La fille au parapluie bleu [t...

By Aleyks24

6.9K 453 145

Julie. Prénom banal, elle le sait. C'est la fille au fond de la classe. Mais si, vous voyez la fille au fond... More

Prologue
Chapitre -I-
Chapter -II-
Chapter -III-
Chapter -IV-
Chapter -VI-
Chapter -VII-
Chapter -VIII-
Chapter -IX-
Chapter -X- ÉPILOGUE
Remerciement

Chapter -V-

695 37 18
By Aleyks24

Chapter 5

Le samedi matin, je m'éveillai avec un léger rayon de soleil qui caressait ma joue. Cela me fit sourire, parce que j'avais l'impression d'être une de ses princesses dont le soleil caresse le visage tous les matins afin de les réveiller.

Je m'assis dans mon lit, et m'observai dans le miroir, placé en face du lit. Mes cheveux étaient emmêlés et retombaient en une masse informe sur mon visage. J'avais les yeux mi-clos, et un air hébété sur la figure. On oublie l'image de la princesse... Soupirant, je replongeai sous les draps. Mais le comportement d'Alec et les mots d'Allan me revinrent bien vite en mémoire, et j'étouffai un gémissement tout en enfouissant mon visage sous l'oreiller.

J'étais perdue dans des tourbillons d'émotion, et ne savais plus où j'en étais. Mon portable vibra un bref instant, mais je ne levai pas le nez de la couverture. Je n'avais pas envie d'affronter la tempête de sentiments qui était prête à éclater à l'intérieur de moi-même. Je voulais stopper le cours du temps. Mon téléphone vibra plus longtemps, signe que je recevais un appel. Soupirant, je me levai et l'attrapai, puis, voyant que c'était Axel, je décrochai :

« - Oui ?

- Julie ? Je voulais juste te prévenir qu'aujourd'hui, je suis seul à la plage, mais qu'à partir de demain, Julien me rejoindra tous les jours. Donc j'attends ta venue avec espoir.

- Oh... Tu y es ?

- Oui.

- ... Je me prépare et j'arrive.

- D'accord. Merci. »

Il raccrocha, et je marmonnai des choses incompréhensibles tout en allant sous la douche. Je me lavai, et en sortant, j'allai fouiller dans mes tiroirs pour trouver un maillot de bain. Mais comme je n'étais pas allée me baigner depuis une éternité, je ne trouvai qu'un vieux maillot bleu deux pièces. Je l'enfilai avec difficultés. En effet, depuis la dernière fois que je l'avais mis, j'avais changé de morphologie. J'avais pris des hanches et de la poitrine. En me regardant dans le miroir, je fus prise d'une crise de fou rire intense. Je m'écroulai par terre en me tenant le ventre et en hoquetant. Je ris comme une folle pendant un long moment, puis, quand je repris mon calme, je m'examinai de nouveau. Le maillot était étriqué à la taille, et me moulait la poitrine de façon indécente. J'ai l'air d'une prostituée de bas étage en maillot de bain. A cette pensée, le fou rire me reprit, et je m'effondrai sur le lit en me tenant les côtes. Je ne me souvenais plus de la dernière fois où j'avais autant ris. Mais rire me faisait du bien. J'avais l'impression de redevenir moi-même, de redevenir joyeuse et d'oublier tous mes récents ennuis.

Puis, je me rappelai que j'avais rendez-vous avec Axel. Je mis un short et un tee-shirt par-dessus le maillot, attrapai un grand sac où je fourrai de la crème solaire, mes lunettes de soleil, un livre et mon iPod, mes écouteurs, deux serviettes, un peu de nourriture et quelques autres choses inutiles. J'enfilai mes sandales et parti en fermant ma porte à clé. Je dévalai les escaliers et marchai rapidement en direction de la plage. Il faut beau aujourd'hui, mais j'ai quand même pris mon parapluie. On ne sait jamais.

Je marchai pendant quelques minutes, puis dus enlever mes chaussures pour ne pas avoir de sable dedans. Je cherchai Axel des yeux, quand j'entendis :

« - Julie, je suis là ! »

Je vis ce dernier me faire signe du bras, et je le rejoignis. Il était assis dans un coin à l'ombre. Je dépliai ma serviette et m'assis dessus. Puis, je le détaillai. Il avait une chemise blanche ouverte qui laissait voir son torse et un bermuda. Je lui demandai :

« - Tu n'es pas en maillot ?

- Je t'attendais pour aller me baigner.

- Oh... C'est que... Mon maillot est trop juste et je...

- N'aie pas peur du regard des autres Julie. Sois toi-même. »

Sur ce, il se leva et enleva sa chemise et son short.

J'hésitai, puis repensai à la phrase qu'il avait prononcé juste avant. Il est vrai que je tiens énormément compte de l'avis des autres, et je déteste être jugée. Peut-être est-il temps pour moi d'être... Moi. Pff, plus facile à dire qu'à faire. Soupirant, je retirai mon haut et mon short, et me levai en agrippant la main qu'il me tendait. Il ne fit qu'une remarque en voyant mon maillot étriqué :

« - J'aime bien la couleur. Il fait ressortir tes yeux. »

Je lui souris, et le suivis. J'aperçus quelques regards moqueurs, voire dédaigneux sur le chemin, mais je gardai la tête haute. Arrivés devant l'eau, je trempai un pied dedans, et marmonnai :

« - Elle a l'air assez fraîche...

- Ce n'est pas grave. Il fait trop chaud, ça ne peut qu'agréablement nous rafraîchir. »

Je hochai la tête, et il avança, jusqu'à avoir de l'eau à hauteur de la taille. Il me fit signe, de venir, et j'avançai en hésitant. Je frissonnai quand l'eau m'arriva à la taille, et amorçai un mouvement pour reculer. Mais Axel m'attrapa par le bras et me murmura :

« - Reste. Je m'en voudrais de t'avoir fait venir pour rien. »

Je marmonnai quelque chose qui pouvait passer pour un assentiment, et serrai sa main dans la mienne tandis qu'il me faisait avancer dans l'eau. Il s'arrêta quand j'eus de l'eau jusqu'au cou. Comme il était plus grand que moi, l'eau ne lui arrivait qu'aux épaules, et encore. Si seulement je pouvais être aussi grande... Mais bon, il faut savoir abandonner ses rêves... Il me demanda :

« - Tout va bien ? »

Je hochai la tête en détournant le regard. Je vis du coin de l'œil qu'il me fixait, et il finit par dire :

« - Tant mieux alors. »

Je ne répondis rien, et commençai à nager. Il m'imita, et, au bout d'un moment, il disparut sous l'eau. Je m'arrêtai, et, battant, des jambes et des pieds pour ne pas couler, je fouillai la mer du regard. Alors que je commençai à sérieusement m'inquiéter, je sentis deux mains m'attraper la taille, et je fus projetée en l'air par Axel. Un rire m'échappa tandis que je m'écrasai dans l'eau. Je remontai à la surface, et je vis qu'Axel me regardait. Il avait l'air sérieux, mais une petite lueur d'amusement éclairait ses beaux yeux. Je me rapprochai de lui à la nage, et lui envoyai de l'eau dans la figure. Pendant quelques minutes, nous jouâmes comme des enfants qui font une bataille d'eau. J'avais l'impression que tous mes ennuis récents s'envolaient au fur et à mesure qu'Axel m'envoyait de l'eau. Je rigolais comme une gamine qui découvre la mer pour la première fois. Puis, pour rire, je plongeai sous l'eau et nageai le plus silencieusement possible jusqu'à arriver derrière Axel. Je vis qu'il me cherchait des yeux. Je prenais de l'élan et sautais sur son dos. Il eut un léger rire tandis que je me cramponnais comme un koala en passant mes bras autour de son cou. Je lui murmurai :

« - Merci beaucoup Axel de m'avoir fait venir ici.

- Mais de rien. »

Je descendis de son dos, et me positionnai face à lui. Il me dit d'un ton sérieux :

« - Julie... Je sais que tu ne veux pas me parler de ton problème actuel. Mais si jamais un jour tu veux le faire, je serais là d'accord ?

- Oui. »

C'est ça que j'aime bien chez lui. Il est discret, et ne force pas les gens à se confier. Il me frotta légèrement la tête, puis regarda sa montre et s'exclama :

« - Oh ! Il est déjà midi et quelques. Je dois rentrer. »

Nous retournâmes à la plage, et nous nous séchâmes. Je me rhabillai, l'imitant, et il rassembla ses affaires afin de partir. Je fis de même, et il m'emmena en direction de la ville. Il s'arrêta après quelques minutes de marche devant un immeuble assez défraîchi. Sa maison. Il toussota, et m'embrassa sur les deux joues :

« - A bientôt, Julie.

- A bientôt.

- N'oublie pas d'être toi-même. »

Sur ce, il poussa la porte d'entrée et s'engouffra dans le hall. Je restai indécise, réfléchissant à cette simple phrase. Si je voulais être moi-même, que devais-je faire ? Parler. Chanter. Et trouver quelqu'un ayant un peu d'amour pour moi. Ce que mes parents n'ont pas. Mais avais-je vraiment envie d'être moi-même ? De montrer à tout le monde que finalement, non je ne suis pas muette ? Non, je n'en avais pas la force.

La tête basse, je pris le chemin pour rentrer chez moi. Arrivée sur la place du centre-ville, je m'assis sur un banc et pris mon visage dans mes mains. Axel avait essayé de m'aider, mais l'effet obtenu était contraire à ce qu'il voulait. Je me rendais compte que pour être moi, j'allais devoir affronter plusieurs épreuves. Mais je voulais redevenir moi-même. Avant de connaître Axel, j'étais persuadée que la solitude était ma seule amie, et que j'allais sûrement rester seule toute ma vie. Et puis, il m'avait aidée. Grâce à lui, j'étais redevenue un peu joyeuse, je n'avais pas peur d'être en sa compagnie. Il m'écoutait, ne me jugeait pas. Je m'en voulais un peu de ne pas m'être confiée à lui. Il essayait vraiment de m'aider.

...

Le lundi, je me réveillai assez tôt. J'avais mal dormi la nuit, cherchant le sommeil en vain. Je me levai, et titubai jusqu'à la salle de bain. Là-bas, je me regardai dans la glace, et grimaçai. La nuit quasi-blanche que j'avais passée se reflétait sur mon visage, et particulièrement sous mes yeux. Détournant le regard, j'entrai dans la douche, et me lavai les cheveux. Je chantonnais, afin de me détendre. En effet, pour je ne sais quelle raison, j'étais stressée. Stupide rendez-vous. Je sortis de la douche, m'enveloppai dans une serviette, et allai m'écrouler sur le canapé. Je fermai les yeux, et sans que je m'en rende compte, je plongeai dans un profond sommeil, ponctué de quelques cauchemars.

...

Je me réveillai en sursaut au son de la sonnerie de mon portable. Un instant désorienté, je cherchai à tâtons mon téléphone, et décrochais :

« - Allo ?

- Juju ? Excuse-moi de te déranger à cette heure-là, mais je voulais savoir si tu serais disponible ce soir pour venir chanter au bar à 20 heures ? »

Fronçant les sourcils, je reconnus la voix d'Hervé. Silencieusement, je réfléchissais. J'ai rendez-vous avec Alec à 14 heures. Donc, normalement, j'aurais fini. Je lui répondis :

« - Oui, ça devrait aller.

- Très bien. A ce soir. »

Je raccrochai, et allai m'habiller. En apparence, je ne voulais pas paraître préoccupée par ce rendez-vous. Mais intérieurement, j'étais une vraie boule de nerf. Après avoir écarté tous mes pantalons, quelques tee-shirts, des robes et des jupes de mon choix d'habillement tout en grommelant, je finis par me poser sur mon lit, et pris ma tête entre mes mains. Je me mets dans un état pas possible pour rien. Il n'est que 11 heures, je dois voir Alec dans trois heures, donc j'ai le temps. Déstresse Julie ! Sois toi-même comme le dis si bien Axel !

Être moi-même. Je n'avais pas de style vestimentaire bien particulier, le mien était un mélange plutôt surprenant d'influence grunge, gothique, basique, rétro etc. Je ne me reconnaissais dans aucun style en particulier, et je n'aimais être enfermée dans une sorte de caste vestimentaire. Décidée par cette décision, je fouillai dans mon armoire avec une nouvelle ardeur. Je mis de côté un short, deux jupes, une robe à bretelles, et plusieurs tee-shirts. Puis, j'allumai ma chaîne afin de mettre de l'ambiance tandis que j'essayais les tenues choisies.

Je fronçai les sourcils en essayant le short. Je n'aimais pas montrer mes jambes. Je les trouvais... disgracieuses. C'était une des parties de mon corps que j'aimais le moins. Je fis l'impasse sur les jupes trop courtes. Il ne me restait que la robe.

Je la passai en soupirant, puis m'examinai dans la glace. Le haut de la tenue était une sorte de bustier noir sur lequel couraient de minces fils argentés. Le bas était en sorte de dentelle, noire également, mais qui s'éclaircissait en progressant vers le bas. A la fin, c'était un noir très clair. Elle s'arrêtait un peu au-dessus des genoux. Ce n'était pas forcément la robe la plus joyeuse pour voir quelqu'un, mais c'était la seule qui me restait. J'attachai mes cheveux en queue de cheval, et ramassai tout le bordel que j'avais éparpillé dans ma chambre. Je décidai de mettre un peu de mascara, mais seulement ça. Je n'aime pas avoir la sensation du maquillage sur la figure. Une fois prête, je me préparai à tuer le temps pendant deux longues heures environ. Mais l'on frappa à ma porte. Si c'est Allan, je n'ouvre pas.

Je me rendis sur la pointe des pieds jusque dans l'entrée, et regardais par le trou. C'était Alec. Mais qu'est-ce qu'il fout là ? Il est à peine 11h30 ! Légèrement inquiète, je lui ouvris.

Quand il me vit, un sourire éclaira son visage, et je me sentis rougir. Il me murmura :

« - Il serait peut-être plus prudent que tu me laisse rentrer non ? Mon frère est juste à côté.

- Oh ! »

Je m'écartai en vitesse pour le laisser pénétrer dans l'appartement, puis refermai la porte. Je m'adossai contre le bois, et lui demandai :

« - Qu'est-ce qui se passe ?

- Oh, je pensais que ce serait sympathique de manger ensembles, puis de passer l'après-midi et, pourquoi pas, la soirée tous les deux ? Sans dormir ensembles bien sûr !

- C'est que... J'ai déjà prévu quelque chose ce soir...

- Ah, tu vois ton petit copain ? »

A ces mots, je ne pus m'empêcher d'éclater de rire. C'était la deuxième fois en peu de jours que je riais, et cela sortait de l'ordinaire. Je me tenais les côtes tout en glissant le long de la porte, et m'écroulai par terre, pliée de rire. Alec s'inquiéta, car il posa sa main sur mon épaule. Lentement, j'arrêtai de rire, et, quand la crise fut passée, j'essuyai du revers de la main les quelques larmes qui avaient coulées et me relevai. Je précisai au frère de Allan qui devait me prendre pour une cinglée :

« - Non je n'ai pas de copain, mais je pense que tu l'avais compris.

- En voyant ta réaction, oui.

- En fait... Je vais chanter dans un bar, et j'ai besoin de rentrer chez moi pour me changer, donc...

- Je serais ravi de venir te voir chanter. »

Je m'arrêtai de parler, et le regardai, étonnée. Il a vraiment envie de venir me voir ? Moi qui ne suis rien ? Il passa lentement sa main sur ma joue, et me murmura :

« - Ce sera vraiment un plaisir de t'entendre.

- Oh, et bien... Tu peux venir dans ce cas-là, mais il faudra quand même que je repasse chez moi...

- Pas de problèmes, je te rejoindrais là-bas. Tu chantes à quelle heure ?

- 20 heures. »

Il hocha la tête tout en me promettant d'être là. Puis, il me re proposa :

« - Que dirais-tu que l'on mange ensembles ?

- Je suis d'accord.

- Bien entendu, je t'invite. »

Je sentis mon cœur fondre. On ne m'avait jamais invitée manger nulle part, et je me sentis rougir. Je me détournai, et allai chercher mon sac dans ma chambre. J'y fourrai un peu tout et, en me retournant, je vis qu'Alec m'avait suivie. Il examinait la pièce d'un air satisfait, et, sans pouvoir m'en empêcher, je lui hurlai presque :

« - Non, ne regarde pas ! »

Immédiatement après avoir dit ça, je me plaquai les mains sur la bouche. Mais je n'aime pas que l'on pénètre dans ma chambre sans me prévenir. C'est un peu mon antre, mon refuge. Et cet endroit n'est qu'à moi.

Il me regardait, amusé, sans rien dire. Je t'en supplie, dis quelque chose pour éviter que je ne passe pour une grosse folle ! Il décida finalement de m'aider :

« - C'est très joli. Ça te ressemble. »

Je restai silencieuse. Comment ça ma chambre me ressemblait ? Donc en gros, si je suivais son idée, j'étais bordélique, hétéroclite, et un peu sale ? Merci du compliment... Voyant la tête que je faisais, il rectifia :

« - Enfin, je veux dire... Elle te ressemble dans le sens où... Il y a plusieurs styles différents, chaque objet paraît posé là comme si tu n'avais pas eu le temps de le mettre autre part, mais tout est en harmonie malgré tout. Elle est unique.

- C'est... un compliment ?

- Oui, bien sûr ! »

Je hochai la tête, et, mal à l'aise, je lui demandai :

« - On y va ?

- Oh, bien sûr ! »

Il sortit de ma chambre, et je le suivis, heureuse qu'il ne s'attarde pas plus longtemps dans la pièce. Malgré sa gentillesse, je n'aimais pas qu'il s'introduise trop dans ma vie privée. Nous retournâmes dans le salon, et je mis mes sandales. Il ne put s'empêcher de me demander :

« - Tu ne mets pas de talons ? »

J'avais essayé une fois de marcher avec des talons, et je m'étais faite une entorse. Donc, je ne veux pas réessayer. Je secouai la tête, et marmonnai :

« - Je n'arrive pas à marcher avec. »

Il eut un léger rire. Non mais il se moque de moi ?! Je m'apprêtais à lui lancer une pique quand il me coupa dans mon élan :

« - Excuse-moi, mais tu es la seule fille que je connaisse qui n'arrive pas à marcher avec des talons. Mais cela te rend originale, même si tu l'étais déjà. »

Ah, en fin de compte, il ne se moque pas. Bon. Je haussai les épaules, et le fis sortir de chez moi.

...

Il m'avait emmené jusque dans le centre-ville, et avait insisté pour aller dans un petit restaurant. J'avais fini par accepter. Nous nous étions assis en terrasse, à l'ombre d'un parasol. Nous avions commandé à manger, et, en attendant, nous sirotions nos boissons. Le silence s'était installé entre nous deux, et j'avais peur de le briser. Ce fut lui qui prit la parole le premier :

« - Je ne t'avais jamais vue en robe...

- En fait, tu ne m'as pas beaucoup vue, et je ne mets presque jamais de robe.

- Ah, tu en as mis une spécialement pour moi ? »

Je sentis mes joues s'enflammer et détournai la tête. Je marmonnai :

« - Non, c'est juste que je n'avais que ça. »

Je l'entendis se lever, et il attrapa mon menton entre ses mains pour tourner mon visage vers lui. Il me murmura en souriant :

« - Hey, ce n'est pas grave si tu rougis, ça te rend encore plus mignonne... »

Moi ? Mignonne ? Je penche plutôt pour dire que ces deux mots ne vont pas du tout ensembles. Mais il insista :

« - Oui Julie. Tu es mignonne. Et cela m'étonne que personne ne te l'a dit avant.

- Sans doute parce que tu es le seul à le penser. »

Les mots m'avaient échappé, amers. Il me regarda, surpris, ne s'attendant pas à cette réponse. Mais je n'en avais que faire. Voilà, c'était ça le vrai « moi ». J'étais amère envers mes parents qui ne m'aimaient pas, envers les personnes qui n'en avaient rien à faire de mon existence, et envers moi-même. J'étais amère d'être ce que j'étais. Mais, alors que je songeais réellement à m'en aller de là, Alec posa sa main sur la mienne, et me murmura :

« - Dans ce cas, les autres ne savent pas ce qu'ils ratent. »

Un léger sourire fleurit sur mon visage tandis que je sentais mon cœur battre la chamade. Le serveur arriva avec nos plats, clôturant la discussion.

...

Après manger, Alec m'emmena me balader dans la vieille ville. Je n'y allais pas souvent, parce que je ne voyais pas l'intérêt de marcher sur de vieux pavés, et de ne voir que des ruines en pierre tandis qu'un passionné nous expliquait que dans telle ruine, une personne était morte, que telle autre tas de pierres était en fait une cuisine etc. J'étais donc réticente à l'idée d'y aller. Mais Alec insista :

« - Mais si, tu vas voir. C'est super. Au pire, si ça t'ennuie, on s'en va d'accord ? »

J'avais donc acceptée. Il me fit visiter tous les recoins de cette ancienne partie de la ville. Je découvris plein de petites ruelles avec des commerces artisanaux, des endroits que je ne connaissais pas et plein d'autres choses. Vers 18 heures, alors que nous étions sur le point le plus haut de la ville et que nous marchions depuis un long moment, je soufflai :

« - S'il te plaît Alec, on peut se poser quelques minutes ? »

Il se tourna vers moi, et, voyant que j'étais essoufflée à l'extrême, il acquiesça. Je me laissai lourdement tomber sur un banc, et fermai les yeux. Je le sentis s'asseoir à côté de moi, et j'entendais sa respiration. Il me demanda :

« - Tu rentres à quelle heure chez toi pour te préparer ?

- Vers 19 heures.

- D'accord. »

Nous restâmes silencieux pendant un moment, puis engagea la conversation :

« - Tes parents n'habitent pas avec toi ?

- Non. »

J'avais prononcé ce simple mot avec froideur, et Alec avait immédiatement compris qu'il ne fallait pas insister. Un silence pesant s'installe, puis, délicatement, il me prit la main et me murmura une fois encore :

« - Julie... Si je t'ai fait venir ici... C'était pour être seule avec toi. »

Seul pour faire quoi ? C'est un psychopathe ?! Il continua sans se douter des pensées qui m'agitaient :

« - Voilà. Depuis que je t'ai rencontré, quand tu cherchais Allan, et bien... Je pense tout le temps à toi. Je... Je ne sais pas comment dire ça sans paraître trop... ridicule, mais... »

Il est sérieux ? Il est en train de dire qu'il est... amoureux de moi ? C'est quoi ce délire ?! Avant que je ne puisse éclaircir la situation, il me tourna vers lui et posa délicatement ses lèvres sur les miennes. Euh... Oh mon Dieu, il fait quoi ?! Au contact de sa bouche contre la mienne, un tourbillon de chaleur m'envahit, et je me sentis planer. Il avait fermé les yeux, tandis que je gardais les miens ouverts sous le coup de la surprise. Avec douceur, il m'entrouvrit la bouche et glissa sa langue à l'intérieur.

Bon, je fais quoi ? En hésitant, je fermai les yeux, et me laissai embrasser.

Enfin, il interrompit le baiser avec douceur, et plongea son regard vert dans le mien. Gênée, je détournai les yeux, mais il me saisit le menton et me tourna vers lui. Il me fixa longuement, puis me murmura :

« - Je ne voulais surtout pas te forcer.

- Oh... Non, ce n'est pas ça, mais... »

Comment dire sans passer pour une grosse solitaire que je n'ai jamais eu de petit ami ? Il le comprit, car un sourire craquant apparut sur son visage, et il me rassura :

« - Ce n'est pas grave si je suis le premier. Ne t'inquiète pas. »

Je hochai la tête, et jetai par hasard un regard sur ma montre. Ce que je vis me fit bondir :

« - Je dois rentrer ! Il est 18h30, mais le temps d'arriver chez moi et tout, je...

- Pas de problèmes. Je te ramène. »

Je lui souris timidement, et il m'attrapa par la main avant de m'entraîner sur la descente.

Je ne parlai pas du trajet, gênée, et ayant terriblement peur de dire une bêtise. Quand nous fûmes devant chez moi, il me lâcha la main, et, me posant un tendre baiser sur les lèvres, il me dit en souriant :

« - A toute à l'heure Julie. »

Puis il tourna les talons et s'en alla. Je rentrai chez moi avec une puissante envie de chanter, de danser. Je sautillais dans mon appartement, un sourire irrépressible aux lèvres. Je chantonnais avec joie sous la douche, puis choisissais mes habits avec plus de soin que d'habitude. Je me sentais un peu bête d'être aussi heureuse, mais je n'y pouvais rien. Je me fis une natte avec soin, me maquillai avec attention, et m'habillai. J'avais sélectionné un jean noir, et un tee-shirt de la couleur de mes yeux. J'enfilai mes sandales, pris mon sac et repartis en direction du bar.

...

Arrivée là-bas, j'allais poser mes affaires dans la salle qui faisait office de vestiaires, et gardai mon portable. Le cœur battant la chamade, je montai sur la scène, tapotai le micro, et choisis une chanson. L'air désinvolte, je cherchai Alec. Ne le voyant pas, je sentis mon cœur se serrer. Mais pourquoi je suis si triste ? Mince quoi, je suis Julie, la fille solitaire ! Inspirant un bon coup, je lançai la musique.

Vers le milieu de la chanson, alors que le bar se remplissait petit à petit, j'aperçus Alec, adossé à un pilier, qui me dévorait du regard. Je rougis, et détournai le regard.

Je passai le reste de la soirée à chanter des chansons d'amour, puisque c'était ce que m'avait demandé Hervé. Je sentais le regard d'Alec sur moi, brûlant. Quand j'eus fini, je descendis de la scène, repris mes affaires, et sortis. Il m'attendait dehors, appuyé contre un poteau. Je me dirigeai vers lui, et il me félicita :

« - Tu chantes vraiment très bien. Bravo. »

Je lui souris, et, brusquement, il m'attira vers lui pour m'embrasser. Ses lèvres se plaquèrent sur les miennes, et il m'embarqua dans un long baiser. Quand il rompit le contact, j'étais haletante. Cela le fit rire, et il me demanda :

« - On se revoit demain ? Sur la place de centre-ville vers 15 heures ?

- D'accord. »

Il me fit un clin d'œil, me frotta la tête, et me prit la main pour me raccompagner chez moi. Devant la porte du hall, il me lâcha, et resta silencieux. Je suis censée faire quoi ? Le remercier ? L'embrasser ? Non, pas ça. Je suis trop gênée. Je marmonnai :

« - Merci... A demain. »

Et je m'engouffrai dans le hall, maudissant ma timidité subite. Oh et puis mince. Je fis demi-tour, rouvris la porte, et vis avec soulagement qu'il était toujours là. Je me dirigeai vers lui et lui plantai un rapide baiser sur les lèvres. Puis je rentrai chez moi pour de bon.

...

Le lendemain, je me levai vers 13 heures. Puis, en me souvenant de la veille, j'enfouis mon visage brûlant sous mon oreiller. Mais qu'est-ce qui lui avait pris de m'embrasser comme ça ?! Et pourquoi je me sentais attirée par lui ?! J'en avais marre de m'interroger, et décidais d'agir. Je me levai, m'habillai rapidement, mangeai un petit truc et sortis. Je me dirigeai vers le centre-ville sous la pluie (dire que hier il faisait beau...), même si j'étais consciente d'arriver en avance. Et plus j'étais proche de la place, plus je me rendais compte qu'en fin de compte, j'étais tombée amoureuse d'Alec. Bon, en même temps, qui résiste à un type aussi parfait ? Arrivée sur la place, serrant dans ma main mon parapluie, je m'assis sur la fontaine qui l'ornait et soufflait un bon coup. C'est quand même bizarre qu'un type aussi parfait que lui s'intéresse à moi. J'étais en proie au doute le plus profond. C'est alors que je le vis arriver de loin. Jetant un coup d'œil à ma montre, je m'aperçus qu'il avait une heure d'avance. Et il ne m'avait pas vue. Mais pourquoi il est là ?! Je vis qu'il se dirigeait vers la fontaine, et me tournai totalement, rangeant rapidement mon parapluie mouillé dans mon sac de peur d'être reconnue. Je vis du coin de l'œil une personne s'asseoir à côté de lui avec une capuche, et tendis l'oreille pour entendre ce qu'ils se disaient. Choquée, je reconnus la voix de Deborah :

« - Alors, comment ça avance ?

- Très bien. Je l'ai emmenée faire un tour hier, et je l'ai embrassée. Tu aurais dû voir sa tête ! J'ai appris qu'elle n'avait jamais eu de petit ami.

- Donc j'en étais sûre. Cette petite salope parle. Elle n'est pas muette. J'ai hâte de voir sa réaction quand j'aurais tout appris à Pauline, elle qui répétera tout. Elle va savoir qu'il ne faut jamais m'énerver, car ma vengeance est terrible !

- Par contre, je n'ai rien pu apprendre sur ses parents. Elle a refusé de m'en parler.

- Oh, tu sais, tu lui fais quelques baisers dans le cou, tu t'arrange pour qu'elle ait envie de plus, et là tu lui parle de ses parents.

- Ok, je vais faire ça. »

Tremblante, je me rendais compte que je m'étais faite avoir depuis le début. J'aurais bien dû me douter qu'un type aussi beau, serviable et tout voulait se servir de moi. Quelle imbécile... Les yeux emplis de larmes, je me levai et partis en courant, trempée jusqu'aux os. Je voulais m'enfuir, n'importe où. A l'aveugle, j'empruntai un chemin au hasard, et me rendis compte que je courrais en direction du parc. Au moins je serais seule.

Je passai la grille du parc, et pris le premier chemin qui arrivait. Mais alors que je courrais, je rentrai dans une personne. Je tombai à terre, sonnée, les larmes coulant sur mes joues et se mélangeant aux gouttes de pluie. J'entendis :

« - Julie ?! »

Relevant la tête, j'aperçus Allan. Je me remis debout rapidement, et me jetai dans ses bras en sanglotant. Surpris, il referma ses bras autour de moi et me serra contre lui. Dans ma peine, je m'entendis pleurer :

« - T-Tu avais raison... Depuis le début... »

Continue Reading

You'll Also Like

1.2K 414 9
Comment un tableau peut-il susciter autant de discours? Vous y lirez les différents points de vue de tous ceux qui sont en lien avec ce tableau, de p...
253K 5.2K 40
- Met toi à genoux, pour baiser les pieds de ton maître Elle s'agenouille pour presser ses lèvres sur mes pieds. - c'est bien,si tu es bien obéissant...
1M 38.3K 50
J'ai toujours voulu visiter la Californie. Sans expliquer pourquoi. Alors je m'y suis rendue, accompagnée par mes meilleures amies. Tout devait se...
242K 8K 42
Selena une jeune fille de 17 ans aux apparences tout a fait ordinaire mais qui est loin de l'être, elle est tout a fais hors du commun, elle est une...