Je me disais que les carottes étaient cuites. Raïssa bégayait comme pas possible et je n'arrivais pas à sortir un seul mot de la bouche.
Mamie : C'est à vous que je parle!!! Vous étiez où?
Moi : On... Heuheumm (raclement de gorge), on était juste euhhh... pas loin.
Mamie : Ne me faites pas perdre patience. Parlez tout de suite où je ne répondrais plus de moi.
Raïssa : Nous étions avec des amis, pour regarder un match de basket.
Mamie : Match de basket? A cette heure? Tu me prends pour une folle?
Raïssa : Je te le jure mamie. C'était à l'UCAD.
Mamie: Quel UCAD? L'Université?
Moi : Oui mamie.
Mamie: Que faisiez-vous dans ce lieu de débauches? Qui vous y a invitées? Qu'est ce qu'ils vont ont fait?
Moi : Rien mamie. Nous avons juste regardé le match et sommes rentrés juste après.
Mamie : (Elle hurlait) Vous sentez des parfums d'homme à distance, vos lèvres sont toutes roses et vous avez les cheveux ébouriffés !!!! Vous pensez être assez grandes pour me tenir tête et sortir quand bon vous semble? Vous vous croyez dans une auberge ou un bordel? Vous allez vous faire tripoter sans gêne par de petits connards et osez me mentir éhontément !!! Raïssa, dis la vérité !!! Étiez-vous avec des garçons?
Raïssa : (baissant la tête) Oui mamie.
Rose et tonton Souleymane avaient accouru à cause de ses cris.
Tonton Souleymane : Qu'est ce qui se passe maman?
Mamie : Retournez vous coucher Souleymane!! Ce n'est rien.
Tonton Souleymane : Mais tu as sûrement réveillé tout le quartier avec tes cris et tu me dis qu'il ne se passe rien. Pourquoi vous êtes habillées à cette heure ci ?
Mamie : Souleymane ne m'énerve pas davantage. Vas te coucher. Je te parlerais demain.
Il s'en est allé.
Mamie : Maguy, étais tu avec un garçon?
Moi : Oui mamie.
Mamie : Bien!!! Vous devez aller à l'école demain. Je vais vous laisser dormir. Nous réglerons cette histoire demain insha'Allah. Et croyez moi, vous allez voir de quel bois je me chauffe.
Elle s'est levée du lit de Raï et mon portable a presque vibré en même temps. Punaisssseeeee!!! Comme si je n'avais pas assez de soucis!!
Mamie : Ahhh!!! Ce doit sûrement être ton prince charmant!! Non mais je rêve ou quoi? Des gamines comme vous? Donnes moi ton portable tout de suite Maguy. Raïssa où est le tien?
Raïssa : Il est dans ma poche.
Mamie : Donnes le moi. C'est fini maintenant. Je vais vous rendre la vie difficile. Vous ne verrez plus ces appareils. Vous voulez choisir le chemin de la perversion et de la prostitution, ce sera avec vos parents. Je vais les avertir à la première heure demain. Allez-vous coucher.
Je n'arrivais plus à bouger. Raïssa pleurait à chaudes larmes. Personne ne parlait. Nous étions encore sous le choc. Nous n'avions pas pu dormir, évidemment. Nous étions juste allongées dans le noir, attendant la levée du jour. Mamie nous a accompagnées à l'école, mais ne disait absolument rien. J'avais vraiment peur quand elle était si calme. Je ne voulais pas lui causer de la peine, ni entrainer Raï dans mes bêtises, je me sentais mal. Raïssa est directement allée en classe. J'ai compris qu'elle m'en voulait. Aminata nous regardait bizarrement aussi. À la récréation, Raïssa n'était pas venue me voir. Attendre la pause pour la voir était juste ridicule, mais je n'avais pas le choix. Aminata m'a rejointe pour acheter nos sandwichs. Raïssa était introuvable.
Je l'ai finalement trouvée dans sa classe, écrivant dans son journal.
Moi : Tu ne manges pas?
Raïssa : Je n'ai pas faim.
Moi : Tu n'as rien mangé depuis hier. Ce n'est pas bien. J'ai besoin de te parler, sortons de la classe.
Elle m'a suivie dans la cour. Nous nous sommes assises sur un banc.
Moi : Je suis désolée de t'avoir entraînée dans ce merdier. Mais ça va aller !! Mamie n'est pas méchante. Elle ne nous fera pas de mal, elle criera et parlera beaucoup, c'est tout.
Raïssa : Tu ne comprends vraiment rien, où tu fais exprès ?
Moi : De quoi parles-tu?
Raïssa : Non!! C'est moi qui suis désolée, désolée d'avoir laissé une gamine me dicter ma conduite, désolée de ne pas t'avoir dit non plus fermement, désolée de ne pas avoir mis mes études en avant, désolée de t'avoir suivie dans tes bêtises.
Moi : Tu es sérieuse là?
Raïssa : Très sérieuse!! Tu voulais de la compagnie sans penser aux répercussions sur mes études et mon avenir. Tu es juste égoïste. C'est toujours moi, moi et encore moi. Tu n'as rien à perdre, n'est ce pas? Te frapper est la pire des choses que mamie pourrait te faire !!! Elle ne te donnera jamais à ta mère et c'est le contraire pour moi. Mon père me tuera s'il apprend la nouvelle. Il me demandera sûrement de ne pas retourner vivre avec eux. Tu n'en fais toujours qu'à ta tête. Mademoiselle veut goûter à tout ce qui est interdit. Je n'ai pas dit que je n'y prenais pas plaisir mais c'est fini maintenant. Je vais de ce pas appeler Toumane de la cabine téléphonique et le larguer. Je ne veux plus de problèmes.
Moi : Tu es ma grande soeur, je n'ai jamais voulu te faire du mal. Tu es ma confidente et ma seule amie. Je suis désolée de te causer des ennuis depuis que l'on se connait. Je vais dire à mamie que c'était mon idée. Si je t'avais écoutée, nous serions rentrées assez trop et aurions pu éviter mamie. Mais je tenais à passer du temps avec Momar. Je les ai encouragés à te retenir en plus.
Raïssa : Tu es ma sœur aussi. Ne t'inquiète pas!!! Je ne t'en veux pas, mais je me méprise !!! Je ne mets jamais mes études en second plan. Tout ça à cause d'un petit copain!! Mais c'est la première et dernière fois que ça arrive. Bon, je vais passer mon coup de fil.
Moi : Ok, je t'attends ici.
Après son départ, je réfléchissais à ses paroles. Elle n'avait pas tord. J'avais été égoïste. Même pour notre première sortie, j'avais joué avec ses sentiments, sachant qu'elle ne me laisserait jamais sortir seule. C'est vrai qui si mamie en parle à ses parents, son papa ne voudrait pas qu'elle retourne avec eux. Peut-être qu'inconsciemment, je voulais qu'elle reste et faisais tout pour que ça marche. Je me sentais sale et nulle. Je ne voulais pas rompre avec Momar. J'en étais amoureuse et il m'aimait aussi. J'en étais sûre car aucun homme ne patienterait pendant presque deux ans pour sortir avec une fille, s'il ne l'aimait pas. Afin, c'était mon avis. Je lui en ai fait voir de toutes les couleurs, il disait toujours que j'avais l'air d'un animal blessé. Non, je ne pouvais pas le larguer, je l'aimais trop. Raï pouvait laisser Toumane, car elle ne le fréquentait pas assez longtemps pour en être accro.
Raïssa est revenue bien après notre petite discussion. Elle m'a fait un bref compte rendu du coup de fil.
Moi : Tu l'as fait?
Raïssa: Oui, C'est fait.
Moi : ohhhh le pauvre!! Il me fait pitié. Il avait l'air vraiment amoureux Raï.
Raïssa: Je m'en fous. Mon avenir est plus important que cette amourette.
Moi : Amourette? Comment a t-il réagi?
Raïssa: Bah, il était déboussolé, choqué. Je lui ai expliqué que j'allais dorénavant me concentrer sur mes études. Il a dit que continuer à être ensemble, ne m'empêcherait pas d'étudier. Il a fallu que je lui donne des explications sur mes parents et le fait que je devais rentrer après le BAC. Je lui ai dit que notre relation n'avait aucun avenir et que je n'aimais pas perdre mon temps.
Moi : Toumane est un garçon simple et gentil. Il ne méritait pas que tu le traites avec autant de froideur.
Raïssa : Je lui ai juste craché mes vérités. Il s'en remettra. Je l'aime bien mais je me préfère. Appelle Momar et fais de même.
Moi: J'aime Momar. Il est peut-être mon futur mari. Tu vas rentrer à la fin de l'année si tu réussis au bac. Tu ne reverras sûrement jamais Toumane. Tu as raison. Mais ce n'est pas mon cas. Je ne romprais pas.
Raïssa : Tu es trop têtue. Cette relation nous a conduites dans la merde aujourd'hui. Je t'aurais avertie. Je n'ai rien contre Momar, mais mamie nous a demandé de ne jamais avoir de petit ami et d'éviter de fréquenter des hommes. Dis la vérité à Momar et demande lui de faite profil bas. L'heure est grave.
Moi : Je préfère prendre tous les risques avec lui.
Raïssa : ok. C'est ton choix. Je retourne en classe.