Sain d'Esprit (Laura Woodward...

By LeodeGalGal

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Ceci est un tome 2, passez votre chemin si vous n'avez pas lu (et apprécié) Les Affaires des Autres ! La tra... More

Préambule
Récapitulatif des personnages (au besoin, sans spoilers pour le tome 2)
Un instant perdu
1. Train-train sanglant (1/2)
1. Train-train sanglant (2/2)
2. De la promiscuité
3. Un os dans le gratin
4. Visite macabre à Butterfly
5. Sans nostalgie, vraiment
6. Relance
7. Au taquet
8. Entre détectives
9. Inspection délicate
10. Apparition
11. Bienveillance brune
12. Garder le cap (1/2)
12. Garder le cap (2/2)
13. Interférences
14. Mauvais esprit
15. La compagnie des vivants
16. SOS fantômes
17. Retour à la fac
18. Assaisonnement (1/2)
18. Assaisonnement (2/2)
19. Indésirable
20. Les autres
21. L'expert (1/2)
21. L'expert (2/2)
22. Le chacal
23. Les voies du dépit
24. Enquête et trahisons (1/2)
25. Compromis
26. Contre-attaque (1/2)
26. Contre-attaque (2/2)
27. Un autre spécialiste
28. Échos de Dunnes
29. RedWeasel007
30. Triste fin
31. Apprentie sorcière (1/2)
31. Apprentie sorcière (2/2)
32. Introduction posthume
33. Le coût du silence
34. Catharsis
35. Thérapie
36. Orage
37. Chaleur humaine
38. Incendie
39. Persév-errance
40. Qui sème le vent
41. Prise en charge
42. Réminiscences hivernales
43. Encore debout
44. Personne n'est parfait
Postface
L'eau qui dort (chapitre Poisson d'Avril)

24. Enquête et trahisons (2/2)

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By LeodeGalGal

— Comment se passent tes cours ? reprit le psychologue brun, sans doute face à son silence. J'ai entendu dire que tu avais opté pour une méthode interactive ?

Laura se carra sur sa chaise et s'autorisa un étirement. Ses yeux recommençaient à piquer malgré la nouvelle dose de caféine.

— Ah. Oui. Ce ne sont pas des médecins, ils doivent juste comprendre les bases. Alors je les fais jouer au petit détective. Ça a l'air de fonctionner pas trop mal et ça les oblige à utiliser leurs acquis. Une partie d'entre eux deviendront officiers de police. Ce n'est jamais perdu.

Il acquiesça et bâilla à nouveau derrière ses paumes, ce qu'elle imita en miroir.

— C'est sûr. Je commence seulement les cours en septembre. Je dois dire que j'appréhende un peu. Les jeunes de la capitale... Ils vont rire de mon accent, de mes tournures de phrase... Je ne suis pas sûr que je vais être très bon à ce jeu.

— Les étudiants de Bryne sont si différents ?

— Déjà, nous nous comprenons, ce qui n'est pas rien.

— Tu exagères. Je te trouve parfaitement compréhensible, moi.

— Tu n'imagines pas les efforts que ça me demande.

Elle haussa un sourcil incrédule mais il demeura parfaitement sérieux, sans lui faire la moindre ouverture. 

— Mais beaucoup des étudiants de Fernbridge viennent d'ailleurs dans le pays, reprit-elle.

— Pas de Bryne. Ils sont cent-douze sur un peu plus de trente-et-un mille. J'ai vérifié dans les statistiques.

— Ah oui, ça ne fait pas beaucoup.

Il la gratifia d'une grimace éloquente.

— Allons, ce ne sera pas si terrible. Je suis sûre que tu t'en sortiras.

— J'aimerais avoir cette certitude. Cet endroit est beaucoup plus déroutant que je ne l'avais imaginé. Et le fait que Gwen soit aussi occupée... et qu'elle s'adapte aussi bien... C'est déstabilisant. Mais aussi la preuve que c'est possible. C'est une question d'état d'esprit. Bon, je ne suis pas surpris qu'elle y arrive plus facilement que moi, elle a toujours été... moins brune que la moyenne.

Laura haussa les sourcils. Elle était un peu surprise par la franchise de son interlocuteur, mais c'était exactement ce qu'on disait des Bruns, qu'ils avaient tendance à dire les choses telles qu'elles étaient, sans les dissimuler sous des banalités ou de la diplomatie, en se souciant peu des convenances.

— Je ne m'imaginais pas aussi psychorigide.

— C'est une question de temps... d'adaptation...

— Tu es de Murmay, toi ?

— Oh oui.

En réalité, elle ne savait pas si Nathanaëlle en était originaire, mais elle ne croyait guère au poids du sang.

— Ça doit avoir des avantages.

— Je suppose. On est blasé de naissance. Un peu fataliste. Rarement choqué.

Un beau mensonge. Certaines vérités étaient impossibles à écarter d'un haussement d'épaules.

— Comme émoussé, alors.

— Mmm, pas complètement. Je suppose qu'on peut être blasé mais sanguin ?

Leur conversation fut interrompue par du bruit en provenance de l'ascenseur et l'arrivée d'Edward, l'air mal réveillé. Il n'était encore que six heures mais il s'arrêta un moment pour prendre du café. À voir son état débraillé, Laura devina qu'il venait de faire la fête toute la nuit, bien qu'il prétextât une surcharge de travail lorsqu'elle lui posa la question. Il fila d'ailleurs vers la douche.

Laura profita de la diversion pour abandonner Gareth et retourner à son propre dossier mais la fatigue l'avait rattrapée et elle finit par surfer sur le web, sans réel objectif, jusqu'à ce que le bruit dans le couloir devienne plus pressant, que les lumières s'allument partout, et que la porte finisse par s'ouvrir sur Lloyd, de retour de sa mission en campagne. La légiste échangea quelques nouvelles avec le vieux policier, qui avait été, avec Duncan, son premier partenaire à la Société, quand elle l'avait intégrée dix ans plus tôt. Ses pérégrinations lointaines semblaient l'avoir épuisé et elle devina qu'il ne tarderait pas à raccrocher. 

Ils gagnèrent ensemble la salle de réunion. Duncan s'y trouvait déjà, ainsi que Gwen et Gareth, côte à côte, l'image parfaite d'un couple serein, et Graham, que Laura reverrait au cours de l'après-midi. Lafferty et Vima entrèrent juste derrière Lloyd. Edward surgit depuis la porte du fond, qui donnait sur la cafétéria, avec un plateau couvert de viennoiseries. Laura réalisa qu'elle ne se sentait même plus particulièrement fatiguée. Mais sans doute aurait-elle dû, elle aussi, faire un détour par la salle de douche.

Tandis que la réunion débutait, Laura s'amusa à chercher le regard de Duncan et le trouva étrangement fuyant. Le fait qu'il ne soit pas venu à sa rencontre en arrivant l'accusait d'autant plus. Elle ne put s'empêcher de lui décocher un petit sourire retors et il changea de couleur. Il allait falloir qui vienne acheter son silence, ou du moins il le penserait. Elle-même ne se sentait de loyauté envers personne, mais elle ne voulait pas qu'une incartade stupide mette l'harmonie de leur équipe en danger. Elle allait lui parler, oui, pour le réprimander comme le gosse qu'il était encore et toujours.

Mais Gwen Conway et lui avançaient effectivement bien sur leur dossier et étaient à deux doigts de le boucler, on ne pouvait rien leur reprocher de ce côté. Lloyd fit ensuite un petit topo sur sa propre affaire, une histoire de blanchiment d'argent dans le monde des antiquités, qu'il avait commencée à Murmay, poursuivie à Dunnes, et qu'il avait l'intention de terminer à Byron en fin de semaine. Gareth fut le troisième à présenter son cas, Butterfly, et Laura l'écouta parler en conservant une expression neutre. Certains l'attendaient au tournant sur le sujet, mais elle était désormais plus sereine. Elle savait que le spectre ne pouvait pas retourner à l'asile dans l'immédiat, que s'il y avait d'autres décès, ils seraient dû à autre chose, l'évolution naturelle d'un trouble trop profond, une allergie médicamenteuse, une infection, un organe fatigué. Le cas était clos. Enfin... tant que les sceaux tenaient le coup. Il fallait qu'elle détourne définitivement l'empreinte de Jonathan de sa mission, et ce n'était pas encore gagné. Elle repensa à la bibliothèque, aux livres, à Allan et ses foutus conseils.

— Laura ?

Arrachée à ses ruminations, elle se tourna vers Lafferty puis exposa l'état du dossier, sans rentrer dans les détails. Quatre professeurs morts dans un temps très bref, de causes tout à fait différentes les unes des autres. Pour l'heure, l'absence d'arrestation pour le premier meurtre, et le caractère imprécis du second, faisaient craindre qu'une main assassine soit à l'oeuvre sur le campus.

— Mais quoi, comment est-ce qu'un cycliste qui fait une crise cardiaque pourrait être victime d'un meurtre ? s'étonna Duncan.

Il n'avait pas tort, c'était assez improbable, mais pas impossible.

— Il existe certaines substances, des poisons si tu veux, qui peuvent induire ce genre de choses, expliqua Laura. Qui se dissipent parfois trop vite pour qu'on les détecte dans les analyses, surtout si on a cru à une mort naturelle et qu'on a traîné dans les relevés, ce qui est le cas pour Tillman. Donc voilà. On n'a rien, mais on ne peut rien écarter. Donc on cherche, pour voir s'il y a un mobile qui réunirait toutes les victimes. En espérant qu'il n'y en ait pas.

Graham toussota dans son poing et les regards se tournèrent vers lui. Il s'empourpra avant de prendre la parole.

— De ce que j'ai appris, pas mal d'étudiants connaissaient les trois premiers, pour avoir bossé avec eux. Ceux qui les ont juste eu comme profs sont généralement plus généreux que ceux qui ont travaillé avec eux. Enfin pas tous. Les expériences sont contrastées, je dirais.

— C'est-à-dire ? demanda Laura.

— Et bien, il y en a deux ou trois qui ont un bon souvenir de leurs interactions avec Zafscav. Apparemment, il courtisait agressivement les bons étudiants, pour les intégrer à son équipe. Certains apprécient ce type d'intérêt, flatteur, même si la rumeur prétend que la majeure partie d'entre eux déchantent après.

— Dans le groupe de redoublants, il y a des gens que Zaftruc a approché ? fit Duncan, sceptique.

— Ce ne sont pas que des redoublants. Ce sont aussi des étudiants qui viennent de facultés d'autres villes et qui veulent se mettre à niveau, des gens qui se réorientent. Il y a dans le groupe de vraies têtes... et des étudiants qui, oui, pourraient tout à fait faire carrière, y compris dans le monde universitaire.

— Qu'est-ce qu'ils en pensent, de ce meurtre ? demanda Laura.

— Certains sont stressés, d'autres disent qu'il l'a mérité, dans l'ensemble, cela ne les émeut pas des masses.

— Ils font des hypothèses sur le coupable ? continua-t-elle.

— Ils parlent beaucoup de Jason Byatt, le type qui s'est suicidé il y a quelques mois. Certains le connaissaient. Mais de manière générale, ils n'imaginent pas sa famille s'engager dans ce genre de vendetta, même s'ils sont de Dunnes.

— Qui connaissait Jason ?

Elle avait déjà relevé quelques noms sur Instagram, mais elle était curieuse de voir si Graham avait les mêmes. Il baissa les yeux sur ses notes.

— Melinda Sullivan, Anton Fergus et Henry Jones. Mais aucun d'entre eux n'était un ami proche. Melinda est une copine d'un ancien colocataire, Anton l'a côtoyé au club de foot et Henry a travaillé avec lui sur une présentation dans un colloque je ne sais plus où.

Lafferty s'éclaircit la gorge.

— Il me semble que vous vous concentrez beaucoup sur ce Byatt, qui est mort, et la police investigue déjà sa famille.

Il n'avait pas tort et Laura haussa les épaules, avant d'échanger un regard avec Graham.

— Nous n'avons rien de mieux, pour l'heure.

— Vima, de ton côté ? demanda Lafferty.

La juriste qui jouait les femmes de ménage secoua la tête.

— Rien de probant, non. Les trois morts du bâtiment Lombroso traitaient le personnel d'entretien avec politesse, à défaut de réellement les voir. Et franchement... ce n'est pas un sujet de conversation en vogue. Les gens s'en fichent, ne se sentent pas concernés... Ils considèrent qu'il s'agit de problèmes d'un autre monde. Sur le plan pratique, de l'avis commun, les locaux sont vétustes et un véritable gruyère. Personne n'a rien vu de suspect, et personne n'a non plus le profil d'un suspect. Honnêtement, Roger... Je perds mon temps.

Vima détestait les infiltrations floues, son esprit efficace perdait ses marques dès que la trajectoire n'était pas toute tracée. Lafferty la dévisagea, lèvres pincées, puis consulta Laura du regard. Cette dernière lui retourna une moue indécise, touchée par l'intention. Vu les circonstances, ils perdaient en réalité tous leur temps.

— Bon, très bien, trancha Lafferty. Vima, transmets ce que tu as aux deux autres puis démissionne. Laura, tu dois de toute façon rester jusqu'aux délibérations. Ensuite, tu devras te retirer. Graham, nous aviserons en fonction de l'avancement du dossier. Edward ?

L'archiviste releva le nez du café où il s'était noyé pour cuver son vin.

— Je veux que tu les soutiennes en priorité. La police a fatalement un fichier de suspects dont nous pouvons tirer profit. On va se laisser encore deux semaines, trois au maximum, puis on laisse tomber. De ce que vous racontez, nous n'avons rien de solide, et je ne peux pas gaspiller autant de ressources sur une poignée de profs morts, juste parce que le doyen de la faculté panique.


La réunion prit fin peu après, et Edward, Graham, Laura et Vima se rassemblèrent dans le bureau du premier pour accorder leurs violons. Comme elle l'avait laissé entendre, la juriste n'avait rien à leur offrir, sinon des dossiers factuels, très précis, peut-être exhaustifs, sur tous les membres du personnel qu'elle avait côtoyés. Une fois la clé USB entre les paumes de Laura, elle s'excusa et les laissa poursuivre sans elle. La légiste et l'archiviste ne purent s'empêcher de glousser, tandis que Graham ouvrait des yeux interdits.

— C'est Vima, tu vas t'habituer, le rassura Edward.

Ils convinrent qu'Edward se procurerait la totalité de l'enquête d'Helen Melville et creuserait l'alibi des différents suspects, en usant des ressources supplémentaires dont ils disposaient en interne. Laura lui demanda aussi de se procurer un accès à la boîte mail de Zaffy et de vérifier s'il y avait eu d'autres morts sur le campus ces derniers jours, pas seulement des professeurs. D'autre part, elle tenait à ce que Graham continue à s'intéresser à Jason Byatt et notamment s'il pouvait trouver un lien entre le suicidé et l'ingénieur, Sikorski. Heureusement, le jeune homme ne lui demanda pas pourquoi, elle aurait été bien en peine de le lui expliquer. Épuisée comme elle l'était, elle doutait de réfléchir complètement droit, mais son statut d'aînée lui conférait assez d'autorité pour que l'étudiant se fie à ses intuitions.


Une fois les derniers détails réglés, et avant de quitter les lieux, Laura fit un crochet par le bureau de Duncan, dont elle referma précautionneusement la porte. Il leva les yeux de son écran, défiant, et elle hésita une seconde. Mais il savait qu'elle se doutait de quelque chose et tourner autour du pot n'avait jamais été son genre.

— Tu couches avec la femme de Gareth, lâcha-t-elle de but en blanc.

Il s'empourpra spectaculairement.

— Ce n'est pas ce que tu crois, protesta-t-il.

— C'est-à-dire ?

— Gwen... Elle va le lui dire. Le prévenir. C'est différent... différent du reste.

Laura écarquilla de grands yeux. Il venait de la traiter de « reste », mais c'était un détail.

— Différent ?

— Nous nous aimons, vraiment. Elle va divorcer.

— Duncan, vous vous connaissez depuis deux semaines ! Tu as une idée du bordel que ça va mettre dans l'équipe ? Tu pourrais être viré ! Sans parler de l'ambiance...

— L'idée n'est pas de révéler d'emblée que nous sommes ensemble. Gwen peut demander le divorce... et puis ensuite...

— Tu crois que Gareth est complètement débile ? J'ai pas mal bavardé avec lui, c'est un gars plutôt fin sous ses dehors bruns.

— Gwen est sûre qu'il rentrera à Bryne s'ils se séparent. Qu'il ne s'adapte pas bien. S'il s'en va, il n'y aura pas de remous.

— Duncan, tu délires.

Il parut légèrement déstabilisé.

— Ecoute, Laura, je ne te demande pas de comprendre... pas de t'en mêler... et de ne rien dire. Tu penses que tu pourrais ne rien dire ?

Elle opina du chef.

— Bien sûr que je ne vais rien dire. Mais en échange, tu vas vraiment réfléchir. Cette fille, Gwen, je ne la connais pas, mais de ce que Gareth m'en a dit, elle est toute excitée et enthousiaste à l'idée de découvrir la capitale... Méfie-toi de n'être que le premier Murmaysien qu'elle a croisé, qui l'a séduite, et qu'elle va jeter dès que la nouveauté sera passée...

— C'est un couple qui était déjà branlant...

— Ce n'est pas d'eux que je parle, mais de toi et elle.

— Oui, je t'entends. Et ce n'est pas très gentil.

Laura grimaça.

— Désolée, la gentillesse n'a jamais été ma spécialité.

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