Rimbaud et Lolita

By OhMyLonelyMonster

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La disparition de la jeune Nola Kellergan, tout le monde l'a oubliée, à Aurora. Ça se comprend, l'affaire rem... More

blurb
disclaimer
un // mouettes
deux // carottes
trois // cafés
quatre // équation
cinq // pluie
six // boîte
sept // monstre
huit // amertume
neuf // photographie
petit mot de l'auteure
dix // médisances
onze // vérité
douze // vengeance
treize // maison
quatorze // millard
quinze // lâche
seize // bébé
dix-sept // point de non-retour
dix-huit // embarras
dix-neuf // fantôme
vingt // corps
vingt-et-un // inopiné
vingt-deux // parias
vingt-trois // mère
bonus // océan mer
vingt-quatre // colère
vingt-cinq // winston
vingt-six // manuscrit
vingt-sept // sweet sixteen
vingt-huit // pénultième (1)
vingt-huit // pénultième (2)
vingt-neuf // glas
trente // rideau
trente-et-un // calamité
trente-deux // adieux
trente-trois // magouilles
trente-quatre // canada
trente-cinq // déchéance
trente-six // twitter
trente-sept // alma
trente-huit // retrouvailles
bonus // montages photos
trente-neuf // règle d'or
quarante // dorian gray (1)
quarante // dorian gray (2)
épilogue
the end...or is it?
des mouettes et des hommes

prologue

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By OhMyLonelyMonster

A Change Of Heart, The 1975

10 août 2007

—   Marcus Goldman, je crois que je t'aime.

Le visage enfoncé à moitié dans l'oreiller, Marcus s'esclaffa. Il se replaça sur le dos et se cacha les yeux d'une main. 

—   On se connaît depuis quatre jours. Tu ne crois pas qu'il est un peu trop tôt, pour se dire ce genre de trucs?

Alice lui sourit.

—   Il n'est jamais trop tôt pour ça.

Marcus, les yeux fermés, enfouit son nez dans l'épaisse chevelure d'Alice, qui en retour se pressa davantage contre lui. Lovés l'un contre l'autre, ils ne bougeaient plus. Leurs corps nus, encore brillants de sueur, récupéraient.

—   Alors, je crois aussi que je t'aime, murmura-t-il.

—   Tu te forces pour me dire ça, hein?

—   Non...

—   Non?

—   Oh, tais-toi, je suis trop fatigué pour répondre à tes questions.

—   Pauvre petite chose, pouffa Alice.

Marcus lui sourit. Ils se regardèrent longuement.

—   Merci, en tout cas. C'était bien, reprit Alice.

—   Bien? Seulement bien? répéta Marcus, interdit.

—   Oh, fais pas cette tête-là. La prochaine fois, ce sera sans doute très bien.

—   Parce que tu crois qu'il y aura une prochaine fois, avec ce que tu viens de me dire? s'indigna Marcus. Et que je...

Contre toute attente, Alice s'approcha encore plus de lui et l'embrassa avant que le verbe ne s'échappe de sa bouche. Il en oublia ce qu'il voulait dire, et l'imbécile, tout sourire, parcourut de ses lèvres pulpeuses sa bouche, son menton, son cou...

—   Arrête! Ou je te bouffe les yeux tout crus, susurra Marcus.

Alice s'agrandit les yeux à l'aide de ses doigts et le taquina :

—   D'accord, vas-y.

Marcus se fendit d'un large sourire quand claqua soudain la porte d'entrée. Il se redressa, les yeux ronds.

—   Marcus? T'es là? claironna une voix féminine bien connue.

D'un geste brusque, il repoussa Alice, qui fronça les sourcils.

—   C'est qui, elle?

Marcus, le cœur au bord des lèvres, bondit hors du lit et chercha frénétiquement du regard ses vêtements qui devaient être là, par terre, quelque part. Alice, une main enfouie dans ses longs cheveux, le regardait faire d'un air ahuri.

—   Marcus, il se passe quoi, là?

—   Il se passe que je suis dans la grosse merde, répliqua-t-il, ses dents serrées.

—   Je comprends pas, t'as une copine?

Il venait d'enfiler sa chemise et se penchait pour ramasser son pantalon quand ce qu'il craignait qu'il arrive arriva. La porte de la chambre s'ouvrit brusquement et révéla la silhouette d'une femme élancée au maquillage si épais qu'elle donnait l'impression de sortir tout droit d'un magazine people. Si la pauvre souriait en entrant dans la pièce, elle déchanta bien vite en découvrant, encore nus, Marcus debout et Alice encore sur le lit.

— Wow, Lydia Gloor? L'actrice? s'exclama Alice, les yeux exorbités.

Marcus osa lever les yeux vers Lydia, à trois pas de lui. Elle venait de laisser tomber son sac à main par terre et le dévisageait, béate d'étonnement. Qu'Alice l'ait reconnue sans la moindre difficulté, elle semblait s'en contre-balancer.

—   Marc', tu m'expliques? gronda Lydia, les poings serrés.

—   Je... je ne sais pas quoi te dire, balbutia-t-il.

Il tenait encore son pantalon dans ses mains, qui cachait à peine sa queue devenue toute flasque.

—   Tu ne sais pas quoi me dire? répéta Lydia, incrédule. Et toi, tu sais quoi me dire, peut-être?

Elle se tourna vers Alice qui, les joues écarlates, se couvrit aussitôt le corps avec les draps.

—   Eh, oh, calme-toi...

— Me calmer? Tu me dis de me calmer? s'emporta Lydia.

Les lèvres pincées, elle s'avança d'un pas déterminé vers Alice et l'empoigna par l'avant-bras. Ses ongles longs, sans pitié, s'enfonçaient dans sa chair. 

—   Eh, lâche-moi, espèce de folle!

—   Tu sors de chez moi! Tout de suite! martela Lydia.

—   Mais, je ne savais pas, pour lui et toi! Je pensais que vous n'étiez plus ensemble.

Marcus, le cœur battant, enfila son pantalon et les suivit à l'extérieur de la chambre. Il eut tout juste le temps d'apercevoir Lydia qui jetait littéralement Alice dans le couloir.

—   Mes vêtements, merde! Rends-moi mes vêtements! s'époumona Alice, encore à poil.

—   Je m'en tape! hurla Lydia en lui claquant la porte au nez.

Sans attendre, Alice tambourina contre la porte en lui beuglant de lui redonner ses fringues. Bientôt, les voisins de palier se joignirent au concert :

—   C'est pas fini, ce boucan?

—   Il est même pas encore 8 h!

—   On essaie de dormir, nous!

—   Vos gueules!

Marcus retourna à la chambre et ramassa les vêtements d'Alice. Il n'osa pas croiser son regard lorsqu'il les lui remit en mains propres. Une fois la porte refermée, il prit une grande respiration. Il ne parvenait pas à avaler la saleté de boule coincée au travers de sa gorge. Il marcha jusqu'au salon comme s'il marchait vers son lieu d'exécution, là où Lydia l'attendait, seringue à la main.

—   Ça fait longtemps? l'agressa-t-elle, les bras croisés.

Elle marchait de long en large, sa démarche sèche et rapide. Elle n'avait même pas pris la peine d'enlever son manteau, et sa valise et ses sacs de voyage traînaient sur le sol. Marcus s'appuya contre le cadre de porte, la tête baissée.

—   Quelques jours à peine.

—   Ça fait donc quelques jours à peine que tu...

Elle s'arrêta avant que sa voix ne se casse et porta sa main à son front, tête baissée, avant de reprendre, la respiration courte :

—   Quelques jours à peine que tu te tapes cette... cette...

—   Attention, Lydia. Fais bien attention à ce que tu vas dire, lui intima Marcus.

—   Pourquoi? explosa-t-elle. Parce que tu l'aimes, c'est ça?

—   Tu sais très bien que c'est toi que j'aime. 

Elle partit d'un rire sans joie.

—   Bien sûr, c'est pour ça que tu couchais avec quelqu'un d'autre pendant que j'étais partie. Ne me prends pas pour une conne, Marc'! T'aurais fait comme si de rien n'était, si j'étais rentrée demain comme prévu?

Elle reniflait et se retenait tant bien que mal de pleurer, le visage levé pour ne pas que ses larmes coulent. Pour ne pas ruiner son maquillage? Pour ne pas se laisser aller devant lui? Il n'en était pas sûr.

—   J'aurais... Je ne sais pas, finit-il par avouer, à voix basse.

—   Dis donc, tu ne sais pas grand-chose, toi, le railla-t-elle. Et dire que je pensais que ça pouvait marcher, toi et moi. 

Elle tourna enfin la tête vers lui, et ce n'est qu'à ce moment qu'il remarqua une petite traînée de morve sous son nez, pas très jolie à voir. Ça lui donna envie de pleurer à son tour.

—   Lydia, je suis désolé, murmura-t-il, la gorge nouée.

—   Va te faire foutre, Marcus.

—   Mais, c'est vrai! Je suis immensément désolé.

Elle passa une main maladroite sur ses yeux, son nez. Elle renifla encore.

—   Marcus, j'ai bossé toute la semaine, je viens de passer des heures et des heures en avion et dans les aéroports, je suis crevée comme pas possible, et maintenant ça... Écoute, j'ai besoin qu'on me foute la paix.

—   Mais, Lydia...

—   Laisse-moi tranquille, Marcus! Va-t'en! Je ne veux plus te voir! 

Elle se croisa les bras et lui tourna le dos, le regard pointé vers les buildings, à travers la baie vitrée. Grimaçant, il s'avança vers elle et voulut lui toucher l'épaule pour attirer son attention, mais elle dévia sa main d'un geste brusque.

—   Ne me touche pas.

—   Lydia, je t'en prie, regarde-moi. Écoute-moi.

—   Pour que tu me mentes à nouveau? Non, merci, rétorqua-t-elle, reniflant.

Elle avait tourné la tête vers lui, et c'est là qu'il se rendit compte qu'elle avait cessé de faire semblant. Elle pleurait pour de bon, cette fois; son mascara coulait sous ses yeux. Et elle ne criait plus. Étrangement, il aurait préféré. Cette statue froide, il ne la connaissait pas. Il se racla la gorge.

—   Très bien. Je m'en vais. Je t'appellerai demain...

—   Non. Non, tu ne m'appelles pas demain, ni après-demain, ni la semaine suivante. On n'a plus rien à se dire.

Non, ils n'avaient plus rien à se dire, c'était vrai. On disait qu'une image valait mille mots, et quoi de plus frappant que celle de son amour jumelé à un autre corps, jalousé et étranger? Quoi de plus explicite?

À contrecœur, il retourna à la chambre et ramassa ses affaires : des vêtements, des livres, son lecteur de minidisques, son ordinateur portable... Le reste, il l'avait laissé à son appartement, qu'il avait déserté pour emménager chez Lydia voilà plus de trois semaines. Quand il revint au salon, il la regarda, elle l'ignora. Postée contre la baie vitrée, elle attendait qu'il s'en aille.

Il voulut s'excuser à nouveau, la supplier de lui pardonner, mais il n'osa pas. Par fierté. Par lâcheté, aussi. Une fois la porte refermée sur lui, sans un bruit, il sortit de l'immeuble sans perdre de temps. Dehors, New York se réveillait peu à peu.

Lorsqu'il monta dans sa voiture, il sentait encore son cœur cogner fort dans sa poitrine, et son cerveau se nourrir de questions tout aussi affolantes les unes que les autres. Et si, par vengeance, Lydia balançait toute cette histoire à la presse? Et si on l'injuriait de tous les noms possibles dans les journaux et à la télévision et que, du jour au lendemain, on le maudissait d'un accord tacite? Pire encore, et si on se désintéressait totalement de lui et qu'il tombait dans l'oubli?

Avec un long soupir, il s'affaissa et sentit son front heurter le volant, il grimaça. Il fallait qu'il se reprenne en main. Machinalement, il mit la clé dans le contact et fit vrombir le moteur. Tout allait bien. Tout irait bien. Il rentrerait chez lui, se taperait ensuite trois bons miles de jogging pour se revigorer le corps et l'esprit, et avec un peu de temps, il oublierait Lydia. Et Alice.

Car le sexe ne signifiait rien. L'amour non plus, si tant est que pareille chose puisse exister ici‑bas. À quoi bon se prétendre libre si on lui tapait sur les doigts par la suite? À quoi bon aimer si on lui interdisait d'aimer comme bon lui semblait? Face à une logique aussi défaillante, Marcus Goldman rendait les armes. C'était la grève des sentiments.

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