L'Assassin du Roi (Le Grand R...

By Csfantasy

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Depuis son enfance, Sixtine attend ce jour. Elle entre enfin à la Cour du Grand Royaume comme gouvernante de... More

Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 20
Chapitre 21
Chapitre 22
Chapitre 23
Chapitre 24
Chapitre 25
Chapitre 26
Chapitre 27
Chapitre 28
Chapitre 29
Chapitre 30
Chapitre 31
Chapitre 32
Chapitre 33

Chapitre 19

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By Csfantasy

- Quand reviendra-t-il ? gémit Lady Persley. Cela fait déjà plus de deux semaines !

J'échangeai un regard avec Jedrek qui se tenait droit comme un i contre le mur près de la porte de la salle. Ses lèvres me parurent pincées, comme s'il se retenait de rire. Lorsque son regard croisa le mien, sa joue tiqua. Mon exaspération le céda à une envie de rire.

Lady Persley était infernale à chaque dîner. Pour oublier ses jérémiades, je me concentrai sur la princesse, corrigeant sa posture, ses manières, sa façon de se servir ou de tenir ses couverts. Elle détestait autant que moi ces dîners durant lesquels j'étais intransigeante.

J'avais hâte que ça se termine. Pour la troisième fois, j'allais descendre aux donjons pour soigner Ryker et l'aider à dormir quelque peu. J'avais tenté d'en apprendre plus sur les fantômes en allant dans la bibliothèque royale mais je n'avais rien appris de plus que ce qu'il m'avait dit la première nuit.

J'étais épuisée. Quand je n'allais pas voir dans quel état était le Prince, je passais un certain nombre d'heures avec Jedrek à m'entraîner à l'épée ou à chercher un moyen d'empêcher le Roi de fuir le château.

Dès que je le pus, je sortis de la pièce avec Jedrek. Il souriait comme un idiot, moqueur. Je lui donnai un coup de coude dans les côtes en le fusillant du regard.

- Si cette gourde savait ! rit-il. Elle ferait une crise d'apoplexie !

- Mais tais-toi ! Personne n'a besoin de savoir. Surtout pas elle. Elle irait hurler sur tous les toits que je vois le Prince et je me retrouverais enfermée dans une cellule avec toi avant d'avoir eu le temps de lui arracher la langue !

Il éclata de rire. Je roulai des yeux, agacée.

Depuis qu'il avait commencé à me tutoyer, il était devenu plus à l'aise et donc, plus énervant que jamais. J'appréciais d'avoir un ami dans ce château mais, parfois, j'avais juste envie de l'assommer.

Je percutai Lady Persley et tombai sur mes fesses lorsqu'elle apparut soudainement devant moi. Elle me jeta à peine un regard, comme si je n'existais pas.

- Vous savez quand le Prince reviendra ? demanda-t-elle à Jedrek avec ses grands airs.

- Quand bien même le saurait-il qu'il ne vous le dirait pas, répondis-je en me relevant et en époussetant ma robe. Au cas où vous seriez aussi ignorante que votre robe est chère, le Capitaine de la Garde n'est pas là pour répondre à vos questions. Maintenant, vous nous excuserez mais nous avons mieux à faire que de vous entendre gémir plus longtemps. Nous vous avons assez entendue durant le dîner. Sur ce, au revoir, Lady Persley.

Je passai devant elle sans lui accorder plus d'attention. Elle me rattrapa par la manche et me gifla.

- Oh, oh... souffla Jedrek.

Je rendis sa gifle à l'autre idiote. Elle tomba en se tenant la joue, choquée.

- Comment osez-vous ?! cria-t-elle.

- Il ne fallait pas me gifler. Si vous me pensiez assez bête pour tendre l'autre joue, vous êtes encore plus idiote que je le pensais.

- Que se passe-t-il ici ?

Je virevoltai. Je souris en m'inclinant. Ses doigts saisirent mon menton, me forçant à me redresser et à le regarder.

- Dans quels ennuis vous êtes-vous encore mise, milady ?

- Elle m'a giflée, Votre Altesse.

- Ce n'est pas très mature de votre part de rendre coup pour coup.

- Je ne cherchais pas à être mature.

Il sourit.

- Allons, milady.

- Ce n'est pas une lady ! cria Lady Persley en tapant du pied. C'est une gouvernante ! Pas une lady ! Vous ne devriez pas lui parler ainsi ! Vous devriez la faire fouetter pour m'avoir giflée !

- C'est vous que je vais faire fouetter si cela vous fait taire.

Je lui avais rarement entendu un ton si glacial et coupant. Je souris à Persley avec un miel et une moquerie apparents.

- Vous n'êtes pas en position de me parler sur ce ton, poursuivit Ryker. Vous mentez sans vergogne à mon propos et agissez comme une fille de joie abandonnée par son protecteur ! N'avez-vous donc aucune honte ? Aucune fierté ? Lorsque vous agirez à nouveau comme une véritable lady, peut-être vous considérerai-je comme telle. En attendant, faites profil bas.

Elle fondit en larmes et j'eus une terrible envie de rire. Jedrek devrait ressentir la même chose parce qu'il se détourna en toussant.

- Vous venez marcher dans les Jardins avec moi, milady ? me demanda-t-il avec douceur. J'ai bien besoin d'air et votre compagnie me ravit toujours.

- Avec plaisir, Votre Altesse.

Je glissai ma main dans le creux de son coude et le laissai me guider dans les Jardins. L'air était frais, vivifiant. Il inspira à plein poumons.

- Quand êtes-vous sorti ? le questionnai-je dès que nous fûmes à l'écart. Nous pensions descendre ce soir.

- Ma mère a enfin eu gain de cause auprès de mon père. Elle lui a promis que je ne lui répondrais plus de façon aussi impolie et virulente et que je ne m'opposerais plus à lui.

- Comptes-tu le faire ?

Ryker regarda Jedrek, un sourcil haussé, l'air las et agacé.

- Ai-je le choix ? Si je lève encore la voix sur lui ou si je prononce une opinion contraire à la sienne, il me fera pendre.

- Il vous tuerait alors que vous êtes son seul héritier ?

- Il me passera la corde autour du cou lui-même s'il le faut.

Je frémis.

- Ne vous en faites pas. Je me contenterai de me taire face à lui.

- Je n'en attendais pas moins de toi, se réjouit Jedrek.

Le Prince roula des yeux. Nous entrâmes dans la Serre où il faisait bien plus chaud qu'à l'extérieur. Il faisait presque trop chaud pour moi, en fait.

Nous nous assîmes sur un banc. Jedrek s'excusa et nous laissa seuls. Un malaise naquit, nouant mon estomac. Ma gorge s'assécha et je devins affreusement consciente de notre isolement. De sa proximité. C'était bien la première fois que la promiscuité avec un homme me mettait dans un tel état.

- Retrouver la lumière du soleil me fait un bien fou, soupira le Prince en offrant son visage aux rayons amplifiés par les vitres de la Serre.

- Vous avez su dormir ces dernières nuits ?

- Un peu. Ils se sont mis dans la tête de chanter sans cesse. Ce n'est plus aussi terrifiant quand ils ne hurlent plus comme des harpies.

Je souris.

- J'ai fait des recherches sur eux mais je n'ai rien pu trouver, avouai-je. Je n'ai pas pu m'aventurer trop loin, toutefois. Je crois que votre mère me fait surveiller depuis quelques jours.

- Ma mère ? Pourquoi ferait-elle cela ? Ça n'a aucun sens.

Haussant les épaules, je gardai le silence. Je n'avais pas de réponses. Pour quelle raison la Reine pourrait-elle me faire suivre ? Je l'ignorais. Mais j'étais certaine que c'était elle. Le Roi n'aurait jamais usé de servantes pour m'espionner. Il avait déjà Jedrek pour cela, bien qu'il ignore que son Capitaine de la Garde m'aidait à planifier son assassinat.

- Pour changer de sujet, je sais où trouver les bons livres. Venez.

Je me levai à sa suite et me pressai pour demeurer à sa hauteur. Il n'était pas beaucoup plus grands que moi mais malgré tout, ses quelques centimètres en plus s'accumulaient vite lorsqu'il usait de toute la longueur de ses jambes.

Il poussa les portes de la bibliothèque royale et les referma derrière moi. Il saisit ma main et m'entraîna entre les rayonnages, me forçant presque à courir.

- Pourquoi vous pressez-vous ainsi ? haletai-je. La bibliothèque ne va pas disparaître !

- Les espions, si.

Ainsi me prenait-il au sérieux. Il n'attendait pas de preuves ou autres. Que je lui dise que je pensais que sa mère me faisait suivre lui suffisait pour le croire. C'était... inattendu. Je n'aurais pas pensé qu'il me croirait aussi aisément.

- Ça doit être par ici... murmura-t-il, plus pour lui que pour moi. Ah ! Là.

Il tira un livre et j'entendis un claquement. Le mur se mit à pivoter, dévoilant une ouverture juste assez grande pour passer en crabe. Ryker passa en premier.

Le couloir était étroit et humide. Je dus me guider en laissant mes doigts glisser le long des pierres.

- Bienvenue dans l'enfer de la bibliothèque royale !

Nous débouchâmes très vite sur une petite pièce ronde, couvertes d'étagères et de livres anciens aux couvertures élimées. Au centre, il y avait une petite table grise de poussière et deux chaises branlantes. Des toiles d'araignées pendaient du plafond, rejoignaient l'une des chaises et l'étagère derrière... Je n'attendais plus que ces sales bêtes pour compléter le plus glauque tableau que j'ai vu jusque là dans ce château.

- Je pensais que rien ne pouvait être pire que les donjons... marmonnai-je alors qu'il regardait les rayonnages.

Il se tourna vers moi avec un sourire en coin.

- Vous tuez des mercenaires sans avoir peur mais vous avez peur de petites bêtes qui ne pourront jamais vous tuer ?

- Je doute qu'elles soient encore petites, vos bêtes. Je vois plutôt une reine Rouge cachée derrière l'une de ces pierres descellées. Elle attend de lancer sa meute sur nous, c'est tout.

Il éclata de rire. Il me tendit un livre.

- Regardez dans celui-ci si vous trouvez quelque chose. Je vais voir si je trouve d'autres ouvrages.

Je posai le livre sur la table tant il était lourd. Toutefois, je refusais de m'asseoir sur l'une de ces chaises.

- Nous ne pouvons pas les remonter pour les lire ailleurs ?

- Auriez-vous peur de petites araignées, Sixtine ? se moqua-t-il.

- Bien sûr que non ! Mais nous manquons de lumière.

- Nous sommes dans l'enfer de la bibliothèque. À quoi vous attendiez-vous ?

- À ce qu'il y ait assez de lumière pour que l'on puisse lire.

Il sourit. Il s'éloigna des étagères quelques minutes avant de revenir avec un chandelier aux bougies couvertes de coulures séchées et fripées. Il prit les bougies et les alluma grâce à sa torche. Il les remit sur le chandelier.

- Merci.

Il ne répondit que par un nouveau sourire. Il fit soudain plus chaud. Je baissai les yeux vers le livre sur lequel la lumière dansait. C'était mieux que rien même si ça allait vite me donner mal à la tête.

J'adorais lire lorsque j'étais petite. Je cachais des livres sous mon oreiller pour que Jon ne les trouve pas et ne me les prenne pas. Patsy m'aidait à avoir de nouveaux livres et empêchait parfois son mari de me les prendre. Ou alors, elle me les rendait dès qu'il avait le dos tourné.

En grandissant, ce plaisir de plonger dans un livre et de m'immerger dedans avait doucement disparu. Je m'étais centrée sur mon objectif, oubliant le reste. Me battre et apprendre à m'adapter à un personnage qui n'existe pas réellement était devenu ma priorité. Ma préparation avait régi ma vie.

Me retrouver à nouveau devant un livre, je fus perdue. Tous ces mots attaquèrent mes yeux, se mélangèrent devant moi. Je cillai, ne parvenant même pas à lire l'index.

Un tressaillement me secoua lorsque le Prince posa sa main sur mon épaule, effleurant mon cou.

- Ça va ?

Je hochai activement la tête.

- Oui, oui... Je vais bien.

Il ne parut pas complètement convaincu. Il s'assit sur la chaise couverte de toiles d'araignées sans sourciller. Je demeurai debout, tentant de me concentrer sur l'index. Mais les lettres se mélangeaient, formant des mots qui n'avaient pas de sens.

Je me laissai tomber sur la chaise libre, retrouvant soudain une mémoire éloignée de mon enfance. Lorsque j'avais appris à lire, mon institutrice me hurlait dessus sans cesse lorsque venait le moment de la lecture. Les pleurs, les cris, le sentiment de nullité... Tout me revint comme une gifle.

Et puis, il y avait eu cet ami de Jon qui m'avait aidée. Qui avait le même problème que moi. Qui m'avait vraiment appris à lire. Il m'avait appris à aimer la littérature et à dépasser mon problème. Je ne me souvenais plus du nom qu'il avait donné. Toujours était-il qu'il fallait que je me souvienne la clé qu'il m'avait donné.

Ryker ferma son livre et le posa à terre dans un soulèvement étouffant de poussière. Il passa au second. Mon estomac se souleva, me donnant envie de vomir. Allait-il se rendre compte que quelque chose clochait, chez moi ?

Je n'y arriverais pas. Il fallait que je l'accepte. Je ne parviendrai pas à lire. Pas aussi vite. Il fallait que je retrouve la méthode que m'avait donnée l'ami de Jon et ça n'allait pas se faire en cinq minutes.

Je fermai le livre, le laissant sur la table et je me relevai. Des bruits résonnaient dans les murs. Des gens couraient.

- Que se passe-t-il ?

Je levai une main pour le faire taire, tendant l'oreille. Un cri déchira le silence.

- Restez là, ordonnai-je avant de sortir.

J'avais la main sur ma dague, prête à réagir en sortant de l'enfer. Je suis vis les cris, remontant la foule à contre-courant. Les gens me percutèrent, manquant de me faire perdre mon arme.

Des gardes faisaient partir les gens et empêchaient les curieux de s'approcher. Le Roi ne tarda pas à arriver, entouré de ses conseillers les plus proches et de deux Chevaliers, les premiers que je voyais depuis que j'étais au château.

Subtilement, je me glissai derrière une statue. Ma robe n'était pas trop volumineuse donc elle ne devrait pas me vendre. De ma cachette, je pus observer ce qui avait fait hurler les servantes.

Sur le mur, un message avait été inscrit avec ce qui était assurément du sang.

« We will be back »

L'ancien langage. C'était un message de la Faerie. Comment je savais le lire, je l'ignorais. Comment je savais qu'il venait de la Faerie ? Ils étaient le seul peuple à encore user de l'ancien langage. Par contre, je ne connaissais rien de cette langue et je ne savais pas du tout ce qu'il voulait dire.

- Faites-moi laver cela, ordonna sèchement le Roi. D'ici ce soir, je ne veux plus une tache sur ce mur.

- Bien, Votre Majesté, répondit un servant.

Le Roi tourna les talons et repartit. Je vis combien sa main était crispée sur sa canne.

En toute discrétion, je retournai dans l'enfer. Ryker n'avait pas bougé. Il avait posé plusieurs livres à terre et semblait plongé dans la lecture d'un petit ouvrage aux pages jaunies par le temps.

Il releva la tête lorsque j'entrai, sa question dans les yeux plutôt que sur les lèvres.

- Quelqu'un a laissé un message en lettres de sang sur un mur près des quartiers de votre père. En ancien langage.

Il blêmit.

- Comment est-ce possible ?

- Je l'ignore. Peut-être quelqu'un chez les rebelles connaît l'ancien langage et s'amuse à effrayer les habitants du château. Je ne sais même pas ce que le message signifie.

- Qu'est-ce qui était écrit ? Vous vous en souvenez ? Vous pourriez le réécrire ?

- Je crois, oui.

- Montons. Nous parlerons de ces livres plus tard.

Il les rangea rapidement avant de sortir de l'enfer. Il me guida jusqu'à l'étage dédié à la famille royale. Il poussa une porte qui ouvrit sur un salon immense dans les tons bordeaux et or, empli de meubles gravés et lustrés, de tapis riches et doux... Il n'y avait pas de doutes à avoir sur quel genre de personne vivait dans ces quartiers.

Sur un bureau massif, le Prince récupéra un papier et une plume. J'écrivis ce que j'avais lu sur le mur aussi bien que je pus. Écrire n'avait jamais été mon fort. Autant j'étais douée pour manier ma dague autant une plume était difficile à manœuvrer sur un papier.

- Vous êtes sûre de vous ?

- Oui. C'est ce que j'ai lu. Qu'est-ce que ces mots signifient ?

Il alla s'asseoir dans l'énorme canapé en soupirant. Il passa une main dans ses cheveux, blême et inquiet.

- Lorsque mon père a enfermé la Faerie sous terre, les Rois Jumeaux lui ont dit la même chose. Lui ont fait la même promesse. We will be back. And we will destroy this world. Nous reviendrons. Et nous détruirons ce monde.

Une vague glacée s'abattit sur moi, me faisant trembler.

La Faerie commençait d'ores et déjà à planifier son retour et sa vengeance. Et un rebelle n'aurait jamais pu avoir connaissance des derniers mots des Rois Jumeaux.


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