Evan
Driiiing
La cloche sonne la fin des cours. Je me lève et me dirige vers la bibliothèque pour l'heure de colle. Calliopé n'est plus dans la salle, elle doit déjà être là-bas. J'ai remarqué qu'elle n'était pas bien aujourd'hui. Quand la fille qui était assise à côté d'elle, Abygail je crois, lui faisait une blague, elle souriait tristement, semblant se forcer. Pas la peine d'être devin pour comprendre. C'est son altercation avec son mec hier qui doit la mettre dans un tel état. Je ne sais pas ce qu'il lui a fait mais il a du vraiment déconner. Je souris intérieurement. S'il grille ses cartes, j'aurai le champ libre.
Je ne lui ai pas parlé pendant le cours. Cassandra m'a collé toute la journée. Il faut vraiment que j'arrête notre soi-disant relation. Elle ne me satisfait plus et si je veux gagner le pari, il faut que je me débarrasse d'elle. Pas besoin d'aller lui dire en face, ce n'est pas comme si on était fou amoureux l'un de l'autre. Un frisson de dégoût me parcourt le corps. L'amour ? Est-ce que ça existe réellement ? Y a-t-il encore des personnes qui croient au grand amour? Je parie que Calliopé est comme ça...
Cette fille est trop innocente.
Je sors mon téléphone et écrit un message à Cassandra.
[Nous deux, c'est terminé]
Comme ça, c'est clair et net. Pas besoin de tourner autour du pot pendant quatre heures. Un simple « C'est fini » et c'est réglé.
Mon portable vibre.
[Pas de soucis, tu sais où me trouver si jamais tu as besoin de coucher avec quelqu'un]
Je secoue la tête. Les réactions de Cassandra sont vraiment imprévisibles ! Ca m'arrange bien qu'elle le prenne comme ça. Je n'aurais pas supporté qu'elle me fasse une scène. Je range mon téléphone et pousse la porte de la bibliothèque.
- M. Miller, enfin ! On n'attendait plus que vous ! m'accueille la bibliothécaire.
Je l'aime bien cette femme. C'est la seule qui est gentille et qui a toujours le sourire dans ce putain de lycée. Je regarde Calliopé. Elle me fixe l'air de dire « Je suis dégoûtée, j'aurais préféré que tu ne sois pas venu ». Je lui fais un grand sourire. Elle secoue la tête et regarde autre part mais je peux apercevoir le petit rictus qui se forme au coin de ses lèvres. Je me demande si elle attendait mon arrivée. Je ne sais pas pourquoi mais cette idée accentue mon sourire.
- Bon, alors, je vous ai posé là une série d'ouvrages! nous dit la bibliothécaire en pointant une table sur laquelle trône une immense pile de livres. Il faut que vous les ayez tous rangés pour que vous puissiez sortir d'ici.
Quoi ? Mais on va en avoir pour la nuit ! La bibliothécaire a l'air très fière d'elle. Je retire ce que j'ai dit, elle n'est pas si gentille que ça !
- Vous auriez peut-être dû en mettre un peu plus, on ne va pas en avoir pour longtemps là ! ironisé-je.
Elle me sourit et sort de la pièce, nous laissant seuls.
Calliopé s'avance vers la pile de livres et commence à les classer. Je ne peux pas m'empêcher de la regarder. Elle porte un jean moulant qui épouse parfaitement ses formes. Je bloque sur son fessier, elle est vraiment bien foutue !
-Bon, tu viens m'aider ou tu passes la nuit à me reluquer ? dit-elle en se retournant brusquement.
Merde, elle m'a cramé !
-Je passe la nuit à te regarder, princesse, je réponds avec un sourire narquois.
Il faut bien que je sorte des phrases de loveur si je veux faire avancer le pari. Vu la mine dégoûtée qu'elle prend, je devine que ça ne marchera pas avec elle. Au moins, j'aurais essayé.
- Au fait, pas mal ce soutien-gorge rose ! dis-je, cherchant à la déstabiliser même si je n'aperçois pas le moindre bout de tissus dépasser de son t-shirt large.
Elle rougit à ces mots et réajuste maladroitement son haut. J'ai réussi à la mettre mal à l'aise.
Evan : 1, Calliopé : 0.
- Tiens, prend ça au lieu de dire n'importe quoi !
Elle me donne une grosse pile de livres.
- T'es pas sérieuse Calliopé, c'est lourd putain ! je dis en m'écroulant à moitié sous le poids des livres.
Elle a dû m'en mettre au moins vingt ! Elle me regarde méchamment.
-T'arrête de faire ton gamin un peu ? Tu ne peux même pas porter cinq pauvres livres ?
Ok... Evan : 1, Calliopé : 1.
- Tu veux que je mette ça où ? je lui demande.
- Va dans la rangée des livres de science-fiction, répond-elle.
Je la regarde, perdu. Je crois que Calliopé n'a pas compris que je ne vais jamais à la bibliothèque alors cette putain de rangée, je n'ai aucune idée d'où elle est.
- C'est où?
Elle s'esclaffe face à mon air perdu. Et je ne sais pas pourquoi, son rire me fait du bien. Il est doux et j'ai envie de rire avec elle. Je secoue la tête, enlevant ces pensées de mon esprit- Suis-moi !
Elle avance entre les rayons et s'arrête dans une grande rangée.
- Pose-les là ! dit-elle en désignant une petite table.
Je lâche la pile et vais m'asseoir sur un fauteuil dans la rangée. J'observe Calliopé. Elle en prend un, regarde attentivement la couverture puis la côte et le range à ce qui semble être la bonne place. De mon point de vue, je peux étudier son profil. Ses longs cheveux blonds retombent sur son dos, venant effleurer la courbe de ses fesses. Elle mordille ses lèvres pulpeuses, la mine concentrée, à chaque livre qu'elle étudie. Ce tic me rend fou et j'ai du mal à détacher mon regard de sa bouche. Ne m'accordant toujours pas un regard, elle passe une main dans ses cheveux pour les attacher. Cette nouvelle coiffure dévoile son cou fin et sa peau laiteuse. Mon souffle devient court et je m'agite dans le fauteuil. Il serait si facile de m'approcher, de la coincer contre une des étagères pour couvrir son cou si tentant de mes lèvres... Mon portable vibre dans ma poche, m'arrachant à ma contemplation.
[Hey frère ! Je profite de la pause pour te dire que l'entraîneur était vraiment énervé que tu ne sois pas venu. Il en a marre que tu te tapes tout le temps des heures de colle. Et sinon le pari, ça avance ?]
Je fronce les sourcils et réponds à Mickey :
[T'inquiète pas, je parlerai à l'entraîneur. Oui ça avance plus vite que tu ne pourrais l'imaginer.]
Ok, j'ai peut-être un peu exagéré. Ça n'avance pas si vite que cela. Calliopé n'est pas du genre à se laisser séduire. D'habitude je n'ai qu'à claquer des doigts et les filles sont à mes pieds. Et vu les pensées qui m'habitent lorsque je suis en sa présence, j'ai l'impression que c'est elle qui a de l'emprise sur moi et non l'inverse. Il faut que je me reprenne et que je ne perde pas de vu mon objectif premier. Gagner ce foutu pari !
***
Calliopé
Il me regarde. Je suis dos à lui et pourtant je sens son regard perçant sur moi. Il me détaille entièrement. J'ai envie de me retourner et de lui dire d'arrêter de me fixer. Mais j'ai peur de perdre tous mes moyens comme tout à l'heure quand il m'a parlé de la couleur de mon soutien-gorge. Je ne m'y attendais pas, même si j'aurais du vu sa réputation. Savoir qu'il utilise sur moi sa technique de séducteur me trouble plus que ça ne le devrait. Je prends un autre livre et le place sur l'étagère, essayant d'ignorer sa présence. Je pourrais passer des journées à la bibliothèque. La lecture est mon moyen d'évasion et quand je ne vais pas bien, j'aime me plonger dans un bon roman d'amour. Je suis une romantique et je l'ai toujours été. Je croyais vraiment avoir trouvé mon prince charmant en Simon. Mon cœur se serre en repensant à son départ. Sa gentillesse et sa patience me manquent déjà ! Je prends un nouveau livre et regarde sa côte. Je repère l'endroit où il faut le ranger et m'aperçois que l'étagère est très haute et que je suis beaucoup trop petite pour l'atteindre. J'hésite à demander à Evan de m'aider mais décide finalement de me débrouiller seule. Je tends le bras, mais rien n'y fait, je suis trop petite. Je m'apprête à reposer le livre sur la table quand je sens une présence derrière moi. Evan est collé à mon dos.
- Besoin d'aide princesse ? me murmure-t-il à l'oreille.
Un frisson me parcourt le corps. Je n'ose plus bouger et ma respiration s'accélère. Chaque parcelle de mon dos qui est en contact avec son torse est tendue, dans l'attente. Je sens son souffle chaud dans ma nuque alors que je tente de calmer les battements de mon cœurSa proximité me trouble!
Reprends-toi Calliopé, bon sang ! Il ne cherche qu'à te destabiliser !
- Tu peux mettre ce li-livre là-haut ? dis-je en lui tendant l'ouvrage.
Mince, j'ai bégayé ! Il faut que je calme ces foutus battements de cœur. Evan lève son bras et range le livre. Je peux sentir son parfum et il sent extrêmement bon. Mon dieu Calliopé qu'est-ce que tu racontes ? Ce mec a sûrement fait de la prison et ta relation vient juste de se terminer !
Je prends mon courage à deux mains et me retourne, me retrouvant face à face avec son torse musclé. Je lève les yeux vers son visage. Il me regarde aussi. Je me perds une fois de plus dans ce regard noir. Je peux y voir de l'amusement et ce qui ressemblerait à.... du désir ? On se fixe pendant quelques minutes avant que ses yeux ne descendent lentement jusqu'à mes lèvres. Une tension sensuelle s'installe et je sens mes jambes devenir tremblantes. Je m'appuie contre l'étagère derrière moi, tentant de retrouver mon équilibre. Il remonte son regard vers mes yeux et j'y lis clairement l'envie cette fois. Mon cœur bat très vite. Il lève sa main et me caresse la joue délicatement. Comme si jetais un objet fragile qu'il ne voulait pas casser. Sa main sur ma joue déclenche une nouvelle vague de frissons agréables dans tout mon corps. Nos regards ne se lâchent pas. Il se penche vers moi, je ferme les yeux...
Un raclement de gorge nous fait sursauter. Je tourne la tête et aperçois la bibliothécaire qui nous regarde, les mains sur les hanches.
Je m'écarte d'Evan précipitamment et il se passe la main dans les cheveux, l'air agacé.
- On a fini de ranger tous les livres madame, il faut que j'y aille, dis-je prenant mon sac et quittant précipitamment la pièce.
Il faut que je m'éloigne. Il faut que je parte très loin d'Evan. Je n'ai pas les idées claires quand je suis près de lui... Mais qu'est-ce qui a failli se passer ? Je rêve ou on allait s'embrasser ? Je rêve ou j'ai eu envie qu'il m'embrasse ?