À NOS SOLEILS MOURANTS, r.tsu...

By _odysseee

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─ et oublions que cette nuit-là, nos larmes se sont changées en étoiles pour mieux nous voir mourir. (il n'e... More

─ le monde est mort sous les étoiles.

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By _odysseee

(tw : dépression, pensées suicidaire, mutilations citées, angst++ ...)



          Il restait funeste, les mains pendantes et le regard suspendu au néant. Sur sa peau s'échouait ce que ses maux n'avaient pas su oublier. Les larmes, ces perles étranges dans lesquelles le monde se noyait à la tombée de la nuit. Ces soirs où même les démons s'écroulaient sous l'ampleur de sa détresse, il était éreinté par ces murmures, usé par le poids de sa fatigue. L'âme décrépite et le cœur en lambeau, Tsuchigomori voulait disparaître. Se moudre à travers le sol, laisser son corps succomber et son esprit se déchirer. Mais qui viendrait sur sa tombe, qui pleurerait sa déchéance ? Les fleurs que l'on y déposerait finiraient elles aussi par mourir de chagrin. Parce que ces soirs où même les anges détournaient le regard étaient de ceux où la vie n'avait d'importance qu'à travers la voix des autres. Tordu, malsain et discret, un mal inconnu rongeait son âme. Mais le monde était aveugle, le monde était fou, et Tsuchigomori avait des ronces à la place du cœur.




          Au loin, dans les ténèbres de ces nuits, il y avait toujours les lumières de la ville narguant la noirceur de ses espoirs. Depuis le toit de son immeuble, il voyait des milliers d'êtres exister sans se connaître eux-même. Invisibles, inutiles, insignifiants, des nuisibles aux sourires empoisonnés, des vipères au regard hypocrite. Pas un pour rattraper les autres. Mais ce n'était que justice après tout, quel damné accepterait de porter le poids de tous ces despotes ? Car la masse ne se mélangeait pas aux autres, ces gens plus prudes que la totalité de ces vermines. Ces gens qui, de leur simple existence pouvaient refaire la vie des uns, et hanter celle des autres. Des gens si purs que les cristaux en jalousaient les mœurs, et si détruits que les supernovas en devenaient absurdes devant eux. Des personnes que la vie aimait saccager, des damnés de l'existence, des victimes du destin. Tsuchigomori était persuadé que tout le monde avait été ces personnes là un jour, il y a si longtemps que les mémoires avaient oublié. Qu'on a tous été les autres du monde, et qu'il a prit plaisir à nous détruire. Mais qui était-il pour juger ? Un dieu ? Certainement pas, les dieux étaient immortels, pas suicidaires.




          Fermant les yeux, il prit une bouffée de vapeur. Cette toxine qui le tuait à petit feu était plus douce que la mélancolie qui l'accablait. C'était un peu cette dose de souffrance qui lui plaisait tant, alors qu'il se consumait par les cendres de ses cigarettes. Fronçant les sourcils, il essuya d'un revers de main les restes de sa morosité. Sous ses yeux habitait ce que les nuits ne pouvaient repeindre de beauté. Des creux plus profonds que l'océan, vestiges de ses insomnies et divagations nocturnes, et des iris reflétant le vide intersidéral. Rien ne semblait pouvoir le détruire tant il le paraissait déjà. Il releva la tête vers le ciel, et acheva d'expirer sa fumée. Les étoiles étaient drapées d'un voile nuageux, alors que l'air devenait humide. Il allait sûrement pleuvoir.



─  Les étoiles sont belles ce soir, n'est-ce pas ?

─  Qui es-tu ?

─  Oh, ça n'a pas d'importance. Pour le moment, je suppose.



          Tsuchigomori se vautra un peu plus contre le sol, peu désireux d'être dérangé par cet étranger. Il ne le regardait pas, il ne le voulait pas. Tout son corps rejetait l'envie de discuter, encore moins après s'être vidé de ses larmes. Et pourtant, l'inconnu ne semblait pas dérangé par cela, et vint s'asseoir auprès de lui. Reprenant une bouffée de son poison, et constatant qu'il ne partait pas malgré les signaux qu'il envoyait, il finit par souffler :



─  Elles sont peut-être belles, mais bientôt il va pleuvoir.

─  Est-ce un mal ? Ce n'est pas comme ci le ciel allait nous tomber sur la tête.

─  Peut-être qu'il s'est déjà écroulé sur nous sans que nous le sachions.

─  Alors vaut mieux ne pas savoir.



        Il sentait encore le sillons de ses larmes brûler sa peau. Des cicatrices que personne ne verrait jamais, pourtant marquées sur sa plastique pour toujours. Un effrayant tableau pour celui qui n'est pas ignorant. Il continua :




─  Les morts reviennent à la vie seulement les jours de pluie.

─  Pourquoi les jours de pluie ?

─  Car ce sont les seuls jours où le monde se retrouve noyé dans ses propres larmes, et que même le ciel pleure avec lui. Peut-être leur accorde-t-il la renaissance seulement lorsque le monde est triste. Et puis c'est bien connu, la pluie apaise les cœurs souffrants.

─  Comment peux-tu le savoir ?

─  Sûrement parce qu'elle apaise le mien.




          Il finit par entrouvrir les yeux, observant furtivement son interlocuteur. Des cheveux d'un brun profond recouvraient jusque ses paupières, à tel point qu'il en arrivait à se demander comment faisait-il pour voir, alors que sa peau semblait aussi fragile qu'une feuille de papier. L'obscurité ne permettait pas de le détailler avec précision, mais cela lui était bien égal. Il n'avait pas besoin de connaître la couleur de ses yeux, la forme de sa mâchoire, ou encore l'état de ses mains après tout. Pourtant il pouvait être témoin d'une chose, d'un seul fait, d'une unique réalité, c'était qu'il tremblait à s'en briser les os. Fragile et émacié, il se demandait comment il pouvait se tenir encore à ses côtés.



─  Tu as froid ? Tu es malade ?

─  Non, juste fatigué.

─  La fatigue n'est pas la réponse à tout. Tu es à la limite de te briser.

─  Ne parle pas comme ça, on dirait que tu as vu un fantôme, rigola doucement ce dernier.

─  Je ne crois pas aux fantômes.

─  Personne n'y croit, mais tout le monde en a secrètement peur.

─  Peur de quoi ?

─  D'en devenir un.



          Le brun renifla quelques secondes, et baissa la tête vers la ville. Il le savait, plus que quiconque d'ailleurs, que son corps était faible, qu'il n'était plus que l'ombre de lui-même, et que sa peau était à la frontière du diaphane. Mais ce n'était pas son enveloppe charnelle qui avait le plus mal, c'était une évidence.



─  Les gens ont peur d'être oublié, même après la mort. Je ne comprend pas pourquoi, qu'est-ce qu'ils en ont à faire, ce n'est pas si grave.

─  Le monde est égoïste, c'est ainsi.

─  Mais les fantômes aussi finissent par disparaître. Le plus triste n'est pas d'en devenir un, mais que contrairement aux morts, personne ne se souviendra de ces existences invisibles, car se sont déjà des êtres oubliés. Et le monde se fiche bien des larmes qu'ils peuvent verser.



          Achevant sa phrase, il se recroquevilla et posa sa tête sur ses genoux. Plus loin, dans l'une des ruelles environnantes, il aperçu un jeune garçon courir comme s'il fuyait les monstres de sous son lit, puis trébucher lourdement sur les pavés. L'enfant se mit à pleurer, recouvrant son visage de sa douleur, réclamant l'aide de n'importe qui. Aussitôt, un femme se pencha à son niveau pour le prendre dans ses bras, cajolant ce qui semblait être son plus précieux bijou, sa seule raison d'exister. Un soupir franchit la barrière de ses lèvres.


─  Je n'ai jamais aimé les enfants. J'ai l'impression de voir la jeunesse que je n'ai jamais eu.

─  Moi non plus, mais c'est surtout parce que je les trouve trop bruyants.


          Tsuchigomori l'entendit rire une nouvelle fois, et un rictus s'édifia discrètement sur son visage, illuminant un peu ses traits jusqu'alors cadavérique.


─  Ah excuse-moi d'avoir des paroles si étranges, ça doit être un peu ennuyant, murmura le brun.

─  Pourquoi ?

─  Pourquoi pas ?

─  Tu as juste les pensées d'un homme triste.

─  Je m'appelle Toahl, fit-il d'une petite voix.

─  Tsuchigomori.

          Il ferma de nouveau les yeux, appréciant finalement la compagnie de cet étrange personnage. Sa bouche s'ouvrit pour accueillir sa cigarette, alors que la fumée emplissait ses poumons. La solitude pouvait bien se faire à deux parfois.



─  Je peux ?

─  De quoi ?

─  Prendre une bouffée.

─  Tu es jeune.

─  Toi aussi.

─  Ma santé ne vaut pas la peine d'être sauvée.

─  La mienne non plus.


Il soupira. Décidément, quelle énergumène. Mais c'était bizarrement plaisant.


─  Si tu veux.

─  Merci.


          Prenant avec précaution le morceau de papier, il l'emmena jusqu'à ses lippes où il en aspira les effluves. Pendant ce temps, Tsuchigomori observa de plus près son visage, visualisant finalement la forme de sa mâchoire, de son nez, de sa bouche. Un sweet à capuche enveloppait son corps comme pour le protéger du monde. Descendant plus bas, il regarda ses jointures se plier et ses mains anguleuses enrober la tige de nicotine. Et puis, plus bas encore, à un endroit secret, interdit, dissimulé d'ordinaire de la vue de tous, des marques pourpres étaient gravées sur ses bras. Des cicatrices entaillant sa peau, des balafres témoignant d'une grande détresse.


─  Qu'est-ce que tu as sur les bras ?

─  Des vestiges du passé.

─  Dis-moi, qu'étais-tu venu faire sur ce toit ?

─  Oh.


          Et plusieurs minutes passèrent. Ou alors peut-être étais-ce des heures, des jours, une éternité à attendre le néant. Le brun avait la tête baissée, et les yeux camouflés par sa chevelure ondulée. Il aspira une fois encore la fumée, et expira un bon coup. Si le silence était d'or, ce silence là ne l'était pas. Il était effrayant, lugubre, portant le poids d'un lourd secret inavouable, d'une vérité dévoilant ses démons les plus féroces.


─  Je venais dire bonsoir aux étoiles.

─  Et de quelle façon ? enchaîna l'autre.

─  Il semblerait que tu sois quelqu'un d'intelligent, je ne pense pas que tu ais besoin de moi pour le savoir. Et puis toi alors, que faisais-tu ici ?

─  Là n'est pas la question.

─  Tu fais comme si j'avais commit une erreur, mais tu n'es pas mieux.

─  Je venais seulement regarder le ciel.

─  Pourtant ce n'est pas ce que ton visage a l'air de dire. Tu es fatigué de vivre, tes yeux te trahissent. Quand je suis arrivé, je t'ai vu, les jambes au bord du vide et le corps affalé contre le sol.

─  Je n'ai pas sauté.

─  Moi non plus.


          Il se releva, son corps frêle ployant sous la force du vent. Ses mèches volèrent enfin, révélant l'éclat olive de ses iris. Un vert profond épousait ses prunelles, gâché par la teinte sombre de sa tristesse. Une lueur que Tsuchigomori possédait également. Voir la couleur de l'espoir dans les yeux de quelqu'un mort de l'intérieur était d'une ironie sans nom. Le voyant s'approcher dangereusement du rebord, il se leva à son tour afin d'attraper le poignet de ce dernier. Il se retrouvait à avoir peur pour un inconnu, et c'était à en faire rigoler ses propres démons.


          Tout à l'heure il y avait pensé. À sauter. Il y avait même pensé le jour d'avant, et le jour d'encore avant, et tous les autres jours. Rien ne le retenait, évidement qu'il était prêt à se laisser tomber. Sa main se crispa sur l'avant-bras de son interlocuteur. Il avait raison, il allait sauter. Puis, la voix du brun perturba ses pensées.


─  Qu'importe de toute façon. Si ce n'est pas aujourd'hui, ce sera demain. Et si ce n'est pas demain, ce sera après-demain, voir même le surlendemain ! Peu importe combien je reporte l'idée, elle est toujours là, à prendre de plus en plus de place dans ma tête, à empoisonner ma vie. Je ne veux plus continuer.

─  Tu n'es pas obligé de faire ça.

─  Devenons des fantômes ensemble, Tsuchigomori.


          Il allait craquer, et il le savait. Au plus profond de lui il le sentait, c'était le genre de pressentiments effrayants qui ne mentaient jamais. Il se retrouvait à faire la guerre à lui-même, à être le martyr de ses pensées, la victime de son indécision, le damné de ses réflexions. C'était terrifiant de se rendre compte de pareil désespoir.


─  Le soleil se lève, déclara Toahl, des larmes dévalant timidement ses joues.

─  Il se lèvera toujours demain.

─  Je ne serais plus là pour le voir.

─  Descendons.

─  Tu ne trouves pas ça drôle ? Les gens disent que lorsque l'on meurt notre âme rejoint les étoiles, mais notre corps est enterré sous terre, ou conservé sous forme de poussières. Comme si notre existence n'était au final pas si importante. Je préfère encore choisir la façon dont je vais mourir, à la manière d'un ange sans ailes, plutôt que de laisser le destin me torturer davantage.

─  Arrêtes.

─  Je suis fatigué moi aussi.


          Oh, s'en était trop. Beaucoup trop. Son pauvre esprit ne supportait plus cet enfer invisible, ce royaumes des supplices. Il était éreinté, et rien ne pouvait le sauver. Il se déplaça aux côtés de Toahl, le dépassant bien d'une tête. Sa main était toujours enroulée autour de son poignet, il fit alors glisser ses doigts jusqu'à ceux du brun. Leurs yeux se croisèrent pour la première fois, et un sourire immergea des profondeurs de leurs consciences.


─  Mourir seul est un peu triste, souffla-t-il.




Parce que parfois, il n'y a personne pour vous sauver du désespoir,
et que même le ciel vous regarde mourir en fermant les yeux.


Puis, il se mit à pleuvoir.



                                                                                                                           fin haha <33

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