tranquillement dans ton lit ? dit-il peu sûr de lui.
- Oui ?
- Le cauchemar que tu as fait n'en était pas vraiment un. En fait je peux contrôler les esprits à distance, c'est moi qui t'es fait marcher dans les bois, tu ne t'en rendais juste pas compte.
Je le mitraillais du regard. Alors c'est à cause de lui que j'avais eu la peur de ma vie ? Ça aurais pu être extrêmement dangereux vu mon état de panique quand j'avais repris conscience.
- Pourquoi as-tu fais une chose pareille ? demandais-je furieuse.
J'essayais de me débattre mais impossible de me dérober de son étreinte, il avait beaucoup plus de force que moi.
- On m'a formellement interdit de le faire sur les loups de la meute, dit-il, et je m'ennuyais terriblement, alors quand j'ai su qu'une famille humaine venait d'arriver en ville j'ai voulu m'amuser un peu... désolée.
- Tu m'as laissé complétement perdue au milieu des bois Cally !
- Ce n'était pas prévu au programme, à la base je devais te ramener chez toi mais Cléo m'a dérangé ce qui a interrompu la connexion que j'avais établie. Nous sommes tout de suite parti à ta recherche mais tu avais déjà pris la poudre d'escampette et nous avons dû te courir après... tu m'en veux ?
- Oui ! comment pourrais-je ne pas t'en vouloir ? j'ai eu la peur de ma vie !
Il me regardait avec ses yeux de chien battu, la tête toujours posée sur mon épaule. Il avait vraiment l'air désolé, mais il savait aussi terriblement bien jouer la comédie. J'étais encore indécise sur le sort que je lui réservais quand j'entendis des hurlements de loup tout près. J'avais complétement oublié que j'étais censée lui en vouloir et je me serrais encore plus que je ne l'étais contre lui. Il avait lâché mes poignés pour enrouler l'un de ses bras autour de ma taille et me caresser les cheveux avec l'autre main.
- Calme-toi ils sont juste en train de faire leur petite course du soir, d'ailleurs ça ferais sûrement du bien à Davana d'aller se dégourdir les pattes avec eux non ?
- Ça ne va pas la tête ! m'emportais-je
- Quoi ? de toute manière tu fais partie de la meute maintenant, tu ne pourras pas toujours les éviter et Davana n'a pas l'air apeurée alors pourquoi pas ? je resterais a côté de toi.
- Je ne sais pas Cally...
Davana était folle à l'intérieur, je sentais qu'elle en avait envie, après tout elle n'avait quasiment pas sorti depuis vendredi, elle devait sans nul doute avoir besoin de se défouler. Il fallait bien que je fasse des efforts aussi de mon côté si je voulais que notre relation fonctionne. Cally attendais ma réponse et je pouvais sentir que son loup en avait autant envie de Davana.
- Bon ok... mais je t'interdis de t'éloigner de moi !
- Tu me pardonnes alors ?
- Pardon ?
- Pour l'autre soir ?
- Tu es en train de me dire que si je ne te pardonne pas, tu vas le laisser toute seule ?
Pour toute réponse il se contenta de sourire.
- C'est du chantage ça ! m'exclamais-je.
- ...
- Ok très bien t'as gagné. je te pardonne ! mais maintenant jure moi que tu ne m'abandonneras pas !
- Juré.
Sur ces mots il se leva. Il avait encore gagné et c'était vraiment rageant. Quelques secondes plus tard Callypsow avait laissé la place à Speed, et je m'étonnais une fois de plus devant la carrure imposante de ce loup. Il imposait le respect et ses yeux, malgré que je sache qu'il ne me ferait pas de mal, me donnaient encore la chair de poule. Il me regardait attentivement guettant le moindre de mes mouvements. Il était temps pour Davana de sortir. J'observais une nouvelle fois les alentours avant de me laisser couler. Ça faisait encore un mal de chien mais de toute manière je n'avais pas le choix, peut être qu'un jour je m'y habituerais. Après tout Cally ne semblait pas souffrir quand il se transformait. Une fois Davana pleinement consciente Speed s'approcha d'elle pour lui lécher le museau comme pour lui dire bonjour et il se mit à courir en direction de la forêt. Ma louve ne se fit pas prier et elle le suivit au pas de course.
Nous finîmes par apercevoir plusieurs loups qui semblaient s'amuser à se courser. Quand ils perçurent notre présence, ils poussèrent une série de petits jappements avant de s'approcher doucement. Arrivés a environ trois mètres de nous ils se stoppèrent et nous observèrent. Contrairement à Speed ou Davana, les loups avaient la queue entre les pattes et une posture beaucoup moins fière. Ils faisaient tous preuve de soumission face à l'Alpha de la meute. D'ailleurs je ne comprenais pas pourquoi il n'avait pas réagis quand ma louve s'était montrée aussi peu soumise. Ils auraient dû considérer cela comme un affront et l'obliger à se soumettre ou la chasser. Encore maintenant je sentais qu'elle avait la queue relevée et la tête haute. Bizarre qu'ils n'y prêtaient pas attention.
Finalement speed donna sa permission et les autres loups commencèrent à s'approcher pour nous saluer. Instinctivement le loup noir vint se coller à Davana, signe qu'il était prêt à la protéger. Contrairement à ma louve qui semblait dans son élément, j'étais vraiment stressée. Les loups pourtant ne semblaient pas faire preuve d'agressivité envers nous alors pourquoi cela se passerait mal après tout ? Ils n'allaient quand même pas attaquer leur chef.
Une fois les présentations terminées, les loups se mirent à courir ensemble, Speed en tête avec Davana à ses côtés, les autres placés derrières selon une hiérarchie que je commençais à peine à comprendre. Nous étions une bonne vingtaine de loups et le bruit de nos foulées donnait l'impression qu'un troupeau enragé était en train de s'enfuir. Cela nous faisait un bien fou de se défouler ainsi. Derrière moi j'entendais certains loups pousser des petits cris de joie. Nous sautions au-dessus de gros tronc d'arbre, nous faisions des virages serrés tout en essayant au maximum d'éviter de rentrer dans les loups situés à l'arrière. Parfois nous faisions quelques accélérations avant de ralentir à bout de souffle. C'était un vrai sentiment de liberté. Au bout de deux heures intensives de course Davana était complétement lessivée. Speed l'avait remarqué car il avait ralenti et demandait aux autres de continuer sans nous. Nous étions rentrés en marchant jusqu'au chalet de Cléo.
Arrivé devant la porte Cally reprit forme humaine et il attendit que j'en fasse de même, mais quelque chose me traversa l'esprit... j'allais encore me retrouvé nue ! Et cette fois-ci aucun drap pour me cacher.
- Tu veux que je tourne la tête ? dit-il en riant.
Evidement que je veux que tu tournes la tête idiot ! Je demandais à Davana d'acquiescer à ma place. Il se tourna pour se retrouver nez à nez avec la porte et attendit. C'était beaucoup plus difficile pour moi de me transformer dans ce sens, Davana n'étant pas toujours très coopérative, mais au bout de 5 minutes j'avais retrouvé une apparence normale.
- C'est bon ? demanda-il, on peut rentrer ?
- Oui mais je te préviens si tu te retournes je te tue ! c'est clair ?
- Ça va ce n'est pas comme si je ne t'avais jamais vu nue... ricana-t-il.
Je devins rouge pivoine. C'est vrai que le jour de ma première transformation c'est lui qui m'avait forcé à reprendre forme humaine. Il m'avait donc vu sous mon plus simple appareil, mon dieu que c'était gênant. Si ce jour-là j'avais su que c'était lui...
Une fois à l'intérieur du chalet il me montra un plaid posé sur le canapé que je m'empressais d'enrouler autour de moi.
- C'est bon, lui dis-je.
Il se retourna vivement vers moi.
- Alors comment tu as trouvé ça ?
- C'était plutôt... cool, je dois l'admettre. Ça m'a fait du bien, enfin surtout à Davana.
- Elle manque un peu de condition physique, m'avoua-t-il, mais ça devrais s'améliorer. Après on ne peut pas dire que toi tu sois très sportive alors... dit-il d'un ton moqueur.
Je ne répondis rien, je commençais à connaitre son petit jeu ! Il s'amusait à me mettre dans tous mes états et m'observait hilare m'énerver contre lui. Je n'allais pas rentrer dans son jeu cette fois-ci.
- Bon je suis fatiguée, je peux dormir où ?
- Viens, je vais te montrer ta chambre.
Il m'emmena à l'étage et me conduisit à travers le couloir. Nous passâmes plusieurs portes avant qu'il n'en ouvre une. La chambre était un peu plus grande que la mienne, mais aussi mille fois plus chaleureuse. Les meubles étaient en bois brut, il y avait de nombreux cadres avec de magnifiques photographies de paysage et pour couronner le tout il y avait d'énormes coussins sur le lit avec une couette qui paraissait ultra moelleuse. Je n'avais qu'une envie : me jeter dedans. Je sentais mes yeux pétiller à la vue de cette magnifique chambre. Sans prévenir, Cally se jeta sur le lit en mode étoile de mer et me regarda avec un sourire malicieux.
- Qu'est-ce que tu fais ? demandais-je perplexe.
- Je veux mon petit câlin du soir !
Ce mec avait un sérieux problème !
- Donne-moi un pyjama et je t'en fais un.
- Ok attend 30 secondes.
Il se redressa sur le lit avant de fermer les yeux. Il murmura quelque chose que je ne compris pas et quelques secondes après un t-shirt et un short de pyjama apparurent sur le lit. J'étais complétement estomaquée. Comment avait-il fait ça ? C'était complétement dingue !
- Ferme ta bouche tu vas gober des mouches !
- Comment... ?
- Secret professionnel, me dit-il tout en me faisant un clin d'œil, maintenant habille toi je veux mon câlin !
Il se recoucha sur le lit et se plaqua un oreiller sur le visage. Je me dépêchais de m'habiller tout en gardant un œil sur lui. S'il osait relever la tête, je laisserais Davana s'occuper de son cas ! Une fois fini je m'approchais pour m'assoir sur le bord du lit.
- Bon tu le fais ton câlin je voudrais dormir maintenant.
Il me fit basculer, je me retrouvais étalée sur son torse, sa respiration était calme et je me décrispais petit à petit.
Moi j'étais dans ses bras tandis que Queen était six pieds sous terre. Malgré le mal qu'elle m'avait fait c'est moi qui avais gagné.